Le témoignage des hommes n'a pas manqué à notre Suaire. Les princes de l'Eglise, les grands et les puissants, la foule humble et modeste, l'art et la poésie, la science enfin et la critique, tout lui rendit hommage. Que pouvait-on demander encore? Il fallait la voix du ciel, et Dieu vint à son tour ajouter sa suprême sanction, celle du miracle (45). Si jamais, disent les historiens, la vérité d'une relique a été avantageusement approuvée et confirmée par des prodiges, nous pouvons dire hardiment que c'est celle de Cadouin. Quand Mgr de Lingendes visita l'abbaye, les religieux lui présentèrent un livre manuscrit, commencé vers l'an 1200, qui contenait les miracles du saint Suaire, et ce prélat reconnut qu'ils n'avaient pas cessé jusqu'à l'an 1500, ou environ. Ils étaient faits en faveur des fidèles qui se vouaient à Jésus-Christ et à son saint Suaire, ou qui se faisaient enrôler dans sa Confrérie, ou qui faisaient dire des messes devant la relique en y laissant des offrandes, ou qui portaient avec dévotion quelque objet qui l'avait touchée, ou enfin qui accomplissaient des neuvaines en son honneur. Non seulement les individus avaient recours à elle, mais des villes entières dans leurs nécessités publiques lui faisaient des vœux et des présents (46). Encore que nous n'ayons pas conservé la quatrième partie des livres et registres où on décrivait anciennement les miracles opérés par la vertu du saint Suaire, néanmoins, disent les religieux dans leur histoire, il en reste encore plus de deux mille, entre lesquels se trouve la résurrection d'au moins soixante morts (47). A Toulouse, ils furent si multipliés que les peuples accouraient de toutes parts, et l'archevêque de cette ville, Dominique de Florence, déclare dans une lettre, datée de l'an 1413, que Jésus-Christ correspond miséricordieusement aux vœux des fidèles en opéranț un grand nombre de miracles. Le P. Dupuy feuilleta et lut plus tard les documents conservés dans cette ville à ce sujet, et il s'étonnait de leur nombre, ajoutant qu'ils avaient continué en Périgord et qu'en leur considération les Papes avaient accordé de grands priviléges à l'abbaye de Cadouin (48). Les grands vicaires de Périgueux, par leur patente de l'année 1469, autorisent dans le diocèse les quêtes en faveur de la Confrérie et ils disent en propres termes que dans le monastère de Cadouin Dieu opérait évidemment et à vue d'œil des miracles éclotants et infinis. Un Abbé de Cadouin donne pouvoir à son procureur pour la Confrérie du saint Suaire, de recevoir toutes les personnes qui désireront y entrer et d'annoncer aux fidèles les miracles innombrables que Jésus-Christ opère tous les jours en l'honneur de la sainte relique. Ils étaient si fréquents qu'à peine pouvait-on les écrire et qu'on en racontait un sur mille. On dira peut-être : mais d'où vient que ces prodiges n'existent plus ? Il est facile de répondre : l'af faiblissement de la dévotion au saint Suaire devait avoir cette conséquence Dieu veut récompenser la foi de ses enfants et il mesure ordinairement ses grâces à la correspondance qu'il trouve dans nos cœurs. Que la confiance renaisse, que la prière devienne plus fervente et la dévotion plus vive, et nous reverrons les merveilles d'un autre temps. Ne semble-t-il pas que le ciel nous donne déjà des témoignages nouveaux et quelques faits récents vraiment extraordinaires ne nous permettent-ils pas d'espérer bientôt des grâces plus signalées? Ajoutons que pour être moins nombreux, les prodiges n'ont jamais cessé entièrement à Cadouin. Nous allons donner une série de miracles arrivés dans les siècles passés et qui furent authentiquement constatés et écrits dans les livres du monastère (49). 1o Une noble femme de Cahors, qui resta aveugle pendant quatre ans, sans qu'aucun remède humain put la soulager, fit vou, s'il plaisait à Jésus-Christ de la guérir par les mérites de sa Passion et la vertu du saint Suaire, de venir l'adorer et d'apporter son offrande. Elle recouvra la vue aussitôt et vint ensuite à Cadouin pour y accomplir son vœu et rendre témoignage de la faveur singulière dont elle avait été l'objet. C'était en 1387. 2o L'an 1386, une maison d'un lieu appelé Siorac, était embrasée de tous côtés, sans qu'on put y remédier; la personne à qui elle appartenait fit vœu à Jésus-Christ et à son saint Suaire, et le feu s'éteignit entièrement. Ce miracle fut fait à la vue de tous les habitants de Siorac, et publié dans Cadouin le jour de la Trinité, qu'on faisait l'ostension du saint Suaire. Les seize miracles suivants ont été faits au temps où le saint Suaire était à Toulouse. 3o Une femme appelée Benoîte Cayssabon, du Lauraguais, s'étant accouchée d'un enfant mort, eut recours à Jésus-Christ et à son saint Suaire, promettant que si son fils pouvait ressusciter et être baptisé, elle l'apporterait au lieu où reposait la relique; à peine eut-elle fait ce vœu que l'enfant revint à la vie et fut baptisé. C'était en 1392. Les témoins de ce miracle furent Jean Fabry et Benoît Servat. 4o En 1374, le fils d'un seigneur nommé Guillaume de Bières, du diocèse de Toulouse, tomba dans une grave maladie qui le conduisit à la mort. Sa mère, tout en larmes, le voua à Jésus Christ et à son saint Suaire : le mort, ressuscita miraculeusement en présence de tous les assistants. Son père vint ensuite |