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quoniam diuturna sunt, etiam multò posterioribus seculis produnt. Qu'on cesse donc de vanter la prodigieuse grandeur de ce géant dont on dit que Jean Ier, duc de Berry, vit, en 1356, les ossements proche Valence en Dauphiné, dans la baronie de Crussol, et dont il fit apporter une partie à Bourges; Chaumeau, qui n'est point accoûtumé à diminuer le mérite des raretez de la ville de Bourges, et qui en vit des restes à la Sainte-Chapelle, dit qu'il n'avoit que quinze coudées de hauteur (1). Étoit-ce là un sujet qui méritât d'être relevé par les pompeux vers qu'il rapporte :

Durant le cours de ce prince notable,
Fut mis à mort d'une masse massive,
Un grand géant de grandeur excessive,
Qui surmontoit en hauteur justement,
De douze pieds ceux qui sont maintenant.
Le duc voyant l'horrible créature,
Tant excéder les mètes de nature,
Fit colliger par désir curieux
Des ossements du monstre furieux,

Et pour monstrer tant merveilleux spectacle,

Les enchaîna sous ce grand habitacle.

Je ne sçai si Gulliver a cru forger une idée de hauteur dans les hommes qui n'eût jamais existé, lorsqu'il a décrit son royaume imaginaire; quoi qu'il en soit, les géants de Macédoine et d'Afrique se trouvent comparables à ceux de ce royaume. C'est ce qui doit mettre à l'abri de la critique les sculpteurs ou plutôt les architectes qui ont donné aux statues de saint Christophe une taille de trente, quarante, cinquante pieds, et même davantage, telles qu'on les voit à Paris, à Auxerre et à Rome; et si l'on n'avoit pas d'autre argument contre la légende de ce saint, que l'énormité de sa stature, je vous déclare franchement que je ne crois pas qu'on fùt bien fondé à la combattre. (1) Jean Chaumrau, Histoire de Berry 1566, pages 230 et 231.

Vous voyez, Monsieur, qu'il n'est pas toujours inutile de mettre à part certains traits historiques et singuliers qu'on rencontre en lisant les ouvrages des Saints Pères ou des historiens, soit ecclésiastiques, soit profanes. L'extrait que plusieurs journaux ont donné du livre intitulé: les Chats, m'a aussi rappelé une particularité qui pourroit trouver place dans ce livre, (1) et qui ne convient guère ailleurs. C'est Jean, diacre de Rome, qui nous fait remarquer dans la vie qu'il a écrite de saint Grégoire, pape, premier du nom, qu'il y eut un solitaire de si grande vertu du temps de ce saint pontife, que Dieu lui révéla qu'il joüiroit du même degré de béatitude que ce saint pape. Or, ce solitaire ne possédoit rien au monde qu'une chatte. Vir magnæ virtutis qui nihil in mundo possidebat præter unam cattam quam blanditiis crebrò quasi cohabitatricem in suis gremiis refovebat (2). La grande pauvreté de cet hermite l'empêchoit de comprendre comment il pourroit n'être récompensé qu'à l'égal de saint Grégoire, qui possédoit des biens immenses. Une seconde révélation lui apprit qu'il n'étoit pas si pauvre ni si détaché qu'il le pensoit, puisqu'il avoit pour sa chatte plus d'attachement que saint Grégoire n'en avoit à tous les grands biens dont il joüissoit. Cur audes paupertatem tuam Gregorii divitiis comparare, qui magis illam Cattam quam habes, quotidie palpando, nullique conferendo diligere comprobas quàm ille qui tantas divitias non amando sed contemnendo cunctisque liberaliter largiendo dispergit? Ce trait historique peut servir en même temps d'apologie et de leçon à ceux et celles qui aiment les chats. J'aurois voulu que M. de Moncrif ne l'eût pas oublié.

(1) Histoire des chats, dissertation sur la prééminence des chats, dans la société, sur les autres animaux d'Egypte, sur les distinctions et priviléges dont ils ont joui personnellement; sur le traitement honorable qu'on leur faisoit pendant leur vie, et des monuments et autels qu'on leur dressoit après leur mort, avec plusieurs pièces qui y ont rapport, par Moncrif. Paris, Quillau, 1727-1748; et Amsterdam, 1767, in-8o, fig.

Il y a des exemp. de l'édit. de 1748 qui portent pour titre : Lettres philosophiques sur les chats. Réimprimé aussi dans le tome XII des œuvres du comte de Caylus. (Voir le n° 95 du Catalogue de cette livraison.)

(2) Joan. Diac. Rom. lib. 2. Cap. 60. l'Edition des Bénédictins met Gattam. M. du Cange a mis dans son Glossaire, Cattam.

LE CHANCELIER DU PRAT (1).

La postérité n'a pas toujours usé d'une parfaite équité dans l'opinion qu'elle s'est formée de nos hommes d'État. Des préventions imméritées, acceptées de tout le monde, pèsent encore sur la mémoire de certains personnages, par la seule raison qu'en prêtant leur ministère à l'un de ces coups d'État qui transforment les mœurs d'une nation, ils ont, en vue du bien public, atteint gravement de hauts et vindicatifs intérêts. Les contemporains, à la vérité, ne sont pas toujours les meilleurs juges en pareille matière mais quand une appréciation erronée a reçu la consécration de plusieurs siècles, il est donné à peu de personnes de la réformer. L'erreur trône en souveraine, et pour la déposséder de son usurpation, il faut plus que la passion du vrai; il faut à l'œuvre un intérêt réel, direct et autant dire personnel car l'esprit public fourvoyé ne se détache pas volontiers du crampon de l'erreur : le champ du retour, lui semble fermé, et pour l'y refouler, il faut un peu recourir au compelle intrare de l'Évangile.

M. le marquis du Prat essaie quelque chose de ce genre dans la réhabilitation qu'il entreprend d'une des grandes figures de notre histoire il s'agit du cardinal du Prat, l'un des ascendants de l'auteur, chancelier de France, cardinal-archevêque de Sens, que les pamphlétaires contemporains, et à leur remor

(1) M. le marquis du Prat a publié un Essai sur la Vie d'Antoine du Prat, chancelier de France, archevêque de Sens, cardinal, etc. Versailles, 1854; in-80 x et de 170 pages. Ce volume est en vente à la librairie J. Techener.

que, les historiens du règne de François Ier, ont fort peu ménagé. Au surplus on sait que rien n'égale l'animosité, qu'en notre temps, certains écrivains ont mise à poursuivre la mémoire du roi chevalier lui-même. Des hommes d'un talent incontestable qui, s'ils eussent vécu sous le règne de François Ier, auroient été anoblis et comblés de bienfaits par ce prince, ont pris à tâche de le stigmatiser quoique sa magnanimité eût désarmé les haines contemporaines, et que le jugement unanime des générations éteintes sembla avoir mis à l'abri de toute réaction envieuse. L'amour des institutions libérales devoit-il rendre aveugle au point d'obliger les gens à remplir le rôle de diffamateurs! Deshériter le pays d'une gloire acquise, est-ce là du patriotisme?

A côté de ces haines sauvages, de ces diffamations furibondes, j'aime à relire ce qu'un contemporain ennemi, un écrivain de la Réforme, Sleidan, grand comtempteur des têtes couronnées, publioit à la nouvelle de la mort de ce prince, tant insulté par les gens de lettres de notre époque :

de

<«<La mort du roi François vint mal en poinct aux gens «<lettres et d'estude, car jamais homme n'aima mieux tous les << arts libéraux ny les entretint plus libéralement. Par long usage «<et accoustumance il avoit acquis la cognoissance de maintes « choses. Car en dinant ou souppant il parloit coustumierement « des lettres, voire de grande affection. Il se servit longtemps « pour cela de Jacques Collin, homme docte, fort facond en « langue vulgaire. Pierre Castellan tint après son lieu. Par le « moyen d'iceulx, il estoit instruit de tout ce qui estoit aux « livres des poëtes, historiens, et cosmographiens et par long « usage et récit ordinaire il entendoit et savoit tout ce que Aristote, Théophraste, Pline et semblables ont escrit des « plantes, herbes, animaux, métaux et pierres précieuses. « Souvent aussi il conféroit des mathématiques et choses di«< vines sa table estoit entourée de gens magnifiques et de « tous estats, et pour ce qu'on entamoit propos de diverses « matières il estoit mal aisé que l'un d'eux ne mist quelque

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« chose en avant ce qui estoit permis à chacun, pourvu qu'il <«< fut quelque peu cogneu. Cet exemple et estude du roi ai« guillonna plusieurs à diligemment estudier, afin qu'ils peus<< sent avoir honneur en disputant devant luy. Il estoit estimé « éloquent et grave en sa langue. Il avoit gens par l'Italie et « la Grèce qui cherchoient les escrits des auteurs anciens et « les copioyent. Il ordonna une librairie fort ample et riche « dont plusieurs bons livres sont venus: Castellan en avoit la « charge. » (Sleid. liv. xix an, 1547.)

François Ier, si grand appréciateur du vrai mérite, ne pouvoit pas s'aveugler, comme on l'a dit, sur la valeur de son principal ministre, de celui que durant plus de vingt années au milieu des embarras de tout genre, des difficultés et des complications de toute nature, il maintint sans partage au timon de l'État. On n'a voulu voir dans le chancelier que l'agent aveugle et passionné de la reine-mère Louise de Savoie. Certes je n'accepte pas en son entier le panégyrique que, sous forme d'Essai, M. le marquis du Prat nous donne du cardinal-archevêque de Sens quelques points de cette biographie marquent une trop filiale préoccupation: mais en présence de l'invective et de la calomnie, on comprend, par manière de contre-poids, la complaisance et l'optimisme. Dans cette première ébauche, fruit d'un sentiment pieux, l'auteur aborde sommairement toutes les grandes affaires auxquelles fut mêlé le cardinal; celles. même que la passion lui a le plus reprochées. Ainsi la révocation de la pragmatique et le concordat; la disgrâce de Bourbon et le supplice de Samblançay; la vénalité des offices et les abus de la commandite; l'auteur n'élude aucune difficulté et ne dissimule aucun grief; il ne combat point tous les arguments; il ne répond point à toutes les objections; mais sa bonne foi est évidente, et lorsque sa religion ou sa conviction l'entraîne, le sentiment l'excuse et plaide avec lui une cause jusqu'à ce jour peu équitablement jugée. Au surplus, nous le répétons, cet Essai n'est qu'une introduction à une étude plus approfondie que termine en ce moment l'auteur sur l'administration du

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