l'accomplissement; mais je ne veux pas entrer dans plus de détails. Je me borne donc à ce qui est arrivé aux autres. Elle avait annoncé le châtiment terrible de quelques persécuteurs de la sainte Église; je n'en dis rien à cause de la méchanceté des gens de notre époque, et pour ne pas exciter contre sa glorieuse mémoire le venin de ses détracteurs.

XI

Puissance de Catherine sur la nature. Farine purifiée et

augmentée avec l'aide de la sainte Vierge. — Pain multiplié à Rome et à Sienne. - Vin miraculeux de Pise.

1. La Justice suprême veut que toute chose obéisse à ceux qui obéissent parfaitement à Dieu. Catherine obéissait fidèlement au Créateur, et toutes les créatures obéissaient à son commandement. A l'époque où la Bienheureuse était à Sienne, et lorsque je ne la connaissais pas encore, il existait une jeune veuve, nommée Alessia , qui l'aimait tellement qu'elle ne pouvait vivre sans elle. Elle voulut revêtir le saint habit que Catherine portait; elle quitta sa maison pour en occuper une près de la sienne, afin de jouir plus souvent de ses entretiens. Alors Catherine négligea un peu la maison paternelle; elle restait chez Alessia souvent plusieurs jours, quelquefois des semaines et des mois entiers. Une année, le

a

blé fut rare 1; beaucoup d'habitants en avaient acheté de gâté par l'humidité, parce qu'il était impossible d'en trouver d'autre à aucun prix. Alessia dut faire de même. Aux approches de la moisson, avant que la provision de la mauvaise farine fût épuisée, on apporta du blé nouveau et excellent au marché. Alors Alessia voulut jeter le reste de la mauvaise farine, et faire le pain avec le nouveau froment qu'elle avait acheté; elle dit å Catherine, qui habitait alors sa maison : « Ma mère, cette farine ne fait qu'un pain détestable; puisque Dieu a eu compassion de nous, je vais jeter le peu qui en reste. » Catherine répondit : « Pourquoi jeter ce que Dieu a fait pour

la nourriture de l'homme ? Si vous ne voulez pas manger de ce pain, donnez-le aux pauvres qui n'en ont pas. » Et comme Alessia lui disait qu'elle se faisait scrupule de donner aux pauvres du pain de si mauvaise qualité, et qu'elle aimait mieux leur en donner abondamment avec de la bonne farine, Catherine répondit:

Préparez de l'eau, et apportez la farine que vous voulez jeter; je veux en faire moi – même des pains pour les pauvres de Jésus-Christ. »

2. Catherine se mit d'abord à pétrir la pâte, et fit des pains avec un peu de cette mauvaise farine, si promptement, en si grand nombre, qu'Alessia et sa domestique, qui la regardaient, ne revenaient pas de leur étonnement; il aurait fallu quatre ou cinq fois plus de farine qu'il n'y en avait pour confectionner tous les pains que les mains bénies de Catherine présentèrent à

mas,

Alessia , pour qu'elle les rangeât sur les planches; et ces pains n'avaient point la mauvaise odeur de ceux qu'on avait fabriqués jusqu'alors avec cette farine. Quand tout fut employé, Catherine envoya ces pains au four et les fit servir sur la table. Tous ceux qui en mangèrent n'y trouvèrent aucune amertume, aucune odeur, et déclarèrent au contraire qu'ils n'en avaient jamais mangé d'aussi agréables. On rapporta la chose au frère Tho

confesseur de Catherine, qui vint avec d'autres religieux pieux et instruits pour examiner la chose. Tous furent dans l'admiration, en voyant ces pains dont le nombre avait été si multiplié, et la qualité si merveilleusement corrigée. A ces deux prodiges s'en joignit un troisième. Catherine fit distribuer ces pains; on en donna largement aux pauvres; on en servit copieusement aux religieux; on n'en mangea pas d'autres à la maison, et cependant il en restait toujours une grande quantité à l'office. Ainsi le Seigneur, par l'intermédiaire de sa servante, signala de trois manières sa puissance à l'occasion de ces pains : il corrigea d'abord la corruption et la mauvaise odeur de la farine, il augmenta ensuite la pâte qu'on en avait faite; il multiplia enfin tellement les pains, qu'on put en distribuer pendant plusieurs semaines. Des personnes pieuses conservèrent de ce pain par dévotion. Quelques-unes en ont encore, quoiqu'il y ait une vingtaine d'années que ce miracle soit arrivé.

3. Catherine vivait encore, lorsque j'en eus connaissance; et comme je désirais beaucoup savoir plus parfaitement ce qui s'était passé, je l'interrogeai en particulier sur les détails de cet événement. Elle me répondit : « Je souhaitais ardemment de ne pas jeter ce que Dieu avait bien voulu nous donner. J'avais aussi une grande compassion des pauvres; alors j'allai avec ferveur au coffre où était la farine. Ma très-douce Reine, la Vierge Marie, m'apparut accompagnée de Saints et d'Anges; elle m'ordonna de faire ce que je projetais. Elle daigna, dans son affectueuse bonté, travailler ellemême à pétrir la farine, et c'est la vertu de ses mains sacrées qui a multiplié tellement les pains : elle me les présentait à mesure qu'elle les terminait, et je les donnais à Alessia et à sa servante. » Je lui dis alors : « Ma mère, je ne m'étonne plus si ces pains ont semblé si doux à moi et à tous ceux qui en ont mangé, puisqu'ils avaient été faits par les mains glorieuses de cette grande Reine, au sein de laquelle l'auguste Trinité a voulu faire le Pain qui est descendu du ciel, et qui donne la vie à tous les croyants. » En assistant ainsi Catherine, la Mère du Verbe voulait nous faire comprendre qu'elle nous donnait, par son intermédiaire, le pain spirituel du salut, comme elle nous donnait par elle un pain matériel si miraculeux. Dieu lui-même nous inspirait de l'appeler notre mère; elle l'était bien en effet ; son âme nous avait enfantés dans les gémissements et la douleur, jusqu'à ce qu'elle et formé le Christ en nous, et elle nous distribuait chaque jour le pain salutaire de ses bons enseignements.

4. Puisque nous avons parlé de cette multiplication du pain, nous pourrons, pour continuer le même sujet, rappeler ce qui est arrivé dans les derniers temps de sa