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Une grenouille en soupirait.
Qu'avez-vous? se mit à lui dire
Quelqu'un du peuple croassant.
Eh! ne voyez-vous pas, dit-elle,
Que la fin de cette querelle

Sera l'exil de l'un; que l'autre le chassant
Le fera renoncer aux campagnes fleuries?
Il ne régnera plus sur l'herbe des prairies,
Viendra dans nos marais régner sur les roseaux;
Et, nous foulant aux pieds jusques au fond des eaux,
Tantôt l'une, et puis l'autre, il faudra qu'on pàtisse
Du combat qu'a causé madame la génisse.

Cette crainte était de bon sens.

L'un des taureaux en leur demeure
S'alla cacher, à leurs dépens :
Il en écrasait vingt par heure.

Hélas! on voit que de tout temps Les petits ont pâti des sottises des grands.

XIV.

L'Oiseau blessé d'une flèche.

Mortellement atteint d'une flèche empennée

Un oiseau déplorait sa triste destinée ;
Et disait, en souffrant un surcroît de douleur :

Faut-il contribuer à son propre malheur!

Cruels humains! vous tirez de nos aîles
De quoi faire voler ces machines mortelles!

Mais ne vous moquez point, engeance sans pitié :
Souvent il vous arrive un sort comme le nôtre.
Des enfans de Japet toujours une moitié
Fournira des armes à l'autre.

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Va-t-en, chétif insecte, excrément de la terre!

C'est en ces mots que le lion

Parlait un jour au moucheron.

L'autre lui déclara la guerre :

Penses-tu, lui dit-il, que ton titre de roi

Me fasse peur ni me soucie?

Un bœuf est plus puissant que toi;
Je le mène à ma fantaisie.

A peine it achevait ces mots,
Que lui-même il sonna la charge,
Fut la trompette et le héros.
Dans l'abord il se met au large,

Puis prend son temps, fond sur le cou
Du lion qu'il rend presque fou.

Le quadrupède écume, et son œil étincèle:
Il rugit. On se cache, on tremble à l'environ
Et cette alarme universelle

Est l'ouvrage d'un moucheron.

Un avorton de mouche en cent lieux le harcèle;
Tantôt pique l'échine, et tantôt le museau,
Tantôt entre au fond du naseau.

La rage alors se trouve à son faîte montée.
L'invisible ennemi triomphe, et rit de voir
Qu'il n'est griffe ni dent en la bête irritée
Qui de la mettre en sang ne fasse son devoir.
Le malheureux lion se déchire lui-même,
Fait résonner sa queue à l'entour de ses flancs,
Bat l'air qui n'en peut mais; et sa fureur extrême
Le fatigue, l'abat: le voilà sur les dents.
L'insecte du combat se retire avec gloire
Comme il sonna la charge, il sonne la victoire,
Va partout l'annoncer, et rencontre en chemin
L'embuscade d'une araignée :

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Quelle chose par là nous peut être enseignée?
J'en vois deux dont l'une est qu'entre nos ennemis
Les plus à craindre sont souvent les plus petits;
L'autre, qu'aux grands périls tel a pu se soustraire,
Qui périt pour la moindre affaire.

XVI.

La Lice et sa compagne.

Une lice étant sur son terme,

Et ne sachant où mettre un fardeau si pressant,
Fait si bien qu'à la fin sa compagne consent
De lui prêter sa hutte, où la lice s'enferme.

Au bout de quelque temps sa compagne revient.

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La lice lui demande encore une quinzaine :

Ses petits ne marchaient, disait-elle, qu'à peine.
Pour faire court, elle l'obtient.

Ce second terme échu, l'autre lui redemande
Sa maison, sa chambre, son lit.

La lice cette fois montre les dents, et dit :
Je suis prête à sortir avec toute ma bande,
Si vous pouvez nous mettre hors.

Ses enfants étaient déjà forts.

Ce qu'on donne aux méchants, toujours on le regrette:

Pour tirer d'eux ce qu'on leur prête,

Il faut

que l'on en vienne aux coups;

Il faut plaider; il faut combattre.
Laissez-leur prendre un pied chez vous,
Ils en auront bientôt pris quatre.

XVII.

La Colombe et la Fourmi.

L'autre exemple est tiré d'animaux plus petits.
Le long d'un clair ruisseau buvait une colombe :
Quand sur l'eau se penchant une fourmi y tombe;
Et dans cet océan l'ont eût vu la fourmi
S'efforcer, mais en vain, de regagner la rive.
La colombe aussitôt usa de charité.

Un brin d'herbe dans l'eau par elle étant jeté,
Ce fut un promotoire où la fourmi arrive;
Elle se sauve. Et là-dessus

Passe un certain croquant qui marchait les pieds nus:
Ce croquant, par hazard, avait une arbalète.
Dès qu'il voit l'oiseau de Vénus,

Il le croit en son pot, et déjà lui fait fête.
Tandis qu'à le tuer mon villageois s'apprête,
La fourmi le pique au talon.

Le vilain retourne la tête :

La colombe l'entend, part, et tire de long.
Le soupé du croquant avec elle s'envole :
Point de pigeon pour une obole.

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