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mépris, il passa à la colère, de la colère à la fureur et de la fureur à une rage sanguinaire. Il rugissait de voir cette poignée de Galiléens, essayant de renverser ses dogmes et sa doctrine. Il était sincèrement Juif et, dans sa sincérité, il défendait sa religion et se croyait obligé de la venger et de la protéger, contre les agissements des nouveaux sectateurs, et, pour mieux y réussir, il emploie la violence et la répression contre ces séducteurs, qui passaient déjà pour des thaumaturges, dont l'ombre elle-même guérissait les malades et dont la parole seule faisait marcher les paralytiques. Pour lui, c'était trop d'insolence et d'imposture. Il se mêle à une troupe qui assomme, à coups de pierre, un jeune homme nommé Etienne, et se fait le gardien des habits de ceux qui procédaient à cette exécution, aussi lâche que sommaire.

La prière de ce nouveau martyr et la voix de son sang, plus puissante que celle d'Abel, montent vers les cieux et obtiennent non pas la vengeance, ou le châtiment, mais la grâce des bourreaux, et alors le gardien des habits est le premier fruit germé de cette semence fécondée par le sang du premier martyr.

Toutefois, cette première exécution capitale ne sastifait pas la rage de Saul; il pénètre dans les maisons, il en tire d'innocentes victimes, des femmes et des enfants, et jette en prison ces nouveaux néophytes.

Non content de ces premiers essais, il se fait délivrer par les princes des prêtres des lettres de pouvoir, et armé de ces pièces judiciaires, il se dirige vers Damas avec une escorte de cavaliers, et les voilà partis avec toute la vitesse de leurs coursiers. La joie est peinte et rayonne sur le visage du chef de cette petite troupe armée; car il se dit : cette fois ils ne m'échapperont pas et nous allons en finir, avec cette secte odieuse du crucifié Jésus.

Ah! pauvres petits chrétiens de Damas, qui vaquez à la prière, dans le silence de vos maisons, confiants et pleins de sécurité, quel ne serait pas votre effroi, s'il vous était donné d'apercevoir cette escouade, armée de lances et d'épées et courant à bride abattue vers vos pacifiques demeures, pour anéantir la religion nouvelle !

Oui, tremblez, car, humainement parlant, vous ne pouvez échapper à des desseins de destruction si habilement combinés. Pharaon, à la tête d'une formidable armée ne courait pas après vos pères, à la sortie d'Egypte, avec plus d'acharnement et de fureur, que ce jeune et fougueux prosélyte du judaïsme ne poursuivait les sectaires du néo-christianisme. Et, cette fois, il n'y a pas une nouvelle mer Rouge pour engloutir la troupe des poursuivants, ni un autre Moyse pour arrêter ou faire reculer ces intrépides cavaliers.

Mais, attendez! le bras de Dieu n'est pas raccourci, et tout à l'heure vous allez voir le prodige qui va se réaliser un cheval de cette troupe tombe et laisse rouler son cavalier dans la poussière. C'était le chef de cette expédition qui était renversé à terre, les yeux fixés vers le ciel qu'il ne pouvait plus voir, car il venait d'être frappé de cécité; mais il entendait une voix distincte et claire qui lui criait : « Saul, Saul, pourquoi me persécutes-tu? » Et le malheureux, terrassé par cet aveuglement subit, encore plus que par sa chute, répond : <<< Qui êtes-vous, Seigneur! » Et la voix céleste se faisant tout à coup harmonieuse lui adresse ces paroles qui résonnent comme une lyre plaintive : « Je suis Jésus de Nazareth que tu persécutes, il t'est dur de regimber contre l'aiguillon. » Et, en un clin d'oeil, le farouche persécuteur, de lion qu'il était, est changé en un agneau plein de douceur, et au lieu de s'écrier, comme le fera plus tard Julien l'Apostat: << Tu as vaincu Ô Galiléen! » il répond : « Eh bien, Seigneur ! que voulez-vous que je fasse ? Ce que je veux, c'est que tu confesses mon nom devant les têtes couronnées et au milieu des supplices de tout genre qui dureront toute ta vie et qui ne finiront que par le martyre aux eaux salviennes; en attendant, va trouver Ananie qui te dira ce qu'il faut faire. »

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Alors, le pauvre vaincu se relève, mais il est obligé de se laisser conduire par les gens de son escorte, car il était complètement aveugle, et il le fut pendant trois jours, et la vue ne lui fut rendue que par un miracle. Voilà, certes, une victoire et une grande victoire remportée par ce Jésus qui sut faire de son persécuteur le plus célèbre de ses prédicateurs. Car, depuis dix-huit siècles, il y en a eu des prédicateurs du

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saint Evangile; mais il y en eut jamais qui égalât saint Paul. Je le salue comme le plus grand de la nation juive. Les contemporains en voulurent faire un Dieu, mais il refusa les honneurs de la divinité; il se contenta de l'auréole d'apôtre, et je l'admire dans son auréole, et le catholicisme tout entier lui a voué une incomparable-admiration. O Juifs! nous ferezvous un crime d'avoir exalté ce foudre d'éloquence!

Ananie, l'homme de Dieu, accueille le loup ravisseur agenouillé devant lui, le baptise et en fait un apôtre, et le plus intrépide des apôtres. Je m'explique que les douze disciples du Galiléen mis en croix deviennent après sa résurrection, manifestée à plus de cinq cents témoins, les défenseurs de sa Divinité et les propagateurs de sa doctrine; ils avaient vécu trois ans dans son intimité; ils en avaient reçu mille et mille témoignages de bonté; mais Paul n'avait aucun motif d'aimer, de bénir et de prêcher ce Jésus condamné par Pilate; il n'avait vu aucun miracle des trois années de sa vie publique, ni surtout celui de sa résurrection.

Comment expliquer que ce Juif, si entiché de son judaïsme, ait consenti à croire à l'Evangile prêché par douze ignorants, et qu'il ait reçu le nouveau baptême ? Jésus, qui avait dit devant Pilate que son royaume n'était pas de ce monde et qui n'avait pas daigné ramasser la couronne de ses ancêtres détrônés, mais qui avait accepté la couronne d'épines tressée par ses bourreaux, venait de se choisir du haut du ciel un ambassadeur pour conquérir plusieurs royaumes terrestres et les soumettre à son divin empire. Il aurait pu le prendre au milieu de Rome, la métropole de tant de villes soumises à sa domination par des conquêtes successives de plusieurs siècles, ou le trouver au milieu de cette Grèce si fertile en rhéteurs et en éloquents orateurs: mais non! C'est ce Juif qui le persécute dans la personne de ses disciples, c'est lui qu'il envoie au milieu des nations pour les conquérir et les soumettre aux saintes lois de l'Evangile, car le vaincu du chemin de Damas dont l'âme fut encore plus terrassée que le corps, après avoir changé son nom de Saul en celui de Paul, devint le Docteur des nations. Il nous reste à voir si le choix fut bon et si le nouvel élu sut remplir sa mission et s'acquitter de ce glorieux mandat.

CHAPITRE IV

PAUL LE PERSECUTEUR DES CHRÉTIENS, DEVIENT LE DOCTEUR DES

NATIONS

Un docteur en Israël était un homme estimé et respecté, et Jésus, nous l'avons vu, leur donna un témoignage de déférence, en se rendant au milieu des docteurs à l'âge de douze ans. Si la qualité de docteur était si grande dans Jérusalem, que dire et penser du titre que les siècles et l'Eglise décernent à saint Paul en le reconnaissant pour le Docteur des nations! Et ici, chers lecteurs, il nous semble que vous ne devez pas voir, avec indifférence, que nous décernons ce titre à l'homme le plus célèbre de votre race, car il est bien justifié, puisque saint Paul a évangélisé les Romains, les Perses, les Indiens, les Sarrasins et toutes les races d'hommes, sans exception, dans l'espace de trente ans, et pourtant il n'était qu'un homme perdu dans la foule, exerçant un art manuel; mais ce tanneur de peaux se montra assez puissant et assez habile pour soumettre, au joug du Christ, tous les empires du monde.

Vous pouvez connaître et lire l'énumération de tous ses périls, de toutes ses douleurs, de toutes ses luttes, de tous les coups qu'il a reçus dans l'exercice de son apostolat, et de toutes les tortures corporelles qu'il eût à endurer; et si, après cette étude, vous le prenez pour un imposteur, je vous demanderai quel était son but en quittant le judaïsme pour suivre un chemin où il ne devait rencontrer que la honte, l'ignominie et la mort au bout? et que dire de sa sollicitude pour toutes les églises du monde : torture morale qui s'attaque à l'âme et qui l'atteint dans tout ce qu'elle a de plus intime et de plus sensible, car c'est un combat intérieur, ce sont des flots tumultueux, c'est un déluge de préoccupations. Souvent une seule maison à notre charge est une source de soucis qui vous empêche de respirer; mais, lui, il avait des cités, des

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nations entières et tous les peuples de l'univers, ce qui ne l'empêchait pas de s'inquiéter des individus en particulier et aussi il s'en plaint en disant : « Qui donc est infirme sans que je le sois moi-même ? Qui donc est scandalisé sans que je brûle ?» Et, tout en portant le poids de l'Eglise répandue dans l'univers, il s'arrogeait encore le droit de souffrir de toutes les souffrances de chaque membre. Est-il étonnant après cela, que, dans notre admiration, nous le portions aux nues et que nous le trouvions supérieur à tous les grands hommes que nous connaissons!

Osez donc, ô Juifs, nous faire un crime d'exalter ce grand Docteur. Il est de votre sang, il devrait être votre orgueil. Ses contemporains en ont voulu en faire un dieu; s'il avait été un séducteur ou un homme plus soucieux de sa gloire que de celle de Dieu, il se serait laissé prendre pour Mercure. Mais il ne l'a pas voulu.

En revanche, le ciel l'a donné à l'admiration de toutes les générations catholiques. Qu'attendez-vous donc, lecteurs juifs, pour unir votre admiration à la nôtre !

Pour notre part, nous nous faisons honneur et gloire d'être les disciples soumis d'un si grand génie, et si nous nous trompons, nous nous trouvons heureux de marcher à la suite de cet apôtre et de prêter l'oreille à ses sublimes leçons, comme nous le verrons plus loin, en répétant quelques-unes de ses paroles. Mais nous ne nous trompons pas, et l'Eglise et ses plus grands Docteurs et bon nombre de saints Pères exaltent Paul, au-dessus des plus éminents prophètes ou écrivains inspirés.

Paul est au-dessus de David, et pourtant ce fut un grand roi, un roi selon le cœur de Dieu; puissant en œuvres et en paroles, puisqu'il a composé des psaumes immortels que l'Eglise répète tous les jours, par la bouche de ses prêtres.

Souvenir admirable! que les Juifs eux-mêmes conservent dans leurs Livres Saints. On sait comment David encore jeune tua le géant Goliath et avant lui les lions du désert. Paul, au lieu de tuer ses ennemis, guérissait les malades. Les psaumes de David respirent la plus profonde humilité. Les épîtres de

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