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phrosine, dont on lui avait donné le nom ; elle voulait entrer dans un couvent, et revêtir, en se dépaysant, l'habit des Frères Prêcheurs, pour secourir les âmes qui périssaient. Mais Dieu, qui lui avait inspiré ce zèle pour l'utiliser d'une autre manière, ne lui permit pas de réaliser son désir, tout en le lui laissant longtemps.

5. La sainte enfant grandissait, mais son âme devançait beaucoup ses années. Son humilité et sa piété se développaient de jour en jour. La Foi lui donnait de plus vives lumières, l'Espérance augmentait ses forces, et la Charité lui inspirait une admirable ferveur. Ses vertus et ses actions commandaient le respect à tous ceux qui en étaient témoins; ses parents et tous les gens de la maison s'étonnaient de trouver tant de maturité dans un åge si tendre. En voici une preuve, que sa mère n'a souvent racontée. Catherine n'avait pas encore dix ans, lorsque Lapa , qui voulait faire célébrer une messe en l'honneur de saint Antoine, lui dit : « Tu vas aller à la paroisse, et tu prieras notre curé de célébrer ou de faire célébrer une messe en l'honneur de saint Antoine; tu offriras sur l'autel tant de cierges et tant d'argent. » La pieuse enfant fit avec joie ce qui avait la gloire de Dieu pour objet ; elle alla promptement à l'église, s'adressa au curé, et remplit parfaitement la commission de sa mère : mais elle voulut en profiter ; elle resta dans l'église jusqu'à la fin de la messe, et ne retourna chez elle que lorsque l'office fut terminé. Sa mère, qui pensait que Catherine devait revenir après avoir parlé au prêtre, trouva son absence trop longue,

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et lui dit, pour la gronder : « Que maudites soient les langues qui prétendaient que tu ne reviendrais pas! » C'est, chez le peuple surtout, la manière de reprocher à quelqu'un sa lenteur. L'enfant écouta sans rien dire les paroles de sa mère; mais quelques instants après, elle la prit à l'écart, et lui dit avec autant de gravité que d'humilité : « Ma chère mère, lorsque je fais une faute, ou que j'exécute mal vos ordres , punissez-moi, battez-moi, si vous le voulez, afin qu'une autre fois je fasse mieux mon devoir; mais, je vous en supplie, ne maudissez personne à cause de moi, cela ne convient point à votre âge et me fait beaucoup de peine. » Sa mère fut très-surprise de la leçon qu'elle recevait de son enfant; elle en admira la sagesse, mais elle ne voulut pas le laisser paraître, et elle lui dit : « Pourquoi es-tu restée si longtemps? - J'ai entendu, répondit Catherine, la messe que vous aviez demandée, et je suis revenue ensuite, sans m'arrêter nulle part. » La mère, de plus en plus édifiée de sa fille, raconta ce qu'elle avait dit à Jacomo, son mari, quand il fut de retour à la maison; celui-ci en fut frappé et rendit grâces à Dieu. Cet exemple, entre mille, prouve combien la grâce faisait de progrès dans cette ame, dès ses plus jeunes années. Je tiens tout ce que j'ai écrit dans ce chapitre de Catherine elle-même, de sa mère et des personnes qui vivaient avec elle à cette époque.

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IV

Relâchement de Catherine. Sa soeur Bonaventure la décide à s'occuper de sa toilette.

Ses regrets. Sa dévotion pour sainte Madeleine. Elle se coupe les cheveux. Persécutions de sa famille.

1. Après le développement merveilleux de ces premières années, Dieu voulut que cet arbre, qu'il avait planté dans sa vigne d'Engaddi, s'élevât à la hauteur des cèdres du Liban et portât des raisins aussi beaux que ceux de Chypre. Il permit que la terre le couvrît quelque temps, afin de donner plus de profondeur à ses racines, plus d'étendue à ses rameaux, plus de perfection à ses fruits. L'eau descend pour rejaillir avec plus de force, et la racine d'une fleur est en rapport avec l'élévation de sa tige. La Sagesse incréée, qui gouverne tout , permet quelquefois les chutes de ses saints, pour qu'ils se relèvent ensuite avec plus d'ardeur, qu'ils tendent avec plus de prudence vers la perfection, et qu'ils remportent sur l'ennemi du salut de plus éclatantes victoires.

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VIE DE SAINTE CATHERINE DE SIENNE

- fre PARTIE

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Lorsque Catherine, qui avait consacré à Dieu sa virginité, eut atteint l'âge de douze ans, elle ne sortit plus seule de chez elle, selon l'usage pour les jeunes filles qui ne sont pas mariées. Son père, sa mère et ses frères , qui ignoraient son veu, pensèrent à lui trouver une alliance convenable. Sa mère, qui lui voulait un époux digne de sa vertu, et qui ne savait pas qu'elle en avait un préférable à tous ceux de la terre, prit soin de parer sa fille; elle lui fit arranger ses cheveux, orner sa tête et prendre les moyens de rendre plus beaux son cou et son visage, afin de plaire à ceux qui pourraient la demander en mariage. Catherine avait d'autres pensées; mais elle les cachait à ses parents, dans la crainte de les affliger; elle ne se prêtait pas aux désirs de sa mère, et cherchait plus à plaire à Dieu qu'aux hommes. Lapa vit cette opposition avec peine; elle appela à son secours sa fille Bonaventure, qui était mariée, et la chargea de décider sa seur à prendre les ornements des jeunes personnes de son âge. Elle savait toute la tendresse de Catherine pour cette seur, dont l'influence pouvait faire réussir ses projets. Elle ne s'était pas trompée.

Dieu permit le succès des petites maneuvres de Bonaventure; elle fit tant par ses discours et ses exemples qu'elle décida Catherine à s'occuper de sa toilette, sans la faire renoncer cependant à son veu. Elle s'accusait de cette faute avec tant de larmes et de sanglots, qu'on aurait pu croire qu'elle avait commis quelque grand crime. Maintenant qu'elle est au ciel, je puis dire les choses secrètes qui sont à sa gloire et faire connaître ce qui s'est

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et que

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passé entre nous à ce sujet. Il en était question dans toutes ses confessions générales, et c'était toujours avec les signes de la plus vive douleur. Je savais bien que les saintes âmes voient souvent des fautes où il n'y en a pas, et exagèrent beaucoup les imperfections qu'elles commettent. Mais comme Catherine croyait avoir mérité l'enfer, je voulus lui demander si elle avait pensé renoncer à son veu de virginité en agissant de la sorte. Elle me répondit que non,

cette idée n'avait pas même approché de son coeur. Je lui demandai alors si, sans penser trahir son vou, elle avait cherché à plaire aux hommes en général, et à quelqu'un en particulier. Elle me répondit que rien ne lui était plus pénible que

de voir des hommes et de se trouver avec eux. Quand les apprentis de son père, qui demeuraient à la maison, venaient où elle se trouvait, elle s'enfuyait comme si elle avait rencontré des serpents; ce qui étonnait tout le monde. Elle ne se mettait non plus jamais à la fenêtre ou à la porte pour regarder les passants. « Mais alors, lui dis-je, comment pouvezvous croire que le soin que vous preniez de votre toilette puisse vous mériter l'enfer , surtout s'il n'y avait rien d'excessif dans votre parure. » Elle me répondait qu'elle avait trop aimé sa sæur, en préférant son plaisir à celui de Dieu même; et elle recommençait ses larmes.

Je répliquai qu'il pouvait y avoir imperfection, mais qu'elle n'avait violé aucun précepte formel; alors elle leva les yeux au ciel et s'écria : «0 mon Dieu , voici mon père spirituel qui excuse maintenant mes péchés! »

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