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histoire de Charles Edouard et son histoire de l'abdication de Charles Quint, qui, louée par Prescott, un grand maître, aura sa place marquée dans les bibliothèques entre les excellents livres de Mignet et de M. Sterling."

Quoiqu'il ait traduit Byron en entier, M. Pichot était surtout l'admirateur passionné de Shakespeare, et pour prouver que tout est dans Shakespeare, il conçut l'idée bizarre de prendre pour épigraphe des vers de cet auteur, pour chacune de ses chroniques mensuelles. Il s'en est tiré jusqu'au bout, et pour lui rendre hommage, ses continuateurs ont choisi, pour la chronique qui annonce son décès, un funèbre passage du poëte anglais C'est très-bien; mais je leur conseille de s'en tenir là. Un tour de force qui dure déjà depuis si longtemps, commence à devenir périlleux.

Québec, 12 juin 1877.

P. C.

PÊLE-MÊLE (')

Voici un joli volume ajouté à la liste de nos ouvrages canadiens. Joli ne s'applique, bien entendu, qu'à la forme extérieure; car la valeur intrinsèque de l'ouvrage mérite une épithète plus caractéristique, qui ressortira de la suite de cette étude.

Les vers sont extrêmement communs, dans ce pays; les poëtes y sont beaucoup plus rares. Tout le monde, cependant, se mêle de versifier; et chacun, en offrant son contingent de lignes mesurées, apporte aussi ses améliorations. C'est ainsi que certains poëtes (?) moins corrects qu'abondants, en sont arrivés à produire, sans le moindre effort apparent, des vers de treize, de quatorze et même de quinze syllabes. Où s'arrêtera cette course désordonnée? Je ne sais pas; mais si l'on doit en juger d'après la vitesse initiale, il n'y a pas de raison pour que cela finisse, à moins que le bon sens du public ne vienne s'en mêler. Cette dernière hypothèse est peut-être encore une illusion; car les critiques qui ont la mission de former le goût littéraire, sont, en général, complètement dépourvus de la compétence nécessaire. Ils jugent, comme je l'ai déjà dit ailleurs, non pas suivant le mérite de l'œuvre, mais d'après les sentiments que leur inspire le nom de l'auteur. Ou bien, s'ils entreprennent ce qu'ils appellent un examen sérieux et raisonné, ils démembrent les phrases, analysent chaque mot sans s'occuper du contexte, tranchent dans les détails sans tenir compte de l'ensemble; bref, ils font un véritable travail d'écolier de sixième et prétendent rendre une sentence sans appel. Malheureusement, et quelqu'inexpliquable que soit ce résultat, ce sont eux qui font et défont les renommées, qui forment et modifient l'opinion de la plupart des lecteurs.

C'est ce qui fait que notre littérature est aujourd'ui inondée d'œuvres incolores et sans aucune valeur, qui prennent le premier rang et refoulent prétentieusement au troisième dessous, les quelques bons écrivains qui font honneur à leur pays et lui

(1) Fantaisies et souvenirs poétiques, par Louis-II. Fréchette, 1 vol. in-12 gr., 274 p.; Montréal, compagnie d'impression et de publication Lovell, 1877.

attirent du dehors des certificats aussi honorables que bien. mérités.

C'est de l'un de ces derniers que j'ai à entretenir aujourd'hui les lecteurs de la Revue.

M. Fréchette n'en est pas à son premier essai, et le livre que nous avons maintenant sous les yeux, a été précédé par beaucoup d'autres productions du même auteur. Mais notre poëte est de ceux qui travaillent, et l'ouvrage qu'il vient de mettre devant le public accuse un grand progrès sur ses devanciers. On peut d'ailleurs se convaincre de ce fait en se reportant aux dates des diverses pièces de ce volume, qui embrasse une période de plus de quinze années.

Pêle-Mêle porte un excellent titre, car il renferme à peu près tous les genres; l'ode, l'élégie, l'idylle, et la simple chanson s'y rencontrent sans se heurter et y vivent même sur un excellent pied d'intimité. On peut donc envisager dans ce livre le talent de M. Fréchette sous tous ses aspects; et il est de fait que si, dans chaque genre, le poëte ne s'élève pas toujours à la même hauteur, il est toujours correct, châtié et harmonieux. Tel est mon avis, et je le crois bon, quoi qu'en disent certains critiques, qui m'ont l'air de prendre les choses de trop loin et de trop haut, pour bien voir ce qui se passe au-dessous de leur sphère lumineuse.

M. Fréchette tient de Lamartine et de Victor Hugo; il attein souvent le vers énergique de celui-ci, et a presque toujours le velouté de celui là.

Mais, comme, en parlant d'un poëte, il vaut mieux citer ses vers que les expliquer, je choisis au hasard quelques strophes de la première pièce du volume, intitulée: Sursum Corda.

Tout à coup, au détour du sentier, sous les branches

D'un buisson dépouillé, j'aperçus, entrouvert,

Un nid, débris informe où quelques plumes blanches
Tourbillonnaient encor sous la bise d'h ver.

Je m'en souviens:-c'était le nid d'une linotte
Que j'avais, un matin du mois de juin dernier,
Surprise, éparpillant sa merveilleuse note
Dans les airs tout remplis d'arôme printanier.

Ce jour-là tout riait; la lande ensoleillée
S'enveloppait au loin de reflets radieux;
Et, sous chaque arbrisseau, l'oreille émerveillée
Entendait bourdonner des bruits mélodieux.

Le soleil était chaud, la brise caressante;

De feuilles et de fleurs les rameaux étaient lourds......
La linotte chantait sa trille éblouissante

Près du berceau de mousse où dormaient ses amours.

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O jeunesse ! tu fuis comme un songe d'aurore.....
Et que retrouve-t-on, quand ton rêve est fini?
Quelques plumes, hélas ! qui frissonnent encore
Aux branches où le cœur avait bâti son nid.

Voilà des vers qui sont non-seulement harmonieux, mais remplis d'émotion et de souffle, pour me servir d'un terme du métier.

Dans la seconde partie de la pièce, le poëte revoit en rêve la lande revêtue encore une fois de la parure éblouissante du printemps, et trouve deux pinsons

...sous le feuillage vert,

Qui tapissaient leur nid avec ces plumes blanches

Dont les lambeaux flottaient naguère au vent d'hiver.

Puis il termine par cette strophe, qui renferme une pensée aussi belle que consolante:

Au découragement n'ouvrons jamais nos portes:

Après les jours de froid viennent les jours de mai;
Et c'est souvent avec ses illusions mortes,

Que le cœur se refait un nid plus parfumé.

Dans sa pièce intitulée Le printemps, le poëte est sous l'empire d'un autre sentiment; mais c'est toujours, cependant, le même pinceau qui saisit la nature physique ou morale dans ses moindros détails, et sait en rendre les nuances les plus délicates:

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Les ruisseaux transparents et frais
Mêleront au chant des forêts

Leur voix si douce;

Et sous les branches qui plieront,
Des bruits d'amour s'envoleront
Des nids de mousse.

Sous les peupliers, vers le soir,
Vous irez souvent vous asseoir,
Rêveuse et lasse,

Humant la brise et ses parfums,
Et dénouant vos cheveux bruns
Au vent qui passe.

Il est difficile de trouver quelque chose de plus frais et de plus harmonieux, si ce n'est peut-être la pièce intitulée La Louisianaise:

Je sais une rive sereine

Qui, sur un frais lit de roseaux,
S'endort au chant de la sirène,
Et s'éveille au chant des oiseaux
Pays de douce nonchalance,
Où toujours le hamac balance
A l'ombre des verts bananiers,

Son heureuse indolence

Aux souffles printaniers.

Je voudrais pouvoir citer toute cette pièce, ainsi que celle des Oiseaux blancs; mais ce serait peut-être sortir des limites que je me suis imposées.

Dans la grande poésie, le poète se sent aussi à l'aise que dans les compositions plus légères.

Lisez cette strophe de l'Ode à Papineau :

Longtemps il contempla la lumière expirante;
Et ceux qui purent voir sa figure mourante,
Que le reflet vermeil de l'Occident baignait,
Crurent-dernier verset d'un immortel poëme-
Voir ce soleil couchant dire un adieu suprême
A cet astre qui s'éteignait!

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