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Pour toute cette première partie de l'histoire, M Faillon a donné les plus complets développements. Il aurait pu les mettre sous ce titre Comment on fonde une ville; titre d'autant plus frappant, que cette ville est devenue providentiellement la plus importante du Canada. Quant aux chapitres suivants, ils pour raient être intitulés ainsi : Comment on établit une colonie M. Faillon, dans son troisième volume, nous donne les détails de l'organisation conçue par le ministre Colbert et confiée à son envoyé, M. Talon. Ces renseignements sont pleins d'intérêt, surtout à notre époque, où l'on comprend de nouveau l'importance des colonies, et où l'attention est fixée sur le développement des dernières entreprises faites en Austra lie, en Algérie et dans l'extrême Orient.

En 1659, Louis XIV guidé par les conseils de Colbert, résolut, pour accroître les ressources de son royaume, de faire pros pérer l'industrie au dedans, et l'établissement des colonies au dehors.

Il voulut donc établir à Québec et à Montréal un foyer d'ac tion qui embrassât toute l'Amérique du Nord, et qui l'eût assurée à la France, sans les fautes commises un siècle plus tard.

Il établit d'abord la Compagnie des Indes Occidentales et lui donna une constitution admirable.

Plût à Dieu qu'on y fût resté fidèle! La Nouvelle-France, alors, eût grandi, malgré les difficultés et les attaques de ses puissants voisins. Elle eût, en temps opportun, offert un dé bouché au trop plein de la population et sinon prévenu, du moins atténué l'explosion des passions ardentes qui ont amené les catastrophes de la fin du XVIIIe siècle.

Le ministre envoya au Canada des représentants du souverain. Ces représentants étaient placés au-dessus des autorités locales, plus exposées, peut-être, que les premiers, à céder aux perfides conseils de l'intérêt privé. M. de Courcelles fut nommé gouverneur; M. de Tracy, lieutenant général, et M. Talon, intendant de la colonie.

On trouve de précieux renseignements dans les instructions adressées par le ministre Colbert à M. Talon. L'Intendant est chargé d'abroger les décisions prises par l'ancien gouverneur; il doit réduire la dime au vingt-sixième, d'après les représen tations des habitants; il doit composer le Conseil de membres indépendants et libres de toute autre fonction; il doit rendre au séminaire de Montréal l'administration de la justice et le droit de nommer le gouverneur.

Enfin, il est recommandé à M. Talon de parcourir les maisons de tous les habitants, d'aller même aux pays les plus éloignés, afin de s'enquérir de leurs besoins et des plaintes que l'on peut formuler contre l'administration. En cas de nécessité pressante, il doit leur offrir des secours immédiats.

Après cet exposé, M. Faillon énumère les mesures qui furent prises pour assurer l'accroissement de la colonie.

Il considère 1o l'augmentation de la population, 2o le développement de l'agriculture, 3o l'industrie et le commerce, 4o l'instruction publique, 5o l'organisation des seigneuries, des paroisses et des bourgades.

10 Augmentation de la population.-Le roi résolut d'envoyer au Canada chaque année des centaines de familles, et de leur fournir l'argent nécessaire pour s'établir. De 1661 à 1662,mille colons y avaient été transportés et le gouvernement avait envoyé deux cents mille livres pour leur soutien. On continua avec le même zèle les années suivantes. Les hommes étaient choisis parmi les plus recommandables par leur conduite et leurs sentiments religieux. Ils devaient promettre de s'établir comme cultivateurs. En même temps on y envoyait des jeunes filles, élevées dans les couvents, ou appartenant a des familles nobles. On a conservé les noms de Mdlles de Belleville, de Bélestre, de Laborde, des Granges, de la Bardillière, etc., etc. Elles étaient choisies principalement dans les provinces préservées jusquelà des atteintes de l'hérésie : la Bretagne, la Normandie, la Picardie, l'Ile de France, la Champagne.

Ces jeunes filles, à leur départ de France, étaient confiées à des personnes respectables: Mde Bourdon, femme du secrétaire du Conseil, Malle Etienne, qui fit le voyage du Canada plusieurs fois, ainsi que la sœur Bourgeoys. A leur arrivée, Mde Bourdon les logeait chez elle à Québee et la sœur Bourgeois à Montreal. Il en arriva ainsi plus de mille en dix ans. Elles contractèrent facilement d'heureux mariages. A leur mariage elles recevaient vingt livres. Plus tard on promettait des pensions de 300 livres-1,200 francs de la monnaie actuelle-aux familles de dix enfants et 400 livres -1,600 francs de la monnaie actuelle à celles de douze enfants.

La colonie grandit en peu de temps. En 1640 la population n'était que de 200 personnes; en 1660, de 2,500 personnes; mais dix années après, il y avait 5,000 âmes, et en 1671 près

de 700 enfants étaient nés dans la colonie. Les villes augmentaient en proportion du reste du pays. Ainsi à Montréal on ne comptait que 500 personnes en 1668; en 1672 il y avait près de 1500 âmes, et 1200 âmes dans le district de Québec.

Agriculture. Colbert avait de grandes idées sur l'importance de l'agriculture. Il comprenait que pour établir solidement une colonie, il fallait arriver à la faire subsister du produit de son sol.

C'est pour cela que le Conseil reçut ordre de donner des terres à tous les soldats qui voudraient cultiver, comme aussi des lettres de noblesse aux officiers qui s'adonneraient à l'agriculture de préférence au commerce. Le Conseil fit envoyer des chevaux et des bêtes de trait, qui multiplièrent extraordinairement. Grâces aux soins des officiers établis sur les terres, tels que M. de Chambly, M. de Sorel, M. de Contrecœur, M. de St-Ours, M. de Varenne, M. de la Chesnaye, M. de Repentigny, etc., etc., l'agriculture prit un développement considérable.

Tous les détails étaient fixés avec soin. On donnait à chaque occupant cent arpents de terre, des denrées pour une année et de l'argent: 100 livres aux soldats, 150 aux sergents, 1,000 aux officiers qui faisaient des concessions. Il fallait deux ou trois ans de culture, et une terre en plein rapport était suffisante pour une famille. On mettait deux arpents en culture chaque année. L'occupant, sous peine de perdre sa concession, devait tenir feu et lieu dans l'année, couper les arbres et arracher les souches de plus d'un pied de diamètre. Sans cela, les terres restant boisées auraient causé une humidité préjudiciable aux autres, et offert un repaire aux animaux sauvages.

On obligea les propriétaires d'établir des chemins, de les entretenir, de faire des digues, des chaussées et des ponts suivant le besoin. Les chemins avaient dix-huit pieds dans les terres et trente-six le long des rivières, pour le hâlage des bateaux. Au bout de dix ans, les rives du St-Laurent, du Richelieu, du St-Maurice étaient occupées. Sur le Saint-Laurent, il y avait une étendue de plus de 80 lieues occupée complétement par des habitations, de 3 arpents en 3 arpents de distance; les terres avaient 30 arpents de profondeur. Depuis Montréal jusqu'à Québec, et depuis Québec jusqu'à l'embouchure du Saguenay, on vit bientot s'élever des bourgades de distance en distance.

Développement du commerce et de l'industrie. - Colbert comprit que la nouvelle colonie devait compter sur les ressources du commerce, et en profiter pour établir avec les Sauvages des relations favorables à la paix et à leur instruction religieuse. Mais il fit en sorte que le commerce ne fût pas monopolisé et que les agriculteurs n'abandonnassent pas leurs travaux.

Quant aux richesses du pays, elles étaient d'une exploitation facile. On avait ouvert pour les fourrures trois marchés considérables Tadoussac, Trois-Rivières et la tête de l'ile de Montréal. La pêche fournissait à la fois et pour la subsistance de la colonie et pour le commerce extérieur, donnant à la France la prééminence sur tous les marchés de l'Europe, quant à la vente du poisson salé et des huiles (1).

Les bois servirent dès ce temps-là à construire des vaisseaux pour toute l'Europe. Dès 1667, on construisit des navires de 4 à 500 tonneaux, du meilleur service; on faisait aussi le commerce d'exportation (2).

Il y avait des mines de fer aux Trois-Rivières, des mines de cuivre au lac Supérieur, des mines de plomb, de charbon et d'ardoise.

On put exporter 60,000 boisseaux de blé en 1686, et dans les trente années suivantes, plus de 250,000 boisseaux.

Dès ce temps-là aussi, on établit des manufactures de chaussures, de coiffures, de draps, etc., dans lesquelles on fabriquait presque aussi bien qu'en France.

Le commerce avec les Sauvages développa l'esprit aventureux des colons. Un grand nombe de ceux-ci s'adonnèrent aux exercices de la vie des Sauvages, qu'ils surpassèrent bientôt, grâce à l'esprit de prévoyance et de discipline auquel ne purent jamais se soumettre les enfants de la forêt. Les Canadiens, comme coureurs de bois, chasseurs, guides, interprètes, bucherons, n'eurent pas leurs égaux en Amérique, et ils figurent comme les héros de toutes les légendes de la Nouvelle Angleterre. -A continuer.

(1) Encore aujourd'hui, la France envoie chaque année vers l'embouchure du St-Laurent une flotte de 2,000 vaisseaux, montée par 10,000 pêcheurs, qui font un profit net de plus de dix millions de francs.

(2) Le commerce d'exportation du bois rapporte annuellement encore plus de 30 millions de piastres.

CONSTANTINOPLE ET LE SCHISME D'ORIENT

L'ère sanglante des persécutions finissait. La croix, honnie pendant trois cents ans, brillait sur le diadême des Césars, comme un gage de victoire; des catacombes, de cette ville peuplée de chrétiens et de tombeaux, sortit enfin le successeur de cin quante papes martyrs, et pour la première fois, à la face du soleil, au milieu des splendeurs de la ville éternelle, la majesté de l'empire et la majesté du souverain pontificat se rencontrèrent! Heure unique dans l'histoire. Le sang des martyrs avait emporté les idoles du Panthéon; la puissance toujours victorieuse du peuple-roi s'avouait vaincue, devant cette faiblesse invincible d'une foi nouvelle, et il sembla que la capitale du monde, ce rendez-vous de toutes les gloires, n'était pas assez vaste pour contenir la grandeur si différente et à la fois si illustre de ces deux souverainetés.

Constantin eut assez de génie et de foi pour le comprendre. Assise sur sept collines, comme la ville de Romulus, sous un ciel plus doux que celui d'Italie, baignée par les flots de deux mers qui apportent à ses pieds les richesses de l'univers, s'éle vait l'antique Byzance; ville incomparable par sa position, appelée par la nature à commander à l'Asie et à l'Europe, véritable clef du monde. Constantin lui donna son nom, y transporta le siége de l'empire, en fit une nouvelle Rome, la capitale des cent peuples soumis à sa domination. Telle est la ville fameuse que des nations rivales se disputent comme une proie, à l'heure qu'il est, sur les champs de bataille, et dont le schisme célèbre a tant contribué à accélérer la perte. C'est ce qu'on peut démontrer en feuilletant les pages de sa lamentable his toire.

Malgré la piété dont il avait donné de si éclatants témoigna ges, le premier César chrétien ne sut pas repousser ces titres idolâtriques que l'adulation impie des courtisans avait decernés aux Néron et au Tibère, et qui ne tendaient rien moins qu'à faire un dieu de l'empereur; funeste héritage que ses succes seurs ne recueilleront que pour leur malheur, la ruine de la religion et de l'empire. Pourtant, c'était pour protester contre

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