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gaire, mais il est présumable qu'on ne l'écrivait pas. Les historiens ou plutôt les chroniqueurs se servaient de la langue latine; il est vrai que dans quelques-uns de leurs ouvrages, on trouve disséminés par-ci, par-là, des mots de la langue romane, jamais de passages un peu, étendus, même de quelques lignes. M. Raynouard, pour prouver que la romane date des premiers temps de notre monarchie, a cité quelques-uns de ces mots dans l'introduction de son Choix de poésies des Troubadours, tom. 1, pp. VI-xviij; mais il n'est question là que de la langue parlée.

Tous les actes de la vie civile étaient rédigés dans un latin corrompu et qui l'est devenu encore davantage par la suite (1). La langue vulgaire était donc à

(1) Par exemple, on disait: Quittus erit de illa re, il sera quitte de cela; quitlus est au lieu de quietus par euphonie ; quietus erit de illâ re, il sera tranquille sur cette chose, il n'aura plus à s'en occuper.

Autre exemple: Dicta Johanna relicta dicti deffuncti Petri Lecocq burgensis Pontisara (bourgeois de Pontoise) recognovit et confessa fuit se vendidisse, quitasse et in emphyteosim se demisisse praepositis dictae confrariae clericorum, septem solidos parisienses, supra dictam domum, pro pretio quatuor francorum auri, suis quittanciis, quibus florenis se tenuit pro contenta, quos septem solidos parisienses, annui redditús promisit guarentisare. (Cette donation est du 1er février 1068.)

Dans le même temps, on se servait, en latin, du pluriel pour le singulier lorsqu'on parlait à une personne de considération, vos estis creatus, etc.; mais Pierre de Blois, regardant ce langage comme indigne d'un ecclésiastique, écrivit à

cette époque une espèce de jargon trop nouveau, trop informe pour avoir des monumens transmissibles à la postérité; ou plutôt, l'ignorance et la barbarie qui dominaient alors (nous parlons toujours des vio, vío et VIII° siècles) ne permettaient pas qu'on songeât à écrire dans cette langue dédaignée des gens qui avaient quelque instruction, et peu connue à la cour des rois francs qui ne parlaient que le théotisque.

Mais nous touchons enfin au moment où les quatre grandes romanes parlées dans le midi de l'Europe, c'est-à-dire le français (divisé en deux branches), le castillan, le portugais et l'italien, vont prendre une certaine consistance, et s'approprier un caractère distinctif et spécial que le temps développera, affermira et rendra par la suite plus ou moins célèbre dans les fastes de la civilisation et de la littérature en général. Voici comment on range, par ordre de date, les berceaux de ces romanes, depuis le 1x jusqu'au xi siècle :

La LANGUE D'Oc, ou le provençal,

a commencé à se former à la cour de Boson, roi de Provence.

La LANGUE D'OIL, ou roman wallon, à la cour de Guillaume-Longue

879-887.

l'évêque de Chartres, nouvellement élu : Te precor, quod per TU et TIBI et TE scribo, molestè non feras: pluralis enim locutio quá uni loquendo mentimur, sermo adulatorius est, et longè à sacro eloquio alienus.

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le règne de Ferdinand-le-Grand. . 1037-1065. Le PORTUGAIS, sous Henri de Bour

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gogne, fondateur de la monarchie.. 1095-1112. Et l'ITALIEN, sous Roger, roi de

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Nous ne mentionnons ici ces trois dernières langues (le castillan, le portugais et l'italien) que comme romanes d'origine, faisant partie des dates que nous venons d'indiquer; nous n'avons point à nous en occuper, puisque étrangères maintenant à la langue française, elles ne sont point l'objet de nos recherches. Quant aux deux premières (la langue d'oc et la langue d'oil), nous pensons qu'on n'a guère pu assigner la date d'origine de chacune d'elles que par la tradition et surtout par quelques monumens dont on aura plutôt conservé le souvenir que des fragmens. Nous n'entendons parler ici que de l'époque très-reculée des Ix et x° siècles. C'est dans ces deux siècles que l'injonction faite en 813 par le concile de Tours aux évêques de faire traduire le texte latin des homélies et autres livres pieux, en romane rustique et en théotisque, a dû avoir son effet. Il restait sans doute plusieurs de ces antiques traductions en romane rustique, dans quelques coins poudreux des bibliothèques des anciennes abbayes; mais à peine connues avant la révolution, elles auront-totalement disparu depuis; car les traductions des Vies

des Saints, du Livre des Rois, des Dialogues de saint Grégoire, etc., dont parle l'abbé Lebeuf dans ses Dissertations sur l'histoire ecclésiastique, p. 38, ne remontent pas au-delà du x1° siècle. Il en est autrement pour les traductions en théotisque; M. Gley nous en a conservé d'assez nombreux fragmens dans son traité intitulé Langue et Littérature des anciens Francs, Paris, Michaud, 1814, in-8°. Voy. pp. 89-262. Pour donner une idée de ce théotisque, nous allons rapporter l'ORAISON DOMINICALE traduite

dans cette langue, telle que les Francs la récitaient au VIIIe siècle, et telle sans doute qu'elle était encore en usage à la cour de Charlemagne Cette pièce est tirée d'un manuscrit de la bibliothèque de Munich, qui est du x° siècle, et a été insérée par M. Docen, dans ses Miscelles, Munich, tom.. 11, p. 288. Nous plaçons la traduction française littérale à côté :

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Ce qui est à remarquer, c'est que ce théotisque, dont on faisait encore usage à la cour dans le neuvième siècle, s'appelait parler français, et c'est celui qu'on parle maintenant en Allemagne ; tandis que la langue vulgaire parlée par le peuple dans le même siècle, s'appelait parler roman, et cette langue est actuellement notre français. Au reste, comme nous l'avons déjà dit, il y avait deux romanes : la romane rustique qui était le langage du peuple, et la romane simple ou romaine qui était celui de la société plus relevée, et qui se rapprochait davantage du latin.

Nous avons vu dans le tableau ci-dessus, relatif aux dates, que la formation de la langue d'oc a précédé d'une quarantaine d'années celle de la langue d'oil; d'autres pensent qu'elle l'a précédée de plus d'un siècle. Alors il est naturel de penser que les premières productions littéraires des troubadours ont dû servir sinon de modèle, du moins de véhicule aux trouvères. Nous disons de véhicule et non de modèle, car, dans le principe, les poésies des troubadours et celles des trouvères ont présenté chacune un caractère, un genre différent. Dans le Midi, où l'imagination est vive, passionnée, le genre fut d'abord presque tout lyrique, c'est-à-dire consacré à la chanson et à la poésie légère. Dans le Nord, où l'imagination est plus froide, plus réfléchie, le genre fut ordinairement épique ou de narration.

Mais les deux langues n'ont pas eu le même sort. Après trois siècles d'existence, celle des troubadours, loin de faire des progrès, s'est corrompue de nouveau,

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