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Les philosophes eux-mêmes emploient souvent le style allégorique. Platon, que la nature avait fait poète, exprime assez souvent ainsi les idées les plus sublimes. C'est lui qui a dit que la Divinité est située loin de Douleur et de Volupté. On

(1) « Te voilà arrivée au bord du lit nuptial. Il ne m'est plus permis de te suivre; je me retire: adieu. J'ai été ta compagne dans l'âge le plus tendre; et tu as donné un nouvel éclat à la gloire de mon empire. Tu seras épouse et mère, si le Ciel seconde mon espérance et le vœu général. Je vois déjà l'Amour qui moissonne et qui effeuille en folâtraut les lis qu'il a cultivés lui-même. A ces mots, la déesse disparaît comme un éclair; et trois fois la rappelle en vain cette jeune beauté qui brûle encore pour elle. Alors descend la Fécondité avec un visage rayonnant; et la prenant par la main, elle la présente à son jeune époux. Dès ce moment, les pleurs font place au doux sourire. »

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doit à Xénophon la belle allégorie du jeune Hercule entre la Volupté et la Vertu. Mais qui avait imaginé celle des Furies, nées du sang d'un père répandu par son fils, du sang de Cœlus mutilé par Saturne? C'est là le sublime de l'allégorie. Cette façon de s'énoncer fait le charme du style de Montaigne. Dans ses écrits, l'idée abstraite ne se présente jamais nue: il voit tout ce qu'il pense; il peint tout ce qu'il dit.

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Plus un peuple a l'imagination vive, plus l'allégorie lui est familière c'est à cette faculté de saisir les rapports d'une idée abstraite avec un objet sensible, et de concevoir l'une sous la forme de l'autre, que l'on doit toute la beauté de la mythologie des Grecs ; et à mesure que ce peuple ingénieux devient plus philosophe, ses allégories présentent un sens plus juste et plus profond. Quoi de plus beau, par exemple, que d'avoir fait Cérès l'inventrice des lois et la fondatrice des villes? Quoi de plus sage, dans les mœurs des Spartiates, que de sacrifier à Vénus armée ?

Quoique l'allégorie semble être une façon de s'exprimer artificielle et recherchée, cependant elle est usitée même chez les sauvages. Quand ceux de l'Orénoque veulent témoigner à un étranger que son arrivée leur est agréable, le chef lui dit dans sa harangue, qu'il a vu passer sur sa cabane un oiseau remarquable par la beauté de ses couleurs; ou qu'il a ongé la nuit que les

fruits de la terre périssaient par la sécheresse, et qu'il est survenu une pluie abondante qui les a

ranimés.

Rien de plus naturel en effet, chez tous les peuples et dans toutes les langues, que d'emprunter ainsi les couleurs des choses sensibles, pour exprimer, par analogie, des idées qui, sans cela, seraient vagues, faibles, confuses. Ce qui ne se peint point à l'imagination, échappe aisément à l'esprit. Voyez IMAGE.

ALLÉGORIQUE. Un personnage allégorique est une passion, une qualité de l'ame, un accident de la nature, une idée abstraite personnifiée. Presque toutes les divinités de la fable sont allégoriques dans leur origine, la Beauté, l'Amour, la Sagesse, le Temps, les Saisons, les Éléments, la Paix, la Guerre, etc. Mais lorsque ces idées abstraites personnifiées ont été réellement l'objet du culte d'une nation, et que dans sa croyance elles ont une existence idéale, elles sont mises, dans l'ordre du merveilleux, au nombre des réalités ; et ce n'est plus ce qu'on appelle des personnages allégoriques.

Il est vraisemblable que, dans le langage des premiers poètes, l'allégorie fut la pépinière des dieux; l'opinion en prit ce qu'elle voulut pour former la mythologie, et laissa le reste au nombre des fictions.

Le même personnage est employé comme réel dans un poème, et comme allégorique dans un autre, selon que le système religieux dans lequel ce personnage est réalisé, convient, ou non, au sujet du poème. Ainsi, par exemple, dans l'Énéide. l'Amour est pris pour un être réel; et dans la Henriade ce n'est qu'un être allégorique, de la même classe que la Politique et la Discorde.

Nos anciens poètes ont porté à l'excès l'abus des personnages allégoriques. Le Roman de la Rose les avait mis en vogue. Dans ce roman, l'on voit en scène, Jalousie, Bel-accueil, Faux-semblant, etc. Et, d'après cet exemple, on mettait sur le théâtre, dans les sotties et les mystères, le tien, le mien, le bien, le mal, l'esprit, la chair, le péché, la honte, bonne compagnie, passe-temps, je bois à vous, etc. Et tout cela était charmant ; et, dans ce temps-là, on aurait juré que de si heureuses fictions réussiraient dans tous les siècles.

Non - seulement on faisait des personnages, mais encore des mondes allégoriques; et l'on tracait sur des cartes, de poste en poste, la route du Bonheur, le chemin de l'Amour : par exemple, on partait du port d'Indifférence, on s'embarquait sur le fleuve d'Espérance, on passait le détroit de Rigueur, on s'arrêtait à Persévérance d'où l'on découvrait l'île de Faveur, où faisait naufrage Innocence. Ces curieuses puérilités ont été à la mode dans le siècle du bel-esprit et du

précieux ridicule. Le bon esprit les a réduites à leur juste valeur; et on n'en voit plus que sur des écrans, ou dans quelques livres mystiques. C'est que peut être placée l'allégorie du Temps et de la Fortune, jouant au ballon avec le globe du monde.

ALLUSION. Application personnelle d'un trait de louange ou de blâme.

Diogène reprochait à Platon de n'avoir jamais offensé personne. Grâce Grâce aux allusions, il est peu d'écrivains célèbres de nos jours qui aient le même reproche à craindre.

Rien de plus odieux sans doute que la satire personnelle; et quoiqu'on puisse imaginer un dégré de dépravation des mœurs publiques, où le vice impuni, toléré, allant partout la tête haute, ferait souhaiter qu'il s'élevât un homme pour l'insulter en face et le flétrir, ce vengeur ne laisserait pas d'être encore un personnage détestable.

Que chacun dans la société se fasse raison par le mépris, et par un mépris éclatant, du vice insolent qui le blesse; rien de plus noble et de plus juste, Mais le métier d'exécuteur, quoique très utile, est infame; et s'il se trouvait un homme doué d'un génie ardent, d'une éloquence impétueuse, du don de peindre avec vigueur, et que cet homme eût commis un crime digne de la rigueur des lois, c'est lui qu'il faudrait condamner à la satire personnelle. Voyez SATIRE.

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