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nous sommes à ce que nous devrions être; de la sainteté sublime de notre état, aux foiblesses, aux misères, à la pesanteur de toute notre vie, nous frappe, nous humilie, nous effraye. Nous gemiffons fur nos, infidélités paffées; nous formons mille faine tes résolutions, mille projets d'une vie plus férieuse, plus occupée, plus facerdotale;: nous entrons dans les détails qui regardent. toute notre conduite extérieure ; nous examinons les lieux, les tems, les occasions où notre fragilité s'est laissée surprendre; nous rentrons en nous-mêmes pour aller jusqu'à la source du,mal, & découvrir quels font en nous les panchans qui ont aidé aux oc-.. cafions & facilité nos chûtes; nous prépa-. rons de loin les remédes & les précautions. nécessaires pour ne pas être de nouveau fur-.. pris: ainfi, nous rentrons dans nos fonc tions, dans cette sainte milice, munis de nouvelles armes; nous y rentrons avec moins de cette confiance qui précéde toujours les chûtes, mais auffi avec plus de sûreté. Un Pilote, échappé du naufrage, eft moins téméraire; mais inftruit par ses propres malheurs, des écueils où il s'eft brifé, il prend des mesures plus folides & plus sûres pour les éviter. Et ce qui doit encore plus vous consoler, mes Frères, dans ce. faint exercice, & vous faire mieux sentirla prédilection de miféricorde de Dieu fur vous, c'est que les infidélités sont communes parmi ceux qui sont appellés au faintministère, & que ces regrets & ces chan

gemens, que forme en nous une piété tendre & touchée, sont fort rares. La plupart vivent jusques à la fin de leur course comme ils avoient vécu en la commençant; s'ils y changent quelque chose, c'est en empirant; c'est qu'ayant commencé avec quelque apparence de régularité & de zèle, ils continuent bientôt en découvrant toutes les inclinations vicieuses que ces commencemens spécieux avoient cachées, & qui, laffées pour ainsi dire, de se contraindre, s'échappent ensuite avec moins de retenue & plus de scandale. Nous voyons tous les jours dans le monde de simples Fidèles, qui touchés de Dieu, changent de vie, & de grands pécheurs qu'ils étoient, deviennent l'exemple & l'édification d'une ville : mais nous ne voyons point de ces changemens parmi les Prêtres; ce qu'ils font une fois, ils le font toujours: il semble qu'élevés audessus des Anges par nos fonctions, nos premières chûtes capitales comme les leurs, sont sans retour. D'où vient, mes Freres? c'est que l'abus des chofes faintes étant presque toujours une suite infaillible de nos égaremens, nous attire cet anathême de la part de Dieu, & cette malédiction fecrette qui forme dans un Prêtre l'endurcifsement & l'impénitence; c'est une trifte expérience, qui nous a fait gémir plus d'une fois: les peines, les corrections deviennent inutiles à ces ministres infidèles; & nous les voyons avec douleur, fortir de ces retraites forcées que nous leur prescrivons, fans aucun sentiment de piété & de repentir, & plus déterminés que jamais à continuer leurs égaremens & leurs scandales. Aussi quand nous leur impofons cette peine publique, c'est plus pour les couvrir de honte, que pour espérer un changement: pour réparer l'honneur de l'Eglise par une improbation publique & éclatante de leurs scandales publics, nous voulons les punir; nous n'espérons pas de les corriger.

MAis,

II

mes Frères, quand nous aurions REFL été affés heureux pour vivre dans les fonctions du ministère, exemts de ces infidélités journalières inséparables de la foiblesse humaine & de la dissipation même attachée à nos fonctions; quand nous n'aurions pas besoin de venir nous recueillir ici pour en gémir devant Dieu, & prendre des mesures pour lui être désormais plus fidèles : n'éprouvons-nous pas tous les jours que notre première ferveur se relâche; que ce goût tendre de piété s'use & se rallentit par l'usage même des choses saintes; que la sainteté de nos devoirs fait sur nous chaque jour des impressions moins vives; que ce qui nous avoit paru d'abord des obligations indispensables, ne nous paroît plus qu'un état de perfection, où il n'est pas donné à chacun d'atteindre ; & qu'enfin nous ne marchons plus que languissamment dans les voies où nous avions couru d'abord avec un zèle & une célérité si édifiante? Or c'estici, mes Frères, où nous avons puisé les préConf. Tom. II.

C

mices de l'esprit facerdotal; c'estici où nous devons venir les renouveller, les ranimer, quand elles commencent à s'affoiblir : c'est ma feconde Réflexion.

Oui, mes Frères, ce relâchement de piété & de ferveur inévitable aux Miniftres les plus fidèles, est comme une maladie secrette qui nous mine, qui nous desséche, & qui peu à peu conduit au dépérissement. Ce sont de ces maux qui ne se manifestant point par des symptômes visibles & marqués, & affoibliffant néanmoins tous les jours les forces, & effaçant cette première fleur de santé, trouvent difficilement des remédes, & où l'art ne connoît d'autre refsource que de renvoyer à l'air natal de pareilles langueurs. Or c'est dans cette fainte maison, mes Frères, que nous sommes nés dans la cléricature & dans le ministère; c'est ici, pour ainsi dire, l'air natal du Sacerdoce, que nous devons venir respirer, quand nous fentons que nos forces s'affoibliffent, que notre piété languit; que notre zèle se relâche; que tout notre intérieur dérangé nous menace d'un dépérissement entier, Plus nous différons, plus le mal gagne : tout ce qui nous environne dans le monde, loin d'y remédier, l'augmente, & l'aigrit: l'usage lui-même de nos fonctions saintes, loin de nous réveiller de notre affoupiffement, n'est plus qu'une ressource ufée à laquelle nos maux font accoutumés, & qui presque toujours au lieu de les guérir les aggrave; & par le défaut des dispositions &

de cet esprit de piété qui doit les sanctifier, les change en abus, & tourne contre nous ces ressources de falut. Cet état, mes Frères, a ses dangers, & d'autant plus grands, qu'il n'a rien qui nous effraye: nous nous endormons dans cette habitude d'affoiblifsement & de langueur; nous croyons la mort de l'ame encore bien loin de nous; nous nous calmons sur certains desirs d'une vie plus fervente & plus fidèle, qui échappent quelquefois à notre létargie, & qui nous y laissent retomber un moment après. Nous pensons de nous ce que les Apôtres pensoient de Lazare, que notre maladie n'est qu'un sommeil paffager, & que notre falut est en sûreté: Si dormit, falvus erit; Joan.1 mais Jesus-Christ qui nous voit tels que 12. nous sommes, en juge peut-être bien difléremment: Tunc dixit eis manifeste Jesus: La- v. 14. zarus mortuus eft. Ce ne font pas les grands crimes tout seuls, que nous devons le plus craindre; un fonds s de Religion, une éducation fainte, une réputation établie de régularité, le respect pour la fainteté de notre ministère, suffit pour nous préserver de ces chûtes honteuses: ce qu'il y a de dangereux pour nous, c'est de laisser éteindre cette première ferveur, cet esprit de piété si essentiel à nos fonctions; c'est de nous endormir dans une vie toute naturelle, molle, insensible aux choses du Ciel, accompagnée d'une régularité apparente, & deftituée d'efprit & de vie intérieure. Nous n'y voyons point de crime marqué; & nous ne voyons

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