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passagers, mais ces plaisirs coûtent plus qu'ils ne valent. Jésus-Christ seul peut mettre l'homme en paix; il l'accorde avec lui-même; il soumet ses passions; il borne ses desirs; il le console par son amour; il lui donne la joie dans la peine même : ainsi cette joie ne peut lui être ôtée.

VI. JÉSUS-CHRIST A REFUSÉ DE PRIER POUR

LE MONDE.

Je ne prie point pour le monde. S. Jean, XVII, 9.

VIII. SUR LE MÊME SUJET.

Le monde est crucifié pour moi, comme je suis crucifié pour le monde. Gal., VI, 14.

Il ne suffit pas, selon l'Apôtre, que le monde soit crucifié pour nous, il faut que nous le soyons aussi pour lui. On croit être bien loin du monde, parce qu'on est dans une retraite ; mais on parle le langage du monde; on en a les sentiments, les curiosités, on veut de la réputation, de l'amitié, de l'amusement; on a encore des idées de noblesse; on souffre avec répugnance les moindres humiliations. On veut bien, dit-on, oublier le moude; mais on ressent, dans le fond de son cœur, qu'on ne veut pas être oublié par lui. En vain cherche-t-on un milieu entre Jésus-Christ et le monde.

Jésus-Christ mourant prie pour ses bourreaux, et refuse de prier pour le monde. Que dois-je donc penser de ces hommes qu'on appelle honnêtes gens, et que j'ai appelés mes amis, puisque les persécuteurs et les meurtriers de JésusChrist lui sont moins odieux que ces hommes auxquels j'avois livré mon cœur? Que puis-je attendre de ma foiblesse dans les compagnies où l'on se pique d'oublier Dieu, de traiter la piété de foi- | IX. QUE, DANS LA VOIE DE LA PERFection, les blesse, et de suivre tous ses desirs? Puis-je croire que j'aime Dieu, et que je ne rougisse point de son Evangile, si j'aime tant la société de ses ennemis et si je crains de leur déplaire en témoignant que je crains Dieu ? O Seigneur! soutenez-moi contre les torrents du monde; rompez mes liens; éloignezmoi des tabernacles des pécheurs; unissez-moi avec ceux qui vous aiment!

VII. SUR LA FUITE DU MONDE.

Malheur au monde à cause de ses scandales!
S. Maith., XVII, 7.

Le monde porte déja sur son front la condamnation de Dieu, et il ose s'ériger en juge pour décider de tout. On veut aimer Dieu, et on craint lâchement de déplaire au monde, son irréconciliable ennemi. O ame adultère, et infidèle à l'époux sacré! ne savez-vous pas que l'amitié du monde rend ennemi de Dieu ? Malheur donc à ceux qui plaisent au monde, ce juge aveugle et corrompu !

Mais qu'est-ce que le monde? est-ce un fantôme? Non; c'est cette foule d'amis profanes qui m'entretiennent tous les jours, qui passent pour honnêtes gens, qui ont de l'honneur, que j'aime et dont je suis aimé, mais qui ne m'aiment point pour Dieu. Voilà mes plus dangereux ennemis. Un ennemi déclaré ne tueroit que mon corps; ceux-ci ont tué mon ame. Voilà le monde que je dois fuir avec horreur, si je veux suivre Jésus

Christ.

PREMIERS SONT BIEN SOUVENT ATTEINTS ET
DEVANCÉS PAR LES DERNIERS.

Ceux qui étoient les premiers seront les derniers, et les derniers seront les premiers. S. Luc, x111, 30.

Combien d'ames, qui, dans une vie commune, auront atteint à la perfection, pendant que les épouses du Seigneur, comblées de graces, appelées à goûter la manne céleste, auront langui dans une vie lâche et imparfaite! Combien de pécheurs, qui, après avoir passé tant d'années dans l'égarement et dans l'ignorance de l'Évangile, laisseront tout d'un coup derrière eux, par la ferveur de leur pénitence, les ames qui avoient goûté, dès leur plus tendre jeunesse, les dons du Saint-Esprit, et que Dieu avoit prévenues de ses plus douces bénédictions! Qu'il sera beau aux derniers de remporter ainsi la couronne, et d'être, par leur exemple, la condamnation des autres ! Mais qu'il sera douloureux aux premiers de devenir les derniers, de se voir derrière ceux dont ils étoient autrefois le modèle, de perdre leurs couronnes, et de les perdre pour quelques amusements qui les ont retardés ! Je ne saurois voir le recueillement de certaines personnes qui vivent dans le monde, leur désintéressement, leur humilité, sans rougir de voir combien nous, qui ne devrions être occupés que de Dieu, sommes dissipés, vains, et attachés à nos commodités temporelles. Hâtons-nous de courir, de peur d'être

laissés derrière.

X. DE L'AMOUR DU PROCHAIN.

Soyez attentifs à vous aimer les uns les autres d'un amour fraternel. I Ép. de saint Pierre, 1, 22.

Cet apôtre veut, par ces paroles, que notre charité soit toujours attentive pour ne pas blesser le prochain. Sans cette attention, la charité, qui est si fragile en cette vie, se perd bientôt. Un mot dit avec hauteur ou avec chagrin, un air sec ou dédaigneux, peut altérer les esprits foibles. Il faut ménager des créatures si chères à Dieu, des membres si précieux de Jésus-Christ. Si vous manquez de cette attention, vous manquez aussi de charité; car on ne peut aimer sans s'appliquer à ce qu'on aime. Cette attention de charité doit remplir tout l'esprit et le cœur. Il me semble que j'entends Jésus-Christ vous dire comme à saint Pierre Paissez mes brebis.

:

XI. QUE NOUS SOMMES VENUS POUR SERVIR

LES AUTRES.

Je ne suis pas venu pour être servi, mais pour servir les autres. S. Marc, x, 45.

Il n'y a point de douceur véritable et constante sans humilité. Tandis que nous serons pleins de nous-mêmes, tout nous choquera en autrui. Soyons persuadés que rien ne nous est dû, et alors rien ne nous aigrira. Pensons souvent à nos misères, et nous deviendrons indulgents pour celles d'autrui. Il n'y a point de page dans les Écritures, dit saint Augustin, où Dieu ne fasse tonner ces grandes et aimables paroles: Apprenez de moi que je suis doux et humble de cœur.

XIII. DE LA VÉRITABLE GRANDEUR.

Quiconque s'exalte sera humilié, et quiconque s'humilie sera exalté. S. Luc, xiv, 14.

Puisque nous aimons tant l'élévation, cherchons-la où elle est, cherchons celle qui durera toujours. Oh! l'admirable ambition que celle de régner éternellement avec le Fils de Dieu, et d'être assis à jamais sur un même trône avec lui! Mais quelle ambition, quelle jalousie d'enfant, que de s'empresser pour avoir des noms parmi les homC'est ce que doivent dire toutes les personnes mes; pour parvenir à une réputation encore moins qui ont quelque autorité sur d'autres. C'est un il se donner tant de peine pour avoir quelques solide que la fumée qui est le jouet du vent! Fautpur ministère. Il faut effectivement servir ceux à gens qui se disent nos amis sans l'être, et pour qui l'on paroît commander, souffrir leurs imper-soutenir de vaines apparences? Aspirons à la véfections, les redresser doucement et avec patience, ritable grandeur; elle ne se trouve qu'en s'abaisles attendre dans les voies de Dieu, se faire tout sant sur la terre. Dieu confond le superbe dès cette à tous, se croire fait pour eux, s'humilier pour vie; il lui attire l'envie, la critique et la calomleur adoucir les corrections les plus nécessaires, nie; il lui cause mille traverses, et enfin il l'hune se rebuter jamais; demander à Dieu le changemiliera éternellement et l'humble qui se cache, ment de leur cœur, qu'on ne peut point obtenir qui veut être oublié, qui craint d'être recherché soi-même. Examinez-vous par rapport aux perdu monde, sera, dès cette vie, respecté pour sonnes qui vous sont commises, et dont vous êtes n'avoir pas voulu l'être, et une éternelle gloire chargé devant Dieu. sera la récompense de son mépris pour la gloire fausse et méprisable.

XII. DE LA Douceur et de l'humilité du cœur.

Apprenez de moi que je suis doux et humble de cœur.
S. Matth., XI. 29.

Il n'y avoit que le Fils de Dicu qui pût nous faire cette divine leçon, lui qui, étant égal à son Père, s'est anéanti, comme dit saint Paul', en prenant la forme et la condition d'un esclave. Que n'a-t-il pas fait pour l'amour de nous? Que n'at-il pas souffert de nous, et que ne souffret-il pas encore? Il a été mené, dit Isaïe2, comme une victime qu'on va égorger, et on ne l'a pas entendu se plaindre. Et nous, nous nous plaignons des moindres maux; nous sommes vains, délicats, sensibles!

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XIV. SUR QUOI NOUS DEVONS FONDER NOTRE

JOIE.

Réjouissez-vous, je vous le dis encore; réjouissez-vous : que votre modestie soit connue de tous les hommes; car le Seigneur est proche. Philip., IV, 4, 5.

C'est le dégoût de nos passions et des vanités du monde qui doit être la source de notre joie. Nous ne devons fonder notre joie que sur l'espémonde nous déplaît. Ce doit être l'attente de rance, et nous ne devons espérer qu'autant que le Jésus-Christ, qui va venir nous couronner, qui doit nous rendre modestes et constants: il faut se tenir prêt à le recevoir, être bien aise qu'il vienne :

ce sera le juge du monde et notre consolateur. | qu'il se manifeste dans notre chair mortelle, que Qu'il est doux d'attendre Jésus-Christ en paix, Jésus-Christ paroisse en nous, puisque nous ne tandis que les enfants du siècle craignent qu'il ar- faisons qu'une même chose avec lui. Je vis, mais rive! Ils trembleront, ils frémiront; et nous, ce n'est plus moi qui vis ; c'est Jésus-Christ qui nous verrons venir avec joie et confiance notre vit dans sa créature, déja morte à toutes les choaimable délivrance. Heureux état, état digne ses humaines. d'envie! Que ceux qui n'y sont pas encore, y aspirent c'est notre lâcheté et nos amusements qui nous éloignent de cet état de confiance et de consolation.

XV. DES EFFEts de l'eucHARISTIE EN NOUS.

Celui qui me mange doit vivre pour moi.
S. Jean, vi, 55, 56.

C'est la chair de Jésus-Christ que nous mangeons, mais c'est son esprit qui nous vivifie. La chair seule ne profite de rien, comme il le dit lui-même; oui, la chair quoique unie au Verbe, en sorte que saint Jean ne craint pas de dire que le Verbe est fait chair. Il ne l'a unie que pour nous communiquer son esprit plus sensiblement par cette société charnelle qu'il a faite avec nous; il ne nous la donne à manger que pour nous incorporer à lui, et faire vivre nos ames de sa vie divine. Pourquoi donc, vivant si souvent de lui, refuserons-nous de vivre pour lui? Que devient en nous ce pain céleste, cette chair toute divine? A quoi servent nos communions? Jésus-Christ vit-il en nous? Ses sentiments, ses actions se manifestent-elles en notre chair mortelle? Croissons-nous en Jésus-Christ à force de le manger? Toujours s'amuser, toujours murmurer contre les moindres croix, toujours ramper sur la terre, toujours chercher de misérables consolations, toujours cacher ses défauts sans les corriger, pendant qu'on ne fait qu'une même chair avec lui!

XVI. SUR LE MÊME SUJET.

Celui qui me mange doit vivre pour moi.
S. Jean, VI, 55, 56.

Jésus-Christ est toute notre vie; c'est la vérité éternelle dont nous devons être nourris quel moyen de prendre un aliment si divin, et de languir toujours! Ne point croître dans la vertu, n'avoir ni force ni santé, se repaître de mensonge, fomenter dans son cœur des passions dangereuses, être dégoûté des vrais biens, est-ce là la vie d'un chrétien qui mange le pain du ciel? JésusChrist ne veut s'unir et s'incorporer avec nous, que pour vivre dans le fond de nos cœurs; il faut

XVII. DE LA CONFIANCE EN DIEU.

Je dors, et mon cœur veille. Cant., v. 2. On dort en paix dans le sein de Dieu, par l'abandon à sa providence, et par un doux sentiment de sa miséricorde. On ne cherche plus rien, et l'homme tout entier se repose en lui. Plus de raisonnements incertains et inquiets, plus de desirs, plus d'impatience à changer sa place. La place où nous sommes, c'est le sein de Dieu; car c'est Dieu qui nous y a mis de ses propres mains, et qui nous y porte entre ses bras. Peut-on se trouver mal où il nous met, et où nous sommes comme un enfant que sa mère tient et embrasse? Laissons-le faire, reposons-nous sur lui et en lui. Ce repos de confiance, qui éteint tous les mouvements de la prudence charnelle, c'est la véritable vigilance du cœur. S'abandonner à Dieu sans s'appuyer sur la créature ni sur la nature, c'est faire veiller son cœur tandis qu'on dormira. Ainsi l'amour aura toujours les yeux ouverts avec jalousie, pour ne tendre qu'à son Bien-Aimé, et nous ne nous endormirons point dans la mort.

XVIII. QU'IL N'Y A QUE DIEU QUI PUISSE APPRENDRE A PRIER.

Enseignez-nous à prier. S. Luc, XI, 1.

Seigneur, je sais ce que je dois vous demander. Vous seul savez ce qu'il nous faut; vous m'aimez mieux que je ne sais m'aimer moi-même. O père! donnez à votre enfant ce qu'il ne sait pas luimême demander. Je n'ose demander ni croix ni consolations; je me présente seulement à vous; je vous offre mon cœur. Voyez mes besoins, que je ne connois pas; voyez, et faites selon votre miséricorde. Frappez ou guérissez, accablez ou relevez-moi : j'adore toutes vos volontés sans les connoître; je me tais, je me sacrifie, je m'abandonne. Plus d'autres desirs que ceux d'accomplir votre volonté. Apprenez-moi à prier; priez vousmême en moi.

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XIX. DE L'AMOUR DE DIEU.

Seigneur, vous savez bien que je vous aime.
S. Jean, XXI, 46.

Saint Pierre le disoit à notre Seigneur; mais oserions-nous le dire? Aimons-nous Dieu pendant que nous ne pensons point à lui? Quel est l'ami à qui nous n'aimons pas mieux parler qu'à lui? Où nous ennuyons-nous davantage qu'au pied des autels? Que faisons-nous pour plaire à notre Maître, et pour nous rendre tels qu'il veut? que faisons-nous pour sa gloire? Que lui avons-nous sacrifié pour accomplir sa volonté? la préférons nous à nos moindres intérêts, aux amusements les plus indignes? Où est donc cet amour que nous pensons avoir? Malheur pourtant à celui qui n'aime pas le Seigneur Jésus qui nous a tant aimés! Donnera-t-il son royaume éternel à ceux qui ne l'aiment pas? Si nous l'aimions, pourrions-nous être insensibles à ses bienfaits, à ses inspirations, à ses graces? Ni la vie, ni la mort, ni le présent, ni l'avenir, ni la puissance, ne pourront désormais nous séparer de la charité de Jésus-Christ 2.

XX. SUR LE MÊME SUJET.

Seigneur, vous savez bien que je vous aime. S. Jean, XXI, 16.

Vous le savez mieux que moi, ô mon Dieu! ô mon Père! ô mon tout ! combien je vous aime. Vous le savez, et je ne le sais pas car rien ne m'est plus caché que le fond de mon cœur. Je veux vous aimer; je crains de ne pas vous aimer assez; je vous demande l'abondance du pur amour. Vous voyez mon desir; c'est vous qui le faites en moi. Voyez dans votre créature ce que vous y avez mis. O Dieu, qui m'aimez assez pour m'inspirer de vous aimer sans bornes, ne regardez plus le torrent d'iniquités qui m'avoit englouti; regardez

votre miséricorde et mon amour!

On cherche dans la piété même les commodités et les consolations temporelles; on regarde la piété comme un adoucissement aux peines qu'on souffre, et non comme un état de renoncement et de sacrifice: de là viennent tous nos découragements. Commençons par nous abandonner à Dieu. En le servant, ne nous mettons jamais en peine de ce qu'il fera pour nous. Un peu plus ou un peu moins souffrir, dans une vie si courte, ce n'est pas grand' chose.

Que peut-il me manquer lorsque j'ai Dieu ? Oui, Dieu lui-même est le bien infini et l'unique bien. Disparoissez, faux biens de la terre, qui portez indignement ce nom, et qui ne servez qu'à rendre les hommes mauvais ! Rien n'est bon que le Dieu de mon cœur, que je porterai toujours au-dedans de moi. Qu'il m'ôte les plaisirs, les richesses, les honneurs, l'autorité, les amis, la santé, la vie : tant qu'il ne se dérobera point lui-même à mon cœur, je serai toujours riche; je n'aurai rien perdu ; j'aurai conservé ce qui est tout. Le Seigneur m'a cherché dans mes égarements, m'a aimé quand je ne l'aimois pas, m'a regardé avec tendresse malgré mes ingratitudes : je suis dans sa main; il me mène comme il lui plaît. Je sens ma foiblesse et sa force. Avec un tel appui rien ne me manquera jamais.

XXII. QUE DIEU DOIT ÊTRE L'UNIQUE PORTION DU CŒUR DE L'HOMME.

O Dieu de mon cœur, et mon éternelle portion! Ps. LXXII, 26.

Seigneur, vous êtes le Dieu de toute la nature; tout obéit à votre voix vous êtes l'ame de tout ce qui vit, et même de ce qui ne vit point. Vous êtes plus mon ame que celle même que vous avez donnée à mon corps: vous êtes plus près de moi que moi-même. Tout est à vous: mon cœur n'y sera-t-il pas, ce cœur que vous avez fait, que vous animez? Il est à vous, et non à moi. Mais, ô mon Dieu! vous êtes aussi à moi; car

XXI. QUE RIEN NE SAUROIT MANQUER A CELUI je vous aime. Vous êtes tout pour moi. Je n'ai nul

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XXIII. de queLLE MANIÈRE DIEU VEUT ÊTRE Glorifié.

Gloire à Dieu au plus haut des cieux, et paix sur la terre aux hommes de bonne volonté. S. Luc, 11, 44.

En ne cherchant que la gloire de Dieu, notre paix s'y trouvera. Mais la gloire de Dieu ne se trouve point dans toutes les pensées et les actions des hommes. Dieu ne veut être glorifié que par l'anéantissement entier de la nature, et par l'abandon à son esprit. Il ne faut point vouloir sa gloire plus qu'il ne la veut lui-même. Prêtons-nous seulement, comme des instruments morts, à la conduite de sa providence. Réprimons tout empressement, tout mouvement naturel, toute inquiétude déguisée sous le nom de zèle. Paix dans la bonne volonté. N'avoir plus ni desir ni crainte, et se laisser dans la main de Dieu, c'est là avoir une bonne volonté conforme à la sienne. Celui qui est ainsi est immobile comme la montagne de Sion; il ne sauroit être ébranlé, puisqu'il ne veut que Dieu, et que Dieu fait tout.

XXIV. DE LA DOUCEUR ET DE L'HUMILIté de CŒUR *.

me taire, qu'à adorer, qu'à me confondre, qu'à imiter. Le Fils de Dieu descend du ciel sur la terre, prend un corps de boue, expire sur la croix pour me faire rougir de mon orgueil. Celui qui est tout s'anéantit; et moi qui ne suis rien, je veux être, ou du moins je veux qu'on me croie tout ce que je ne suis pas ! O mensonge! ô folie! ô impudente vanité! ô diabolique présomption!

Seigneur, vous ne me dites point: Soyez doux et humble; mais vous dites que vous êtes doux et humble. C'est assez de savoir que vous l'êtes, pour conclure que nous devons l'être sur un tel exemple. Qui osera s'en dispenser après vous? Sera-ce le ver de terre? sera-ce le pécheur qui a mérité tant de fois pour son ingratitude d'être foudroyé par votre justice?

Mon Dieu, vous êtes ensemble doux et humble parce que l'humilité est la source de la véritable douceur L'orgueil est toujours hautain, impatient, prêt à s'aigrir. Celui qui se méprise de bonne foi veut bien être méprisé. Celui qui croit que rien ne lui est dû, ne se croit jamais maltraité. Il n'y a point de véritable douceur par tempérament, ce n'est que mollesse, indolence ou artifice. Pour être doux à autrui, il faut renoncer à soi.

Vous ajoutez, ô mon Dieu : Doux et humble Apprenez de moi que je suis doux et humble de cœur ; et de cœur. Ce n'est point un abaissement qui ne soit vous trouverez le repos de vos ames. S. Matth., XI,

29.

Mon Dieu, je viens m'instruire et m'examiner à vos pieds. Vous êtes ici présent; c'est vous qui m'y attirez par votre grace. Je n'écoute que vous, je ne crois que vous. Parlez, votre serviteur écoute. Seigneur, je vous adore; mon cœur n'aime que vous; il ne soupire qu'après vous. Je m'anéantis avec joie devant vous, ô éternelle Majesté ! je viens pour recevoir tout de vous, et pour renoncer sans

réserve à moi-même.

Envoyez, ô mon Dieu! votre Esprit saint; qu'il devienne le mien, et que le mien soit détruit à jamais! Je me livre à cet Esprit d'amour et de vérité. Qu'il m'éclaire aujourd'hui, pour m'appren

dre à être doux et humble de cœur.

O Jésus! c'est vous qui me donnez cette leçon de douceur et d'humilité. Tout autre qui voudroit me l'apprendre me révolteroit ; je trouverois partout de l'imperfection et de l'orgueil. Il faut donc que ce soit vous qui m'instruisiez.

O mon bon Maître! vous daignez m'instruire par votre exemple : quelle autorité ! Je n'ai qu'à

*On a vu ci-dessus, page 228, une partie de cette Méditation, dont Fénelon a fait usage dans les Réflexions pour tous les jours du mois. Nous la donnons ici tout entière. (Édit. de Vers.)

que dans l'esprit par réflexion, c'est un goût du cœur ; c'est un abaissement auquel la volonté consent, et qu'elle aime pour glorifier Dieu. C'est un plaisir de voir sa misère, pour s'anéantir devant Dieu, afin de ne devoir sa guérison qu'à lui. C'est une destruction de toute confiance en son esprit et en son courage naturel. Voir sa misère et en être au désespoir, ce n'est pas être humble; au contraire, c'est avoir un dépit d'orgueil qui ne peut consentir à son abaissement.

Enfin vous me promettez, ô Sauveur, que c'est dans cette humilité que je trouverai le repos de mon ame et la paix. Hélas! que j'ai été loin la chercher, cette paix! Je la cherchois dans des passions folles et turbulentes; je la cherchois dans les vaines imaginations de mon orgueil. L'orgueil est incompa-tible avec la paix. Il veut toujours ce qu'il n'a pas; il veut toujours passer pour ce qu'il n'est point. Il s'élève sans cesse, et sans cesse Dieu lui résiste pour le rabaisser, par l'envie, par la contradiction des autres hommes, ou par ses propres défauts qu'il ne peut s'empêcher de sentir. Malheureux orgueil qui ne goûtera jamais la paix des enfants de Dieu, qui sont simples et petits à leurs propres yeux !

Mon Dieu, que vous êtes bon de me faire aimer

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