vertus qui élèvent le courage, de la bienséance et même , et il la met en paix : il lui ôle tout , et il de la régularité des actions extérieures, de la vic- lui donne lout : il lui ôte tout en elle; il lui donne toire que j'avois besoin de remporter sur mon tout en Dieu , en qui seul les choses sont pures. honneur pour ne montrer rien qui ne fût parfait. O mon amour! ô ma vie! ô mon tout ! je n'ai plus Voilà le voile grossier du sacrement: mais le fond que vous. O mon pain ! je vous mangerai tous les du sacrement même, mais cette vérité substan- jours , et je ne craindrai que de perdre ma nourtielle et au-dessus de toute substance bornée et riture. comprise, où est-elle ? Hélas ! je ne l'ai point cherchée. J'ai songé à régler le dehors, sans chan XII. POUR LE VENDREDI SAINT. ger le dedans. Cette adoration en esprit et en vérité, qui consiste dans la destruction de toute vo- Le mystère de la passion de Jésus-Christ est lonté propre pour laisser régner en moi celle de incompréhensible aux hommes. Il a paru un scanDieu seul, m'est encore presque inconnue. Ma dale aux Juifs, et une folie aux Gentils'. Les bouche a mangé ce qui est extérieur et sensible Juifs étoient zélés pour la gloire de leur religion; dans le sacrement, mon cæur n'a point été nourri ils ne pouvoient souffrir l'opprobre de Jésusde cette vérité substantielle. Je vous sers, mon Christ. Lcs Gentils, pleins de leur philosophie, Dieu , mais à ma mode, et selon les vues de ma étoient sages ; et leur sagesse se révoltoit à la vue sagesse. Je vous aime, mais pour mon bien plus d'un Dieu crucifié : c'étoit renverser la raison huque pour votre gloire. Je desire vous glorifier, maine que de prêcher ce Dieu sur la croix. Cepenmais avec un zèle qui n'est point abandonné sans dant cette croix, prêchée dans tout l'univers, surréserve à toute l'étendue de vos desseins. Je veux monte le zèle superbe des Juifs et la sagesse vivre pour vous, mais renfermé en moi, et je hautaine des Gentils. Voilà donc à quoi aboutit le crains de mourir à moi-même. Quelquefois je crois mystère de la passion de Jésus-Christ , à confondre être prêt à tous les plus grands sacrifices, et la non seulement la sagesse profane des gens du moindre perte que vous exigez de moi un moment monde, qui, comme les Gentils, regardent la piété après me trouble, me décourage et me scanda- comme une folie, si elle n'est toujours revêtue lise. d'un certain éclat; mais encore le zèle superbe de O Amour, ma misère et mon indignité ne vous certaines personnes pieuses, qui ne veulent rien rebutent point. C'est sous ce voile méprisable que voir dans la religion qui ne soit conforme à leurs vous voulez cacher la vertu et la grandeur de vo- fausses idées. tre mystère. Vous voulez faire de moi un sacre- 0 mon Dieu ! je suis du nombre de ces Juifs ment qui exerce la foi des autres et la mienne scandalisés. Il est vrai, ô Jésus ! que je vous adore même. En cet état de foiblesse je me livre à vous sur la croix ; mais celle adoration n'est qu'en céje ne puis rien, mais vous pouvez tout; et je ne rémonie, elle n'est point en vérité. La véritable crains point ma foiblesse , sentant si près de moi adoration de Jésus-Christ crucifié consiste à se savotre toute-puissance. Verbe de Dieu, soyez sous crisier avec lui, à perdre sa raison dans la folie cette foible créature comme vous êtes sous l'espèce de la croix, à en avaler tout l'opprobre; à vouloir du pain. O parole souveraine et vivifiante! parlez être, si Dieu le veut, un spectacle d'horreur à dans le silence de mon ame : faites taire mon ame tous les sages de la terre, à consentir de passer même; et qu'elle ne se parle plus intérieurement, pour insensé comme Jésus-Christ. pour n'écouter que vous. O pain de vie ! je ne me Voilà ce qu'on dit volontiers de bouche, mais veux plus nourrir que de vous seul : tout autre voilà ce que le cour ne dit poiot. On s'excuse par aliment me feroit vivre à moi-même, me donne- de vains prétextes, on frémit, on recule lâcheroit une force propre, et me rempliroit de desirs. ment dès qu'il faut paroitre nu et rassasié d'op Que mon ame meure de la mort des justes, probres avec l'Homme de douleurs. O mon Dieu, de cette bienheureuse mort qui doit prévenir la mon amour ! on vous aime pour se consoler; mais mort corporelle; de cette mort intérieure qui di- on ne vous aime point pour vous suivre jusqu'à vise l'ame d'avec elle-même, qui fait qu'elle ne se la mort de la croix. Tous vous fuient, lous vous trouve ni ne se possède plus ; qui éteint toute ar- abandonnent, tous vous méconnoissent, tous vous deur, qui détruit tout intérêt, qui anéantit tout renient. Tant que la raison trouve son compte et retour sur soi ! O Amour ! vous tourmentez mer- son bonheur à vous suivre, on court avec emveilleusement. Le même pain descendu du ciel fait mourir et fait vivre; il arrache l'ame à elle- I I. Cor., 1. 23. pressement, et l'on se vante comme saint Pierre; vous connoissent qu'à demi, et qui ne peuvent mais il ne faut qu'une question d'une servante vous suivre que dans les consolations du Thabor. pour tout renverser. On veut borner la religion Pour moi, je manquerois à l'attrait de votre à la courte mesure de son esprit; et dès qu'elle amour si je reculois. Allons à Jésus; allons au surpasse notre foible raison, elle se tourne en Calvaire: mon ame est triste jusqu'à la mort; scandale. mais qu'importe, pourvu que je meure percé des Cependant la religion doit être dans la pratique mêmes clous et sur la même croix que vous , ô ce qu'elle est dans la spéculation ; c'est-à-dire mon Sauveur ! qu'il faut qu'elle aille réellement jusqu'à faire perdre pied à notre raison , et à nous livrer à la XIII. POUR LE SAMEDI SAINT. folie du Sauveur crucifié. Oh! qu'il est aisé d'être chrétien à condition d'être sage, maitre de soi , Jésus entre la mort qu'il a soufferte et la vie qu'il Ce qui se présente à moi aujourd'hui, c'est courageux, grand, régulier et merveilleux en lout! Mais être chrétien pour être petit , foible, va reprendre, Sa résurrection ne sera pas moins méprisable et insensé aux yeux des homines, c'est réelle que sa mort, et sa mort n'est qu'un pasce qu'on ne peut entendre sans en avoir horreur. sage de la misérable vie à la vie bienheureuse. Aussi l'on n'est chrétien qu'à demi. Non seule- | 0 Sauveur! je vous adore, je vous aime dans le ment on s'abandonne à son vain raisonnement tombeau , je m'y renferme avec vous ; je ne veux comme les Gentils, mais encore on se fait un hon- plus que le monde me voie , je ne veux plus me Deur de suivre son zèle comme les Juifs. C'est voir moi-même, je descends dans les ténèbres et avilir la religion , dit-on, c'est la tourner en pe- bre des vivants. o monde ! ô hommes ! oubliez jusque dans la poussière; je ne suis plus du nomlitesse d'esprit : il faut montrer combien elle est grande. Hélas ! elle ne le sera en nous qu'autant moi, foulez-moi aux pieds ; je suis mort, et la vie qu'elle nous rendra bumbles, dociles, petits et dé qui m'est préparée sera cachée avec Jésus-Christ tachés de nous-mêmes. en Dieu. On voudroit un Sauveur qui vînt pour nous Ces vérités étonnent; à peine les gens de bien rendre parfaits, pour nous remplir de notre propre peuvent-ils les supporter. Que signifie donc la excellence, et pour remplir toutes les vues les baptême par lequel, comme l'Apôtre nous l'assure', plus flatteuses de notre sagesse : au contraire nous avons été lous ensevelis avec Jésus-Christ Dieu nous a donné un Sauveur qui renverse no- par sa mort? Où est-elle , cette mort que le caractre sagesse , qui nous met avec lui nu sur une tère de chrétien doit opérer en nous ? Où est-elle, iofame croix. O Jésus ! c'est là que tout le monde cette sépulture? Hélas ! je veux paroître être apvous abandonné. Il ne faut pas, dit-on, pousser prouvé, aimé, distingué; je veux occuper mon les choses si loin ; c'est outrer les vérités chré- prochain, posséder son cæur, me faire une idole tiennes, et les rendre odieuses aux yeux du de la réputation et de l'amitié. Dérober à Dieu monde. Eh quoi I ne savons-nous pas que l'encens grossier qui brûle sur ses autels n'est lanes seront scandalisés, puisque quelques gens rien en comparaison du larcin sacrilege d'une de bien même le sont ? ame qui veut enlever ce qui est dû à Dieu, et se Comment le mystère de la croix ne paroîtroit faire l'idole des autres créatures. il pas excessif à ces sages Gentils, puisqu'il scan Mon Dieu, quand cesserai-je de m'aimer, jusdalise les Juifs pieux et zélés ? 0 Sauveur ! boive qu'à vouloir qu'on ne m'aime et qu'on ne m'estiqui voudra votre calice d'amertume; pour moi, me plus? A vous seul, Seigneur, la gloire, à vous je le veux boire jusqu'à la lie la plus amère. Je seul l'amour. Je ne dois plus rien aimer qu'en suis prêt à souffrir la douleur, l'ignominie, la dé-vous, pour vous et de votre pur amour : je ne rision, l'insulte des hommes au-dehors, et au dois plus m'aimer moi-même que par charité, dedans la tentation et le délaissement du Père comme on aime un étranger. Ne devrois-je donc celeste; je dirai, comme vous l'avez dit pour mon pas avoir bonte de vouloir être estimé et aimé? , instruction : Que ce calice passe et s'éloigne de ce qui est le plus étrange, et ce qui fait voir l'inmoi; mais, malgré l'horreur de la nature, que justice de mon amour-propre, c'est que je ne me contente pas d'un amour de charité. L'oserai-je rolre volonté se fasse, el non la mienne '. Ces vé- dire, ô mon Dieu ! ma vaine délicatesse est blesrités sont trop fortes pour les mondains , qui ne les pro sée de n'avoir rien que ce qu'on lui accorde à notre amour portera le caractère de Dieu même. cause de vous. O injustice ! ô révolte ! ô aveugle Ne songcons donc qu'à nous unir à Jésus-Christ et détestable orgueil ! Punissez-le, mon Dieu. Je dans son agonie, dans sa mort et dans son tomsuis pour vous contre moi; j'entre dans les inté- beau; ensevelissons-nous dans les ténèbres de la rêts de votre gloire et de votre justice contre ma pure foi, livrons-nous à toutes les horreurs de la vanité. O folle créature, idolâtre de toi-même! mort. Non, je ne veux plus me regarder comme Qu'as-tu donc, indépendamment de Dieu, qui mé- étant de la terre. O monde! oubliez-moi comme rite cette tendresse, cet attachement, cet amour je vous oublie, et comme je veux m'oublier moiindépendant de la charité? Oh! qu'il faut de cha même! Seigneur Jésus, vous n'êtes mort que rité pour se supporter dans cette injustice, de pour me faire mourir : arrachez-moi la vie, ne me vouloir que les autres fassent pour nous ce que laissez plus respirer; ne souffrez aucune réserve, Dieu nous défend de faire pour nous-mêmes ! poussez mon cæur à bout; je ne mets point de Amour que Dieu imprime dans le fond de ses bornes à mon sacrifice. créatures, est-ce là l'usage qu'il en veut tirer ? Ne nous a-t-il faits capables d'aimer qu'afin que XIV. POUR LE JOUR DE L'ASCENSION. nous nous détournions les uns les autres de l'unique terme du pur amour ? Non, mon Dieu, je ne Il me semble que j'accompagne avec les disciples veux plus qu'on m'aime; à peine faut-il qu'on Jésus-Christ jusqu'à Béthanie. Là, il monte au ciel me souffre pour l'amour de vous : plus je suis à délicat et sensible sur cet amour des autres, mes yeux; je l'adore, je ne puis me lasser de le plus regarder, de le suivre d'affection , et de goûter j'en suis indigne et dans le besoin d'en être privé. Il en est, ô Seigneur de la réputation comme sorties les dernières de sa bouche sacrée, quand il au fond de mon cæur les paroles de vie qui sont de l'amitié : donnez ou Ôtez selon vos desseins : a quitté la terre. O Sauveur ! vous ne cessez point que cette réputation , plus chère que la vie, de- d'étre avec moi et de me parler ! Je sens la vérité vienne comme un linge sali , si vous y trouvez vo- de celle promesse : Voilà que je suis avec vous tre gloire : qu'on passe et qu'on repasse sur moi tous lesjours jusqu'à la consommation du siècle'. comme sur les morts qui sont dans le tombeau ; Vous êtes avec nous, non seulement sur cet autel qu'on ne me compte pour rien; qu'on ait horreur sensible où vous appelez tous vos enfants à manger de moi; qu'on ne m'épargne en rien, tout est le pain descendu du ciel; mais vous êtes encore aubon. S'il me reste encore quelque sensibilité vo dedans de nous, sur cet autel invisible, dans cette lontaire, quelquc vue secrète sur la réputation , je église et ce sanctuaire inaccessible de nos ames , ne suis point mort avec Jésus-Christ, et je ne où se fait l'adoration en esprit et en vérité. Là vous suis point en état d'entrer dans sa vie ressus- sontoffertes les pures victimes; là sont égorgés tous citée. les desirs propres, tous les retours intéressés sur Ce n'est qu'après l'extirpation de la vie maligne nous-mêmes, et tous les goûts de l'amour-propre. et corrompue du vieil homme que nous passons Là nous mangeons le véritable pain de vie dont dans la vie de l'homme nouveau. Il faut que tout votre chair adorable même n'est que la superfimeure: douceurs, consolation, repos , tendresse, cie sensible; là nous sommes nourris de la pure amitié, honneur, réputation; tout nous sera rendu substance de l'éternelle Vérité ; là le Verbe fait au centuple: mais il faut que tout meure, que tout chair se donne à nous comme notre verbe intésoit sacrifié. Quand nous aurons tout perdu en rieur, comme notre parole, notre sagesse, notre vous, Ô mon Dieu! nous retrouverons tout en vie , notre être, notre tout. Si nous l'avons connu vous. Ce que nous avions en nous avec l'impu- selon la chair et par les sens , pour y rechercher relé du vieil homme nous sera rendu avec la pu- un goût sensible, nous ne le connoissons plus de reté de l'homme renouvelé, comme les métaux même ; c'est la pure foi et le pur amour qui se mis au feu ne perdent point leur pure substance, nourrissent de la pure vérité de Dieu fail une mais sont purifiés de ce qu'ils ont de grossier. même chose avec nous. O règne de mon Dieu ! Alors, mon Dieu, le même esprit qui gémit et qui c'est ainsi que vous venez à nous dès celte vie miprie en nous , aimera en nous plus parfaitement. sérable. O volonté du Père! vous êtes par-là acCombien nos caurs seront-ils plus grands, plus complie sur la terre comme dans le ciel. O ciel ! tendres et plus généreux ! Nous n'aimerons plus en foibles créatures, et d'un cour resserré dans d'étroites bornes : l'Amour infioi aimera en uous, Mullh. XXVIII, 20. pendant qu'il plaît à Dieu de me tenir hors de en reste-t-il quelqu'une dont nous osions encore vous dans ce lieu d'exil, je ve vais point vous refuser le sacrifice? 0 Dieu! n'écoutez plus ma chercher plus loin, et je vous trouve sur la terre. lâcheté ; dépouillez , écorchez , s'il le faut; coupez Je ne connois ni ne veux d'autre ciel que mon jusqu'au vif. Quand tout sera ôté, ce sera alors Dieu ; et mon Dieu est avec moi au milieu de cette que vous resterez seul dans l'ame. vallée de larmes. Je le porte, je le glorifie en mon cæur ; il vit en moi. Ce n'est pas moi qui vis; XV. POUR LE JOUR DE LA PENTECÔTE. c'est lui qui vit triomphant dans sa créature de boue, et qui la fait vivre en lui seul. O bienheu- Vous avez commencé, Seigneur, par ôter à reuse et éternelle Sion, où Jésus règne avec tous vos apôtres ce qui paroissoit le plus propre à les les saints ! que de choses glorieuses sont dites de soutenir, je veux dire la présence sensible de vous! Que j'aime ce règne de gloire qui n'aura Jésus votre Fils ; mais vous avez tout détruit pour point de fin ! A vous seul , Seigneur, l'empire, la tout établir : vous avez ôté tout pour rendre tout majesté, la force, la toute-puissance aux siècles avec usure. Telle est votre méthode. Vous vous des siècles. plaisez à renverser l'ordre du sens humain. Seigneur Jésus, bien loin de m’affliger pour Après avoir ôté cette possession sensible de nous de ce que vous n'êtes pas visible sur la terre, Jésus-Christ , vous avez donné votre Saint-Esprit. je me réjouis de votre triomphe; c'est votre seule O privation ! que vous êtes précieuse et pleine de ! gloire qui m'occupe. Je joins ici-bas ma foible voix vertu , puisque vous opérez plus que la possession avec celle de tous les bienbeureux pour chanter le du Fils de Dien même! O ames lâches! pourquoi cantique de l'Agneau vainqueur : trop heureux, vous croyez-vous si pauvres dans la privation , 6 Jésus! de souffrir dans cet exil pour vous glori- puisqu'elle enrichit plus que la possession du plus lier ! Votre présence sensible, il est vrai, est le grand trésor? Bienheureux ceux qui manquent de plus doux de lous les parfums; mais ce n'est pas tout, et qui manquent de Dieu, c'est-à-dire de pour moi que je vous cherche, c'est pour vous. Dieu goûté et aperçu ! Heureux ceux pour qui Oh! si je me regardois moi-même, qu'est-ce qui Jésus se cache et se retire! L'Esprit consolateur pourroit me consoler dans cette misérable vie, viendra sur eux; il apaisera leur douleur, et de ne vous avoir point , de vous déplaire par tant aura soin d'essuyer leurs larmes. Malheur à ceux de fautes, et de me voir sans cesse en risque de qui ont leur consolation sur la terre , qui trouvous perdre éternellement? qu'est-ce qui seroit vent hors de Dieu le repos , l'appui et l'attachecapable d'adoucir mes peines, et de me faire sup- ment de leur volonté! Ce bon Esprit promis à porter la vie ? Mais j'aime mieux votre volonté tous ceux qui le demandent n'est point envoyé que ma sûreté propre. sur eux. Le Consolateur envoyé du ciel n'est que Je vis donc, puisque vous voulez que je vive. pour les ames qui ne tiennent ni au monde ni à Cette vie, qui n'est qu'une mort, durera autant elles-mêmes. que vous voudrez. Vous le savez, ô Dieu de mon Hélas ! Seigneur, où est-il donc, cet Esprit qui cæurque je n'y veux tenir à rien qu'à votre or- doit être ma vie ? il sera l'ame de mon ame. Mais dre. Je ne suis dans celle terre étrangère qu'à où est-il? je ne le sens, je ne le trouve point. Je cause que vous m'y tenez. Je vous aime mieux n'éprouve dans mes sens que fragilité, dans mon que mon bonheur et que ma gloire. Il vaut mieux esprit que dissipation et mensonge, dans ma vovous obéir que jouir de vous; il vaut mieux souf- lonté qu'inconstance et que partage entre votre frir selon vos desseins, que goûter vos délices et amour et mille vains amusements, Où est-il donc, voir la lumière de votre visage. En me privant de votre Esprit? que ne vient-il créer en moi un vous, privez-moi de tout : dépouillez , arrachez ceur nouveau selon le vôtre ? 0 mon Dieu ! je sans pilie; ne laissez rien à mon ame, ne la lais- comprends que c'est dans cette ame appauvrie sez pas elle-même à elle-même. que votre Esprit daignera habiter, pourvu qu'elle Si la présence du Sauveur a dû nous être ôtée, s'ouvre à lui saus mesure. C'est cette absence que doit-il nous rester ? Si Dieu a été jaloux d'une sensible du Sauveur et de tous ses dons qui attire si sainte consolation pour les apôtres, avec quelle l'Esprit saint. Venez donc, ô Esprit ! vous ne indignation détruira-t-il en nous tant d'amuse- pouvez rien trouver de plus pauvre, de plus déments qui nous conservent certains restes secrets pouillé, de plus nu, de plus abandonné, de plus d'une vie propre? Quelle consolation sera aussi foible que mon cæur. Venez , apportez-y la paix ; pure que celle de voir Jésus? et par conséquent l non celte paix d'abondance qui coule comme un a fleuve, mais cette paix sèche, cette paix de pa- | donnez tout entier à nous. Mais encore de quelle tience et de sacrifice; cette paix amère, mais manière faites-vous ce don ? sous la figure de l'apaix véritable pourtant, et d'autant plus pure, liment le plus familier. O mon pain ! ô ma vie! plus intime, plus profonde , plus intarissable, ô chair de mon Sauveur ! venez exciter ma faim ! qu'elle n'est fondée que sur le renoncement sans je ne veux plus me nourrir que de vous. réserve. O Verbe ! ô Sagesse, ô Parole , ô Vérité élerO Esprit, ô amour , ô vérité de mon Dieu ! ô nelle ! vous êtes caché sous cette chair , et cette amour lumière! ô amour qui enseignez l'ame sans chair sacrée se cache sous cette apparence grosparler , qui faites tout entendre sans rien dire; sière du pain. 0 Dieu cachél je veux vivre caché qui ne demandez rien à l'ame, et qui l'entraînez avec vous pour vivre de votre vie divine. Sous par le silence à tout sacrifice ! ô amour qui dé- toutes mes misères, mes foiblesses , mes indigoûtez de tout autre amour, qui faites qu'on se gnités , je cacherai Jésus ; je deviendrai le sacrehait, qu'on s'oublie et qu'on s'abandonne ! ô ment de son amour : on ne verra que le voile amour qui coulez au travers du cour comme la grossier du sacrement, la créature imparfaite et fontaine de vie , qui pourra vous connoître, si- fragile, mais au - dedans vivra le vrai Dieu de non celui en qui vous serez? Taisez-vous, hommes gloire. aveugles ; l'Amour n'est point en vous. Vous ne Hélas ! Ô Dieu d'amour! quand viendrez-vous savez ce que vous dites; vous ne voyez rien, vous donc ? quand est-ce que je vous aimerai? quand n'entendez rien. Le vrai Docteur ne vous a jamais est-ce que vous serez le seul aliment de mon enseignés. cour , et mon pain au-dessus de toute substance? C'est lui qui rassasie l'ame de vérité sans au- Le pain extérieur , cette créature fragile , sera brisé cune science distincte. C'est lui qui sait naître au et exposé à toutes sortes d'accidents; mais Jésus, fond de l'ame les vérités que la parole sensible immortel et impassible, sera en elle sans dide Jésus-Christ n'avoit exposées qu'aux yeux de vision et sans changement. Vivant de lui, je ne l'esprit. On goûtc, on se nourrit, on se fait une vivrai plus que pour lui, et il vivra tout seul en même chose avec la vérité. Ce n'est plus elle moi. qu'on voit comme un objet bors de soi ; c'est elle Verbe divin, vous parlerez, et mon ame se qui devient nous-mêmes , et quc nous sentons in- taira pour vous entendre ; cette simple parole qui timement comme l'ame se sent elle-même. Oh! | fait le monde se fera entendre de sa créature , et quelle puissante consolation sans chercher à se elle fera en elle tout ce qu'elle exprimera : elle : consoler! On a tout sans rien avoir. Là on trouve formera sa nouvelle créature comme elle forma en unité le Père, le Fils et le Saint-Esprit; le Père l'univers. Taisez-vous donc, mon ame; n'écoutez créateur , qui crée en nous tout ce qu'il veut y plus rien ici-bas; ne vous écoutez plus vous-même faire pour nous rendre des enfants semblables à dans ce silence qui est l'anéantissement de l'eslai ; le Fils Verbe de Dieu , qui devient le verbe et prit. Laissez parler le Verbe fait chair ; oh ! qu'il la parole intime de l'ame , qui se tait à tout pour dira de choses ! Il est lui seul toute vérité. Quelle ne laisser plus parler que Dieu ; enfin l'Esprit, différence entre la créature qui dit en passant quelqui souffle où il veut, qui aime le Père et le Fils que vérité, et qui dit ce qui n'est point à elle, en nous. O mon Amour , qui êtes mon Dieu , ai- mais ce qui est comme emprunté de Dieu, et le mez-vous, glorifiez-vous vous-même en moi. Ma Fils de Dieu qui est la vérité même! Il est ce qu'il paix, ma joie, ma vie sont en vous qui êtes mon dit ; il est la vérité en substance : aussi ne la dit-il tout , et je ne suis plus rien. point comme nous la disons : il ne la fait point passer devant les yeux de notre esprit , successiXVI. POUR LA FÊTE DU SAINT SACREMENT. vement et par pensées détachées; il la porte elleJ'adore Jésus-Christ au saint sacrement où il même tout entière dans le fond de notre être; il cache tous les trésors de son amour. O octave l'incorpore en nous et nous en elle: nous sommes trop courte pour célébrer tant de mystères de faits vérité de Dieu. Alors ce n'est point par force Jésus anéanti! Je n'y vois qu'amour, que bonté de raisonnements et de science, c'est par simplicité et que miséricordo. Hélas ! Seigneur , que voulez- d'amour qu'on est dans la vérité; tout le reste vous ? Pourquoi cacher votre majesté éternelle n'est plus qu'ombre et mensonge. On n'a plus bePourquoi l'exposer à l'ingratitude des ames sensi- soin de discourir et de se convaincre en détail : bles , à l'irrévérence des hommes? Ah ! c'est que c'est l'amour qui imprime toute vérité. D'une vous nous aimez, vous nous cherchez, vous vous seule vue on est saisi du véant de la créature el |