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d'une église paroissiale, était tellement tourmenté d'un abcès qui s'était formé à l'entrée de l'estomac, que le bras s'étant aussi retiré, il ne put célébrer la messe pendant l'espace de cinq mois. Les remèdes humains étant impuissants, il eut recours aux divins. Élevant ses yeux vers les montagnes de Dieu, il obtint la santé; car, portant sur sa poitrine une lettre écrite de la main de Thérèse, il fut guéri du mal qu'il avait en cette partie; et visitant son sépulcre et appliquant le bras, qui se garde à Albe, sur le sien qui était encore retiré, il en obtint une parfaite guérison. Jean de Leyra avait un mal de gorge si violent, qu'il pouvait à peine respirer; et déjà il était réduit à toute extrémité, lorsqu'il mit avec une grande confiance un mouchoir dont sainte Thérèse s'était servie sur la partie où était le mal; s'étant ensuite laissé aller au sommeil, il se trouva guéri à son réveil, et s'écria qu'il devait sa guérison aux mérites de la bienheureuse Thérèse. La sainteté de Thérèse étant reconnue dans toute sorte de nations, son nom étant en très-grand honneur parmi les fidèles, Dieu, par son intercession, opérant tant de miracles qui s'augmentaient de jour en jour ainsi que sa vénération, on en a dressé des procès-verbaux dans différents endroits de l'Espagne qui ont été envoyés à ce SaintSiége; et Philippe, troisième roi catholique d'Espagne, faisant en ceci grande instance, l'affaire diligemment discutée, tant à la sacrée congrégation des rites que dans la rote, notre prédécesseur, Paul V, d'heureuse mémoire, a permis qu'on fit son office dans tout l'ordre des carmes, comme d'une vierge bienheureuse. Le même Philippe III, ayant supplié derechef notre prédécesseur Paul V, de passer outre à la canonisation de la bienheureuse vierge Thérèse, il commit de nouveau l'affaire aux cardinaux de la sacrée congrégation des Rites, qui décrétèrent qu'on forait de nouveaux procès-verbaux par autorité apostolique, et députèrent à cet effet le cardinal Bernard de Rojas, de bonne mémoire, archevêque de Tolède, et les vénérables frères évêques d'Avila et de Salamanque, qui, s'étant acquittés avec soin de cette commission, en renvoyèrent tous les actes au même Paul V, notre prédécesseur. Il ordonna à trois auditeurs des causes du palais apostolique, savoir: François, archevêque de Damas, lieutenant, maintenant cardinal de la sainte Église romaine; Jean-Baptiste Coccine, doyen; et Alphonse Mauzanède, d'examiner ces actes avec la plus grande attention et de lui en dire leur avis. Ayant considéré soigneusement toutes choses, selon que le requérait l'importance de l'affaire, ils ont fait rapport que la sainteté de vie et les miracles de la bienheureuse vierge Thérèse étaient pleinement justifiés, et que tout ce qui est requis par les sacrés canons pour sa canonisation s'y trouvait abondamment vérifié, et qu'on y pouvait passer outre. Afin que l'affaire se fit avec la maturité qui était convenable à une chose si importante, le même Paul ordonna à nos chers fils les cardinaux de la sainte Église romaine, de la congrégation des Rites sacrés, qu'ils vissent de nouveau lesdits procès, et prissent connaissance exacte de tou e la cause. Or le même Paul V, ayant achevé son pélerinage en cette vie

mortelle; et nous, quoique sans aucun mérite, par la scule bonté de Dieu, ayant été appelés au gouvernement de l'Église, nous avons cru qu'il fallait avancer cette affaire pour l'augmentation de la gloire de Dieu et l'utilité de la sainte Église; et avons estimé que ce serait un grand moyen pour adoucir les misères de ces temps, si la dévotion des fidèles de Jésus-Christ était accrue envers les saints et les élus de Dieu qu'ils intercédassent pour nous dans de si grandes nécessités. Partant, nous commandâmes auxdits cardinaux d'exécuter au plus tôt ce qui leur avait été enjoint par notre prédécesseur, ce qu'ayant accompli avec la diligence convenable, et tous ayant opiné unanimement à ce qu'on canonisât la vierge Thérèse, notre vénérable frère François Maria, évêque du Port, cardinal du Mont, exposa brièvement devant nous, dans notre consistoire, le sommaire de tout le procès, et son avis avec celui de ses collègues. Ce qu'étant entendu, les autres cardinaux, qui étaient présents, prononcèrent, d'un commun suffrage, qu'il fallait passer outre. Donc, notre cher fils Jules Zambeccarius, avocat consistorial de notre cour, ayant harangué pour sa canonisation, et nous ayant supplié humblement, au nom de notre très-cher fils en Jésus-Christ, Philippe, roi catholique d'Espagne, d'y daigner procéder, nous fimes réponse que nous consulterions sur une chose si importante nos vénérables frères les cardinaux de la sainte Église romaine, et les évêques qui pour lors étaient en cour; nous exhortâmes ardemment, au nom de JésusChrist, les cardinaux et les évêques présents, à persister soigneusement en oraison, et à humilier leurs âmes devant Dieu par des jeûnes et des aumônes; à prier avec nous le Seigneur de répandre sur nous la lumière de vérité, pour connaître et accomplir sa divine volonté. Dans le consistoire demi-public qui fut tenu ensuite, non seulement les cardinaux y étant appelés, mais aussi les patriarches, archevêques et évêques qui étaient en notre cour, nos notaires du siége apostolique, les auditeurs des causes du sacré palais, aussi présents, ayant mentionné plusieurs faits relatifs à la sainteté insigne de la servante de Dieu, de la multitude des miracles, et de la dévotion des peuples envers elle dans toute la chrétienté; après avoir aussi exposé les instances qui nous étaient faites, non seulement au nom de très-grands rois, mais aussi au nom de notre très-cher fils en Jésus-Christ, Ferdinand, roi des Romains, élu empereur, et plusieurs autres princes chrétiens; tous, d'un accord et d'une commune voix, bénissant le Seigneur, qui honore ses amis, ont été d'avis qu'il fallait canoniser la bienheureuse Thérèse et la mettre au rang des saintes vierges, desquels tous ayant oui le consentement, nous nous sommes grandement réjouis d'une intime affection de cœur au Seigneur, rendant grâces à Dieu et à son fils Notre-Seigneur Jésus-Christ, de ce qu'il avait regardé son Église des yeux de la miséricorde ; et qu'il avait voulu l'illustrer d'une si grande gloire. Partant, nous publiâmes le jour de la canonisation, et enjoignîmes à nos mêmes frères et fils de persévérer en oraisons, et de continuer à faire des aumônes, à ce que,

dans l'execution d'une si grande œuvre, la splendeur du Seigneur fût sur nous, et que sa majesté dirigeât l'œuvre de nos mains, pour accomplir sa volonté. Enfin toutes les choses qui devaient être faites suivant les sacrées constitutions et la coutume de l'Église romaine ayant été executées aujourd'hui dans l'église de Saint-Pierre, nous nous sommes assemblés avec nos vénérables frères les cardinaux de la sainte Église romaine, avec les patriarches, archevêques, évêques, prélats de la cour romaine, officiers et nos amis, le clergé séculier et régulier, et une trèsgrande multitude de peuple. Les demandes pour la canonisation ayant été réitérées, au nom de notre très-cher fils en Jésus-Christ, Philippe, roi catholique, par notre bien-aimé fils Louis, cardinal du titre de Sainte-Marie Transpontine, surnommé Ludovisio, notre neveu selon la chair; par Jules, l'avocat susdit, après avoir chanté les sacrées prières et les litanies, et ayant imploré humblement les grâces du Saint-Esprit, en l'honneur de la sainte Trinité et à l'exaltation de la foi catholique, avec l'autorité de Dieu Tout-Puissant, Père, Fils et Saint-Esprit, celle des bienheureux apôtres et la nôtre, du conseil et du consentement unanime de nos vénérables frères les cardinaux de la sainte Église romaine, des patriarches, archevêques et évêques, présents en cour de Rome, nous avons défini que la vierge Thérèse, de bonne mémoire, native d'Avila, de laquelle la sainteté était pleinement vérifiée, avec sa sincérité de foi et l'excellence de ses miracles, doit être tenue comme sainte, et avons décrété qu'elle doit être enrôlée au catalogue des saintes vierges, comme nous le définissons, le décrétons et l'admettons par ia teneur de ces présentes; avons inandé et mandons que tous les fidèles de JésusChrist l'honorent et la révèrent comme vraiment sainte, ordonnant que, par toute l'Église, on puisse bâtir et consacrer en son honneur des temples et des autels, dans lesquels on offre des sacrifices à Dieu; et que tous les ans, le cinquième d'octobre, auquel jour elle a été transportée à la gloire céleste, son office puisse être célébré comme d'une sainte Vierge, suivant l'usage du brévfaire romain. Avec la même autorité nous avons remis et remettons miséricordieusement en Notre-Seigneur à tous les fidèles de Jésus-Christ, qui tous les ans en la même fête visiteront le sépulcre où repose son corps, une année et une quarantaine; et à ceux qui visiteront dans l'octave de cette fête, quarante jours de pénitence à eux enjointe, ou due en quelque manière que ce soit. Finalement, ayant rendu grâces à Dieu de ce qu'il lui avait plu illustrer son Église de cette insigne et nouvelle lumière; et après avoir chanté en l'honneur de sainte Thérèse, l'oraison solennelle des saintes vierges, nous avons célébré la messe à l'autel du prince des apôtres, avec la commémoration de cette sainte vierge; et avons concédé à tous les fidèles de Jésus-Christ, qui étaient là présents, indulgence plénière de tous leurs péchés. Il est donc raisonnable que, pour un si grand bienfait, avec toute sorte d'humilité, nous bénissions et nous glorifiions tous celui auquel convient toute bénédiction, honneur, gloire, puissance dans les

siècles des siècles, demandant à Dieu par des prières continuelles que, par l'intercession de son élue, il détourne sa face de nos péchés; qu'il nous regarde et nous montre la lumière de ses miséricordes, et qu'il envoie sa crainte aux nations qui ne le connaissent point, afin qu'elles sachent qu'il n'y a point d'autre Dieu que le nôtre. Au reste, parce qu'il serait difficile que les présentes lettres fussent portées en tous les lieux où il serait nécessaire, nous voulons que partout on ajoute la même foi aux copies; et même à celles qui seront imprimées, étant signées de quelques notaires publics, et munies du sceau de quelque personne constituée en dignité ecclésiastique, qu'on ferait à ces présentes, si elles étaient produites ou montrées. Que personne donc n'entreprenne d'enfreindre ce témoignage de nos définitions, décret, adscription, commandement, statut, ordonnance et volonté, ou d'y contrevenir avec une hardiesse téméraire. Que si quelqu'un avait cette présomption que d'attenter à ceci, qu'il sache qu'il encourra l'indignation de Dieu tout-puissant et de ses bienheureux apôtres saint Pierre et saint Paul. Donné à Rome, à Saint-Pierre, l'an de l'incarnation de Notre-Seigneur 1621, le douzième jour de mars, et le deuxième de notre pontificat.

LA VIE

DE

SAINTE THÉRÈSE,

ÉCRITE PAR ELLE-MÊME.

AVANT-PROPOS DE LA SAINTE.

Je souhaiterais que, comme l'on m'a ordonné d'écrire très-particulièrement la manière de mon oraison et les grâces que j'ai reçues de Dieu, on m'eût permis de faire connaître, avec la même exactitude, la grandeur de mes péchés, et la vie imparfaite que j'ai menée. Ce me serait beaucoup de consolation; mais au lieu de me l'accorder, on m'a lié les mains sur ce sujet. Ainsi, il ne me reste qu'à conjurer, au nom de Dieu, ceux qui liront ce discours de ma vie, de se souvenir toujours que j'ai été si méchante, que je ne remarque un seul de tous les saints qui se sont convertis à Dieu, dont l'exemple puisse me consoler. Car je vois que depuis qu'il lui a plu de les toucher, ils n'ont point continué à l'offenser; au lieu que, non seulement je devenais toujours plus mauvaise, mais il me semblait que je prisse plaisir à résister aux grâces que Notre-Seigneur me faisait, quoique je comprisse assez qu'elles m'obligeaient à le mieux servir, et que je ne les pouvais trop connaître.

Qu'il soit béni à janrais de m'avoir attendu avec tant de patience je ne saurais trop l'en remercier, et j'implore de tout mon cœur son secours, pour pouvoir écrire avec autant de clarté que de vérité cette relation que mes confesseurs m'ont ordonné de faire, et que je n'avais jusqu'ici osé entreprendre, quoique Dieu m'eût, il y a long-temps, donné la pensée d'y travailler. Je souhaite qu'elle réussisse à sa gloire, et que me faisant encore mieux connaître à ceux qui m'y ont engagée, ils me fortifient dans ma faiblesse, afin que je puisse faire un bon usage des grâces que j'ai reçues de Dieu, à qui toutes les créatures doivent donner de continuelles louanges.

CHAPITRE PREMIER.

Vertus du père et de la mère de la Sainte. Soin qu'ils prenaient de l'éducation de leurs enfants. La Sainte n'étant âgée que de six ou sept ans, entre, avec un de ses frères, dans le désir de souffrir le martyre.

Les faveurs que j'ai reçues de Dieu, et la manière dont j'ai été élevée auraient dû suffire pour me rendre bonne, si la malice n'y eût point apporté d'obstacle. Mon père était fort affectionné à la lecture des bons livres, et en avait plusieurs en langue vulgaire afin que ses enfants pussent les entendre. Ma mère secondait ses bonnes intentions pour nous; et le soin qu'elle prenait de nous faire prier Dieu, et de nous porter à concevoir de la dévotion pour la sainte Vierge et pour quelques saints, commença à m'y exciter à l'âge de six ou sept ans. J'y étais aussi poussée, parce que je ne voyais en mon père et en ma mère que des exemples de vertu.

Mon père était très-charitable envers les pauvres et les malades, et avait une si grande bonté pour les serviteurs, qu'il ne put jamais se résoudre d'avoir des esclaves, tant ils lui faisaient de compassion. Ainsi ayant eut, durant quelques jours, chez lui, une esclave qui appartenait à l'un de ses frères, il la traitait comme si elle eût été sa propre fille, et disait qu'il ne pouvait sans douleur voir qu'elle ne fût pas libre. Il était très-véritable dans ses paroles; on ne l'entendit jamais jurer ni médire de personne; et il n'y avait rien dans toute sa conduite que de fort honnête et de fort louable.

Ma mère était aussi très-vertueuse, et son peu de santé la fit tomber dans de grandes infirmités. Quoiqu'elle fût extrêmement belle, elle faisait si peu de cas de cet avantage qu'elle avait reçu de la nature., qu'encore qu'elle n'eût que trente-trois ans lorsqu'elle mourut, une personne fort âgée n'aurait pu vivre d'une autre manière qu'elle faisait. Son humeur était extrêmement douce, elle avait beaucoup d'esprit: sa vie fut traversée par de grandes peines, et elle la finit très-chrétiennement.

Nous étions douze enfants, trois fils et neuf filles; et tous, par la miséricorde de Dieu, ont imité ses vertus et celles de mon père, excepté moi, quoique je fusse celle de tous ses enfants qu'il aimait le mieux.

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