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c'est-à-dire, qu'avant que de monter sur son tribunal, pour condamner les coupables par une sentence rigoureuse, il parle premièrement dans les chaires, pour les ramener à la droite voie par des avertissements charitables.

C'est en ce saint temps de pénitence que nous devons une attention extraordinaire à cette voix paternelle qui nous avertit. Car, encore qu'elle mérite en tout temps un profond respect, et que ce soit toujours un des devoirs les plus importants de la piété chrétienne que de donner audience aux discours sacrés; ç'a été toutefois un sage conseil de leur consacrer un temps arrêté par une destination particulière, afin que, si tel est notre aveuglement, que nous abandonnions presque toute notre vie aux pensées de vanité qui nous emportent, il y ait du moins quelques jours dans lesquels nous écoutions la vérité qui nous conseille charitablement, avant que de prononcer notre sentence, et qui s'avance à nous. pour nous éclairer, avant que de s'élever contre nous pour nous confondre.

Paraissez donc, ô vérité sainte! faites la censure publique des mauvaises mœurs; illuminez par votre présence ce siècle obscur et ténébreux; brillez aux yeux des fidèles, afin que ceux qui ne vous connaissent pas vous entendent, que ceux qui ne pensent pas à vous vous regardent, que ceux qui ne vous aiment pas vous embrassent.

Voilà, chrétiens, en peu de paroles, trois utilités principales de la prédication évangélique. Car, ou les hommes ne connaissent pas la vérité, ou les hommes ne pensent pas à la vérité, ou les hommes ne sont pas touchés de la vérité. Quand ils ne connaissent pas la vérité, parce qu'elle ne veut pas les tromper, elle leur parle pour éclairer leur intelligence. Quand ils ne pen

prédication de l'Évangile; parce que, s'ils ne sont pas bien instruits, elle leur découvrira ce qu'ils ignorent; et s'ils sont assez éclairés, elle les fera penser à ce qu'ils savent; et s'ils y pensent sans être émus, le Saint-Esprit agissant par l'organe de ses ministres, elle fera entrer dans le fond du cœur ce qui ne fait qu'effleurer la surface de leur esprit. Et comme ces trois grands effets comprennent tout le fruit des discours sacrés, j'en ferai aussi le sujet et le partage de celui-ci, qui sera, comme vous le voyez, le préparatif nécessaire et le fondement de tous les autres.

PREMIER POINT.

Comme la vérité de Dieu, qui est notre loi immuable, a deux états différents, l'un qui touche le siècle présent, et l'autre qui regarde le siècle à venir; l'un où elle règle la vie humaine, et l'autre où elle la juge: aussi le Saint-Esprit nous la fait paraître dans son Écriture sous deux visages divers, et lui donne des qualités convenables à l'un et à l'autre. Dans le psaume cent dix-huitième, où David parle si bien de la loi de Dieu, on a remarqué, chrétiens, qu'il l'appelle tantôt du nom de commandement, tantôt de celui de conseil; quelquefois il la nomme un jugement, et quelquefois un témoignage. Mais encore que ces quatre titres ne signifient autre chose que la loi de Dieu, toutefois il faut

observer que les deux premiers lui sont propres au siècle où nous sommes, et que les deux autres lui conviennent mieux dans celui que nous attendons. Dans le cours du siècle présent cette même vérité de Dieu, qui nous paraît dans sa loi, est tout ensemble un commandement absolu et un conseil charitable. Elle est un commandement, qui enferme la volonté d'un souverain; elle est aussi un conseil, qui propose l'avis d'un ami. Elle est un commandement, parce que ce souverain y prescrit ce qu'il exige de nous pour les intérêts de son service; et elle mérite le nom de conseil, parce que cet ami y expose en ami sincère ce que demande le soin de notre salut. Les prédicateurs de l'Évangile font paraître la loi de Dieu dans les chaires en ces deux augustes qualités en qualité de commandement, en tant qu'elle est nécessaire et indispensable; en qualité de conseil, en tant qu'elle est utile et avantageuse. Que si, manquant par un même crime à ce que nous devons à Dieu, et à ce que nous nous devons à nous-mêmes, nous méprisons tout ensemble, et les ordres de ce souverain, et les conseils de cet ami; alors, cette même vérité prenant en son temps une autre forme, elle sera un témoignage pour nous convaincre, et une sentence dernière pour nous condamner: « La parole que j'ai prêchée, dit le << Fils de Dieu, jugera le pécheur au dernier jour : » Sermo quem locutus sum, ille judicabit eum in novissimo die 1. C'est-à-dire, que ni on ne recevra d'excuse, ni on ne cherchera de tempérament; la parole, dit-il, vous jugera la loi elle-même fera la sentence, selon sa propre teneur, dans l'extrême rigueur du droit; et de là vous devez entendre que ce sera un jugement sans miséricorde.

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C'est donc la crainte de ce jugement qui fait monter les prédicateurs dans les chaires évangéliques : « Nous << savons, dit le saint Apôtre, que nous devons tous com<< paraître un jour devant le tribunal de Jésus-Christ: >> Omnes nos manifestari oportet ante tribunal Christi1. « Mais sachant cela, poursuit-il, nous venons persuader << aux hommes la crainte de Dieu » Scientes ergo, timorem Domini hominibus suademus. Sachant combien ce jugement est certain, combien il est rigoureux, combier. il est inévitable, nous venons de bonne heure vous y préparer; nous venons vous proposer les lois immuables sur lesquelles votre vie. sera jugée, par lesquelles votre cause sera décidée, et vous mettre en main les articles sur lesquels vous serez interrogés, afin que vous commenciez, pendant qu'il est temps, à méditer vos réponses.

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Que si vous pensez peut-être que l'on sait assez ces vérités saintes, et que les fidèles n'ont pas besoin qu'on les en instruise, c'est donc en vain, chrétiens, que Dieu se plaint hautement, par la bouche de son prophète Isaïe, que non-seulement les infidèles et les étran«gers, mais son peuple, » oui, son peuple même, « est << mené captif, pour n'avoir pas la science » Captivus ductus est populus meus, eo quod non habeat scientiam3» Mais parce qu'on pourrait se persuader que la troupe n'est pas fort grande, parmi les fidèles, de ceux qui périssent faute de connaître; il assure au contraire qu'elle est si nombreuse, que « l'enfer est obligé de se << dilater et d'ouvrir sa bouche démesurément pour << l'engloutir, la recevoir : » Propterea dilatavit infernus animam suam, et aperuit os suum absque ullo termino". Et, de peur qu'on ne s'imagine que ceux qui périssent

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ainsi faute de science, ce sont les pauvres et les simples qui n'ont pas les moyens d'apprendre, il déclare en termes formels, et je puis bien le dire après cet oracle, que ce sont les puissants, les riches, les grands et les princes mêmes, qui négligent presque toujours de se faire instruire, et de leurs obligations particulières, et même des devoirs communs de la piété; qui ne savent presque jamais comme il faut leurs obligations particulières, et qui tombent, par le défaut de cette science, pêle-mêle avec la foule, dans les abîmes éternels: Et descendent fortes ejus et populus ejus, et sublimes gloriosique ejus ad eum 1.

Non-seulement, chrétiens, souvent nous ignorons les vérités saintes; mais même nous les combattons par des sentiments tout contraires. Vous êtes surpris de cette parole; et peut-être me répondez-vous dans votre cœur que vous n'avez point d'erreur contre la foi, que vous n'écoutez pas ces docteurs de cour qui font des leçons publiques de libertinage, et établissent de propos délibéré des opinions dangereuses. Je loue votre piété dans une précaution si nécessaire; mais ne vous persuadez pas que vous soyez pour cela exempts de l'erreur. Car il faut entendre, messieurs, qu'elle nous gagne en deux sortes : quelquefois elle se déborde à grands flots, comme un torrent, et nous emporte tout à coup; quelquefois elle tombe peu à peu, et nous corrompt goutte à goutte. Je veux dire que quelquefois un libertinage déclaré renverse d'un grand effort les principes de la religion; quelquefois une force plus cachée, comme celle des mauvais exemples et des pratiques du grand monde, en sape les fondements par plusieurs coups redoublés et par un progrès insensible.

1 Is., V, 14.

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