Obrazy na stronie
PDF
ePub

parmi les exemples de l'antiquité, ceux qu'il eft bon de fuivre & ceux que l'ou doit éviter?

Perrault, fes partifans, & fes adverfaires ont tous eu tort dans cette dispute : aux uns, c'est le bon goût qui manque; & aux autres, la bonne foi..

:

Quelle pitié de voir, dans les Dialogues fur les Anciens & les Modernes, oppofer férieufement Mézerai à Tite-Live & à Thucydide, fans daigner parler de Xénophon, de Sallufle, ni de Tacite ; de voir oppofer l'avocat Le Maître à Cicéron & à Démosthène; Chapelain, Defmarets, Le Moine, Scudéri, à Homère & à Virgile de voir déprimer PIliade & l'Enéide, pour exalter le Clovis, le Saint-Louis, l'Alaric, la Pucelle; de voir donner aux romans de l'Aftrée, de Cléopâtre, de Cyrus, de Clélie, le double avantage de n'avoir aucun des défauts que l'on remarque dans les anciens poè& d'offrir une infinité de beautés nouvelles, notamment plus d'invention & plus d'efprit que les poèmes d'Homère ;

tes,

de voir préférer les poéfies de Voiture, de Sarazin, de Benferade, pour leur galanterie fine, délicate, Spirituelle, à celles de Tibulle, de Properce, & d'Ovide! &c.

Il n'est pas étonnant, je l'avoue, qu'un parallèle fi étrange ait ému la bile aux zélateurs de l'antiquité. Mais auffi dans quel autre excès ne font-ils pas tombés eux-mêmes? Une fi bonne caufe avoitelle besoin d'être foutenue par des injures? étoit-ce à la groffièreté pédantefque à venger le goût? Leur mauvaise foi rappelle ce que l'on raconte d'un homme qui par fyftême ne convenoit jamais des torts de fes amis. On lui en demanda la raison. Si j'avouois, dit-il, que mon ami eft borgne on le croiroit aveugle. Mais les amis des anciens n'avoient pas cette injuftice à craindre: & d'ailleurs ne voyoient-ils pas que ne rien céder, c'étoit donner prife fur eux & préfenter un côté foible? Avoit - on befoin de leur aveu, pour favoir que les grands hommes qu'ils défendoient étoient

,

des hommes? On fait bien que l'inéga lité eft le partage du génie. Avoient-ils peur que les beautés d'Homère ne fiffent pas oublier fes défauts ? Pourquoi ne pas reconnoître que de longues harangues étoient déplacées au milieu d'un combat; que des comparaifons prolongées au delà de la fimilitude, choquoient le bon fens & le goût; qu'une foule de détails pris dans les moeurs antiques, mais fans nobleffe & fans intérêt, n'étoient pas dignes de l'Epopée ; que le langage des héros d'Homère étoit fouvent d'un naturel qui ne peut plaire dans tous les temps; que fi Homère avoit voulu fe jouer de fes dieux, en les repréfentant railleurs, colères, emportés, capricieux, il avoit tort; que s'il les avoit peints de bonne foi, d'après in croyance publique, il avoit tort encore de n'avoir pas été plus philoophe que fon fiècle; & que, s'il les avoit imaginés tels lui-même, il avoit dormi & fait de ridicules fonges? Après avoir reconnu ces défauts, n'avoit-on pas à louer en lui la Poéfie au plus haut degré;

par

le coloris & l'harmonie ; la hardiesse du deffin & la beauté de l'ordonnance; la plus étonnante fécondité, foit dans l'invention de fes caractères, foit dans la compofition de fes groupes; la véhémence de fes récits & la chaleur de fes peintures; la grandeur même de fon génie dans l'ufage du merveilleux; le premier don du poète enfin, l'art de tout animer & de tout agrandir, cet art créateur & fécond, qui a frappé, rempli, échauffé tant de têtes dans tous les fiècles, & tant donné à peindre, après lui, & à la plume & au pinceau ?

Après avoir avoué que dans l'Enéïde l'action manquoit de rapidité, de chaleur, & de véhémence; que les paffions s'y mêloient trop rarement, & laiffoient de trop grands intervalles vides; que tous les caractères, excepté Didon, étoient foiblement deffinés; que celui d'Enée, fur-tout, n'avoit ni force ni grandeur; que les fix derniers livres étoient une très foible imitation de l'Iliade, &c. n'avoit-on pas à dire que les fix preTome I.

P

miers étoient une imitation merveilleufement embellie & ennoblie de l'Ody Jée? que jamais la mélodie des vers, l'élégance du ftyle, la poéfie des détails l'éloquence du fentiment, le goût exquis dans le choix des peintures, n'avoient été à un si haut point dans aucun poète du monde?

Après avoir avoué que Sophocle & Euripide étoient inférieurs à Corneille. & à Racine pour la belle ordonnance de l'action théâtrale, l'économie du plan", l'oppofition des caractères, la peinture des paffions, l'art d'approfondir le cœur humain, d'en d'en développer les replis; n'avoit-on pas à faire valoir le naturel, la fimplicité, le pathétique des poètes. grecs, & fur-tout leur force tragique?

Après avoir mis fort au deffous de Molière, Ariftophane, Plaute, & Térence, ne leur eût-on pas laiffé la gloire d'avoir formé eux-mêmes dans leur art celui qui les a furpaffés? Et fi la Fontaine a porté dans la fable le génie de la Poéfie; fi, par le charme du pinceau,

« PoprzedniaDalej »