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Ainsi vous n'avancez rien de n'avaler pas tout à coup le poison du libertinage, si cependant vous le sucez peu à peu, si vous laissez insensiblement gagner jusqu'au cœur cette subtile contagion, qu'on respire avec l'air du monde dans ses conversations et dans ses coutumes.

Qui pourrait ici raconter toutes les erreurs du monde? Ce maître subtil et dangereux tient école publique sans dogmatiser: il a sa méthode particulière de ne prouver pas ses maximes, mais de les imprimer sans qu'on y pense; autant d'hommes qui nous parlent, autant d'organes qui nous les inspirent; nos ennemis par leurs menaces, et nos amis par leurs bons offices, concourent également à nous donner de fausses idées du bien et du mal. Tout ce qui se dit dans les compagnies nous recommande, ou l'ambition, sans laquelle on n'est pas du monde, ou la fausse galanterie, sans laquelle on n'a point d'esprit. Car c'est le plus grand malheur des choses humaines, que nul ne se contente d'être insensé seulement pour soi, mais veut faire passer sa folie aux autres : si bien que ce qui nous serait indifférent, souvent, tant nous sommes faibles, attire notre imprudente curiosité par le bruit qu'on en fait autour de nous. Tantôt une raillerie fine et ingénieuse, tantôt une peinture agréable d'une mauvaise action impose doucement à notre esprit. Ainsi, dans cet étrange empressement de nous entrecommuniquer nos folies, les âmes les plus innocentes prennent quelque teinture du vice et des maximes du siècle; et recueillant le mal deçà et delà dans le monde, comme à une table couverte de mauvaises viandes, elles y amassent aussi peu à peu, comme des humeurs peccantes, les erreurs qui offusquent notre intelligence. Telle est à peu près la séduction qui règne publiquement dans le monde; de sorte que si vous demandez à Tertullien ce qu'il craint pour nous dans cette

uvez-nous, sauvez-nous, Seigneur, de la contagion e siècle! « Sauvez-nous, disait le Prophète, parce 'il n'y a plus de saints sur la terre, et que les véés ont été diminuées par la malice des enfants des mmes:» Salvum me fac, Domine, quoniam defecit tus, quoniam diminutæ sunt veritates a filiis homi2. Où il ne faut pas se persuader qu'il se plaigne infidèles et des idolâtres, ceux-là ne diminuent pas ement les vérités, mais ils les méconnaissent : il se nt des enfants de Dieu, qui, ne les pouvant tout à éteindre, à cause de leur évidence, les retranchent es diminuent au gré de leurs passions. Car le monde -t-il pas entrepris de faire une distinction entre les es? Il y en a que nous laissons volontiers dans l'exétion et dans la haine publique, comme l'avarice, la auté, la perfidie; il y en a que nous tâchons de ttre en honneur, comme ces passions délicates qu'on pelle les vices des honnêtes gens. Malheureux, qu'enprenez-vous? « Jésus-Christ est-il divisé?» Divisus est ristus? Que vous a-t-il fait, ce Jésus-Christ, que vous déchirez hardiment, et défigurez sa doctrine par tte distinction injurieuse? Le même Dieu, qui est le otecteur de la bonne foi, n'est-il pas aussi l'auteur de tempérance? « Jésus-Christ est tout sagesse, dit Tertullien, tout lumière, tout vérité; pourquoi le partagez-vous par votre mensonge? » Comme si son saint vangile n'était qu'un assemblage monstrueux de vrai de faux, ou comme si la justice même avait laissé

1 De Spect., n° 27.

2 Ps. XI, 1.

3 I. Cor., 1, 13.

trer, on perd le respect qui leur est dû, on les ravilit, on leur ôte tellement leur juste grandeur qu'à peine les voyons-nous : ces grands astres ne nous semblent qu'un petit point, tant nous les mettons loin de nous, ou tant notre vue est troublée par les nuages épais de nos ignorances et de nos opinions anticipées: Diminuta sunt veritates a filiis hominum.

Puisque les maximes de l'Évangile sont si fort diminuées dans le siècle, puisque tout le monde conspire contre elles, et qu'elles sont accablées par tant d'iniques préjugés, Dieu, par sa justice suprême, a dû pourvoir à la défense de ces illustres abandonnées, et commettre des avocats pour plaider leur cause. C'est pour cela, chrétiens, que ces chaires sont élevées auprès des autels; afin que, pendant que la vérité est si hardiment déchirée dans les compagnies des mondains, il y ait du moins quelque lieu où l'on parle hautement en sa faveur, et que la cause la plus juste ne soit pas la plus délaissée. Venez donc écouter attentivement la défense de la vérité, dans la bouche des prédicateurs venez recevoir par leur ministère la parole de Jésus-Christ condamnant le monde et ses vices, et ses coutumes, et ses maximes antichrétiennes car, comme dit saint Jean Chrysostome 2, Dieu nous ayant ordonné deux choses, d'écouter et d'accomplir sa sainte parole, quand aura le courage de

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que la vérité jugera les hommes, il ne faut pas messieurs, ni qu'elle paraisse au dehors, ni ait besoin, pour se faire entendre, de sons diset articulés. Elle est dans les consciences, je dis dans les consciences des plus grands pécheurs; lle y est souvent oubliée durant cette vie. Qu'ar-t-il après la mort? la vérité se fera sentir, et en même temps sera prononcé. Quelle sera cette se, combien étrange, combien terrible, lorsque ntes vérités, auxquelles les pécheurs ne pensaient , et qu'ils laissaient inutiles et négligées dans un e leur mémoire, enverront tout d'un coup à leurs in trait de flamme si vif, qu'ils découvriront d'une vue la loi et le péché confrontés ensemble; et voyant dans cette lumière l'énormité de l'un par ugnance avec l'autre, ils reconnaîtront en tremla honte de leurs actions et l'équité de leur sup

chant cela, chrétiens, je reviens encore à l'apôtre : nt persuadés de ces choses, nous venons enseigner - hommes la crainte de Dieu » Scientes ergo, tim Domini hominibus suademus. Nous venons les exer de sa part qu'ils souffrent qu'on les entretienne vérités de l'Évangile, et qu'ils préviennent le ple de cette attention forcée par une application ntaire.

Vous qui dites que vous savez tout, et que vous n'avez pas besoin qu'on vous avertisse, vous montrez bien par un tel discours que même vous ne savez pas quelle est la nature de votre esprit. Esprit humain, abime infini, trop petit pour toi-même et trop étroit pour te comprendre tout entier; tu as des conduites si enveloppées, des retraites si profondes et si tortueuses dans lesquelles tes connaissances se recèlent, que souvent tes propres lumières ne te sont pas plus présentes que celles des autres. Souvent ce que tu sais, tu ne le sais pas; ce qui est en toi, est loin de toi; tu n'as pas ce que tu possèdes : << Donc, dit excellemment saint Augustin, notre esprit « est trop étroit pour se posséder lui-même tout entier :>> Ergo animus ad habendum seipsum angustus est'. Prouvons ceci par quelque exemple.

En quels antres profonds s'étaient retirées les lois de l'humanité et de la justice, que David savait si parfaitement, lorsqu'il fallut lui envoyer Nathan le prophète pour les rappeler en sa mémoire? Nathan lui parle, Nathan l'entretient, et il entend si peu ce qu'il faut entendre, qu'on est enfin contraint de lui dire : 0 prince! c'est à vous qu'on parle2; parce que, enchanté par sa passion, et détourné par les affaires, il laissait la vérité dans l'oubli. Alors savait-il ce qu'il savait? entendait-il ce qu'il entendait? Chrétiens, ne m'en croyez pas; mais croyez sa déposition et son témoignage. C'est lui-même qui s'étonne que ses propres lumières l'avaient quitté dans cet état malheureux : Lumen oculorum meorum, et ipsum non est mecum3. Ce n'est pas une lumière étrangère, c'est la lumière de mes yeux, de mes propres eux, c'est celle-là même que je n'avais plus. Écoutez,

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