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CHAPITRE XI.

CONQUÊTES DE ROME ET DE CARTHAGE ENTRE
LES DEUX GUERRES PUNIQUES (241-219).

ORGANISATION DE LA SICILE EN PROVINCE; ACQUISITION DE LA SARDAIGNE ET DE LA CORSE. GUERRE EN ILLYRIE (229-219); EN CISALPINE (225); EN ISTRIE (219). GUERRE DES MERCENAIRES (241-238). · AMILCAR; ASDRŮDAL; ANNIBAL; CONQUÊTE DE L'ESPAGNE (238-219).

Organisation de la Sicile en province; acquisition de la Sardaigne et de la Corse.

La première guerre punique avait coûté à Rome 700 galères, et diminué de près de moitié sa population militaire. Mais la formation de deux nouvelles tribus, Vélina et Quirina, combla les vides de la population, et Rome se retrouva aussitôt prête pour de nouveaux travaux. Carthage avait perdu non-seulement la Sicile, mais l'empire de la mer: c'était trop de honte pour qu'elle s'y résignât longtemps; la paix qui venait d'être signée n'était donc qu'une trêve. Le sénat de Rome le comprit, et il employa les 23 années qu'elle dura à fortifier sa position en Italie, en occupant tous les points d'où la péninsule pouvait être menacée, la Sicile, la Corse, la Sardaigne, la Cisalpine et l'Illyrie.

La Sicile fut déclarée province romaine. Lutatius en désarma tous les habitants, fit la part du domaine public, et ne rendit à 200 villes leur territoire qu'à la condition de payer un tribut fixé chaque année par les censeurs romains, et la dîme de tous les produits du sol. Chaque année aussi un préteur fut envoyé dans la nouvelle province avec un pouvoir absolu, duquel on ne put appeler qu'après les faits accomplis. Fidèle cependant à sa maxime de ne faire jamais peser sur tous un joug égal, le sénat accorda des priviléges a quelques villes. Ainsi Panorme, Égeste, Centoripa, Halæsa, Halycia restèrent libres et exemptes du tribut, mais astreintes au service militaire : la petite république de Tauroménium et celle des Mamertins furent indépendantes comme l'était le royaume de Syracuse: plus tard il y eut aussi des colonies.

Les deux îles de Corse et de Sardaigne ne furent acquises qu'au prix d'une odieuse trahison. A la nouvelle de la révolte des mercenaires en Afrique, ceux de Sardaigne avaient massacré leurs chefs et appelé les Romains, qui menacèrent Carthage de la guerre si elle ne payait 1200 talents et ne cédait la Sardaigne; mais alors il fallut conquérir les Sardes. Le sénat y employa huit années. La Corse partagea le sort de l'île voisine. Pour administrer les deux nouvelles provinces, le nombre des préteurs fut porté à quatre deux, le prætor urbanus et le prætor peregrinus, restèrent à Rome; les deux autres furent chargés de gouverner l'un la Sicile, l'autre la Sardaigne et la Corse (227).

Guerre en Illyrie (229-219); en Cisalpine (225);
en Istrie (219).

L'Adriatique était infestée de pirates illyriens. Sur les plaintes qui s'élevaient de toutes parts, le sénat envoya des ambassadeurs à la veuve de leur dernier roi, Teuta, qui gouvernait au nom de son fils Pinéus. Elle répondit en faisant égorger deux députés qui lui avaient trop fièrement parlé. Aussitôt 200 vaisseaux et 20 000 légionnaires avec les deux consuls furent dirigés contre les Illyriens (229). Corcyre leur fut livrée par Démétrius de Pharos, chef illyrien, dont les intrigues favorisèrent leur succès. Aucune place ne put tenir devant eux; et Teuta, effrayée, accorda tout ce qu'on voulut: un tribut, la cession d'une grande partie de l'Illyrie et la promesse de ne pas mettre en mer au delà du Lissus plus de deux navires, encore seraient-ils désarmés (228). Les villes grecques soumises par les Illyriens, Corcyre et Apollonie, furent rétablies dans leur pleine indépendance. Une révolte du roi Pinéus et de Démétrius, à qui les Romains avaient donné l'île de Pharos, ne fit qu'appesantir le joug sur les Illyriens (229). Rome avait donc acquis sur le continent grec de bons ports et une province, poste avancé qui couvrit l'Italie et menaça la Macédoine.

Dans la Cisalpine, deux chefs boïes, soutenus de toute la jeunesse du pays, voulurent, en 238, entraîner leur peu

ple dans une guerre contre Rome, et appelèrent quelques tribus des Alpes qu'ils lancèrent sur Ariminum. Mais les partisans de la paix l'emportèrent; les deux chefs furent massacrés, leurs auxiliaires chassés, et le calme était rétabli avant que les légions fussent arrivées sur la frontière. Les expéditions de Sardaigne et d'Illyrie n'étaient pas encore commencées; les Gaulois semblaient intimidés et Carthage abattue; le sénat, pour la première fois depuis Numa, ferma le temple de Janus. Presque aussitôt des troubles éclatèrent de toutes parts. Le tribun Flaminius avait proposé le partage des terres du pays Sénon le long des frontières des Boïes. Ceux-ci s'effrayèrent à l'idée d'avoir les Romains pour voisins; ils s'unirent aux Insubres, et appelèrent de la Transalpine une formidable armée. Heureusement les Cénomans et les Venètes trahirent la cause commune. Leur diversion força les confédérés à laisser une partie de leurs forces à in défense de leurs foyers; le reste, 50000 fantassins et 20 000 chevaux, prit la route de Rome.

L'effroi fut au comble dans la ville; les livres sibyllins consultés demandèrent le sacrifice de deux Gaulois; on les enterra vivants au milieu du Forum Boarium. Puis on déclara qu'il y avait tumulte; et tous, jusqu'aux prêtres, s'armèrent 150 000 hommes furent échelonnés en avant de Rome; et l'on tint en réserve 620 000 soldats. L'Italie entière s'était levée pour défendre sa nouvelle capitale et repousser les barbares. Ils arrivèrent jusqu'à trois journées de Rome. Mais cernés entre deux armées, auprès du cap Télamone, ils laissèrent 40 000 des leurs sur le champ de bataille (225).

Le sénat, décidé à délivrer l'Italie de pareilles terreurs, renvoya, l'année suivante, les deux consuls dans la Cisalpine pour en commencer la conquête. Les Anamans, les Boïes et les Lingons donnèrent des otages et remirent aux Romains Mutina (Modène), Clastidium (Chiasleggo), et Tannetum (Taneto), qui furent occupées par de fortes garnisons. La Cispadane semblait domptée. En 223, Flaminius et Furius franchirent le Pô pour soumettre la Transpadane. Mais, reçus vigoureusement par les Insubres, ils furent

heureux d'accepter un traité qui leur permit de se retirer sans combat. Ils gagnèrent le pays des Cénomans; et, quand, après quelques jours de repos et d'abondance, ils eurent refait leurs troupes, oubliant le traité, ils rentrèrent par 1 pied des Alpes sur le territoire insubrien. Ils trouvèrent en face d'eux 50000 hommes qui étaient accourus pour venger cette perfidie. Les Insubres perdirent 8000 morts. et 16 000 prisonniers. Ils demandèrent la paix; mais le sénat ne les jugea pas assez affaiblis et renvoya contre eux, au printemps, Cornélius Scipion et Marcellus. Des Gésates ou auxiliaires gaulois étaient venus, au nombre de 30 000, des bords du Rhône au secours des Insubres. Leur roi Virdumar fut tué par Marcellus en combat singulier. Dans le même temps, Scipion prenait Milan. Les Insubres partout vaincus se remirent à la discrétion du sénat qui leur fit payer une forte indemnité, et confisqua une partie de leur territoire pour y établir des colonies (222). Marcellus rentra dans Rome en triomphe : il rapportait les troisièmes dépouilles opimes.

Le sénat envoya à Crémone et à Plaisance, en 218, deux colonies, chacune de 6000 familles romaines, pour garder la ligne du Pô, que défendaient déjà Tannetum, Clastidium et Mutina. Une voie militaire commencée par le consul Æmilius reliait ces postes avancés à la grande place d'Ariminum. Ainsi la domination romaine s'approchait des Alpes. En 221, les Romains avaient aussi occupé l'Istrie : là, ils étaient maîtres d'une des portes de l'Italie et ils s'établissaient au nord de la Macédoine, qu'ils menaçaient déjà du côté de l'Illyrie. Dans son infatigable activité, le sénat portait ses regards au delà même de la Grèce; il avait, après la première guerre punique, renouvelé l'alliance avec le roi d'Égypte, et il fut un instant question de lui envoyer des troupes auxiliaires contre Antiochus de Syrie.

Guerre des Mercenaires (241-238).

Depuis la fin de la première guerre punique, Carthage avait eu une guerre civile et une guerre étrangère. Ses mer

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cenaires qu'elle ne pouvait plus payer s'étaient révoltés sous la conduite du Campanien Spendius et de l'Africain Mathos. Ses sujets qu'elle opprimait se réunirent aux insurgés. Utique et Hippone-Zaryte, qui d'abord avaient hésité, finirent par massacrer les soldats que Carthage tenait dans leurs murs. On en fit autant en Sardaigne et en Corse. Hannon, envoyé dans ces îles, fut saisi par ses troupes, qui le mirent en croix, et les Romains, profitant de la détresse de leur rivale, lui prirent deux îles, et la menacèrent, en outre, de la guerre, si elle n'ajoutait au tribut stipulé 1200 talents euboïques. Cependant, les Carthaginois étant serrés de près dans leur ville, le parti de la maison Barca, celui de la guerre, reprit le dessus, et Amilcar eut le commandement des troupes. Il commença par gagner les Numides; dès lors les vivres manquèrent aux mercenaires. Pour empêcher la désertion et rendre tout rapprochement impossible, les deux chefs firent massacrer tous les captifs, au nombre de 700, et déclarèrent « que tout prisonnier carthaginois périrait dans les supplices, que tout allié de Carthage serait renvoyé les mains coupées.» Alors commencèrent d'épouvantables représailles. Amilcar fit jeter aux bêtes tous les mercenaires qu'il prit. Carthage reçut des secours d'Hiéron et même de Rome, qui commençaient à craindre la victoire des mercenaires. Les Barcas et les Hannon, réconciliés par le danger, agirent de concert. Amilcar parvint à enfermer une des deux armées ennemies dans le défilé de la Hache, où ils se trouvèrent réduits par la famine à la nécessité de se manger les uns les autres. Les prisonniers et les esclaves y passèrent d'abord; mais quand cette ressource manqua, il fallut bien que Spendius, Autariate et les autres chefs, menacés par la multitude, demandassent un sauf-conduit pour aller trouver Amilcar. Celui-ci ne le refusa point, et convint avec eux que, sauf 10 hommes à son choix, il renverrait tous les autres, en leur laissant à chacun an habit. Le traité fait, Almicar dit aux envoyés : « Vous êtes des dix, » et il les retint. Les mercenaires étaient si bien enveloppés, que, de 40 000, pas un seul n'échappa. L'autre armée ne fut pas plus heureuse; Amilcar l'extermina dans une grande bataille, et son chef Mathos, amené dans

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