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matrones n'avaient pas encore élévé ce temple à la pudeur, dont les portes se fermaient devant la femme qui deux fois avait offert le sacrifice des fiançailles. Quant aux enfants, la loi ordonnait, si le père mourait sans tester, le partage égal

entre eux.

Tel est le droit des Quirites, jus Quiritium, et nous retrouvons ici la triple base sur laquelle reposait cette société si profondément aristocratique : l'inviolabilité de la propriété, les droits illimités et le caractère religieux du chef de la famille.

Mœurs publiques; patriotisme, esprit religleux, fidélité

aux engagements.

Ces droits de l'autorité paternelle devaient préparer de dociles sujets. Devenu citoyen, le fils reportait du père à l'État son aveugle obéissance. C'est un caractère des petites sociétés, que le patriotisme y soit en raison inverse de l'étendue du territoire, et d'autant plus énergique que la frontière ennemie est plus voisine. L'homme y appartient plus à l'État qu'à la famille. Il est plutôt citoyen qu'il n'est époux ou père; et les affections domestiques passent après l'amour du sol natal et de ses lois. Servir l'État, c'est la première religion des Romains; et dans le songe de Scipion, cette page demichrétienne, l'immortalité n'est promise qu'aux grands citoyens. De là ce respect des plébéiens pour les institutions, même quand elles leur sont contraires; et ces retraites sans pillages, ces révolutions non sanglantes, ce progrès pacifique qui s'opère lentement, pas à pas, et par les voies légales. De là aussi, dans la vie ordinaire, cette soumission aux vieux usages, à la lettre de la loi, qu'il serait sacrilége d'interpréter; cette foi aveugle pour des formules incomprises, et l'autorité si longtemps reconnue des acta legitima, c'est-à-dire de la procédure symbolique, toute en paroles et en cérémonies mystérieuses, à l'aide de laquelle il fallait réclamer ou défendre son droit.

La religion, en plaçant sous la surveillance divine, c'està-dire sous celle des pontifes et des augures patriciens, tous

les actes de la vie, en nourrissant la superstition par la fréquente intervention des dieux, multipliait encore les liens qui attachaient le citoyen à l'État et à ses institutions. Chez les anciens tout tenait à la religion: l'art, les plaisirs, la vie publique et la vie privée, la famille et l'État. Les jeux et les courses se célébraient en l'honneur des dieux. Les chants étaient des hymnes; les danses une prière; la musique, da grossières, mais saintes harmonies. Comme au moyen âge, les drames étaient de pieux mystères, et si les maisons n'avaient que des toits de chaume, la statuaire et l'architecture décoraient, dans la mesure de leurs forces, les temples des dieux.

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Nul peuple, malgré quelques exemples fameux, ne poussa si loin la religion du serment: rien ne se faisait, levée de troupes, partage du butin, procès, jugements, élections, affaires publiques, affaires privées, ventes, contrats, sans qu'on jurât, soit fidélité et obéissance, soit justice et bonne foi. Dans les ventes, l'acquéreur en présence de cinq témoins tous citoyens romains d'âge adulte, mettait dans une balance l'airain, prix de l'achat, et touchant de la main la terre, ou l'esclave, ou le bœuf qu'il achetait, disait: Cela est à moi, selon la loi des Quirites; je l'ai payé de ce cuivre dûment pesé. » Ce droit de vendre ou d'acheter par mancipation (manu capere) sans l'intervention d'un magistral et sans preuve écrite, était un des priviléges des Quirites, et sans doute un de leurs plus anciens usages. Il explique l'importance de cette loi. Ubi lingua nuncupassit, ita jus csto, qui pénétra si avant dans les habitudes des Romains, qu'elle en fit le peuple le plus fidèle à sa parole, mais à la parole littérale, au sens matériel, la bonne foi dût-elle en être blessée, comme aux Fourches Caudines, devant Carthage, à Numance.

Après la guerre l'unique occupation des Romains étail l'agriculture, car le peu d'industrie que Rome avait alors était abandonné aux affranchis et aux étrangers, sauf quelques professions nécessaires à l'armée. Mais l'agriculture n'enrichit pas le petit propriétaire; heureux quand elle le fait vivre, et qu'il n'est pas forcé par l'insuffisance des ré

coltes, d'aller puiser dans la bourse du riche, de recourir à l'assistance fatale de l'usurier. Le débiteur insolvable n'avait pas de pitié à attendre. « Si le débiteur ne paye pas, dit la loi, qu'il soit cité en justice. Si la maladie ou l'âge l'empêchent, qu'on lui fournisse un cheval, mais point de itière. La dette avouée, et le jugement rendu, qu'il ait trente jours de délai. S'il ne satisfait pas encore, le créancier le jettera dans l'ergastulum, lié avec des courroies ou

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des chaînes de quinze livres pesant. Au bout de soixante jours, qu'il soit produit à trois jours de marché, puis vendu au delà du Tibre; et s'il y a plusieurs créanciers, ils pour'ont se partager son corps; qu'ils coupent plus ou moins, beu importe. Cruauté impolitique et dangereuse, parce que la vue d'un cadavre ou l'apparition au forum d'un homme du peuple à demi mort sous les coups, provoquent plus sûrement une révolution que les plus criantes injustices et que la plus dure oppression.

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CARACTÈRE ARISTOCRATIQUE DE LA RÉVOLUTION DE L'AN 510; CONCES-
SIONS AU PEUPLE LOIS DES CONSULS BRUTUS ET VALÉRIUS. GUERRES
ROYALES: CRUAUTÉ DES CRÉANCIERS.-LA DICTATURE (496). - RETRAITE
DU PEUPLE SUR LE MONT SACRÉ; LE TRIBUNAT (493). — LOI AGRAIRE
DE SPURIUS CASSIUS (486). LES FABIUS; DROIT POUR LES TRIBUNS
D'ACCUSER LES CONSULS (476). VOLERO; DROIT POUR LE PEUPLE
DE NOMMER SES TRIBUNS ET DE FAIRE DES PLEBISCITES (471).
GUERRE CONTRE LES VOLSQUES, LES ÈQUES ET LES VÉIENS (493-471),
CORIOLAN. -
QUINCTIUS CAPITOLINUS ET CINCINNATUS.

Caractère aristocratique de la révolution de l'an 510; concessions au peuple; lois des consuls Brutus et Valérius,

Sous les rois, l'aristocratie avait un chef qui pouvait, comme Servius, élever à la vie politique la foule sujette des plébéiens, ou, comme Tarquin, abattre les plus hautes têtes. L'abolition de la royauté délivra les PATRICIENS de ce double danger, et pour en prévenir le retour, ils substituèrent au roi deux consuls ou préteurs, choisis dans leur sein et investis de tous les droits et de tous les insignes de la royauté. moins la couronne et le manteau de pourpre brodé d'or. A la foi ministres et présidents du sénat, administrateurs, juges et généraux, les consuls avaient le souverain pouvoir,

regium imperium, mais seulement pour une année. Dans l'intérieur même de la ville, ils n'avaient que tour à tour pendant un mois les douze licteurs et l'autorité. Enfin, au sortir de charge, ils pouvaient être appelés à rendre compte et être mis en accusation.

Ce gouvernement nouveau était tout entier aux mains des patriciens. Maîtres du sénat, par lequel devaient préalablement passer toutes les propositions faites dans les comices, ils dominaient, par leurs richesses et leurs clients, dans l'assemblée centuriate qu'on venait de rétablir (voy. p. 34). Ils pouvaient même, comme augures, rompre cette assemblée ou annuler ses décisions; et s'ils manquaient de mauvais présages, il leur restait le droit de refuser dans le sénat et dans leur assemblée curiate, d'où les plébéiens étaient exclus, la sanction nécessaire à tous les actes des comices centuriates. C'étaient donc eux, en réalité, qui faisaient les lois, décidaient de la paix et de la guerre, et nommaient à toutes les charges, qu'ils remplissaient toutes. Ils étaient prêtres, augures, juges, et ils cachaient avec soin aux yeux du peuple les formules mystérieuses du culte et du droit. Seuls enfin ils avaient le droit d'images1 qui nourrissait l'orgueil héréditaire des familles; et l'interdiction des mariages entre les deux ordres semblait devoir repousser à jamais le peuple des positions occupées par l'aristocratie.

Mais les PLÉBÉIENS ont pour eux leur nombre, et les patriciens seront forcés de les armer pour résister à Tarquin, aux Èques, aux Volsques, aux Étrusques. Ce concours, il faudra le payer. C'est, en effet, aux centuries militaires qu'on a demandé, comme le voulait Servius, la nomination des deux consuls; c'est l'assemblée centuriate qui fera désormais les lois que le sénat propose et que les curies confirment; c'est elle qui nommera à toutes les charges, qui décidera de la paix ou de la guerre. Une autre mesure acheva d'attacher le peuple à la cause de la révolution. Pour

1. Jus imaginum, c'est-à-dire le droit de placer dans l'atrium de sa maison et de faire porter aux funérailles des membres de la famille, les images ou les bustes de ceux qui avaient géré des magistratures curules, en revêtant ces images des insignes de ces charges.

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