Obrazy na stronie
PDF
ePub

Cet espoir me confole il mêle quelque joie
Aux horreurs de la mort où mon ame eft en proie.
Je la fens ... elle vient... fonge à Sémiramis,

Ne hai point fa mémoire : ô mon fils, mon cher fils...
C'en eft fait....

OROES.

La lumière à fes yeux est ravie.
Secourez Ninias, prenez soin de sa vie.

Par ce terrible exemple, apprenez tous, du moins
Que les crimes fecrets ont les Dieux pour témoins.
Plus le coupable eft grand, plus grand est le fupplice.
Rois, tremblez fur le trône, & craignez leur justice.

Fin du cinquiéme & dernier acte.

ORESTE,

ORES T E,

TRAGÉD I E.

Telle qu'on la joue aujourd'hui fur le théâtre du Roi à Paris.

Tom. III. & du Théâtre le fecond.

Oo

E PITRE

A SON ALTESSE SERENISSIME MADAME LA DUCHESSE

DU MA IN E.

MADAME,

[ocr errors]

Ous avez vû paffer ce fiécle admirable, à la gloire duquel vous avez tant contribué par votre goût & par vos exemples; ce fiécle qui fert de modèle au notre en tant de chofes, & peut-être de reproche, comme il en fervira à tous les âges. C'est dans ces tems illuftres que les Condés vos ayeux, couverts de tant de lauriers, cultivaient & encourageaient les arts; où un Boffuet immortalifait les héros, & inftruifait les Rois; où un Fénélon, le fecond des hommes dans l'éloquence, & le premier dans l'art de rendre la vertu aimable, enfeignait avec tant de charmes la juftice & l'humanité; où les Racines, les Defpréaux préfidaient aux belleslettres, Lully à la mufique, le Brun à la peinture. Tous ces Madame, furent accueillis furtout dans votre palais. Je me fouviendrai toûjours que prefque au fortir de l'enfance j'eus le bonheur d'y entendre quelquefois un homme, dans qui l'érudition la plus profonde n'avait point éteint le génie, & qui cultiva l'efprit de Monfeigneur le Duc de Bourgogne, ainfi que le votre & celui de Mr. le Duc du Maine; travaux heureux, dans lefquels il fut fi puiffamment fecondé nature. Il prenait quelquefois devant V. A. S. un Sophocle, un Euripide; il traduifait fur le champ en Français une de leurs tragédies. L'admiration, l'entoufiafme dont il était faifi, lui infpirait des expreffions qui répondaient à la mâle & harmonieuse énergie des vers Grecs, autant qu'il eft poffible

[ocr errors]

par

la

EPITRE A MAD. LA DUCH. DU MAINE. 291

d'en approcher dans la profe d'une langue à peine tirée de la barbarie, & qui polie par tant de grands auteurs, manque encor pourtant de précifion, de force & d'abondance. Ôn fait qu'il eft impoffible de faire paffer dans aucune langue moderne la valeur des expreffions Grecques; elles peignent d'un trait ce qui exige trop de paroles chez tous les autres peuples. Un seul terme y fuffit, pour représenter ou une montagne toute couverte d'arbres chargés de feuilles, ou un Dieu qui lance au loin fes traits, ou les fommets des rochers frapés fouvent de la foudre. Non-feulement cette langue avait l'avantage de remplir d'un mot l'imagination; mais chaque terme, comme on fait, avait une mélodie marquée, & charmait l'oreille, tandis qu'il étalait à l'efprit de grandes peintures. Voilà pourquoi toute traduction d'un poëte Grec eft toûjours faible, féche & indigente. C'eft du caillou & de la brique, avec quoi on veut imiter des palais de porphyre. Cependant Mr. de Maléfieu, par des efforts que produifait un entoufiafme fubit, & par un récit véhément, femblait suppléer à la pauvreté de la langue, & mettre dans fa déclamation toute l'ame des grands hommes d'Athènes. Permettez - moi, Madame, de rappeller ici ce qu'il penfait de ce peuple inventeur, ingénieux & fenfible, qui enfeigna tout aux Romains fes vainqueurs, & qui longtems après fa ruine & celle de l'Empire Romain, a fervi encor à tirer l'Europe moderne de fa groffière ignorance.

Il connaiffait Athènes mieux qu'aujourd'hui quelques voyageurs ne connaiffent Rome après l'avoir vûe. Ce nombre prodigieux de ftatues des plus grands maîtres, ces colomnes qui ornaient les marchés publics, ces monumens de génie & de grandeur, ce théâtre fuperbe & immense, bâti dans une grande place, entre la ville & la citadelle, où les ouvrages des Sophocles & des Euripides étaient écoutés par les Périclès & par les Socrates, & où de jeunes gens n'affiftaient pas debout & en tumulte; en un mot, tout ce que les Athéniens avaient fait pour les arts en tous les genres, était présent à fon efprit. Il était bien loin de penfer comme ces hommes ridiculement auftères, & ces faux politiques, qui blâment encor les Athéniens d'avoir été trop fomptueux dans leurs

jeux publics, & qui ne favent pas que cette magnificence même enrichiffait Athènes, en attirant dans fon fein une foule d'étrangers, qui venaient l'admirer & prendre chez elle des leçons de vertu & d'éloquence.

Vous engageâtes, Madame, cet homme d'un efprit presque univerfel, à traduire avec une fidélité pleine d'élégance & de force l'Iphigénie en Tauride d'Euripide. On la représenta dans une fête qu'il eut l'honneur de donner à V. A. S., fête digne de celle qui la recevait, & de celui qui en faifait les honneurs; vous y repréfentiez Iphigénie. Je fus témoin de ce fpectacle; je n'avais alors nulle habitude de notre théâtre Français; il ne m'entra pas dans la tête qu'on pût mêler de la galanterie dans ce fujet tragique ; je me livrai aux mœurs & aux coutumes de la Grèce, d'autant plus aifément, qu'à peine j'en connaisfais d'autres ; j'admirai l'antique dans toute fa noble fimplicité. Ce fut là ce qui me donna la première idée de faire la tragédie d'Edipe, fans même avoir lû celle de Corneille. Je commençai par m'effayer, en traduisant la fameufe fcène de Sophocle, qui contient la double confidence de Jocafte & d'Edipe. Je la lus à quelques-uns de mes amis qui fréquentaient les fpectacles, & à quelques acteurs ; ils m'affurèrent que ce morceau ne pourrait jamais réuffir en France; ils m'exhortèrent à lire Corneille, qui l'avait foigneusement évité; & me dirent tous, que fi je ne mettais, à fon exemple, une intrigue amoureufe dans Edipe, les comédiens. même ne pourraient pas fe charger de mon ouvrage. Je lus donc l'Edipe de Corneille, qui fans être mis au rang de Cinna & de Polyeucte, avait pourtant alors beaucoup de réputation. J'avoue que je fus revolté d'un bout à l'autre mais il falut céder à l'exemple & à la mauvaise coutume. J'introduifis au milieu de la terreur de ce chef-d'œuvre de l'antiquité, non pas une intrigue d'amour, l'idée m'en paraiffait trop choquante, mais au moins le reffouvenir d'une paffion éteinte: je ne répéterai point ce que j'ai dit ailleurs fur ce fujet.

V. A. S. fe fouvient que j'eus l'honneur de lire Edipe devant elle; la fcène de Sophocle ne fut affurément pas condamnée à ce tribunal; mais vous, & Mr. le Cardinal de Polignac, & Mr. de Maléfieu, & tout ce qui compofait votre

« PoprzedniaDalej »