XXVIII MADAME LA DUCHESSE DE HANOVRE, SOPHIE, ELECTRICE DE BRUNSWICK, A MADAME DE BRINON. Autographe inédit tiré du British Museum, fonds Egerton. Sans date. Ce m'est une très grande joye, Madame, d'avoir peu contribuer en quelque chose à vostre satisfaction; la récompense ne seroit pas proportionnée, si elle me monstroit un meilleur chemin pour aller en paradis que celuy qui m'a esté monstré par la Providence divine, où il me semble qu'on se doit arrester quand on n'a pas assez d'esprit pour mieux choisir, ny de temps pour lire tout ce qui a esté dict pour et contre. Et je trouve que la tranquillité d'esprit que le bon Dieu m'a donnée sur ce suject est une si grande bénédiction qu'il n'en auroit pas voulu gratifier une personne qu'il n'auroit pas choisie pour estre de ses éleus. David ne souhaita que d'estre portier de la maison de Dieu; je ne prétends point de plus grande charge. Ceux qui sont plus esclairés que moy posséderont peut-estre des lieux plus éminens; car Jésus-Christ dit que dans la maison de son Père il y a plusieurs demeures. Quand vous serez dans le vostre et moy dans le mien, je ne manqueray pas de vous y faire la première visite, et nous y serons apparemment bien d'accord, car il ne s'agira plus de disputes de religion. Et je ne crois pas que le bon Dieu laissera la gloire au diable d'avoir la plus grande et la plus belle cour; ce qui seroit apparemment s'il n'y eust de sauvés que ceux qui sont sous la domination du pape et de son concile, qui n'est pas composé de fort saincts personnages. Aussi ay-je ouï dire que chacun d'eux peut estre damné; mais, quand tous ces damnés viennent ensemble, ce qu'ils trouvent de bon vient de Dieu : ce qui me surprend, n'estant pas accoustumée de le croire. Cela n'empesche pas que je n'approuve que vous y ayez de la consolation; mesme je l'admire, comme je fais de tout ce qui sort de vostre plume, car l'on ne peut mieux exprimer son opinion que vous ne le faites. Je suis faschée, ma chère Madame, d'y respondre si mal; je le feray toujours mieux où il s'agira de vous servir et de tesmoigner l'affection et l'estime que j'ay pour vous. S. E. DE BRONSWIC. XXIX LEIBNIZIUS SCHMIDIO S. D. Ex autographis editis a Veesenmeyer et in publica auctione Dni Libri a Dno Philips emptis denuo inspexit Foucher de Careil. Brunswiga, 17 augusti 1697. Tuis novissimis non rescripseram, quod pro certo haberem me tecum ante nundinas Guelfebyti esse collocuturum. Nam summus Dux, Antonius Ulricus, Domino Abbati Calixto significaverat, ut aliquot ante nundinas diebus et veniret ipse et te secum addu ceret: quod ego suggesseram, ut ea occasione tuum, quod nosti, negotium in hac Aula confici posset. Porro ipse summus Dux miratus est neutrum vestrum advenisse; itaque si qua sunt quæ Dominum Abbatem Calixtum impediunt, autor ego sum ut ipse ad nos excurras, quod, si spes sit Dominum Abbatem Calixtum ante hujus septimanæ exitum esse venturum, eo usque exspectari posset; interea rogo ut me consilii tui certiorem facias. Sed et Dominum Wagnerum in his nundinis me visurum putavi; et si res ejus ita ferunt, poterit etiam ante te huc excurrere. Quod superest, vale et fave. LEIBNIZIUS. XXX MAXIMILIEN, DUC DE BRUNSWICK-LUNEBOURG, Original autographe inédit de la bibliothèque royale de Hanovre. Kreuzenach, le 5 septembre 1697. Comme nous sommes depuis trois semaines en marche, je n'ay peu respondre à l'honneur de la vostre, par laquelle vous me dites la nouvelle du bruit qui court que je suis devenu catholique; ce qui m'a fort surpris, ne sçachant qui puisse avoir inventé de semblables impostures, pour me faire paroistre dupe dans le monde. Cependant, comme vous connoissez à peu près mon inclination, vous me ferez la justice de respondre pour moy à ceux qui se donnent la peine de m s'informer de ma conduite, qu'il est vray que j'aime fort le changement, mais ce n'est pas dans la religion où je le cherche. S'il y auroit des couronnes de reste, ou quelque grand avantage à faire, peut-estre qu'on auroit raison d'avoir de semblables soupçons, puisqu'il ne seroit pas blasmable que je songe à mes affaires le mieux que je puis, et que je cherche les moyens pour me bien establir. Mais ce bruit n'a pour but que la seule religion, et je ne suis pas assez dévot pour donner dans ce panneau sans sçavoir pourquoy ou pour quelle fin. Si vous m'auriez dict que je gagnerois par là escus de revenu, je vous aurois donné toute la raison du monde de croire ces sortes de bruits; mais, cela n'estant point, je ne sçay ce que je vous y dois respondre. Ne sçavez-vous pas que l'intérest et la religion ont tousjours esté de si fidèles compagnons qu'on ne peut pas les séparer? Ainsi, comme vous me parlez de l'un sans toucher l'autre, vous pouvez juger vous-mesme quel fondement peut avoir vostre nouvelle, laquelle ne sera jamais vérifiée sans l'avantage qui me pourroit faire changer de sentiment, que je ne vois pas à l'heure qu'il est. Il faut que celuy qui vous a faict accroire mon changement soit d'une autre opinion que moy. Mais, pour finir mon discours, je vous asseure et vous promets que je vivray autant pauvre luthérien, jusqu'à ce que je puisse devenir riche catholique. Je voudrois bien mander des nouvelles de nostre guerre, mais je ne sçay ce que je vous en dois dire, et, hormis de marche et remarche, il ne se passe rien de remarquable. Il y a quelque temps qu'on a creu le siége d'Eberenbourg, et il y en a qui croyent que cela se fera encore, quoyqu'il m 25 ya fort peu d'apparence. Quoy qu'il en soit, cette entreprise n'est d'aucune conséquence; car, si nous nous en emparons, nous n'avons [qu'] une maison de plus, et cela ne mérite pas d'en faire tant de bruit. Nous avons pourtant l'honneur de pouvoir dire que nous avons passé le Rhin avec un corps de hommes; mais, si l'ennemi, qui n'est qu'à 8 heures esloigné de nous, sera plus fort que nous, nous ne nous vanterons pas si nous le repasserons aussi vite. Je crois que cette campagne sera finie pour nous autres, et qu'elle sera aussi heureuse que toutes les autres. Je trouve la nouvelle que vous me donnez de l'entretien avec le Czar fort jolie, surplus la danse que vous avez faicte avec luy. Je ne doute nullement de vostre contenance que vous avez tenue, et de vostre gravité. C'est dommage qu'il ne soit pas resté quelque temps en vostre compagnie, pour voir la fin de toutes ses extravagances, qu'on n'a pas peu remarquer en si peu de tems. Je finis par vous asseurer que personne ne soit plus Votre très humble, etc. Au dos, de la main de Leibniz : Il nuntio di Colonia ha scritto al Papa haverli confessato il fratello dell' Elettore d'Hanover essere cattolico ma non voleva esser vescovo di Osnabrug, et il fratello l'anch' esso cattolico secretamente. : NUGE. |