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falloit qu'il y eût dix rois qui reçussent en même temps la souveraine puissance; et dix royaumes, dans lesquels l'Empire de Rome devoit être subdivisé (1), selon l'oracle de l'Apocalypse. Tout cela s'est accompli à point nommé dans le temps de saint Léon c'est donc là le temps précis de ⚫ la naissance de l'Antechrist, et on ne peut pas résister à ces convenances.

:

XXXI.

Absurdité

Doctrine admirable! Ce n'étoit pas ces dix. rois ni ce démembrement de l'empire qui devoit inouie. constituer l'Antechrist; et ce n'étoit là tout au plus qu'une marque extérieure de sa naissance : ce qui le constitue véritablement, c'est la corruption des mœurs, c'est la prétention de la supériorité, c'est principalement la nouvelle idolâtrie. Tout cela n'est pas plus sous saint Léon que quatre-vingts ou cent ans auparavant : mais Dieu ne le vouloit pas encore imputer à antichristianisme, et il ne lui plaisoit pas que la nouvelle idolâtrie, quoique déjà toute formée, fût antichrétienne. Il n'est pas possible à la fin que de telles extravagances, où l'impiété et l'absurdité combattent ensemble à qui emportera le dessus, n'ouvrent les yeux à nos frères; et ils se désabuseront à la fin de ceux qui leur débitent de tels songes.

XXXII.

Le systême

Mais entrons un peu dans le détail de ces belles convenances, qui ont tant ébloui nos Réformés; des ministres et commençons par ces sept rois, qui, selon sur les sept saint Jean, sont les sept têtes de la bête; et par

(1) Apoc. XVII. 12.

BOSSUET. XX.

21

rois de l'A

évidemment confondu

pocalypse, ces dix cornes, qui, selon le même saint Jean, sont dix autres rois. Le sens, dit-on, en est mapar les ter nifeste. « Les sept têtes, dit saint Jean (1), sont » les sept montagnes sur lesquelles la femme est

mes de cette prophétie.

» assise, et ce sont sept rois: cinq sont passés; » l'un subsiste, l'autre n'est pas encore arrivé; et lorsqu'il sera arrivé, il faut qu'il subsiste peu; » et la bête, qui étoit et qui n'est pas, est aussi le » huitième roi, et en même temps un des sept; >> et il va tomber en ruine ». Les sept rois, c'est, dit-on (2), les sept formes de gouvernement sous lesquelles Rome a vécu : les rois, les consuls, les dictateurs, les décemvirs, les tribuns militaires qui avoient la puissance consulaire, les empereurs, et enfin le Pape. Cing ont passé, dit saint Jean: cinq de ces gouvernemens étoient écoulés lorsqu'il écrivit sa prophétie : l'un est encore; c'étoit l'empire des Césars sous lequel il écrivoit : et l'autre doit bientôt venir; qui ne voit l'Empire papal? C'est un des sept rois; une des sept formes de gouvernement: et c'est aussi le huitième roi, c'est-à-dire, la huitième forme de gouvernement: la septième, parce que le Pape tient beaucoup des Empereurs par la domination qu'il exerce; et la huitième, parce qu'il a quelque chose de particulier, cet empire spirituel, cette domination sur les consciences. Il n'y a rien de plus juste: mais un petit mot gâte tout. Premièrement, je demanderois volontiers pourquoi les sept rois sont sept formes de gouvernement, et non pas sept rois effectifs. Qu'on me montre dans les

(1) Apoc. xv. 3, 9, 10, 11, 12. — (2) Acc. I. part. p. 11.

:

Ecritures que des formes de gouvernement soient nommées des rois au contraire, je vois, trois versets après, que les dix rois sont dix vrais rois, et non pas dix sortes de gouvernement. Pourquoi les sept rois du verset 9 seroient-ils si différens des dix rois du verset 12? Prétend-on nous faire accroire que les consuls, des magistrats annuels, soient des rois? que l'abolition absolue de la puissance royale dans Rome soit un des sept rois de Rome? que dix hommes, les décemvirs, soient un roi, et toute la suite de quatre ou six tribuns militaires, plus ou moins, un autre roi? Mais en vérité est-ce là une autre forme de gouvernement? Qui ne sait que les tribuns militaires ne différoient des consuls que dans le nombre? c'est pourquoi on les appeloit, Tribuni militum consulari potestate. Et si saint Jean a voulu marquer tous les noms de la suprême puissance parmi les Romains, pourquoi avoir oublié les triumvirs? N'eurent-ils pas pour le moins autant de puissance que les décemvirs? Que si l'on dit qu'elle fut si courte qu'elle ne mérite pas d'être comptée; pourquoi celle des décemvirs, qui ne dura que deux ans, le sera-t-elle plutôt. Il est vrai, nous dira-t-on : mettons-les à la place des dictateurs; aussi bien n'y a-t-il guère d'apparence de mettre la dictature comme une forme de gouvernement sous laquelle Rome ait vécu un certain temps. C'étoit une magistrature extraordinaire qu'on faisoit selon l'exigence dans tous les temps de la république, et non une forme particulière de gouvernement. Déplaçons-les donc, et mettons les trium

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XXXIII.

Jusoire.

virs à leur place. J'y consens; et je suis bien aise moi-même de donner à l'interprétation des Protestans toute la plus belle apparence qu'elle puisse avoir: car, avec tout cela, ce n'est qu'illusion: un petit mot, comme je l'ai dit, va tout réduire en fumée : car enfin il est dit du septième roi, qui sera donc, puisqu'on le veut, un septième gouvernement, que lorsqu'il sera venu, il faut qu'il subsiste peu de temps. A peine saint Jean l'a-t-il fait paroître; et incontinent, il va, dit-il (1), en ruine. Si c'est l'Empire papal, il doit être court. Or on prétend que selon saint Jean il doit durer du moins douze cent soixante ans, autant de temps, comme le confesse notre nouvel interprète, que tous les autres gouvernemens ensemble (2). Ce n'est donc pas l'Empire papal dont il s'agit.

Mais c'est, dit-on, que devant Dieu mille ans, Réponse il- comme dit saint Pierre (3), ne sont qu'un jour. Le beau dénouement! Tout est également court aux yeux de Dieu, et non-seulement le règne du septième roi, mais encore le règne de tous les autres. Or saint Jean vouloit caractériser ce septième roi en le comparant avec les autres ; et son règne devoit être remarquable par la brièveté de sa durée. Pour faire trouver ce caractère dans le gouvernement papal, qui ne voit qu'il ne suffit pas qu'il soit court devant Dieu, devant qui rien n'est durable? Il faudroit qu'il fût court à comparaison des autres gouvernemens; plus court par conséquent que (2) Acc. I. part. p. 11. — (3) II. Petr.

(1) Apoc. XVII. 10. III. 8.

XXXIV.

Les dix rois de l'Apoca

celui des tribuns militaires qui ont à peine subsisté trente à quarante ans; plus court que celui des décemvirs qui n'en ont duré que deux; plus court du moins que celui des rois, ou des consuls, ou des empereurs qui ont rempli le plus de temps par leur durée. Mais, au contraire, celui que saint Jean a caractérisé par la brièveté de sa durée, non - seulement dure plus que chacun des autres, mais encore dure plus que tous les autres ensemble quelle absurdité plus manifeste! et n'est-ce pas entreprendre de rendre les prophéties ridicules que de les expliquer de cette sorte? Mais disons un mot des dix rois, sur lesquels notre interprète croit triompher, après Joseph Mède (1). C'est lorsqu'il nous fait paroître, 1. les lypse aussi Bretons, 2. les Saxons, 3. les Français, 4. les évidemment mal expliBourguignons, 5. les Visigoths, 6. les Suèves et les Alains, 7. les Vandales, 8. les Allemands, 9. les Ostrogoths en Italie, où les Lombards leur succèdent, 10. les Grecs. Voilà dix royaumes bien comptés, dans lesquels l'Empire romain s'est divisé au temps de sa chute. Sans disputer sur les qualités, sans disputer sur le nombre, sans dispu ter sur les dates, voici du moins une chose bien constante; c'est qu'aussitôt que ces dix rois paroissent, saint Jean leur fait donner leur autorité et leur puissance à la bête (2). Nous l'avouerons, disent nos interprètes, et c'est aussi où nous triomphons; car c'est là ces dix rois vassaux et sujets que l'Empire antichrétien, c'est-à-dire, l'Em

(1) Prej. legit. I. part. ch. vi. p. 126. Acc. des Proph. II part. 27, 28. (3) Apoc. xvi. 13.

qués.

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