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modèle dans la nature, elles femblent deftinées à être éternellement elles-mêmes le modèle de l'art. Pourquoi cela ? C'est que le plaifir des yeux eft, comme celui de l'oreille, attaché à de certaines impreffions, & que ces impreffions dépendent de certains rapports, que la nature a mis entre l'objet & l'organe. Mais faifir ces rapports ce n'eft pas imiter, c'eft deviner la nature.

Ainfi procède l'Eloquence; elle n'imite rien l'orateur n'eft pas un mime ; il parle d'après lui, il tranfmet fa pensée, il exprime ses sentimens. Mais dans le deffein d'émouvoir, d'éclairer, de perfuader, de faire paffer dans nos cœurs les mouvemens du fien, il choifit avec réflexion ce qu'il connoît de plus capable de nous remuer fon gré. C'eft encore ici l'influence de l'efprit fur l'efprit, l'action de l'ame fur l'ame, le rapport des objets avec l'organe du fentiment, qu'il faut étudier ; & pour maîtriser les efprits, le foin de l'orateur eft de connoître ce qui les touche &

peut

les émou

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voir comme il entend qu'ils foient émus.

Dans les arts même dont l'imitation femble être le partage, comme la Poéfie la Peinture, la Sculpture, copier n'est rien, choifir et tout. Les détails font dans la nature, mais l'enfemble eft dans le génie. L'invention confifte à compofer des maffes qui ne reffemblent à rien & qui, fans avoir de modèle, aient pourtant de la vérité : or quel est dans la nature le principe & la règle de ces compofitions? Il n'y en a pas d'autre que la connoiffance de l'homme, l'étude de les affections, le résultat des impreffions que les objets font fur l'organe. Cela eft évident pour le choix, le mélange, & l'harmonie des couleurs, la beauté des contours, l'élégance des formes : l'œil en eft le juge fuprême; & la même étude de la nature, qui démêle les fons qui plaisent à l'oreille, nous a éclairés fur le choix des objets qui plaifent aux yeux.

Même théorie à l'égard de la partie intellectuelle de la Peinture, & à l'égard de la Poéfie, qui eft l'art de peindre à l'esprit.

» Il est auffi impoffible d'expliquer les plaisirs de la pensée & du fentiment, que ceux de l'oreille & des yeux. Mais une expérience habituelle nous fait connoître que la faculté de fentir & d'imaginer a dans l'homme une activité inquiète, qui veut être exercée, & de telle façon plutôt que de telle autre.

La nature nous préfente pêle-mêle, fi j'ofe le dire, ce qui flatte & ce qui bleffe notre fenfibilité : or l'imitation fe propofe, non feulement l'illufion, mais le plaifir; c'eft-à-dire, non feulement d'affecter l'ame en la trompant, mais de l'affecter comme elle se plaît à l'être. Ce choix eft le fecret de l'art, & rien dans la nature ne peut nous le révéler, que l'étude même de l'homme, & des impreffions de plaifir ou de peine qu'il reçoit des objets dont il eft affecté.

C'est ce difcernement acquis par l'obfervation, qui éclaire & conduit l'artiste : mais il eft le guide du parfumeur comme celui du poète & du peintre ; & que l'art imite ou n'imite pas, s'il eft de

fon effence d'être un art d'agrément, fon principe est le choix de ce qui peut nous plaire. La différence est dans les organes qu'on fe propose de flatter, ou plutôt dans les affections que chacun des arts peut produire.

Les arts d'agrément qui ne portent à l'ame que des fenfations, comme celui du parfumeur, ne feront jamais comptés parmi les arts libéraux. Ceux-ci ont fpécialement pour organes l'oeil & Foreille, les deux fens qui portent à l'ame des fentimens & des pensées ; & c'est à quoi l'opinion femble avoir eu égard, lorfqu'elle a marqué à chacun d'eux fa place & le rang qu'il devoit tenir.

Les arts s'accordent affez fouvent pour embellir à frais communs le même objet, & produire un plaifir compofé de leurs impreffions réunies : c'eft ainfi que l'Architecture & la Sculpture, la Poéfie & la Mufique travaillent de concert ; mais il ne faut pas croire que ce foit dans la vue de faire plus d'illufion, en imitant mieux leur objet. Un obfervateur habile

a déjà remarqué que les deux arts dont l'alliance étoit le plus fenfiblement indiquée par leurs rapports (la Sculpture & la Peinture) fe nuifent l'un à l'autre en fe réuniffant. Une belle eftampe fait plus de plaifir qu'une ftatue colorée dans celle-ci, l'excès de reffemblance ôte à Pillufion fon mérite & fon agrément. Voy. ILLUSION, IMITATION, &c.

ARTICULATION. Depuis la leçon du Bourgeois Gentilhomme, il n'y a guère moyen de parler férieusement de la manière de prononcer les lettres; mais, raillerie ceffante, il ne feroit peut-être pas inutile d'analyfer le mécanisme de la parole: on trouveroit dans cette analyse là raifon phyfique de la rudeffe ou de la douceur, de la lenteur ou de la rápidité naturelle des articulations, &, en deux mots, les élémens de la profodie & de la mélodie d'une langue.

Parmi les voyelles, on trouveroit que les fons graves ont naturellement de la

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