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lente qu'exige l'étude d'une science nécessaire, ou l'examen d'une vérité abstraite.

L'heureuse influence du goût sur le bonheur de la vie humaine invite encore à cultiver son étude. L'homine le plus actif et le plus chargé d'affaires ne peut pas s'en occuper sans cesse : ceux qui exercent des professions graves ne peuvent pas se livrer sans relâche à des pensées sérieuses. Une grande fortune et la situation la plus riante ne peuvent pas fournir, dans tous les instans, des plaisirs. La vie de l'homme ojsif.séra toujours languissante; et il en sera de même de l'homme actif, si à sa principale occupation, il n'en ajoute pas une secondaire. Comment remplir les intervalles ou lacunes dont la vie de tous les hommes est plus ou moins semée ? L'étude de la littérature et la culture du goût offrent sans contredit le passetemps le plus agréable et le plus consonnant avec la raison et la dignité de l'esprit humain. Celui qui s'en est fait l'heureuse habitude trouve toujours, au besoin, une provision d'innocens plaisirs qui servent à charmer ses loisirs, et à le défendre du triste ennui et de l'atteinte des passions si souvent funestes.

Les amusemens du goût tiennent un juste milieu entre les plaisirs des sens et les médita

tions du génie; ils rafraîchissent l'esprit fatigué d'un travail abstrait; ils l'élèvent au-dessus des affections sensuelles, et le disposent à goûter les jouissances de la vertu.

La justesse de ces observations est si généralement constatée par l'expérience, que les hommes sages considèrent tous la culture du goût comme une branche importante dans l'éducation de la jeunesse. De cette étude on passe avec aisance aux occupations plus sérieuses. On conçoit les plus heureuses espérances des jeunes gens qui annoncent du goût pour la littérature; ceux qui au contraire paroissent incapables de sentir les beautés de la poësie, de l'éloquence et des beaux arts, donnent une mauvaise idée de leur jugement et de leurs inclinations; et il est certain que la culture du goût influe à certain point sur les heureuses dispositions, de quelqu'espèce qu'elles puissent être. Elle augmente la sensibilité, elle adoucit l'ame et diminue l'influence des passions violentes.

Ingenuas didicisse fideliter artes
Emollit mores nec sinit esse feros.

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Les sentimens vertueux et les exemples brillans que la poësie, l'éloquence et l'histoire

nous

nous présentent, tendent naturellement à nous inspirer l'amour de la gloire, le mépris du faste et de la fortune, et l'admiration de tout ce qui est véritablement grand ou illustre.

Je n'irai point jusqu'à dire que la culture du goût équivaut à celle de la vertu, ou qu'on les trouve l'un et l'autre chez tous les hommes en proportion égale. Je sais que le goût n'est point un correctif assez puissant pour réprimer les inclinations vicieuses auxquelles la race humaine est malheureusement sujette. Je sais que sa théorie peut flotter légèrement sur la surface de l'esprit, tandis que le cœur est la proie des passions malfaisantes ; mais il n'est pas moins vrai que la culture du goût tend à le purifier, et qu'elle est un accessoire de la saine morale. La lecture des productions du génie, soit en prose ou en vers, fait presque toujours sur l'esprit quelques heureuses impressions; et quoiqu'elles ne soient pas toujours durables, on ne doit pas moins les classer parmi celles qui disposent à chérir la vertu ; il est certain que pour atteindre au sublime de l'éloquence, il faut être fortement animé par l'amour de la vertu : j'aurai l'occasion de démontrer plus amplement la vérité de cette assertion. Celui qui veut vivement émouTome I.

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voir, doit vivement sentir. Les sentimens d'honneur, de générosité, de vertu sont les seuls qui peuvent enflammer le génie et présenter à l'esprit les grandes idées qui enlèvent l'admiration. Si ces dispositions sont indispensables pour exciter les grands efforts de l'éloquence, elles doivent l'être aussi pour exciter chez nous le sentiment de l'admiration.

Sans m'arrêter plus long-tems sur ces réflexions générales, je passe aux différens sujets du présent Cours de Leçons, que je divise en cinq parties. Dans la première, on trouvera quelques dissertations préparatoires sur la nature du goût et sur la source de ses plaisirs ; la seconde contient des observations sur le langage; la troisième, sur le style; la quatrième, sur l'éloquence proprement dite, ou sur les différentes sortes de discours publics; la cinquième ou dernière, a pour objet l'examen critique des compositions en prose et en vers qui ont généralement obtenu la préférence sur toutes celles du même genre.

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SECONDE LEÇON.

Du goût.

COMME c'est toujours le goût qu'on prend pour juge des discussions relatives au mérite des écrits et des discours, avant d'entamer notre sujet il ne sera point déplacé de faire sur le goût quelques observations. Ce sujet est un de ceux qu'on a traité jusqu'à présent de la manière la plus vague et la plus insignifiante; c'est aussi un de ceux dont il est moins facile de donner une définition claire et précise; et de tous ceux que ces leçons contiennent, il paroîtra le plus sec et le plus abstrait. Je distribuerai ce que je me propose d'en dire, dans l'ordre suivant j'expliquerai d'abord la nature du goût considéré comme un pouvoir ou une faculté de l'esprit. J'examinerai ensuite à quel point il est susceptible d'être perfectionné. J'indiquerai les moyens de culture, les sources où il convient de les puiser, et le caractère du goût dans son plus haut degré de perfection. Je passerai aux variations dont il est susceptible, et j'examinerai s'il est possible d'établir une

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