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depuis l'établissement du premier journal en 1622, et aussi en Amérique depuis la première gazette publiée à Boston en 1690, et qui fut supprimée par l'action directe de la législature coloniale, pour avoir mal parlé d'elle et du gouvernement. Il fit ensuite allusion aux premiers journaux publiés en Canada, la Gazette de Québec en 1764 et la Gazette de Montréal en 1780. Cette dernière est en ce moment la doyenne du journalisme canadien. Le premier numéro publié annonçait que l'on s'y abstiendrait de toute discussion des affaires politiques de la province sans la permission du gouvernement. C'était là une abstention extrême dont on ne saurait accuser la presse de notre époque. Depuis ce temps, la presse a fait des progrès extraordinaires. Aujourd'hui l'existence du journal est partout le premier signe de progrès. A peine s'est-il fait quelque défrichement dans la forêt, à peine un village a-t-il commencé de naître, qu'il faut de suite un journal, qui se fait l'organe de la jeune colonie, pour exposer ses besoins et trop souvent aussi pour satisfaire ses passions. L'invention du télégraphe électrique et la fureur d'avoir des nouvelles données, pour bien dire, d'heure en heure, ont grandement changé le caractère de nos journaux; tandis que d'un autre côté la manie, des articles à sensation, le désir d'avoir toujours du nouveau aux dépens même de la sécurité de la vie privée et de l'honneur et du repos des familles, sont loin d'avoir amélioré le ton et la portée morale de nos journaux. Mais malgré tous ses défauts, la presse quotidienne rend d'immenses services à la société. Avec une presse libre, boulevard des libertés populaires et source de toutes les réformes, le progrès social est assuré. La gazette est devenue la littérature, souvent l'unique littérature des masses; elle donne l'empreinte à leurs opinions, elle dirige leurs destinées. On ne saurait s'exagérer la responsabilité qui s'attache à l'exercice d'une aussi grande influence, et tous ceux qui y prennent part d'une manière ou d'une autre, pourraient bien ajouter à leur prière quotidienne, les paroles prononcés par le doyen Stanley, à la célébration Caxtonienne qui s'est faite à l'abbaye de Westminster: "Donnez-nous, ô mon Dieu, le sentiment de ce que vaut la vérité, qu'elle soit bien ou mal reçue! Donnez-nous la franchise, la droiture, le courage, la foi qui fuit les ténèbres et se réjouit dans la lumière."

DISCOURS DU Dr MAY

Le Dr P. S. May, du département de l'instruction publique d'Ontario, félicita le comité d'organisation sur le grand succès de l'exposition. Il craignait bien qu'il ne fût très difficile d'en faire une semblable dans la Province d'Ontario. Il parla aussi des trésors bibliographiques que le Dr Trumbull, d'Hartford, avait exposés. Après avoir fait quelques remarques sur l'enfance et la jeunesse de Caxton, dans lesquelles il s'attacha à montrer l'influence de l'éducation sur la carrière des grands hommes, il en vint à l'établissement de l'imprimerie en Amérique; il parla assez au long de la Bible d'Elliot, exposée par le Dr Trumbull et qui est un des premiers chef-d'œuvre de la typographie américaine en même temps que le plus beau monument des langues sauvages de l'Amérique. Il réitéra, en terminant, ses félicitations sur le succès de cette belle entreprise, succès dont il n'aurait pas eu d'idée s'il n'eût été présent, et qui fait le plus grand honneur non-seulement à la société numismatique, mais à la ville de Montréal et à tout le pays.

JEAN-LOUIS

I

Jean-Louis avait douze ans.

Son père était cultivateur et exploitait une jolie ferme dans une des paroisses du bas du fleuve.

La famille était nombreuse, mais vivait assez à l'aise; seulement il fallait travailler et quelquefois travailler dur.

C'est là ce qui déplaisait à Jean-Louis. Jouer à la balle ou aux billes, courir les bois pour dénicher les oiseaux ou cueillir des fruits, faire la pêche ou la chasse, lui était assez agréable; les messieurs de la ville qui venaient passer leurs vacances sur les bords du fleuve, faisaient tout cela; c'était donc de bon genre. Mais conduire les bœufs ou les chevaux de charrue, soigner les bestiaux, sarcler le jardin ou rechausser les pommes de terre, les choux et les navets, cela ne lui convenait pas le moins du monde.

Il consentait bien, de temps à autre, à mener les chevaux au pâturage, après le travail de la journée- cela lui faisait faire une course assez agréable et peu fatigante. Mais, pour tout le reste, il n'en était point; et il n'y avait que la voix du père, appuyée du sifflement irrésistible d'une baguette de coudrier, qui pût vaincre cette résolution bien arrêtée, ou, pour appeler les choses par leur nom, ce déplorable entêtement.

Et puis, durant la morte saison, est-ce qu'on ne poussait pas la cruauté jusqu'à envoyer Jean-Louis à l'école? A quoi bon l'école? Un honnête homme ne peut-il pas vivre, et vivre heureux, sans savoir lire et sans avoir la tête farcie de grammaire et de géographie, pour ne pas parler de l'arithmétique et du catéchisme?

Travailler le moins possible et jouir le plus qu'on peut, telle était donc la méthode de Jean-Louis. C'est excellent pour les commencements, mais désastreux pour la fin, comme Jean-Louis devait en faire plus tard la triste expérience.

Mes jeunes lecteurs ont déjà dû s'apercevoir, d'après ce que

je viens de dire, que notre héros, avec des dispositions semblables, n'était pas dans la voie qui conduit à la perfection.

J'avoue qu'il était rempli de défauts. Il était paresseux, colère, grossier, querelleur et détestait l'eau et le savon presqu'à l'égal de l'école et du travail. Cet aveu me coûte beaucoup, mais, enfin, il faut bien dire la vérité quand le devoir commande de la dire.

Et ceci m'amène tout naturellement à vous faire remarquer que, parmi tous les défauts qui le déparaient, Jean-Louis avait une qualité, oh! mais une belle qualité: on ne l'avait encore jamais entendu faire un mensonge. Cela vous paraît étonnant, et, pourtant, c'est tel que je vous le dis. Comment cette belle qualité avait-elle pu ne pas être étouffée par tant de vilaines habitudes? Je n'en sais rien, et c'est un secret de la Providence.

Vous avez vu, quelquefois, au milieu d'une touffe de mauvaises herbes, s'élever droite et fière une belle plante, portant une fleur éclatante et parfumée, qui se balance au-dessus de ces herbes malfaisantes comme si elle respirait un air à part ou se nourrissait d'un suc choisi. Ou bien, encore, n'avezvous pas remarqué, dans les bois, le long d'un de ces ruisseaux bourbeux qui ressemblent à une conscience coupable, un tout petit endroit dans l'enfoncement de la rive, où l'eau toujours limpide permet d'apercevoir le sable brillant du fond. C'est un secret de la nature, que l'on peut, d'ailleurs, expliquer assez facilement.

Eh bien, cette qualité, dans l'âme de Jean-Louis, était comme la fleur et l'eau limpide dont je viens de vous parler. Cependant, c'était plus qu'un secret de la nature matérielle, c'était le mystère de la bonté de Dieu, et ces mystères se constatent mais ne s'expliquent pas.

Tout ce qu'on peut en dire, c'est que Dieu est bon, et qu'il est bon même en dépit de notre malice. Il permet que nous conservions toujours, au fond de notre cœur, un endroit sensible par lequel il puisse nous toucher à son heure, et nous ramener dans la bonne voie.

Je vous ai donc dit que Jean-Louis, à l'époque où je l'ai connu, avait douze ans et possédait une foule de défauts, moins celui de ne pas dire la vérité.

Or, Jean-Louis comptait bien ne pas vivre encore très longtemps de la vie qu'il menait. Le propre des paresseux est de ne

jamais s'amuser et d'être mécontents de tout, même de leur oisiveté.

Jean-Louis ne faisait pas exception à la règle générale.

Son père avait essayé tous les moyens de le ramener dans la bonne voie. Rien n'avait réussi. Jean-Louis ne cédait qu'à la force, c'est-à-dire au fouet. Dès que la douleur était passée, il recommençait de plus belle.

La mère avait également mis en œuvre toute sa douceur, toute sa patience; le malheureux enfant n'en continuait pas moins à se conduire à sa guise.

Bref, Jean-Louis était devenu insupportable; il boudait tout le monde, et tout le monde le détestait. Il ne parlait plus que sur ce ton cassant et bourru des gens qui sentent leur tort sans vouloir l'avouer. Ses camarades ne l'appelaient plus que du nom de grognon, ce qui le faisait entrer dans des colères sourdes et prolongées. Il était complétement déclassé.

Enfin, un soir, dégoûté de tout et surtout de lui-même, il descendit sur la grève à la tombée de la nuit, et, suivant la rive du fleuve, il marcha devant lui, sans savoir trop où il allait.

Il quittait toute sa famille, sans lui dire adieu, sans penser aux larmes de sa mère et aux vives inquiétudes que ce départ allait causer. Hélas! Jean-Louis avait déjà le cœur presque fermé à ces douces émotions qui sont à la vie ce que le parfum est à la fleur. Il ne songeait qu'à lui-même; tout ce qui touchait les autres ne lui importait guère.

Il chemina donc tranquillement sur la grève, le long des branches, tant que dura le crépuscule; puis, lorsque la nuit fut tout à fait tombée, et qu'il n'eut plus à craindre d'être reconnu, il remonta vers le grand chemin et continua sa route, allant, comme il le croyait, à la conquête du bonheur et de la liberté.

Cependant, vers neuf heures du soir, pendant que notre héros poursuivait son voyage, on avait commencé, dans sa famille, à concevoir des inquiétudes. Le père de Jean-Louis alla s'informer chez les voisins; mais personne n'avait vu le déserteur. Avec l'aide de quelques amis, et muni d'une lanterne, il parcourut les environs, explora les buissons et les fossés; mais toutes ses recherches furent vaines; et lorsqu'il rentra accablé de fatigue, sur les deux heures du matin, il se laissa tomber sur une chaise, la tête entre les mains, et resta là sans dire un mot, pendant que sa femme, assise près de la table, veillait et pleurait, et jetait de temps en temps un coup d'œil vers la porte, dans

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