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accordoient toujours des récompenses aux beaux arts. De même nos académies subsistent toujours, mais elles ont dans leur institution des vices qui les ruinent. Ici, l'inégalité des rangs est fixée par des satuts du prince, lorsqu'on n'y devroit connoître d'autre supériorité que celle du génie. Là, se rend un tribut perpétuel d'éloges fastidieux, honteux langage de la servitude, Souvent, dans ces mêmes académies, la récompense du mérite est enlevée par les menées de l'intrigue ou de l'hypocrisie. La cupidité, la vanité, la jalousie, la cabale, se sont encore emparé de nos sociétés littéraires, plus que la noble ambition de s'y distinguer par ses talens; la sagacité a dégénéré en suffisance, l'amour du beau en amour du faux bel-esprit.

D'ailleurs ce n'est point au centre du luxe que les sciences établissent toujours leur domicile; s'il en étoit ainsi, les connoîtroit-on glorieusement aux bords des lieux où le Rhin vient se perdre, dans le voisinage des îles Orcades, et de celui du Mont-Adule? Il ne faut pas, pour être savant, arroser l'ame, comme nous faisons, de quelques idées superficielles; il la faut teindre de connoissances qui ne s'acquièrent que par les veilles et les travaux.

Ajoutons que la noblesse du royaume, plongée dans la mollesse et l'oisiveté, a trouvé que l'ignorance étoit un état paisible, et elle n'a pas manqué d'en accréditer merveilleusement le parti. Aristote, Platon, Solon, Périclès, Démocrite, Hippocrate, Scipion, Cicéron, Hortensius, Lucullus, César, Pline, et tant d'autres grecs et romains, ne se croyoient pas en droit, parce qu'ils étoient de grands seigneurs, de négliger les sciences et de vivre dans une glorieuse stupidité. Tout au contraire, ils firent cet honneur à leur rang et à leur fortune, de ne les employer qu'à acquérir des lumières; ils savoient bien que les gens éclairés conduisent par-tout les aveugles. Mais une nation qui, dominée par l'exemple, fait gloire de préférer la légéreté et les agrémens frivoles au mérite que l'étude et les occupations sérieuses peuvent donner à l'esprit; une telle nation, dis-je, doit tomber dans la barbarie. Aussi faut-il croire que, dans cette nation, l'amour des sciences n'étoit sous Louis XIV qu'une nouvelle mode; du moins

leur culture a passé comme une mode. Quelqu'autre Louis, dans la révolution des temps, pourra la faire renaître et la changer en un goût durable; car c'est au génie éclairé des monarques, et à leurs mains bienfaisantes, qu'il appartient de fonder aux sciences des temples qui attirent sans cesse la vénération de l'univers. Heureux les princes qui sauront ainsi mériter de l'humanité !

(M. de JAUCOURT.)

SCRUPUL E.

JUGEMENT incertain d'une action, en conséquence duquel nous craignons qu'elle ne soit mauvaise, et nous hésitons à la faire.

Les gens à scrupules sont insupportables à eux-mêmes et aux autres; ils se tourmentent sans cesse, et s'offensent de tout. Ce défaut est la suite du peu de lumières, du peu de sens, de la pusillanimité, de l'ignorance, et d'une fausse opinion de la religion et de Dieu.

Si l'on étoit plus éclairé, on verroit distinctement le parti qu'il y auroit à prendre; si l'on avoit plus de courage, on ne balanceroit pas à agir; si l'on avoit de Dieu l'idée d'un être miséricordieux et bienfaisant, on se reposeroit tranquillement sur le témoignage de sa conscience, fortement persuadé que cette voix de Dieu qui parle au dedans de nous ne peut jamais être en contradiction avec la même voix de Dieu, soit qu'elle se fasse entendre dans les livres saints, soit qu'elle s'adresse à nous par la bouche des prophètes, des saints, des anges même.

Il y a des scrupules de toute espèce; on n'en est pas seulement tourmenté en morale, il y en a dans les sciences et dans les arts. Un géomètre scrupuleux s'impose la nécessité de démontrer des propositions dont l'évidence frappe tout homme qui entend les termes : je ne sais à quoi servent ces démonstrations, dont chaque proposition prise séparément n'est ni plus ni moins claire que l'énoncé du théorème ou du problême, et dont l'ensemble l'est moins, par la seule raison que, pour être saisi, il suppose quelque contention d'esprit que l'énoncé ne demande pas.

Un écrivain scrupuleux modifie presque toutes ses propositions, il craint toujours de nier ou d'affirmer trop généralement, et il écrit froidement ; il n'est jamais content s'il n'a rencontré l'expression et le tour de phrase le plus propre à la chose qu'il énonce; il ne se permet aucune inversion forte, aucune expression hardie; il uivelle tout, et tout devient sous son niveau égal et plat.

(ANONYME.)

LIE

SCRUTI N.

E SCRUTIN est une manière de recueillir les suffrages sans que l'on sache de quel avis chacun a été.

Il se fait par le moyen de billets cachetés ou pliés que chacun met dans un vase ou boîte, ou par des boules diversement colorées, qui sont des signes d'approbation ou d'exclusion.

Les meilleures élections sont celles qui se font par la voie du scrutin, parce que les suffrages sont plus libres que quand on opine de vive voix.

A Rome, dans tous les comices ou assemblées du peuple, les suffrages se donnoient toujours à haute voix jusqu'à l'an 614 de la république, qu'on introduisit l'usage des scrutins, parce qu'on s'étoit aperçu que, dans les élections des charges, le peuple, de peur de déplaire aux grands, qui étoient à la tête des factions qu'ils avoient formées pour se rendre maîtres de l'état, ne donnoit plus sa voix avec hardiesse; on employa sans succès le scrutin pour remédier au mal : le peuple corrompu n'étant plus retenu par la honte de donner sa voix à de mauvais sujets, se laissa gagner par les présens. C'est ainsi que s'introduisit la vénalité des suffrages, qui fut si funeste à la république. Une démocratie où le luxe fait la loi ne peut se rétablir que par de violentes secousses qui ramènent les choses aux principes de la constitution de cet état, qui, par sa nature, est sujet à des divisions toujours renaissantes qui le font à la fin tomber dans l'anarchie ou dans l'esclavage.

(M. de JAUCOURT.)

SÉANT.

Il n'est pas séant d'accepter quelque chose pour un

service rendu, à moins de plusieurs circonstances: premièrement, il ne faut pas demander une injustice, parce qu'il ne faut jamais être injuste ni solliciter personne à l'être; secondement, il faut avoir assez de crédit pour espérer de réussir auprès de celui qu'on sollicite, et ne pas tromper par de fausses promesses le malheureux qui a recours à votre protection, parce qu'il ne faut point ajouter l'effronterie à la trahison; troisièmement, il ne faut pas extorquer de celui qu'on protège le prix de sa protection, et une marque de reconnoissance qui le ruineroit, parce qu'il faut avoir de l'humanité; enfin il ne faut pas soi-même être dans le cas de se passer du tribut de la reconnoissance, car alors ce seroit une rapacité et une avarice insupportable. Sans ces conditions, la chose devient on mauvaise ou peu seante.

ANONYME.)

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