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eux, et étoient érigées en lois publiques! Quelle affreuse république, s'il pouvoit jamais s'en former une dans l'univers, toute composée d'impies, et où les hommes ne pussent mériter que par l'impiété le titre de citoyens!

. 8. Nonne cognoscent omnes qui operantur iniquitatem, qui devorant plebem meam sicut escam panis? . 8. Ne verrai-je jamais, dit le Seigneur, rentrer en eux-mêmes ces endurcis à qui le crime ne coûte plus rien, et qui oppriment mon peuple, comme ils mangeroient un morceau de pain.

Une doctrine si monstrueuse, ò mon Dieu, peut-elle séduire des hommes en qui toute raison n'est pas encore éteinte? L'âge, les exemples, les occasions, la foiblesse multiplient tous les jours les prévaricateurs au milieu de votre peuple; ce sontlà les sources funestes de la corruption des hommes. Mais qu'il s'en trouve, grand Dieu, qui opèrent l'iniquité par système et par principe, en qui le crime devient un dogme; et qui, regardant comme une folie et une crédulité, la doctrine sainte qui nous prêche l'innocence et la vertu, ne trouvent de bon sens et de supériorité de raison, que dans celle qui leur fait une leçon continuelle, et comme un devoir même de tous les vices: ô Dieu! dans quel nuage épais et ténébreux permettez-vous qu'un cœur endurci s'enveloppe et se plonge! C'est un châtiment terrible, mais juste, que l'homme qui refuse de vous connoître, ne se connoisse plus lui-même. Encore si son aveuglement se bornoit à lui cacher l'infamie et les horreurs de son ame, nous adorerions en secret vos jugements sur les cœurs impénitents. Mais cet aveuglement lui change en vices les vertus mêmes des autres hommes. Il déchire vos serviteurs, et leur prête tous les crimes dont il se sent coupable lui-même. Il ne peut se persuader qu'il y ait un seul Juste sur la terre, et il tâche de le persuader en secret à ceux qui l'écoutent. Ses dents cruelles s'acharnent sur l'innocence, et voudroient en exterminer même le nom du milieu des hommes. C'est là leur pain de tous les jours, et l'aliment le plus ordinaire et le plus agréable dont se nourrit la noirceur de son impiété et de sa

malice.

. 9. Dominum non invocaverunt, illic trepidaverunt timore ubi non erat timor.

. 9. Ces aveugles n'invoquent pas le nom du Seigneur, mais ils sentiront un jour les effets de sa puissance, lorsque pressés de leurs ennemis, ils trembleront dans les lieux mêmes qui devroient leur inspirer plus de sécurité.

Quelle ressource, grand Dieu! peut-il rester à ces impies dans leurs afflictions? Vous êtes le consolateur des ames affligées; et elles trouvent dans

la soumission aux ordres adorables de votre Providence, dans les biens que votre sagesse sait tirer en leur faveur de leurs maux mêmes, dans les secours de votre grâce, et enfin dans la foi qui leur fait regarder ces souffrances comme la juste expiation de leurs crimes; elles y trouvent un grand adoucissement à leurs peines. Mais l'impie, qui ne vous connoît point, qui ne vous invoque point; qui croit, ou que vous n'êtes point, ou que vous ne vous mêlez point de ce qui le regarde, à qui peut-il avoir recours dans les maux et les contretemps qui l'affligent ? quel être dans l'univers peutil invoquer ? Il se regarde comme le seul arbitre de sa destinée. Il croit ne tenir qu'à lui seul sur la terre, et ne connoît point de liens qui l'attachent à une puissance invisible qui soit au-dessus de lui. Il faut qu'il combatte seul dans ses souffrances contre toutes les créatures qui se soulèvent contre lui. Dans quelle solitude affreuse se trouve alors l'impie, sans Dieu, sans le témoignage de sa conscience, qui achève de l'accabler par les horreurs qu'elle lui offre; sans espérance que ses peines lui seront utiles, puisqu'il ne connoît de bonheur que dans le temps présent; sans secours du côté des hommes; qui peuvent être touchés de ses maux, mais qui ne sauroient y remédier; seul dans l'univers avec lui-même, comme un infortuné qui se voit seul accablé de maux au milieu d'un chaos vide et ténébreux. Où levera-t-il les yeux? à qui tendra-t-il les mains? Il ne lui reste qu'à s'envelopper dans son désespoir, et se dévouer au hasard, divinité monstrueuse, en qui il a aimé mieux, grand Dieu, mettre sa confiance, que dans votre bonté et votre sagesse, et se précipiter sans savoir où il va, ni d'où il vient', dans les ténèbres hideuses de l'incrédulité qui l'environnent. Aussi, grand Dieu, les impies qui font tant d'ostentation de leur fermeté, sont les plus lâches et les plus timides des hommes, dès qu'ils entrevoient seulement les approches de la mort. Le danger le moins sérieux les trouble et les alarme. Comme leur vie est l'unique bien qu'ils connoissent et qu'ils attendent, tout ce qui la menace même de plus loin, leur rapproche un spectre affreux qui les glace. Hommes foibles et insensés, ils craignent pour leurs corps, destinés à la pourriture, et qu'ils ne sauroient toujours conserver, et ils ne craignent pas pour leur ame, à laquelle il ne tient qu'à eux d'assurer la gloire et l'immortalité qui lui est préparée. Ils craignent les maux de la vie présente, qui ne sont que d'un moment, et qui peuvent nous mériter des biens éternels; et ils ne craignent pas des malheurs qui les attendent, et qui ne doivent jamais finir.

. 10. Quoniam Dominus in generatione justa est: consilium inopis consudistis; quoniam Dominus spes ejus est.

. 10. Car le Seigneur n'abandonne pas les Justes. Insensés! lorsque vous avez vu le Juste, vous vous êtes moqués de ce qu'il espéroit au Seigneur.

Mais que la destinée des ames qui vous servent et qui vous aiment, o mon Dieu! est différente ici-bas de celle des impies! La race des Justes a la consolation de vous avoir toujours au milieu d'eux; c'est dans leur cœur que vous versez abondamment les secours les plus puissants de votre grâce. Les jugements de votre justice peuvent les alarmer à la mort: mais vous y êtes présent pour calmer l'orage, et rétablir la tranquillité et la confiance. Ils peuvent être accablés de maux, d'opprobres, de persécutions, de souffrances en cette vie, car la voie de la croix par où vous avez fait passer votre Fils même, est la voie la plus ordinaire par oû vous conduisez ses frères pour les faire arriver à la gloire: mais quelle ressource et quelle consolation ne trouvent-ils pas dans cette e pérance? Ils savent que le temps de la captivité va finir en un instant; qu'ils sortiront triomphants de Babylone, pour jouir d'une éternelle paix dans la nouvelle Jérusalem; que là, il n'y aura plus pour eux ni larmes, ni deuil, ni douleur; et que les tribulations de la vie présente sont bien rapides et bien légères, comparées au poids éternel de gloire qui les attend, et qu'elles-mêmes leur ont préparé. S'il y a quelque ressource solide sur la terre dans les malheurs qui nous arrivent, on ne peut la trouver que dans la religion : sans elle l'homme porte seul tout le poids de son infortune: il porte de plus le poids de son impiété; et rien ne peut le soulager que le fardeau même qui l'accable. Cependant, ô mon Dieu! l'impie insulte aux souffrances de vos serviteurs, quand il voit des Justes opprimés, acсаblés d'adversités ici-bas. Il leur demande avec dérision: Où est donc le Dieu qu'ils servent, et quel secours il donne à ses adorateurs? Il traite d'illusion l'espérance qu'ils ont en vous, o mon Dieu, et les regarde comme insensés de renoncer à tous les plaisirs pour un Dieu, ou qui ne peut les secourir, ou qui est insensible à leurs peines. Mais l'espérance qui est cachée dans le cœur de ces ames fidèles, et qui est pour elles une source féconde de consolations, confond l'impiété de ces reproches. L'aveuglement de l'impie qui les fait, est plus douloureux pour elles, que tous les maux dont vous les affligez, ô mon Dieu! elles souffrent avec soumission et avec joie la perte de leurs biens et de leur fortune; mais une sainte indignation les saisit et les transporte à la vue seule des outrages

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, 11. Quis dabit ex Sion salutare Israel? cùm converterit Dominus captivitatem plebis suæ, exultabit Jacob et lætabitur Israel.

. 11. Vous avez dit en insultant: Qui viendra de Sion porter du secours à Israël? mais laissez venir le terme que Dieu a prescrit à votre injuste domination; c'est alors que Jacob sera dans l'allégresse, qu'lsraël verra succéder la joie à ses larmes.

Que les ennemis de votre nomet de votre doctrine sainte, grand Dieu! cessent donc de nous demander d'un ton impie et ironique : Quand est-ce donc que vous descendrez de la céleste Sion, pour venir récompenser ceux qui renoncent à tout ce qui flatte les passions pour vous plaire? et quand est-ce que vous leur apporterez la gloire et le salut qu'ils attendent? Ces hommes livrés au crime ne trouvent de véritable sagesse qu'à jouir du présent, et regardent comme une folie de se priver de ce qui est certain, et dont il ne tient qu'à nous de jouir, dans l'espérance d'un avenir, ou qui n'est pas, ou dont personne ne peut nous répondre. Insensés! comme si vos promesses, grand Dieu! n'étoient pas plus sûres et plus infaillibles que tout ce que nous voyons de nos yeux; comme si sous un Dieu juste, la même destinée pouvoit être réservée au-delà du tombeau aux Justes et aux impies; comme si la rapidité des biens et des maux présents étoit capable de punir le crime ou de récompenser la vertu; comme si l'homme qui porte en lui une ame immortelle, créée à votre image, n'étoit fait que pour ramper, comme la bête, un petit nombre de jours sur la terre dans la boue, se vautrer comme elle dans les plaisirs des sens, et disparoître pour toujours sans qu'il reste aucune trace dans les livres de l'éternité, ni de lui-même, ni de ce qu'il a été pendant sa vie. Ne sentons-nous pas, ô mon Dieu, que nous sommes faits pour quelque chose de plus grand que tout ce que nous voyons ici-bas? les plaisirs, la gloire, les honneurs accumulés sur nos têtes, peuvent-ils jamais rendre l'homme heureux? Ne porte-t-il pas toujours un vide inséparable de son cœur, au milieu de tout ce qu'il croyoit le devoir remplir? Son ame tout entière n'est-elle pas comme empreinte du desir et de la pensée de l'immortalité? Ne faut-il pas qu'il s'arrache, pour ainsi dire, à lui-même pour se persuader que tout ee qui est en lui, mourra avec lui? Peut-il jamais, à force d'entasser crimes sur crimes, anéantir le sentiment intérieur de sa conscience, qui le force malgré lui à ne pas donner les mêmes noms aux vices et aux vertus, et à distinguer ce qu'il s'efforce de confondre? Est-il parvenu à se persuader que les vertus et les vices sont des chimères auxquelles la crédulité a donné des noms différents pour les réaliser; que l'inceste et le parricide n'ont rien qui les distingue de la piété filiale et de la pudeur, et qu'on doit les regarder comme des êtres aussi fabuleux et aussi peu réels que les dieux infâmes du paganisme, qui en donnèrent l'exemple aux hommes ?

Que les impies, grand Dieu, nourrissent, s'ils peuvent, leur sécurité de ces idées noires et abominables; qu'ils marchent, s'il est possible, d'un pas ferme sur des abîmes si affreux, et dont la raison même est épouvantée; qu'ils insultent aux macérations, aux violences et aux larmes de vos serviteurs; qu'ils regardent comme une peine inutile, tout ce qu'ils souffrent pour vous plaire. Leurs dérisions seront bientôt changées en désespoir. Nous n'avons qu'un moment à attendre; vous allez venir délivrer pour toujours les ames fidèles de la servitude de leur corps, et des peines inséparables de leur exil. Ce peuple choisi, cet Israël séparé de tous les endroits de la terre, chantera éternellement les louanges de votre grâce. La joie, la paix, un bonheur qui ne finira plus, sera son partage; et les impies précipités dans un gouffre de feu, iront enfin expier par des tourments et des remords éternels, par des larmes de fureur et de désespoir, leur impiété et leurs blasphèmes.

PSAUME XIV.

Prière pour ceux qui se destinent à étre les ministres du tabernacle, ou qui le sont dėja, par laquelle ils demandent à Dieu les vertus nécessaires aux fonctions saintes de leur ministère.

. 1. Domine, quis habitabit in tabernaculo tuo? aut quis requiescet in monte sancto tuo?

. 1. Qui sera digne, Seigneur, de demeurer dans votre tabernacle, et de se reposer sur votre montagne sainte?

Grand Dieu! plus je considère devant vous la sainteté que vous exigez de ceux que vous destinez à être les ministres de votre tabernacle, plus je me sens pénétré d'une juste frayeur. Les premiers âges de la foi n'ont tous fourni à votre Eglise, que des prètres et des pasteurs qui s'immoloient eux-mêmes comme des hosties vivantes

pour le salut de leur peuple. Cet esprit de sacerdoce, de sainteté, de charité s'est perpétué, il est vrai, de siècle en siècle. Chaque âge, chaque nation a vu successivement des ministres d'une piété éclatante; et leurs noms sont venus jusqu'à nous avec les vertus qui les rendirent si respectables. Ce même esprit a même paru revivre et se renouveler dans la dépravation de ces derniers temps. La science des lois et des règles canoniques a succédé à l'ignorance des devoirs du ministère, où le malheur des temps avoit laissé nos prédécesseurs. Mais, grand Dieu, plus les lumières croissent, plus on est instruit sur les qualités sublimes qu'exige le sacerdoce, et plus les terreurs augmentent pour ceux qui doivent s'en approcher, ou qui ont été déja marqués de ce caractère sacré et redoutable. Grand Dieu! où trouverez-vous quelqu'un qui soit digne d'entrer dans le sanctuaire terrible, de vous y offrir les vœux des peuples et le sang de votre Fils, et de faire de votre tabernacle saint, et de l'enceinte de vos autels, où les anges ne sont qu'en tremblant, sa demeure ordinaire? où trouverezvous des ministres pour qui le monde soit un lieu d'ennui et de contrainte, et qui ne goûtent de joie et de repos qu'à l'écart et sur la montagne sainte; éloignés des spectacles de la vanité, et uniquement occupés dans la retraite à se remplir à vos pieds de l'esprit et des vérités qu'ils doivent porter à votre peuple?

.2. Qui ingreditur sine macula, et operatur justi

tiam.

. 2. C'est celui qui marche dans l'innocence, et qui remplit tous ses devoirs.

Vous nous les marquez vous-même, grand Dieu, les qualités que vous exigez de ceux que vous appelez à un ministère si saint. Vous voulez que l'entrée en soit innocente, et qu'une vie sans tache et irréprochable nous ait préparés à l'honneur du sacerdoce. Non-seulement vous exigez qu'une réputation déja flétrie par des excès publics ne vienne pas témérairement se mêler parmi vos ministres, et déshonorer dans l'esprit des peuples un caractère qui n'annonce que la pudeur et l'innocence; (quelle confiance en effet pourroient avoir en un ministre de vos autels, des fidèles qui ont été depuis peu témoins de ses dérèglements et de ses scandales?) mais il ne suffit pas même, ô mon Dieu, que notre vie ait été sans reproche aux yeux des hommes, si elle ne l'a pas été devant vous. L'innocence seule des premières années peut nous ouvrir les portes du temple saint, et nous faire asseoir parmi ses ministres. Des mains déja souillées n'ont plus droit de venir toucher et offrir le sang

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des vierges et le pain des anges. Les larmes mêmes de la pénitence, en expiant nos souillures, sembloient encore autrefois laisser un reste d'odeur de mort que l'Eglise ne jugeoit pas à propos d'introduire au milieu des parfums du sanctuaire, et n'effaçoient pas une flétrissure secrète qui paroissoit déshonorer la beauté de votre maison. La rareté de l'innocence en ces jours mauvais a rendu, ô mon Dieu, aux expiations de la pénitence, un droit dont les premiers âges de la foi l'avoient privée. L'Eglise, toujours plus indulgente à mesure que la dépravation des mœurs oblige sa prudence à relâcher de ses règles, mais toujours conduite par votre esprit, dans sa sévérité comme dans sa clémence; l'Eglise se contente dans le choix de ses ministres, qu'un long repentir de leurs fautes ait précédé l'imposition des mains; pourvu que leur énormité, leur durée et leur scandale n'y ajoute pas un caractère ineffaçable d'indignité, qui leur ferme pour toujours l'entrée du sacerdoce. Les motifs qui nous y conduisent doivent être aussi purs, ô mon Dieu, que les mœurs qui nous y préparent. L'intérêt, l'ambition, toutes les vues humaines forment des mercenaires et des intrus qui s'appellent eux-mêmes à l'autel, plus touchés des honneurs, que des fonctions et des devoirs attachés au saint ministère. Ce n'est pas vous, grand Dieu, qu'ils viennent chercher dans le temple; ce n'est pas l'instruction et le salut des peuples que l'Eglise leur confie; ils n'y cherchent qu'un titre qui flatte leur vanité, ou qu'une opulence qui puisse fournir à leur sensualité et à leur mollesse. Le crime de leur entrée souille toujours toute la suite de leur carrière. L'ambition les a donnés à votre Eglise; elle les rend bientôt après au monde, à ses pompes et à ses dérèglements. Ils ont commencé par usurper le saint ministère; ils continuent et finissent par le déshonorer. Comment pourroient-ils opérer la justice dans un état où des desirs injustes et illégitimes les ont placés? Celui-là seul qu'une vocation sainte et pure établit ministre de vos autels, remplit avec fidélité les devoirs de son ministère. Votre grâce, ô mon Dieu, qui l'a chargé de ce fardeau redoutable, lui aide elle-même à le porter.

. 3. Qui loquitur veritatem in corde suo; qui non egit dolum in lingua sud.

. 3. C'est celui qui ale cœur droit et sans déguisement, et qui est toujours sincère dans ses paroles.

La principale vertu que vous exigez de vos ministres, ô mon Dieu, qui sont les dépositaires de la vérité, c'est qu'ils l'aiment et la publient sans crainte. Leur cœur doit être le sanctuaire de la vérité, et comme un fort inaccessible dont la

crainte, l'espérance, les faveurs, les disgrâces temporelles, et tous les efforts humains ne sauroient jamais la bannir. C'est un trésor précieux que vous leur avez confié: c'est à eux à le défendre contre toutes les entreprises de l'erreur, à le transmettre à leurs successeurs aussi pur, aussi brillant, tel enfin qu'ils l'ont reçu de leurs pères; et à le perpétuer sur la terre à travers tous les brouillards et tous les orages qui s'élèvent de siècle en siècle, ou pour l'obscurcir, ou pour l'éteindre. La duplicité, la dissimulation, un lâche silence même tout seul, quand il est temps de parler, souilleroit, profaneroit leur langue consacrée à la vérité. Ils portent avec une noble fierté sur le front cette vérité sainte qu'ils ont dans le cœur; c'est par elle que leurs prédécesseurs ont vaincu le monde; c'est avec elle qu'ils méprisent encore ses efforts impuissants, et qu'ils conservent à votre vérité, ô mon Dieu, toute la gloire de ses anciens triomphes. Ils laissent au prince du monde les artifices, les souplesses, les ménagements, les ruses, le mensonge dont il est le père. Ce sont des armes foibles et méprisables, mais dont il ne peut se passer pour perpétuer ses illusions parmi les hommes : et vous ne leur avez donné pour toutes armes, que le bouclier de la foi, contre lequel tous les traits les plus enflammés de l'erreur viennent s'émousser et s'éteindre; et le glaive de la vérité, avec lequel ils abattent, ils terrassent toute hauteur qui s'élève contre votre science. O mon Dieu! toute la force de vos ministres est dans la vérité: avec elle ils peuvent défier toutes les puissances de la terre, mais dès qu'ils l'abandonnent, ou qu'ils n'osent plus en faire usage, ils ne sont plus que des hommes vils et méprisables; et le monde lui-même sent diminuer son respect pour eux, à mesure qu'il en obtient plus de complaisances lâches aux dépens de la vérité.

. 4. Nec fecit proximo suo malum, et opprobrium non accepit adversus proximos suos.

. 4. C'est celui qui ne fait jamais tort au prochain, et qui ne souffre pas même qu'on en dise du mal.

Après l'amour de la vérité, le zèle de la charité est comme l'ame du sacerdoce. Nous sommes, ô mon Dieu, les vicaires de la charité de votre Fils envers les hommes. Nous sommes chargés de leur distribuer ses bienfaits; c'est-à-dire, les marques les plus tendres et les plus magnifiques de son amour pour eux. Nos fonctions dans leur diversité ne sont que les différentes démarches de la charité, qui regarde comme étrangères sans doute, toutes celles que nous ne faisons pas pour le salut de nos frères. La haine, la jalousie qu'inspire sou

vent la concurrence des talents et des œuvres saintes, le desir secret de se nuire, de se décrier, de se supplanter les uns les autres; voilà, ô mon Dieu, des plaies qui déshonorent tous les jours votre sanctuaire, ce lieu de paix et de charité. Le zèle lui-même, ce fruit de la piété, nous prête souvent des armes contre elle. On décrie en public ceux qu'il faudroit se contenter de reprendre en secret : en gémissant tout haut de leurs vices, on déshonore leur personne. Ce n'est pas là, grand Dieu, cette charité sacerdotale que vous répandez dans le cœur de vos ministres, avec l'onction sainte qui les consacre: ils ne cherchent pas à nuire à leurs frères; ils ne travaillent qu'à les sauver. Les pécheurs leur sont encore plus chers que ceux qui n'ont pas besoin de pénitence. Le seul mal qu'ils voudroient attirer sur leurs tètes, c'est l'infusion de votre esprit, et cette fontaine de larmes qui efface toutes leurs souillures. Ils ne peuvent souffrir la langue empoisonnée qui les déchire en leur présence, et qui publie et exagère l'opprobre de leur dérèglement et de leur conduite. Ils savent qu'il ne faut pas aigrir la plaie, quand on veut guérir le malade. Ils espèrent toujours que votre grâce, ô mon Dieu, les changera en de nouveaux hommes; et dans cette attente, ils respectent en eux d'avance les biens que votre sagesse peut tirer un jour de leurs crimes.

. 5. Ad nihilum deductus est in conspectu ejus malignus; timentes autem Dominum glorificat.

. 5. C'est celui qui n'a que du mépris pour l'impie, pendant qu'il honore ceux qui craignent le Seigneur.

Ce ne sont pas, grand Dieu, des vues humaines qui inspirent à vos ministres ces ménagements charitables pour les pécheurs : ce n'est pas la puissance, l'autorité, l'éclat des titres et des dignités. Quelque élevé que soit l'impie, toute son élévation ne leur paroît qu'un néant et une boue abjecte: il seroit maître de l'univers, qu'ils ne le regarderoient que comme un vil esclave. Ils ne trouvent rien d'estimable, et de digne d'admiration dans les hommes, que les dons de votre grâce, que la justice et l'innocence. Ils rendent aux puissances que vous avez établies, le respect et les hommages extérieurs que les devoirs de la société, et les ordres éternels de votre providence exigent d'eux : mais l'éclat qui les environne ne les éblouit pas, si leur vie déshonore leur rang; si leurs passions sont encore plus éclatantes que leurs places, ils ne leur paroissent que les derniers et les plus méprisables des hommes; ils n'ont que les yeux de la foi pour voir tous les objets et tous les spectacles que

leur offre la figure du monde. Aussi un Juste obscur qui vous craint, qui vous aime, qui ne vit que pour vous, o mon Dieu, est pour eux un spectacle plus grand, plus magnifique que toutes les grandeurs les plus brillantes de la terre, rassemblées en un seul homme. Ils ne voient de réel dans le monde, que la piété, qui seule doit durer plus que le monde même; tout le reste n'est à leurs yeux qu'une ombre qui fuit, et une vapeur empestée, brillante de mille fausses couleurs, mais qui s'élève et se dissipe au même instant. Ils ne connoissent de véritable gloire, que celle qui vient de vous, ô mon Dieu; parce qu'elle demeure éternellement, et que le monde qui ne la donne pas, ne peut aussi nous en priver. Ils découvrent au milieu de toutes ses pompes, et de ses décorations superbes et éclatantes, un monde invisible composé de vos Justes seuls, où règne la paix, la charité, la vérité, l'innocence; où vous opérez tous les jours des prodiges de grâce et de miséricorde; où se passent des événements plus glorieux, et des actions plus héroïques, que toutes celles que les passions tâchent d'immortaliser dans nos histoires. Aussi, grand Dieu, seront-elles écrites de votre doigt même dans les livres de l'éternité; tandis que toutes les révolutions de la terre seront ensevelies dans un éternel oubli avec elle.

. 6. Qui jurat proximo suo, et non decipit, qui pecuniam suam non dedit ad usuram, et munera super innocentem non accepit.

. 6. C'est celui qui garde inviolablement la foi du serment, qui ne prête point à usure, qui ne peut être corrompu par les présents, pour opprimer l'innocent.

Le désintéressement de vos ministres fidèles, ô mon Dieu, est toujours une suite du mépris qu'ils font des choses présentes. Ils s'engagent aux pieds de vos autels par les liens les plus sacrés et les plus solennels, à consacrer au salut de leur prochain leurs talents, leurs veilles, leurs soins, leurs biens, leur vie tout entière; et l'on ne peut jamais leur reprocher de démentir ce saint engagement par des mœurs opposées à leurs promesses. Ils ne trompent pas l'attente des peuples, qui croient toujours trouver des pères, des consolateurs, des guides fidèles dans ceux que votre Eglise a honorés de votre sacerdoce. Le zèle du salut de leurs frères les lie encore plus que la religion du serment qu'ils ont fait lorsqu'ils ont reçu l'imposition des mains, de n'être plus à eux-mêmes, mais uniquement dévoués à l'utilité des fidèles. Ils ne cherchent pas à s'enrichir aux dépens du troupeau. Comment se permettroient-ils des gains sordides et injustes, eux qui se refusent tout pour soulager leurs frères, qui regardent leur propre

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