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scène un endroit public, comme un temple, un portique, une place où le peuple fût censé pouvoir accourir; l'autre, de rendre indispensable, par sa présence, l'unité de lieu et de temps; et de là une gêne continuelle dans le choix des sujets et dans la disposition de la fable, où une foule d'invraisemblances dans la composition et dans l'exécution. Voyez ENTR'ACTe, Unité.

Ce qu'il eût fallu faire du chœur, sur le théâtre ancien, pour l'employer avec avantage, c'eût été de l'introduire toutes les fois qu'il aurait pu contribuer au pathétique ou à la pompe du spectacle; et de s'en délivrer toutes les fois qu'il était déplacé, inutile, ou gênant.

Mais si par la nature de l'action théâtrale, qui était communément une calamité publique, ou du moins quelque événement qui ne pouvait être caché, une foule de confidents y pouvaient être mis en scène ; si la simplicité de la fable, la pompe du spectacle, et la nécessité de remplir un théâtre immense, qui sans cela aurait paru désert, demandaient quelquefois la présence du chour; il n'en est pas de même dans un genre de tragédie où ce n'est plus, ni un arrêt de la destinée, ni un oracle, ni la volonté d'un dieu qui conduit l'action theâtrale et qui produit l'événement, mais le jeu des passions humaines, qui, dans leurs mouvements intimes et cachés, ont peu de confidents et souffriraient peu de témoins.

les

Quoiqu'il ne soit pas vrai, comme on l'a dit, que la tragédie fût un spectacle religieux chez les Grecs, il est vrai du moins que les opinions religieuses s'y mêlaient sans cesse, ainsi que cérémonies du culte; et c'est ce qui rendait majestueuse pour eux cette espèce de procession du chœur, qui sur trois files se promenait en cadence, dans l'intervalle des scènes, tournant à gauche, et puis à droite, chantant la strophe et l'antistrophe, puis s'arrêtant et chantant l'épode, le tout pour exprimer, dit-on, les mouvements du ciel et l'immobilité de la terre. Mais certainement rien de semblable ne convient au théâtre de Cinna, de Britannicus, de Zaïre.

Nos premiers poètes tragiques, en imitant les Grecs, ne manquèrent pas d'adopter le choeur; et jusqu'au temps de Hardi, le chœur était chanté. Cet accord des voix était connu sur nos premiers théâtres dans ce qu'on appelait mystères : le père éternel avait trois voix, un dessus, une hautecontre et une basse, à l'unisson. Hardi se réduisit à faire parler le choeur par l'organe d'un coryphée; dans le Coriolau de ce poète, le chœur dialogue avec le sénat, et dit de suite jusqu'à quarante vers. Dès lors il ne fut plus question du chœur en intermède, jusqu'à l'Athalie de Racine, pièce unique dans son genre et absolument hors de pair.

Voltaire, dans son OEdipe, a voulu mettre le chœur en scène jamais il ne fut mieux placé;

et l'extrême difficulté de l'exécution l'a cependant fait supprimer. Depuis, on s'est borné, comme Hardi, lorsque l'action exige une assemblée, à faire parler un ou deux personnages au nom de tous c'est la seule espèce de choeur qu'admette la scène française ; et dans les sujets même, soit anciens, soit modernes, dont le spectacle demande le plus de pompe et d'appareil, comme les deux Iphigénies, Mahomet et Sémiramis, un théâtre où l'action se passe immédiatement sous nos yeux, rend presque impossible le concert et l'accord d'une multitude assemblée qui parlerait en même temps. Il est vrai qu'en la faisant chanter comme les Grecs, la difficulté serait moindre; mais le chant du chœur, entremêlé avec une déclamation simple, fera toujours pour nos oreilles une disparate et une invraisemblance qui, dans genre sérieux et grave, nuirait trop à l'illusion. Dans ce qu'on appelle, chez les Grecs, la comédie ancienne, comme ce n'était communément qu'une satire politique, le chœur était très bien placé; il représentait le peuple, ou une classe de citoyens, tantôt allégoriquement, comme dans les Oiseaux et dans les Guépes, tantôt au naturel, comme dans les Acharniens, les Harangueuses, les Chevaliers; et le poète l'employait ou à faire la satire de la république, ou à sa propre défense et à son apologie. C'est ainsi que dans les Acharniens, le choeur, traitant le peuple d'enfant et de dupe, lui reproche son imbécillité à se lais

le

ser séduire par des louanges, tandis qu'Aristophane a seul osé lui dire la vérité en plein théâtre, au péril de sa vie. «Laissez-le faire, ajoute le chœur : il n'a eu en vue que le bien, et il le procurera de toutes ses forces, non par de basses adulations et des souplesses artificieuses, mais par de salutaires avis. » La comédie du second et du troisième âge changea de caractère, et le chœur lui fut interdit.

CHOEUR d'Opéra. Que vingt personnes parlent ensemble, leurs articulations se mêlent, les sons de leurs voix se confondent, et l'on n'entend qu'un bruit confus. Mais dans un chant dont toutes les articulations et les intonations sont prescrites et mesurées, vingt voix d'accord n'en feront qu'une; et de leur concert peuvent résulter de grands effets, soit du côté de l'harmonie, soit du côté de l'expression.

Je vais plus loin. Dans un spectacle où il est reçu que la parole sera chantée, le choeur a sa vraisemblance comme le récitatif, et cette vraisemblance est la même que celle du duo, du trio, du quatuor, etc. Mais ce que j'ai dit du duo français, je le dis de même du chœur : en s'éloignant de la nature, il a perdu de ses avantages. Voyez Duo.

Il arrive souvent, dans la réalité, qu'un peuple entier pousse le même cri, qu'une foule de monde

dit à la fois la même chose; et comme on accorde toujours quelque liberté à l'imitation, le choeur, en imitant ce cri, ce langage unanime d'une multitude assemblée, peut se donner quelque licence; l'art et le goût consistent à pressentir jusqu'où l'extension peut aller. Or c'en est trop que de faire tenir ensemble à tout un peuple un long discours suivi, et dans les mêmes termes, à moins que ce ne soit un discours appris, comme un hymne; et tel peut être supposé, par exemple, le choeur, Brillant soleil! dans l'acte des Incas; le chœur de Thétis et de Pélée, O destin, quelle puissance! le chœur de Jephté, Le ciel, l'enfer, la terre et l'onde, et tout ce qui se chante dans des solennités.

Il faut donc distinguer, dans l'hypothèse théâtrale, le chœur appris et le choeur impromptu. Le premier peut paraître composé avec art, sans détruire la vraisemblance; mais dans l'autre l'on ne doit voir que l'unanimité fortuite et momentanée des sentiments dont une multitude est émue à la fois. Plus ces sentiments seront vifs et rapides, et plus l'expression en sera simple, naturelle et concise; plus il sera vraisemblable que tout un peuple ait dit la même chose en même temps:

Atys, Atys lui-même

Fait périr ce qu'il aime.

Cependant une des plus grandes beautés du chant du choeur, c'est le dessein; ce dessein de

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