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posa de donner le droit de cité à tous ceux qui n'auraient aucune portion des terres publiques. Sur ces entrefaites les Massaliotes implorèrent l'assistance de Rome contre leurs voisins, et Fulvius partit avec une armée à leur secours. On éloigna aussi Caïus en l'exilant comme proquesteur en Sardaigne, et les habitants de Frégelles ayant voulu arracher par la force ce qui était refusé à leurs prières, leur ville fut prise et détruite. Cette exécution sanglante arrêta pour 35 ans le soulèvement de l'Italie.

Rogations et puissance de Caïus Gracchus (123).

Caïus avait 21 ans à la mort de son frère. Plus impétueux, plus éloquent, d'une ambition peut-être moins pure, il donna à la lutte commencée par Tibérius des proportions plus grandes. Celui-ci n'avait voulu que soulager la misère des pauvres; Caïus prétendit changer toute la constitution. Le sénat, qui l'avait deviné, essaya de le retenir dans sa questure de Sardaigne; mais il n'accepta pas cet exil; et quand on l'accusa devant les censeurs d'avoir violé la loi qui retenait le questeur auprès de son général, il répondit: « J'ai fait douze campagnes, et la loi n'en exige que dix. Dans la province, ce n'est pas mon ambition, mais l'intérêt public qui a réglé ma conduite. Personne ne peut dire qu'il m'a donné un as en présent, ni rien dépensé pour moi. Aussi les ceintures que j'avais emportées de Rome pleines d'argent, je les rapporte vides. D'autres ont rapporté pleines d'argent les amphores qu'ils avaient emportées pleines de vin. » On lui suscita encore d'autres chicanes: on l'accusa d'avoir trempé dans la révolte des Frégellans. C'était le désigner à la faveur des Italiens. Élu tribun pour l'an 123, il proposa aussitôt deux lois : la première, dirigée contre Octavius, portait qu'un citoyen frappé par le peuple de destitution ne pourrait être élevé à aucune charge; la seconde, qu'un magistrat qui aurait banni sans jugement un citoyen serait traduit par-devant le peuple. A la prière de Cornélie il retira la première; mais l'ancien consul Popilius, le persécuteur des amis de son frère, s'exila dès que la seconde eut été votée.

Cette satisfaction accordée aux mânes de son frère, Caïus reprit hautement ses projets en les développant. Nouvelle confirmation de la loi agraire, distributions régulières de blé au prix de cinq sixièmes d'as le boisseau; fourniture gratuite aux soldats sous les drapeaux, des vêtements militaires; établissement de nouveaux impôts à l'entrée des marchandises tirées, pour les besoins des riches, des contrées étrangères. Puis des colonies pour les citoyens pauvres; et, pour ceux qui voulaient du travail, en attendant que la loi agraire leur donnât des terres, construction de greniers publics, de ponts et de grands chemins qu'il traça lui-même à travers l'Italie et qui augmentèrent la valeur des propriétés en donnant plus de facilité pour leur exploitation.

Après avoir gagné par ces innovations populaires l'armée, les tribus rustiques et le petit peuple de Rome, Caïus commença la lutte politique contre les privilégiés. D'abord il fit décréter qu'à l'avenir le sort désignerait l'ordre dans lequel les centuries voteraient. Les dernières pouvaient ainsi être appelées les premières, et la majorité ne dépendait plus du vote des riches. De nouveaux articles ajoutés à la loi Porcia défendirent à tout magistrat de ne jamais rien entreprendre contre un citoyen sans l'ordre du peuple. C'était enlever au sénat la faculté de recourir à la dictature. Un changement bien autrement grave fut celui qui donna aux chevaliers toutes les places de juges réservées jusqu'alors aux sénateurs. Caïus pensait que ce qu'il ôtait au sénat profiterait au peuple et à la liberté, et que les chevaliers reconnaissants l'aideraient dans ses autres desseins. « D'un coup, disait-il, j'ai brisé l'orgueil et la puissance des nobles. » Ceux-ci le savaient et le menaçaient de leur vengeance. Mais, répondit-il, quand vous me tueriez, arracheriez-vous de vos flancs le glaive que j'y ai enfoncé?»

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Caïus croyait avoir raffermi la constitution; pour consoli der l'empire en intéressant à sa cause un peuple nombreux, il proposa de donner aux alliés latins tous les droits des citoyens romains, et aux Italiens celui de suffrage.

Ainsi, aux soldats des vêtements gratuits, aux pauvres des

tribus urbaines, du blé; à ceux des tribus rustiques, des terres; aux Latins, le droit de cité; aux chevaliers, les jugements; c'est-à-dire, les pauvres soulagés, les opprimés défendus et une tentative pour rétablir l'équilibre dans l'État, tels sont les actes de ce tribunat mémorable. Caïus avait donc réalisé ce qu'avaient voulu son frère et son beau-frère, Tibérius et Scipion Emilien. Il semblait plus grand qu'eux, et à le voir sans cesse entouré de magistrats, de soldats, de gens de lettres, d'artistes, d'ambassadeurs, on eût dit un roi dans Rome. Il l'était en effet par la faveur du peuple, par la terreur des nobles, par la reconnaissance des chevaliers et des Italiens; il voulut l'être aussi par l'amour des provinciaux. Le propréteur Fabius avait envoyé d'Espagne des blés extorqués aux habitants; Caïus leur en fit rendre le prix. L'Asie surtout était opprimée par les publicains: il autorisa les habitants de la province à prendre eux-mêmes la ferme de l'impôt qu'ils devaient payer. Les consuls se faisaient assigner des provinces à leur convenance, celles qui prêtaient le plus au pillage ou à l'ambition militaire; il fit décréter qu'elles seraient désignées avant l'élection des consuls, pour que l'intérêt seul de l'État, non celui des élus, fût désormais consulté. Il voulait aussi relever Capoue, Tarente; et, malgré les imprécations prononcées contre ceux qui rebâtiraient Carthage, envoyer une colonie sur ses ruines, afin de bien montrer au monde l'esprit nouveau de libéralité et de grandeur qui allait régner dans les conseils de Rome.

Mort de Caïus (121).

Pour détruire sa popularité, les grands résolurent, durant son second tribunat, de se montrer plus amis du peuple que lui-même. Ils subornèrent un des nouveaux tribuns, Livius Drusus, qui, à chaque proposition de son collègue, en fit une, au nom du sénat, plus libérale. Caïus avait demandé l'établissement de deux colonies, Drusus proposa d'en fonder douze. Il avait donné le droit de cité aux Latins, Livius fit décider qu'aucun soldat latin ne pourrait être battu de verges. Fatigué de cette lutte étrange, Caïus partit pour

conduire 6000 colons romains à Carthage. Cette absence, imprudemment prolongée durant trois mois, laissait le champ libre à Drusus. Lorsque Caïus reparut, sa popularite était ruinée, ses amis menacés, les chevaliers détachés de lui, et l'un de ses plus violents ennemis, Opimius, proposé pour le consulat. Il ne put lui-même obtenir sa réélection à un troisième tribunat.

Le nouveau consul, pour l'irriter et le pousser à quelque acte qui légitimât la violence, ordonna une enquête sur la colonie de Carthage, et parla tout haut de casser ses lois. Il fallait les défendre ou s'attendre à périr. Des deux côtés on se prépara au combat. Opimius, investi de la puissance dictatoriale par la formule consacrée, Caveat consul, fit prendre les armes aux sénateurs, aux chevaliers et à leurs esclaves. Durant la nuit, il occupa en force le Capitole, tandis que Caïus et l'ancien consul Fulvius se retranchaient dans le temple de Diane sur l'Aventin. Sur leur route ceux-ci avaient appelé les esclaves à la liberté; opprimés eux-mêmes, ils n'avaient songé qu'à ce suprême et dernier moment, à d'autres hommes aussi malheureux. Le consul avait des archers crétois et de l'infanterie régulière. La lutte ne pouvait être douteuse. Caïus, poursuivi jusqu'au delà du Tibre, se fit tuer par un esclave, qui se poignarda sur le corps de son maître. Opimius avait promis de payer la tête de l'ancien tribun son pesant d'or. Un ami du consul, Septimuléius, en fit sortir la cervelle, coula du plomb fondu à la place, et se fit payer son double sacrilége. Ce jour-là 3000 partisans de Caïus périrent; ceux qu'on ne tua pas dans l'action furent égorgés en prison. On rasa leurs maisons; on confisqua leurs biens, on défendit à leurs veuves de porter le deuil; on prit même la dot de la femme de Caïus.

Plus tard, le peuple dressa aux Gracques des statues, et éleva des autels aux lieux où ils avaient péri. Longtemps on y fit des sacrifices et des offrandes. Cette tardive reconnaissance consola Cornélie, trop fidèle peut-être à son grand caractère. Retirée dans sa maison du cap Misène, au milieu des envoyés des rois et des lettrés de la Grèce, elle se plaisait à raconter à ses hôtes surpris la vie et la mort de ses

deux fils, sans verser une larme et comme si elle eût parlé de quelque héros des anciens temps. Seulement on l'entendait quelquefois ajouter au récit des exploits de son père l'Africain: « Et les petits-fils de ce grand homme étaient mes enfants. Ils sont tombés dans les temples et les bois sacrés des dieux. Ils ont les tombeaux que leurs vertus méritent, car ils ont sacrifié leur vie au plus noble but, au bonheur du peuple..

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CHAPITRE XVII.

JUGURTHA ET LES CIMBRES (112-101).

RÉACTION ARISTOCRATIQUE; MARIUS.

GUERRE DE JUGURTHA (112-104) :

11

HONTE DES ARMES ROMAINES (111-110).-
ET DE MARIUS (109-104).

COMMANDEMENT DE MÉTELLUS DIVERSES EXPÉDITIONS DES ROMAINS POUR S'ASSURER UNE ROUTE PAR TERRE VERS LA GRÈCE ET L'ESPAGNE (154-114). INVASION DES CIMBRES ET DES TEUTONS DANS LE

NORIQUE, LA GAULE ET L'ESPAGNE (113-102).

BATAILLE DE VERCEIL (101).

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Réaction aristocratique; Marius.

Quand on eut jeté au Tibre les 3000 cadavres, étanché le sang des rues et payé le prix du meurtre, le farouche Opimius, pour éterniser le souvenir de cette odieuse victoire, fit frapper une médaille qui le représenta sous les traits d'Hercule, avec une massue et une couronne triomphale. Ensuite il purifia la ville par des lustrations, et voua un temple à la Concorde; parodie dérisoire du dernier acte de la vie de Camille. Mais Camille n'avait pas égorgé Licinius, il avait fermé l'ère des troubles, Opimius ouvrait celle des proscriptions.

Cependant les grands n'osèrent user trop vite de leur victoire; ils mirent quinze ans à renverser l'œuvre des Gracques. D'abord ils permirent à chacun de vendre son lot, ce qui fit en peu de temps revenir aux riches presque toutes les terres partagées. Puis on garantit aux détenteurs la possession de ce qu'ils avaient encore, à la condition de

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