qu'il fût enlevé, il a remporté ce temoignage d'avoir été agréable à Dieu. Verf. 7. Noé ayant été divinement averti de ce qu'on ne voyoit point encore; & profitant prudėmment de cet avis, il bâtit par Foi une Arche, afin de fauver fa Famille, & en la bâtissant il condamna le Monde, & devint héritier de la Juftice qui naît de la Foi. Et dans le verset onziéme nous voyons diftinctement ce que Dieu acceptoit & recompenfoit fi favorablement en la perfonne de ces prémiers Fidèles: C'est auffi par la Foi; dit S. Paul, que Sara étant fterile, reçut la vertu de concevoir un fruit dans fon fein, & qu'elle eut un Fils lors qu'elle n'étoit plus en âge d'en avoir. Et voici comment elle obtint cette faveur de Dieu: c'eft, continuë cet Apôtre, parce qu'elle crut fidèle & veritable celui qui le lui avoit promis. Il s'enfuit de là, que ceux qui étoient agréables à Dieu, & qu'il recevoit en grace avant la Venuë de Jefus-Chrift, jouiffoient de cet avantage par cela feulement qu'ils ajoûtoient foi aux Promeffes de Dieu, & qu'ils fe confioient en fa Bonté, à proportion de ce qu'il leur વે en avoit fait connoître. Car St. Paul nous dit enfuite, vf 13. Tous ceux-là font morts en la Foi, n'ayant point reçu (l'accomplif fement) des promesses, mais les ayant vûës de loin, crues & embraffées. C'étoit-là touc tout ce qu'on exigeoit d'eux, favoir, qu'ils fuffent perfuadez de la verité des promeffes qui leur étoient addreffées, & qu'ils les acceptaffent. Ils ne pouvoient pas croire au delà de ce qui leur étoit propofé à croire, ni embraffer au delà de ce qui leur étoit revelé, conformément aux Promeffes qui leur avoient été faites, & aux Difpenfations fous lesquelles ils vivoient. Or fi la Foi qu'ils ajoûtoient à des chofes qu'ils ne voyoient qu'en éloignement, Si la confiance qu'ils mettoient en Dieu à l'occafion des Promeffes qu'il leur faifoit en ce temps là, Si la croyance où ils étoient que le Meffie viendroit un jour, Si tout cela, dis-je, fuffifoit pour faire que ceux qui vivoient dans les Siécles qui ont précedé la Venuë de Jefus-Chrift, fuffent agréables à Dieu & paruffent Juftes à fes yeux, je fouhaiterois que les perfonnes qui nous difent, que Dieu ne veut point, ou (comme quelquesuns ofent bien l'avancer) qu'il ne peut pas recevoir en grace quiconque n'ajoûte pas foi à chaque article de leurs Confeffions ou de leurs Systêmes particuliers, examinaffent, pourquoi Dieu, par un effet de fon infinie Mifericorde, ne pourroit point juftifier préfentement un homme en confideration de ce qu'il croit que Jefus de Nazareth eft le Meffie, le Roi, & le Liberateur qui avoit été promis, auffi bien qu'il justifioit autrefois ceux qui croyoient fimplement, que Dieu, felon fa promeffe, enverroit en fon temps le Meffie, pour être le Roi & le Liberateur de fon Peuple. CHAPITRE XIV. Comment ceux qui n'ont jamais ouï parler du Mefie, pourront trouver grace auprès de Dieu. Neceffité de la Venuë de Jefus-Chrift. Quels font les principaux avantages qu'elle a apportez dans le Monde. I L y a une autre Difficulté qu'on rencontre fouvent, & qui femble plus confiderable que celle qu'on vient de voir. On convient que la Foi de ceux qui croyoient avant la Venuë de Jefus-Chrift que Dieu, felon fa promeffe, enverroit le Meffie, pour être le Roi & le Sauveur de fon Peuple, & la Foi de ceux, qui, depuis cette Venuë, ont crû que Jefus étoit ce Meffie, que Dieu avoit promis, & qu'il a envoyé lui-même: on convient, dis-je, que ces deux fortes de Foi leur feront imputées à Juftice. Mais cela pofé, l'on demande, que deviendra le refte du Genre Humain, qui n'ayant jamais entendu parler de la Promeffe d'un Sau veur ni ouï dire un feul mot d'un Meffie, qui dût venir ou qui fût venu dans le Monde, n'ont jamais pensé à fa Perfonne, ni fongé à croire en lui? Je répons à cela que Dieu exigera de chaque homme, felon ce qu'il a, & non felon ce qu'il n'a pas. De celui à qui il n'a donné qu'un Talent, il n'attendra pas d'en recevoir le revenu de dix Talens; & il n'impofera à qui que ce foit la néceffité d'ajoûter foi à une Promeffe dont il n'a jamais ouï parler. Sur quoi S. Paul raisonne fort jufte lors qu'il dit dans fon Epître aux Romains, Ch. X. 14. Comment croiront-ils en celui dont ils n'ont point entendu parler? Mais bien qu'il y en eût plufieurs, qui étant feparez de la République d'Ifraël, étoient auffi étrangers à l'égard des Oracles de Dieu, qui ont été confiez à ce Peuple, bien qu'il y en eût plufieurs, qui n'avoient jamais oui dire que Dieu eût promis d'envoyer un Messie dans le Monde, & qui étoient, par conféquent, dans l'impuiffance de croire ou de rejetter cette Revelation particuliére: Cependant Dieu avoit, par la Lumiére de la Raison, revelé, pour ainfi dire, à tous les hommes qui voudroient faire ufage de cette Lumiére, qu'il étoit Bon & Mifericordieux. La même étincelle de connoiffance qui eft dans l'homme, & qui le rend en quelque forte par participant de la Nature Divine, cette même étincelle qui le faifant Homme, lui faifoit voir la Loi à laquelle il étoit foûmis en qualité d'Homme, lui découvroit en même temps le moyen d'appaifer l'Auteur de fon Etre, ce Père plein de mifericorde, de tendreffe & de compaffion, lors qu'il avoit tranfgreffé cette Loi. De forte que quiconque fe fervoit de ce rayon de Lumiére, qui vient de Dieu, jufques à découvrir par-là quels étoient fes Devoirs, ne pouvoit manquer de trouver auffi le moyen de fe reconcilier avec ce Souverain Etre, & d'en obtenir le pardon de fes fautes, lors qu'il venoit à s'écarter de fon devoir. Mais d'au tre part, s'il n'employoit pas fa Raifon à cet ufage, & qu'il vînt à étouffer ou à negliger cette Lumiére, peut-être ne devoit-il jamais parvenir à découvrir, ni fon Devoir, ni le Moyen d'être reconcilié avec Dieu. La Loi eft la Regle éternelle & immuable du Jufte. Et une partie de cette Loi porte, qu'un homme devroit pardonner non feulement à fes Enfans, mais même à ses Ennemis, lors qu'ils fe repentent de l'avoir offenfé, qu'ils lui demandent grace, & qu'ils veulent lui faire fatisfaction. De forte que celui qui feroit dans cette difpofition d'efprit, ne pourroit point douter, que l'Auteur de cette Loi, qui eft Dieu lui-même, c'est |