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qu'il retire en son cabinet, qui n'est autre | que la religion, afin de s'entretenir plus familierement avec eux, et leur reveler, descouvrir et communiquer ses secrets, leur parlant cœur à cœur. Mais entre tous ceux qui ont eu cette grace, la tres-Ste Vierge a esté singulierement privilegiée au-dessus de tous les autres, Dieu luy ayant descouvert de plus hauts secrets et profonds mysteres qu'à nulle autre creature. Voyez donc combien elle a esté heureuse d'avoir escouté et gardé cette divine parolle, et qu'heureuses serez-vous (mes cheres ames) si vous limitez, vous rendant promptes a suivre les inspirations par lesquelles Dieu vous manifeste ses sainctes volontez. l'Escriture dit que toutes choses sont et subsistent par la parolle de Dieu : et c'est cette divine parolle qu'il veut que nous gravions dans nos ames, promettant pour cela aux enfans de son Eglise, je veux dire aux vrays chrestiens, de leur oster leur cœur de pierre et de leur en donner un de chair, capable de recevoir en soy l'impression de cette divine parolle qu'il y gravera luy-mesme, non avec autre burin que celuy de la charité, Auferam cor lapideum de carne vestra, et dabo vobis cor carneum.

Or puisque tous les chrestiens doivent escouter et garder la parolle de Dieu, correspondre à ses inspirations et faire sa volonté, d'où vient qu'il y en a si peu qui l'entendent et la gardent comme il faut, et moins encore qui suivent les inspirations que sa bonté leur donne pour parvenir à la perfection?

Je sçay bien qu'il est necessaire que plusieurs vivent dans le monde, lesquels doivent user des richesses, honneurs et dignitez que la loy de Dieu leur permet de posseder, mais non d'en abuser, et pourveu qu'ils ajustent tousjours leurs affections, en la possession de toutes ces choses, aux commandemens de Dieu, bien qu'ils ne practiquent pas les conseils, ils ne laisseront pas d'estre bien-heureux et parviendront à la jouyssance de la felicité eternelle.

L'on treuve plusieurs personnes qui se veulent bien donner à Dieu, mais elles se veulent neantmoins tousjours reserver quelque chose. Je me veux donner à Dieu, disent-elles, mais non pas si absolument que le monde n'y aye encore quelque part.

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Je me contenteray de rendre à Dieu ce qui est deu à Dieu, et reserveray ce qui est deu au monde, sans toutesfois rien faire en cela qui offense sa divine Majesté, ny qui soit contraire à sa saincte loy: bien que ceux-cy entendent l'inspiration, ils n'y correspondent pas de toute l'estenduë de leur cœur, et quoy qu'ils se sauvent, ils ne parviendront jamais à un haut degré de perfection.

Il y en a d'autres qui veulent bien suivre l'inspiration et volonté de Dieu, et veulent estre tout à luy, mais non pas totalement. Remarquez ce mot, je vous prie : car il y a bien de la difference d'estre tout à Dieu, et totalement à Dieu; au moins veulent-ils se reserver le choix des exercices spirituels, afin, disent-ils, de mieux servir Dieu. O que ceux-cy se mettent en grand danger d'estre seduits et trompez, se gouvernant ainsi à leur fantaisie, ne se voulant pas sousmettre, et se formant une maniere de vivre selon leur caprice. Ha! ne voyez-vous point que vous n'estes pas totalement à Dieu en faisant cela? mais c'est pour Dieu, dira-t-on, que je le fais. Certes, la glorieuse Vierge, nostre tresaymable Maistresse, ne fit pas ainsi, a elle se donna totalement à Dieu au jour de la presentation, sans aucune reserve, n'usa jamais de sa volonté, ny de son choix, en quoy que ce fust.

, ains

O Dieu ! quand l'on considere le cours de la vie de cette saincte Dame, l'on a de cœur tout remply de douceur et de suavité; et quand l'on regarde les grands et rares exemples de vertu qu'elle nous a laissez, ô Dieu! il est vray que si l'on veut avoir de sa douceur, et mesme la porter au cœur du prochain, il la faut prendre en la consideration de la vie de cette Ste Vierge, laquelle, mes tres-cheres ames, doit tousjours estre devant vos yeux pour vous for mer sur icelle, ajustant tousjours toutes vos actions et affections sur le parfaict modelle des siennes; car vous estes ses filles, et pour cela vous la devez suivre et imiter, et vous servir d'elle comme d'un miroir dans lequel vous vous devez tousjours mirer et regarder. Et bien que la douceur que vous recevrez par le regard et la consideration de ses vertus, tombe dans un vaisseau d'argile, elle ne laissera pas neantmoins d'estre grandement suave; car

le beaume mis dans un vaisseau de terre est aussi suave que dans une fiole de cristal. O que cette glorieuse Vierge nous a laissé de merveilleux exemples de son obeyssance à la volonté de Dieu, en tout le cours de sa vie, en son mariage à S. Joseph, et en sa fuite en Egypte. Où allez-vous, o glorieuse Vierge, avec ce petit poupon? je m'en vais en Egypte, dira-t'elle. Mais qui Vous y fait aller? la volonté de Dieu. Mais sera-ce pour long-temps? tant que Dieu Voudra. Et quand reviendrez-vous? quand il le commandera. Mais quand vous reviendrez ne serez-vous pas plus joyeuse qu'en y allant? ò non certes. Et pourquoy? parce que je feray aussi bien la volonté de mon Dieu en y allant, et y demeurant, qu'en revenant. Mais en revenant vous irez en vostre patrie? O Dieu! eust-elle respondu, je n'ay point d'autre patrie que d'accomplir la volonté de mon Dieu en toutes choses: admirable exemple d'obeyssance! Puis que je suis sur le subjet de l'obeyssance, je vous diray deux conditions de cette vertu, qui sont fondamentales, lesquelles je deduiray briefvement. La premiere est, que pour obeyr parfaictement, il faut aymer Dieu qui commande. La seconde est, qu'il faut aymer la chose commandée; et tous les manquemens que nous faisons à l'obeyssance procedent pour l'ordinaire du defaut de ces deux conditions.

des lettres par un de ses pages, regarderiez-vous, pour avoir ces lettres tres-agreables, de quelle couleur ce page seroit vestu?

non certes, ains vous les prendriez, et les mettriez sur votre teste en signe de reverence, sans avoir esgard à la livrée de celuy qui vous les a apportées. Et pour quoy donc n'escoutez-vous pas et ne recevez-vous pas cette sacrée parolle des unt comme des autres, puisque c'est tousjours de la part de Dieu qu'elle vous est annoncée?

Plusieurs ayment la chose commandée, et n'ayment pas Dieu qui commande. L'on commandera à une personne d'aller faire l'oraison, ou tel autre exercice qu'elle goustera; ô Dieu! elle ira volontiers, et pourquoi? parce qu'elle l'ayme à cause de quel que suavité et consolation qu'elle y reçoit : qui fait cela, sinon l'amour-propre ? vous en aurez l'experience, car tirez-la de là, et l'employez en quelque autre chose qu'elle n'aymera pas, vous verrez qu'elle ne la fera pas, sans tesmoigner son mescontentement. Qui ne voit donc qu'elle n'ayme pas Dieu qui commande, ains seulement la chose commandée? car si elle aymoit Dieu qui commande, elle seroit aussi contente de faire une chose qu'une autre, puisqu'en tout elle rencontreroit egalement sa divine volonté.

Un autre aimera Dieu qui commande, et n'aymera pas la chose commandée. Je sçay bien, dira-t'il, que ce qui m'est commandé est la volonté de Dieu; mais c'est une chose à laquelle j'ay tant de repugnance et de difficulté, que je ne la saurois agreer : de plus, quand je tascherois de l'aymer, celuy qui l'ordonne de la part de Dieu est de si mauvaise grace, et a une façon si froide, que cela fait qu'on ne treuve nulle suavité en la chose commandée.

Plusieurs ayment Dieu qui commande; mais ils n'ayment pas la chose commandée d'autres ayment la chose commandée, qu'ils n'ayment pas Dieu qui commande. Voilà un predicateur qui annonce la parolle de Dieu, tout le monde y court; et pourquoy cela? C'est parce qu'il dit bien et fait des merveilles. En voilà un autre qui presche la mesme parolle, personne n'y va ce predicateur, dit-on, n'a point bonne grace, son discours ne m'est Certes voicy la cause de tous nos maux; point agreable. D'où vient cela? Est-ce quand nos superieurs et ceux qui nous qu'il n'a pas assez d'eloquence pour chas- commandent sont à nostre gré, et selon nos touiller vos oreilles par son bien-dire? Hé! humeurs et inclinations, nous ne treuvons quel aveuglement? N'est-ce pas tousjours point de difficulté à ce qu'ils nous ordonla mesme parolle et volonté de Dieu qu'il nent: mais s'ils ne sont pas tels, les moinvous annonce? Si vous aymez cette divine dres choses ordonnées par eux nous sont parolle, et Dieu qui vous l'envoye, et qui rudes et repugnantes à nostre inclination. commande que l'on fasse sa volonté, pour- Or qui ne voit que nous ne regardons pas quoy ne la recevez-vous pas esgalement que c'est Dieu qui nous envoye le commande celuy-cy comme de cet autre? Si un roy dement? mais pour l'agreer nous prenons ou quulque prince vous envoyoit des let-garde si celuy qui nous l'apporte est vestu

fruicts.

de verd ou de gris, c'est-à-dire que nous | resjouyssons de voir qu'ayant reprisša viregardons quelle est sa mine ou sa conte-gueur elle nous fait amplement part de ses nance. O Dieu! il ne faut pas faire cela; mais il faut recevoir l'obeyssance de qui que ce soit qu'elle vienne sans exception quelconque, comme la volonté de Dieu, aymant non seulement Dieu qui commande, mais encore la chose commandée, prenant ce commandement et le mettant sur nostre teste, c'est-à-dire dans le fond de nostre volonté pour l'agreer et l'exécuter avec fidelité.

Or si vous faites ainsi, mes cheres filles, vous imiterez la Ste Vierge, et vous vous donnerez à son exemple totalement à Dieu, et faisant vos renouvellemens vous reprendrez nouvelles forces et vigueur pour le service de sa divine Majesté faites-les donc fidellement; car tant que nous vivrons nous aurons besoin de nous renouveller.

Tous les saincts estoient fort soigneux de faire ce renouvellement, et il se practiquoit mesme en l'ancienne loy, d'autant | que nostre nature est de soy si infirme, que facilement elle se refroidit, et vient à descheoir de ses bonnes resolutions. La terre mesme se lasse, et ne veut pas tousjours faire ses productions, et semble que l'hiver elle se repose: mais quand le printemps est venu elle se renouvelle, et nous nous

Ainsi, mes cheres filles, pour reparer vos manquemens et reprendre nouvelles forces, vous venez aujourd'huy faire vos renouvellemens, comme Nostre-Dame et chere Maistresse vous enseigne en sa saincte presentation; car bien qu'elle n'eust point besoin de se renouvelier, d'autant que n'ayant point peché elle ne pouvoit descheoir de la resolution qu'elle avoit faicte d'estre toute à Dieu; neantmoins la divine providence a permis, pour nostre instruction, qu'elle reconfirmast en ce jour le sacrifice et l'offrande qu'elle lui avoit désjá faite d'elle-mesme en sa tres saincte conception. Faites-les donc à son imitation, avec une grande ferveur d'esprit, une profonde humilité et une ardente charité. Jettez des soupirs et eslans amoureux à nostre cher Sauveur; accompagnez cette glorieuse Vierge en sa saincte presentation, et mettez vos cœurs, vostre ame et tout vostre estre entre ses mains, et elle vous presentera à | la tres-saincte Trinité, et vous obtiendra mille benedictions en cette vie, qui vous feront parvenir à la gloire eternelle en l'autre, où nous conduisent le Pere, le Fils et le Sainct-Esprit. Amen.

SERM ON

POUR LE SECOND DIMANCHE DE L'ADVENT.

In illo tempore, cum audisset Joannes in vincu'is opera Christi, mittens duos de discipulis suis, ait illi: Tu es qui venturus es, an alium expectamus? MATTH XL.

En ce temps-là, comme S. Jean eust ouï en la prison les œuvres merveilleuses de Jesus-Christ, il envoya deux de ses disciples luy demander s'il estoit celuy qui devoit venir, ou s'ils en devoient attendre un autre.

L'Evangile que nous lisons en la messe de ce jour est divisé en trois parties. En la premiere il est dit que S. Jean estant en prison pour la justice, il envoya deux de ses disciples à Nostre-Seigneur, pour sçavoir de luy s'il estoit le Messie promis en la loy, ou s'ils en devoient attendre un autre; la seconde est la response que leur

fit Nostre-Seigneur; et la troisiesme, de ce que Nostre-Seigneur dit aux Juifs à la louange de S. Jean, après que ses disciples s'en furent retournez.

C'est une chose admirable que nos anciens peres qui ont esté si clair-voyans, et qui ont eu de si grandes lumieres pour expliquer et développer les plus grandes et

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obscures difficultez de la saincte Escriture, se soient neantmoins tousjours treuvez estonnez sur le premier poinct de cet Evangile, pour sçavoir comment se doit entendre que S. Jean qui connoissoit NostreSeigneur envoya deux de ses disciples pour sçavoir de luy s'il estoit ce grand prophete et vray Messie promis, ou s'ils en devoient attendre un autre; car, disent-ils, si S. Jean sçavoit bien qu'il estoit le vray Messsie, pourquoy luy envoyoit-il demander? Or que S. Jean sceut bien que celuy à qui il envoyoit faire cette demande estoit le vray Messie, cela est indubitable, il le sceut, qu'il estoit encore dans le ventre de sa mere, et il n'y a eu aucun sainct qui aye eu de plus grandes lumieres et intelligence du mystere de l'incarnation, que ce glorieux sainct. Certes on peut dire qu'il fut comme l'escholier de NostreDame, laquelle lui apprit ce divin mystere lorsqu'elle alla visiter Ste Elisabeth; visite en laquelle il fut sanctifié par le divin Sauveur de nos ames, lequel il connut, et tressaillant d'aise dans les entrailles de sa mere Ste Elisabeth, il l'adora et se consacra dèslors entierement à son service.

Ce fut luy qui fut son précurseur, et qui annonça sa veneuë au monde : c'est lui qui le baptiza et qui vit descendre du ciel le Sainct-Esprit en forme de colombe sur luy, et qui entendit la voix du Pere eternel disant: Hic est Filius meus dilectus, in quo mihi bene complacui; Celuy-cy est mon fils bien-ayme, auquel j'ay pris tout mon bon plaisir. C'est luy qui le monstra au doigt, disant Ecce Agnus Dei, ecce qui tollit peccata mundi; Voici l'agneau de Dieu, voicy celuy qui oste les pechez du monde. Vous voyez donc bien maintenant comme il connoissoit Nostre-Seigneur, et le tenoit pour le vray Messie.

Mais pourquoy donc, disent nos anciens peres, ce glorieux sainct estant en prison, et entendant parler des grands prodiges et miracles que faisoit Nostre-Seigneur, envoye-t'il ses disciples pour sçavoir de luy qui il est, et si c'est luy qui doit venir, ou s'ils en doivent attendre un autre? Certes tous sont admirables à demesler cette difficulté, et si je voulois rapporter la diversité de leurs opinions sur ce subjet, il m'y faudroit employer beaucoup de temps, c'est pourquoy je m'arresteray seu

lement à ce qu'en disent le grand S. Hilaire et S. Jean Chrysostome, qui ont, ce me semble, le mieux rencontré en ce subjet.

L'on ne fait pas tousjours des demandes, disent ces saincts peres, ny par ignorance, ny pour sçavoir les choses qu'on demande: mais l'on en fait pour plusieurs autres causes et raisons; car autrement la divine Majesté ne feroit jamais aucune demande aux hommes, d'autant qu'elle sçayt tout, et ne peut ignorer chose quelconque, elle penetre le plus intime du cœur; et n'y a rien de si secret et caché qui ne soit tresclair et manifeste à sa divine sapience, ainsi que va disant le sainct prophete David, ce divin poëte, en ses psalmes: Intellexisti cogitationes meas de longe, semitam meam, et funiculum meum investigasli, et omnes vias meas prævidisti; Seigneur, dit-il, vous avez connu de loin mes pensées, vous avez consideré mon sentier, et avez fait recherche du lieu de ma retraite, vous avez preveu toutes mes voyes, et si j'ay esté comme un cerf qui ay couru par les forests les plus remplies de rouces et d'espines pour me cacher, vous estes ce divin chasseur, qui de loin avez remarqué mes pas et mes vestiges, et m'avez aperceu au lieu où je m'estois retiré, d'autant que vous avez des yeux qui voyent tout et qui penetrent tout : Quo ibo a spiritu tuo? et quo a facie tua fugiam? si ascendero in cœlum, tu illic es, si descendero in infernum, ades; Où iray-je donc pour me cacher de vous? si je monte au ciel, vous y estes, et si je descends en enfer, je vous y trouveray plus present que moy-mesme. Si sumpsero pennas meas diluculo et habitavero in extremis maris, et enim illuc manus tua deducet me; Et si comme la belle aurore je m'en vay courant sur les eaux, me transportant jusqu'aux extresmitez de la mer, pour y faire ma demeure, vous m'y conduirez et y serez plutost que moy. Que feray-je donc, ô Seigneur, pour me cacher de vous? je ne sçaurois echapper de devant vostre face; car vous estes present partout.

Mais encore que Dieu soit present partout, qu'il voye et scache toutes choses, il n'a pas laissé neantmoins de faire plusieurs fois des demandes aux hommes; non qu'il ignorast ce qu'il leur demandoit: mais sa

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ouvert, et qu'il n'y estoit plus, elle pleura amerement; elle y vit deux anges qui luy demanderent pourquoy elle pleuroit: Mulier quid ploras? Femme, pourquoy pleurez-vous ? Hé! dit-elle, c'est qu'ils ont osté mon Maistre, et je ne sçay où ils l'ont mis, Quia tulerunt Dominum meum et nescio ubi posuerunt eum. Puis passant un peu plus avant, elle aperceust Nostre-Seigneur en la forme d'un jardinier qui luy demanda encore Femme, pourquoy pleurez-vous? et qui cherchez-vous? Et elle toute transportée de l'amour qu'elle luy portoit, croyant qu'il fust veritablement un jardinier, luy dit: Seigneur, si vous l'avez osté,

divine providence l'a fait specialement pour trois causes, dont la premiere est, afin de leur faire confesser leurs pechez. Lors qu'Adam eut transgressé le commandement que Dieu luy avoit fait, il l'appela, Juy disant Adam, ubi es? Adam, où estu? et demanda à nostre mere Eve ce qu'elle avoit fait or ce n'estoit pas qu'il ne sceust bien où estoit Adam et ce qu'Eve avoit fait. Mais la cause pour laquelle il leur fit ces demandes fut afin qu'Adam confessast sa faute, et luy en demandast pardon mais le miserable, au lieu de la confesser, il s'excusa sur sa femme, et pour cela il fut chastié de Dieu, luy et toute sa postérité. Certes une partie des peres tien-dites-moy où vous l'avez mis et je l'empor nent que s'il eust confessé sa faute quand Dieu l'appella, et qu'il eust frappé sa poitrine, et dit un peccavi, sa divine bonté luy eust pardonné, et ne l'eust pas frappé du fleau dont il l'avoit menacé, et duquel il l'a puny luy et toute sa posterité: mais d'autant qu'il ne le fit pas, nous sommes tous demeurez entachez du peché, et par consequent subjets à la peine qu'il tire après soy,

La seconde cause pour laquelle la divine Majesté fait des demandes aux hommes, est pour les esclaircir de leurs doutes, ou les instruire des mysteres de la foy, ainsi qu'il fit à l'endroict des deux disciples qui s'en alloient en Emaus : Nostre-Seigneur s'apparoissant à eux en forme de pelerin, leur demanda de quoy ils parloient, les interrogeantet esclaircissant sur les doutes qu'ils avoient de sa resurrection, Interpretabatur illis, in omnibus scripturis, quæ de ipso erant. Il est certain qu'il ne demanda point à ces deux disciples quels estoient leurs discours pour ignorer et ne sçavoir pas ce de quoy ils parloient: mais il leur fit cette demande pour prendre subjet de les instruire et esclaircir de leurs difficultez, et les retirer de leur ignorance, leur expliquant les Escritures qui parloient de luy, specialement de sa resurrection.

La troisiesme cause pour laquelle Dieu fait des demandes aux hommes est pour provoquer leur amour envers sa divine bonté; en voicy un exemple: La Magdelene, après la mort et passion de NostreSauveur, s'en alla oindre et embaumer son sacré corps; mais voyant le monument

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teray; Domine, si tu sustulisti eum, dicito mihi ubi posuisti, et ego eum tollam. Ha! Seigneur, pourquoy demandez-vous cela à vostre chere amante? ne sçavez-vous pas bien la cause de ses larmes, et ce qu'elle cherche ? Certes, ce divin Sauveur le sçavoit tres-bien, et ce n'estoit pas pour l'apprendre qu'il luy faisoit cette demande, d'autant que toutes choses luy sont tresclaires et manifestes. Mais il se plaist de faire quelques fois telles et semblables demandes à ses creatures, pour leur faire produire des oraisons jaculatoires et des actes d'amour envers sa divine bonté.

Vous voyez donc bien maintenant comme l'on ne fait pas tousjours des demandes par ignorance, mais bien pour plusieurs autres causes et raisons, ainsi que nous avons dit. C'est pourquoy le glorieux S. Jean n'envoya pas ses disciples à Nostre-Seigneur luy demander s'il estoit le vray Messie ou non, car quant à luy il n'en doutoit nullement; mais il les y envoya pour trois raisons que je declareray briefvement.,

La premiere raison pour laquelle ce grand sainct envoya ses deux disciples à NostreSeigneur luy demander s'il estoit le Messie, fut pour le leur faire connoistre, et par leur moyen à tout le monde; car après leur avoir souvent presché sa venue, ses merveilles, ses grandeurs, il les envoya enfin voir celuy qu'il leur avoit si souvent presché et annoncé. Certes ce doit estre le principal but de tous les docteurs et predicateurs, de faire connoistre Dieu. Les superieurs, et ceux qui ont charge des ames et qui les gouvernent, ne doivent re

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