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noncent par le fait même comme incapables de rien entrepren dre. Si, après cela, on objecte, qu'il est plus facile de se rendre l'anglais familier, on commet une double erreur. Il est constant que presque personne ne s'est encore donné la peine d'étudier l'anglais, c'est-à-dire, qu'à l'heure qu'il est l'on n'acquiert proprement ni l'une ni l'autre langue. Quand l'ignorance et l'apathie nous font négliger les ressources qui nous sont propres, il est très-peu probable que nous irons exploiter celles des autres. En deuxième lieu, on croit généralement qu'il suffit d'échanger quelques propos banals dans la langue anglaise et que tout est bien. Or, il reste tout à apprendre. Les incorrections que l'on ne saurait tolérer en français ne peuvent devenir des qualités dans une autre langue, et on ne contestera pas que non-seulement nos compatriotes ont un accent anglais qui écorche l'oreille, mais qu'ils ne prennent pas le moindre souci de la grammaire et des règles de cette langue. Les étrangers les excusent, parce que ce sont des Canadiens. Disons tout de suite que l'indulgence est réciproque, car sur cent Anglais, Ecossais et Irlandais qui nous entourent, il ne s'en rencontre qu'un petit nombre qui parlent correctement. Ils ne sont pas plus parfaits que d'autres sous ce rapport, soit dit sans blesser personne, dans ce chapitre de vérités. Peu de races respectent moins leur langue que les Anglais, tout en voulant l'imposer à l'univers.

L'avantage que sa langue procure au Canadien-français est incontestable. Elle lui vaut parmi les siens tous les signes maçonniques. L'étude qu'il en fait orne son esprit et quadruple ses facultés. Grâce à cette étude, la langue anglaise ne lui offre que peu de difficultés : il s'en empare assez facilement, et le voilà possédant les deux idiomes les plus répandus sur le globe, le voilà s'abreuvant aux sources de la littérature et de la science des deux plus fortes races des temps modernes. C'est un homme double. Les Anglais n'ont pas cela.

Et ne disons pas que, dans ces conditions, la langue française risque de se voir absorber par l'autre. Qu'on aborde l'anglais après avoir appris le français et l'on ne sera jamais tenté de se priver du secours de l'un ou de l'autre ! Les ignorants seuls nous font du tort en allant cacher leur ineptie sous le couvert d'une autre langue... qu'ils se donnent l'apparence d'avoir apprise!

BENJAMIN SULTE.

POÉSIE

Voici une jolie pièce de vers adressée à notre compatriote M. Louis-H. Fréchette par madame Elisa Frank, mère de M. Félix Frank, l'un des parnassiens du jour les plus en vogue à Paris, à qui notre poëte avait adressé un exemplaire de son dernier ouvrage.

A MONSIEUR LOUIS-H. FRÉCHETTE

Député au Parlement fédéral canadien, auteur de
PELE-MELE, Fantaisies et Souvenirs poétiques.

Les pays sont lointains, mais les cœurs sont tout proches,
Quand ils vibrent à l'unisson!

Je sais, poëte, une chanson

Qu'on peut appeler sans reproches :

C'est la brave chanson que se disent si bien
Les âmes à travers l'espace;

Pour l'entendre, l'oiseau qui passe
Suspend son vol aérien.

C'est le chant fraternel de ces amitiés fortes
Qu'un océan n'arrête pas;

Les autres sont, hélas! des mortes...
Les amis vont du même pas !

Cette chanson que j'ai tant de fois entendue,
Un fils me la redit souvent :

Il en jette la note au vent,
L'œil abimé dans l'étendue !

Aussi, comme un écho, lorsque vole aujourd'hui

Vers son logis fière et légère

Cette chanson qui nous est chère,

L'âme entière palpite en lui.

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Dont le flot, balancé dans son urne trop pleine,

Inonde vaguement de ses pâles éclairs

Un fouillis d'ajoncs d'or qui tremble à chaque haleine,

Avez-vous entendu, — voix d'ange ou de sirène,

Animant tout à coup l'ombre des bois déserts,

D'un rossignol ému la cantate sereine
S'élever lentement dans le calme des airs?

Tout fait silence alors-souffles, soupirs, murmures,
Lyres des soirs que Dieu suspendit aux ramures,
De la brise et des nids colloques enchantés...

Madame, vous avez de l'oiseau solitaire
L'accent victorieux, et chacun doit se taire
Dans le ravissement, sitôt que vous chantez !

Lévis, octobre 1877.

LOUIS-H. FRÉCHETTE.

IMPRESSION

DES OUVRAGES ET DES JOURNAUX

CANADIENS

"Me serait-il permis de formuler un regret, presque une critique? Pourquoi l'impression des ouvrages canadiens n'estelle pas, en général, mieux soignée? Évidemment, vos protes ne sont pas à la hauteur des littérateurs de leur pays Dieu merci, ils ont beau faire, le style reste français et très-français, ce qui est l'important (et vous appartient, à vous, écrivains canadiens); mais les fautes de genre et d'accord abondent dans le texte imprimé. Vous savez cela mieux que moi, puisque vous en gémissez dans un de vos chapitres. Pour des ouvrages destinés à l'exportation, il y a là un sérieux inconvénient, et il faut que les auteurs se résignent corriger eux-mêmes les épreuves typographiques. Je vous parle comme si j'étais du métier. Il n'en est rien cependant..."

(Extrait d'une lettre adressée à M. Benjamin Sulle par M. Charles de Bonnechose, el publiée dans l'Opinion Publique du 22 novembre dernier.)

Certes, il faut en convenir, voilà une leçon bien donnée. Sous une forme polie et presque gracieuse, en termes évidemment ménagés, mais avec toute la franchise qui convient à un ami sincère, M. de Bonnechose signale aux écrivains

canadiens un défaut qui dépare leurs ouvrages: la multitude des fautes typographiques.

En justice, nous pouvons bien dire qu'ils n'ont pas attendu les avertissements pour l'apercevoir et en gémir; mais cela n'a pas suffi pour guérir le mal. Qu'y a-t-il eu de tenté, en effet, jusqu'ici, pour le faire disparaître ? - Presque rien. Il semble même que, dans certains quartiers, au lieu de s'amender sur ce point important, on aille fatalement de mal en pis. Les réclamations qui se sont élevées ça et là parmi nous n'ont suscité presque aucun effort, amené aucune amélioration sensible.

Voilà qu'aujourd'hui une voix étrangère vient à son tour constater le mal; sera-t-elle mieux écoutée? Espérons-le; mais il est permis d'en douter.

Pourtant, nous ne saurions nous le dissimuler à nousmêmes, les ouvrages imprimés au Canada, nos publications périodiques, nos journaux oui, hélas! n'oublions pas de mentionner nos journaux-sont remplis de fautes fautes de genre et d'accord, comme le dit M. de Bonnechose, et, nous ajouterons, sans vouloir en donner l'énumération complète, fautes de ponctuation, fautes d'orthographe, barbarismes, solécismes, fautes de typographie proprement dites, fautes de toute espèce en un mot.

Ouvrez certains livres imprimés ici, jetez les yeux sur certains journaux, qu'y verrez-vous? - Des fautes, toujours et partout des fautes, à chaque page, presque à chaque ligue.

Il semble parfois que, négligeant de lire les épreuves, on a tuot simplement mis en pages et livré à l'impression le premier travail du compositeur.

Il n'y a pas jusqu'à quelques ouvrages destinés aux écoles qui ne présentent, au point de vue de l'impression, le spectacle le plus déplorable, quand ces ouvrages pourtant devraient être sans tache et servir de modèle.

Nous ne disons pas assez nos livres d'école sont, en général, sous le rapport typographique, les plus défectueux de tous; cependant, ce sont à peu près les seuls qui récompensent leurs auteurs; et, chose plus étonnante encore, la deuxième, la troisième édition d'un ouvrage d'une géographie, par exemple, que l'auteur a eu tout le temps de revoir, est aussi imparfaite que la première, si elle n'est pas encore plus négligée.

Voilà qui est vraiment impardonnable.

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