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des modulations brillantes à exécuter : on fit des chants qui avoient eux-mêmes du caractère, & de l'expreffion ; & ce fut alors qu'on s'aperçut, quoi qu'en eût dit Rouffeau, que notre langue étoit fufceptible des beautés véritables de la Mufique italienne. Il eût donc fallu diftinguer, dès ce moment, l'Ariette qui n'étoit que brillante, de l'air expreffif & paffionné. Mais l'ufage étoit établi d'appeler Ariette tous les airs de l'Opéra comique ; & quoique le goût eût décidé que les chants du Devin de Village étoient des airs, & non des ariettes, parce que le ftyle en étoit fimple & naturel, Pufage prévalut, & conferva le nom d'ariette pour tous les airs chantés fur le théâtre où l'ariette avoit brillé. Ainfi, l'air de Tom-Jone,

Amour, quelle eft donc ta puiffance ?'

l'air du Déferteur

Mourir n'eft rien, c'est notre dernière heure;

l'air de Silvain

Je puis braver les coups du fort,

Mais non pas les regards d'un père:

s'appelèrent des ariettes.

Ce n'eft pas tout: lorsque la Mufique italienne, la plus fimple, la plus noble, la plus pathétique, s'eft établie fur le théâtre de l'Opéra, ceux qui, par goût, par opinion, par fyftême, ont tâché de la déprifer, ont donné auffi le nom d'ariettes, non feulement aux airs d'un caractère brillant & léger, mais indiftinctement à tous les chants, même aux plus fublimes, aux plus paffionnés de ce nouveau genre d'Opéra ; & de l'idée de légèreté, de frivolité, de comique, originairement attachée au mot d'ariette ils ont tiré cette induction, que la Mufique italienne, la Mufique des ariettes n'étoit pas digne de la Tragédie. On aura cependant quelque peine à croire que l'air de Roland,

Que me veux-tu, monftre effroyable?

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que l'air de Cybèle,

Tremblez, ingrats, de me trahir;

que l'air d'Orefte,

Cruel! & tu dis que tu m'aimes!

& celui de Pilade,

Oreste ! au nom de la patrie,

foient de cette Mufique, ou légère ou comique, qu'on appelle ariettes, ou jolis petits airs.

En italien, le mot aria fignifie un air en général; ce n'eft point un diminutif. Le mot ariette en eft un; il faut donc le garder pour l'efpèce de chant la plus légère & la moins expreffive, & ne pas faire fervir l'abus des mots à donner le change aux idées. Voyez AIR.

ARLEQUIN. Perfonnage de la Comédie italienne. Le caractère diftin&if de l'ancienne Comédie italienne eft de jouer des ridicules, non pas personnels, mais nationaux. C'est une imitation grotefque des mœurs des différentes villes

d'Italie ; & chacune d'elles eft représentée par un personnage qui eft toujours le même. Pantalon eft vénitien, le Docteur eft bolonois, Scapin eft napolitain, & Arlequin eft bergamasque. Celui-ci est d'une fingularité qui mérite d'être obfervée; & il a fait long-temps les plaifirs de Paris, joué par trois acteurs célèbres, Dominique, Thomaffin, & Carlin. Il eft vraisemblable qu'un efclave africain fut le premier modèle de ce perfonnage. Son caractère eft un mélange d'ignorance, de naïveté, d'esprit, de bêtise, & de grâce: c'est une espèce d'homme ébauché, un grand enfant, qui a des lueurs de raifon & d'intelligence, & dont toutes les méprises ou les mal-adreffes ont quelque chofe de piquant. Le vrai modèle de fon jeu eft la foupleffe, l'agilité, la gentilleffe d'un jeune chat, avec une écorce de groffièreté qui rend fon action plus plaifante; fon rôle eft celui d'un valet patient, fidèle, crédule, gourmand, toujours amoureux, toujours dans l'embarras, ou pour fon maître, ou pour

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lui-même, qui s'afflige, qui fe confole avec la facilité d'un enfant, & dont la douleur eft auffi amufante que la joie.

Ce rôle exige beaucoup de naturel & d'efprit, beaucoup de grâce & de foupleffe.

Les François l'ont employé quelquefois heureusement dans leurs comédies, comme de Lifle dans Arlequin fauvage, & dans Timon le Mifanthrope; mais en général la liberté du jeu de cet acteur naïf, & l'originalité de fon langage s'accommodent mieux d'un fimple canevas, qu'il remplit à sa guise, que du rôle le mieux écrit.

ARTS LIBÉRAUX. Rien de plus bizarre en apparence que d'avoir ennobli les arts d'agrément, à l'exclufion des arts de première néceffité; d'avoir distin→ gué dans un même art l'agréable d'avec l'utile, pour honorer l'un de préférence à l'autre ; & cependant rien de plus rai fonnable que ces distinctions, à les regarder de près.

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