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servir du terme général; car un frêne, un sapin, un chène, sont les noms de trois classes ou espèces d'arbres, et chacune comprend une infinité d'objets individuels de sa classe. Il paroît donc que quoique la formation des conceptions abstraites ou générales de l'esprit soit considérée comme une opération très-pénible, la première formation du langage a été évi- the Ducted demment fondée, en partie, sur ces concep-Blair est tions; car, à l'exception des noms propres des

Revision individus, tels que Pierre, Paul, César, Cicéraire à chi

ron tous les noms substantifs dont nous

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nous servons dans le discours, ne sont point ouve les noms d'un objet particulier; mais d'une espèce très-multipliée et très-étendue, comme homme, lion, maison, rivière, etc. Ce seroit Ju toutefois une erreur d'imaginer que l'invention & winn des termes, soit abstraits ou généraux, exige des efforts d'esprit extraordinaires; car, quel que puisse être son procédé dans cette opération, il est certain que dès que les hommes ont apperçu, entre des objets, une ressemblance, ils inclinent naturellement à les désigner par la même dénomination, et à les ranger par conséquent, dans la même classe. Les enfans qui commencent à parler, démontrent tous les jours la justesse de cette observation.

Mais le langage, parvenu au degré que nous venons de décrire, ne pouvoit encore distinguer que très-imparfaitement les objets ; car lorsqu'on prononçoit, dans le discours, un nom substantif, tel que, homme, lion, arbre, etc., il étoit impossible de distinguer l'homme, le lion ou l'arbre dont on vouloit parler; cet embarras fit naître l'invention d'un expédient pour faire connoître l'objet individuel dont il étoit question au moyen de cette partie du discours qu'on nomme l'article.

La force de l'article consiste à distinguer, dans un grand nombre d'individus ou d'objets de la même espèce, l'individu ou l'objet dont on veut parler. La langue anglaise a deux articles a et the; a est le plus général, et the est plus limité. A est l'équivalent de l'adjectif un, qui tient souvent, en français, lieu d'article. Il ne désigne qu'un seul objet d'une espèce, mais d'une pensée indéterminée, comme un lion, un roi, etc. The est équivalent des articles français le, la, les. Il indique un individu ou un objet déterminé, comme le lion, le roi, etc.

Les articles sont des mots très-utiles et très

usités dans le discours. Cependant quelques langues n'en ont point. La langue grecque n'a

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Βασιλέυς

propre et défini le, la, les. Baeus signifie un roi. Bartus signifie le roi. Les latins n'ont point d'article; ils y suppléent par les pronoms, hic, ille, iste, au moyen desquels ils distinguent l'objet dont il est particulièrement question.« Noster sermo', dit Quintilien, articulos » non desiderat, ideoque in alias partes ora» tionis sparguntur. » Je considère toutefois le manque d'articles comme un défaut dans la langue latine, parce que les articles contribuent infiniment à la précision et à la clarté du discours.

Des exemples pris dans la langue anglaise nous feront mieux sentir la vérité de cette assertion, en montrant la différence du sens des mêmes mots, au moyen du changement d'articles. The son of a king, signifie le fils d'un roi ; the son of the king, signifie le fils du roi. A son of the king's, signifie un des fils du roi. Mais en latin, filius regis est tout-àfait vague ou indéterminé; et pour indiquer dans lequel des trois sens on doit l'entendre, il faut nécessairement employer un nombre de mots, c'est-à-dire, une périphrase. Les langues anglaise et française ont donc à cet égard, l'avantage de la précision et de la clarté

sur la langue latine. Il en est de même des questions suivantes : are you a king? êtes-vous roi, ou un roi? Are you the king? êtes-vous le roi? sont des questions fort différentes et confondues dans la langue latine: esne tu rex? Thou art a man, tu es un homme, est une assertion très-insignifiante, et thou art the man, tu es l'homme, peut être, dans certaines occasions, une assertion très-dangereuse. Ces observations servent à faire sentir la force et l'importance des articles, et je m'en sers avec d'autant plus de plaisir qu'elles font connoître les avantages de notre langue.

Indépendamment de la faculté d'être particularisée par l'article, les noms substantifs ont encore trois modifications ou dépendances, le nombre, le genre et le cas, qui demandent

notre attention.

Le nombre distingue les substantifs, comme un ou plusieurs de la même espèce. Cette distinction se fait au moyen du singulier et du pluriel qu'on trouve dans toutes les langues, et qui semblent être de la même date que leur formation; car la différence entre un et plusieurs est celle que les hommes doivent avoir eu plus fréquemment besoin d'indiquer. Pour rendre cette distinction plus facile,

toutes les langues ont adopté l'expédient d'une petite variation dans la terminaison des substantifs. Les Anglais forment, en général, le pluriel par l'addition d'une s: l'hébreu, le grec, et quelques anciennes langues avoient, non-seulement un pluriel, mais un duel poúr exprimer deux unités, et on n'en sera point surpris si on considère que les termes numériques n'étoient point encore inventés, et que, un, deux, et beaucoup, furent les seuls, ou au moins les principales distinctions que les hommes eurent d'abord le besoin ou l'occasion de faire (1).

(1) Dans la langue française, on formoit aussi autrefois le pluriel en ajoutant une s à la terminaison du singulier, et il me semble qu'on a très-injudicieusement adopté un changement à cet égard. Par exemple, le mot changement, dont je viens de me servir, s'écrivoit au pluriel changements, en supprimant l's, on retrouvoit le singulier. Aujourd'hui on supprime le t final, et on écrit au pluriel changemens; ces innovations, qui ne produisent aucune espèce d'avantage, rendent la langue plus difficile à apprendre, particulièrement pour les étrangers, et je ne crois pas que le mérite d'une langue consiste dans sa difficulté. La nouvelle ortographe a défiguré toutes les étymologies, et on répond froidement à ceux qui les regrettent.

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