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En s'élevant sur un degré supérieur, l'esprit aperçoit deux catégories plus distinctes, qui comprennent toutes choses, savoir le nécessaire et le contingent, l'immuable et le variable, status et motus. Les dix catégories d'Aristote, que l'on regarde comme irréductibles, peuvent se ramener pourtant à ces deux catégories plus élevées, plus générales, plús compréhensives, lesquelles, à leur tour, disparaîtront dans le genre qui à lui seul embrasse tout, savoir le To Tav des Grecs, l'universitas des Latins. 1

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Arrivé là, de degrés en degrés, au haut de l'édifice de l'univers, l'esprit en voit mieux les divisions. Or, il y a quatre espèces de natures: 1.° la nature qui crée et n'est pas créée; 2.o la nature qui est créée et qui crée; 3.o la nature qui est créée et qui ne crée pas; 4. la nature qui n'est pas créée et qui ne crée pas. La première c'est Dieu, c'est le Dieu incréé et créateur, celui qui possède la vie et la répand. La seconde, ce sont les causes premières par lesquelles il accomplit son œuvre. La troisième, c'est la création. La dernière, c'est Dieu encore, c'est le Dieu qui est la fin de toutes choses comme il en est le commencement, et vers qui retourne, sans pourtant se confondre avec lui, la vie universelle échappée de ses mains. 2

1. De divis. nat., lib. I, 23, p. 28.

2. Ibidem, 1, p. 1.

Lib. III, 1, p. 177 et seq.

La pensée sur ses différents degrés, nous révèle donc ce grand tout, cet univers; elle nous révèle à la fois Dieu et le monde, le Créateur et la créature. Si, au point de vue inférieur de l'entendement, il semble difficile d'admettre qu'on puisse embrasser dans un seul ensemble, appelé natura, tout à la fois Dieu et le monde, et faire ainsi de Dieu une partie de cet ensemble, cette objection disparaît à la lumière de la raison pure; car nous voyons alors que Dieu est le principe de tout, et qu'on ne peut le séparer de la multiplicité des phénomènes qu'il a créés, et sans lesquels il ne serait point le Créateur. En lui sont toutes choses, en lui est la substance, l'essence de ces phénomènes innombrables qui composent la nature créée. On peut dire, en un certain sens, qu'il est à la fois le tout et la partie, la collection et la division, le genre et l'espèce, non pas qu'il soit réellement le genre, l'espèce, mais parce que tout cela n'existerait pas sans lui, parce que toutes ces choses sont en lui, par lui, pour lui. Il est le fondement de ce monde et son immuable soutien; essayez de l'en séparer, vous ne le pouvez pas. Ne dites pas qu'il devient par là une partie de cet univers: non, il n'est pas une partie, il n'est pas la première division de cet univers, il en est tout ensemble le commencement, le milieu et la fin1; il le remplit tout entier, il l'enveloppe et il le dépasse.

1. De divis. nat., lib. I, 12, p. 11.

Il est comme l'unité qui, se déroulant dans les nombres, est à la fois en eux et au-dessus d'eux, et qui, enveloppant la pluralité sortie de son sein, la recouvre, la contient, et la rappelle à elle-même. Car, au moment même où nous apercevons Dieu dans le monde, et quand nous le plaçons comme la première division de cette nature universelle, il n'y a pas un de ceux qui croient et qui comprennent, qui ne s'écrie tout à coup, sans hésiter, que cette cause première de l'univers, placée au premier rang dans la division des êtres, est pourtant infiniment élevée au delà de l'être, au delà de la nature, au delà de la sagesse, de la vertu, de la vie, au delà de tout ce qui est accessible à l'intelligence et aux sens, puisque tout cela est produit par elle, soutenu par elle, et infiniment enveloppé par l'immensité de sa nature.1

On ne peut donc, dans le premier regard que jette la raison sur l'ensemble des choses, dans cette première vue, féconde et confuse, on ne peut séparer Dieu de la création. Dieu, ce fondement du monde, le traverse inséparablement pour le soutenir, et s'élève au dessus de lui de toute la hauteur sans mesure de son être sans fin.

1. De divis. nat., lib. III, 1, p. 178, 179 et seq.

CHAPITRE III.

DIEU.

C'est une entreprise effrayante de vouloir parler de Dieu. Il est près de nous et, dès que nous croyons le découvrir, il recule infiniment. Il court à travers le monde, il remplit et anime toutes choses, il nous porte, il nous entoure de tous côtés; mais si nous nous approchons, nous voyons que ce grand courant de la vie épanché à travers le monde vient de lui, mais n'est pas lui; car, tout en se mouvant ainsi dans son œuvre, Dieu demeure immobile; en sorte, qu'il est à la fois présent et infiniment éloigné. Nous sommes sans cesse avertis de son existence, de sa présence; mais il recule toujours jusqu'à l'infini au delà de cet univers, qui nous donne de lui ces continuels avertissements. Comment donc parler de ce grand Dieu caché? et qui pourra le faire sans être obscur? Il n'y a point de mots, dit l'Areopagite, il n'y a point de noms, il n'y a point d'articulations de la voix qui puissent désigner cette cause première, cette cause essentielle de toutes choses. Il faut donc, ou bien se taire et s'en remettre à la simplicité de la foi orthodoxe, ou bien déclarer, avant de commencer, y a deux parties principales dans la théologie, l'une qui affirme, nataparin, disent les Grecs, καταφατική,

qu'il

l'autre

1. De divis. nat., lib. I, 14, p. 15.

qui nie, άоQarin. C'est-ce qu'a fait S. Denys dans la théologie symbolique. '

1

De ces deux théologies, la dernière s'apercevant que Dieu est au delà de ce monde, qu'il en est infiniment distant, le maintient dans ces régions supérieures 2. C'est là sa fonction. Elle empêche que l'esprit fini ne le fasse descendre de ces hauteurs, en croyant le comprendre trop aisément; elle s'oppose à ce que l'infini perde son rang suprême, ce qui arriverait si, en voulant le désigner, le définir, on l'enfermait dans une détermination; elle nie donc qu'il puisse être déterminé; elle nie qu'il soit, c'est-à-dire, qu'il soit accessible à l'intelligence et exprimable par la parole. 3

L'autre partie de la théologie, la théologie affirmative, s'occupe surtout de Dieu en tant qu'il est cause la cause s'exprime dans ce qu'elle produit, et c'est parce qu'elle étudie les effets, que cette théologie peut affirmer quelque chose sur l'Être éternel 4; elle s'occupe du Dieu qui est une cause infinie, tandis que la théologie négative s'occupe du Dieu qui est l'infinie substance. Or, comme elle traite, non pas de la substance, dont le propre est d'être caché, mais de la cause dont la nature est de se révéler au dehors; c'est pour cela que ce Dieu caché, invisible,

1. De divis. nat., lib. I, 14, p. 17.

2. Ibidem, lib. I, 69, p. 72.

3. Ibidem, lib. I, 14, p. 17.

4. Ibidem, loc. cit.

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