Obrazy na stronie
PDF
ePub

démentent dès le premier volume. Ils semblent préconiser le vice, en rendant inutile l'amour de la vertu. L'auteur, comme romancier, mérite peu d'estime; il péche contre la vraisemblance, il est diffus et déclamateur, intéressant, mais dénué de its et de situations, chargé de superfluités perpétuelles. Il s'érige en philosophe et en moraliste, et c'est Platon lui-même dans toute la force de la raison et dans l'enthousiasme de la vertu ; mais c'est souvent aussi un disciple grossier d'Epicure.

Lequel est le plus dangereux d'un roman ou des Contes de Lafontaine, demandoit une femme dans une société où le philosophe Dumarsais se trouvoit avec le président Demaisons? Les Contes, sans doute, répondit à cette femme une de ses amies : un roman bien écrit, ajouta-t-elle, peut être d'une grande utilité. La conversation s'anima : chacun fut pour et contre, selon sa façon particulière d'envisagef les objets. Dumarsais, qu'on n'accusera point de rigorisme, fut obligé de convenir que la licence étoit au fond la même dans les uns et dans les autres, qu'il n'y avoit de différence que dans les termes un peu moins mal-honnêtes dans certains romans que dans les contes. Ce n'est pas que Dumarsais proscrivit les romanciers, mais il eût voulu qu'ils tournassent leur talent à l'instruction du lecteur. Loin de se plaindre de l'abondance des écrits dans ce genre, le philosophe le croyoit au contraire trop négligé, tant pour le style que pour le fond.

L'abbé Langlet et M. le chevalier de Mouhi ont fait l'apologie des romans. Ce dernier a jugé à propos de réfuter très sérieusement et très- vivement un écrivain

qui veut que les jeunes gens remplissent leurs momens de loisir par la lecture des livres de piété, de morale et d'histoire. Ce chevalier, blanchi dans la carrière pour laquelle il combat, soutient qu'un roman n'est pas plus dangereux que le bal, la comédie, la promenade et les jeux d'exercice; que la voie la plus courte et la plus sûre pour instruire la jeunesse, et lui donner le goût des choses solides, c'est de commencer par lui présenter les choses agréables; que le roman a cet avantage de montrer la vertu récompensée et le vice puni; au lieu que l'histoire offre souvent le contraire, les gens vertueux dans le malheur,

[ocr errors]

et les scélérats au faîte des grandeurs et des prospérités; l'abus d'un bien, d'un plaisir innocent, n'est pas une raison pour le défendre, tout étant relatif au caractère, et ne devenant poison que lorsqu'on est mal disposé.

que

Sur les raisons de M. le chevalier de Mouhi, on voit que ce n'est pas absolument la plus mauvaise cause qu'il ait soutenue. Son ouvrage est intitulé : Le Financier. On regrette que nous n'ayions pas des romans, non sur le modèle des siens, mais sur le modèle de ceux qu'il imagine. Je ne sais si l'auteur qu'il combat s'est avoué vaincu, mais du moins on n'entendit plus parler ni de l'un ni de l'autre. Quant à l'abbé Langlet, après avoir donné la préférence aux romans sur l'histoire, il a eu ses raisons pour chanter la palinodie dans un livre intitulé: L'Histoire justifiée contre les Romans.

Je passe à la différence des romans anglais et des nôtres, et sur laquelle les écrivains sont encore divisés.

Quelques-uns la trouvent à notre avantage, et d'autres à celui des Anglais. Que de vérités, s'écrie-t-on, dans leurs romans! combien de détails heureux ! quelle image vive et naturelle de la vie ordinaire des hommes ! quel ton de sentiment! quelle abondance d'idées ! quelle prodigieuse imagination! Il y en a plus dans une seule page du Conte du Tonneau ou de Gulliver, que dans les trois quarts de nos romans. Quel choix encore dans les caractères ! qu'ils sont bien établis et bien soutenus! Tom-Jones est un des plus beaux qu'on puisse imaginer. On vante sur-tout parmi les romans anglais ceux de Richardson pour leur morale épurée.

Son admirable Paméla fait adorer l'innocence, quand on la voit récompensée dans une fille jeune et belle, sans naissance et sans biens. Quelle leçon que l'exemple de Clarice, fille de condition, riche, sage, spirituelle, qui périt par l'imprudence qu'elle a de se soustraire à une famille, injuste à la vérité, mais dont la révolte n'aboutit qu'à la faire tomber entre les bras d'un scélérat. Grandisson nous peint deux amans égaux par la naissance, par la fortune et par le mérite, tous deux charmans, tous deux accomplis, fidèles à tous les devoirs de la religion et de la

morale, et qui, après avoir été le modèle des vrais amans deviennent celui des heureux époux.

[ocr errors]

Ce qui ajoute au mérite de ces ouvrages et à celui de leur auteur, c'est le pays où ils ont été composés. Il semble que, chez une nation libre, dans un gouvernement qui ne défend ni de penser ni d'écrire ce qu'on veut, la licence des mœurs devroit être extrême dans les livres; c'est pourtant le contraire à Londres. Quelque libre que soit la presse, il en sort beaucoup moins que parmi nous de romans licencieux.

Le genre épistolaire, employé dans ceux des Anglais est encore regardé comme un sujet d'éloge. La narration en est moins embarrassée : elle en devient plus naturelle plus vive, plus intéressante, et le lecteur plus curieux, plus attentif, plus ému. Il se défie moins de l'art de l'auteur; il ne voit, il n'entend que les personnages qui sont en scène, et l'illusion produit tout son effet. «Les dit-il, » répondit-elle, répliqua-t-il, reprit - elle, interrompit» elle,» toutes ces liaisons parasites disparoissent par ce moyen, et l'on sauve cette monotonie.

Pour justifier la préférence qu'on donne aux romanciers anglais, on se jette ensuite sur les défauts de la plus grande partie des nôtres, comme si l'Angleterre n'avoit pas, ainsi que nous, de bons et de mauvais romans. On ne fait aucune grace à nos intrigues compliquées, à nos épisodes entassés, à nos fictions sans vraisemblance, à nos monologues abstraits, à nos dialogues doucereux, à nos développemens métaphysiques du cœur, à nos pensées épigrammatiques, à notre afféterie de style, voisine du phoebus, et nécessairement ennemie de toute correction. On remarque ce persifflage, même au milieu des horreurs dont nos romans sont remplis, au milieu des images terribles formées par les trahisons, par les enlèvemens, les prisons, les poignards, les enterremens précipités, les résurrections et le fantôme, ressources admirables pour un génie stérile.

Ces mêmes romanciers francais trouvent des défenseurs et des vengeurs qui reprochent à ceux d'Angleterre les longueurs, le verbiage, la bassesse des détails, mille traits qui sont à la vérité dans la nature, mais non pas dans la

belle nature. Ils ne trouvent que dans les nôtres l'ordre et la sagesse dans le plan, la nouveauté des situations, la plus exacte bienséance, un ensemble plus beau, plus fini et toujours supérieur aux écarts brillans d'une imagination féconde et désordonnée.

[ocr errors]

Mais c'est trop parler des romans; dans quelque estime qu'on veuille mettre leurs auteurs, soit ceux de France d'Espagne ou d'Angleterre, ils ne seront jamais élevés par leur nation au rang des premiers écrivains. Ceux-ci les regarderont toujours, comme les grands peintres regardent les barbouilleurs d'éventails et de colifichets.

ANONYME.)

VIBILLE

ROMANCE.

IEILLE historiette écrite en vers simples, faciles et naturels. La naïveté est le caractère principal de la romance. Ce poème se chante; et la musique française, lourde et niaise, est, à ce qui me semble, très-propre à la romance; la romance est divisée par stances. M. de Montgrif en a composé un grand nombre. Elles sont toutes d'un goût exquis; et cette seule partie de ses ouvrages suffiroit pour lui faire une réputation bien méritée. Tout le monde sait par cœur la romance d'Alis et d'Alexis. On trouvera dans cette pièce des modèles de presque toutes sortes de beautés, , par exemple, de récit :

[blocks in formation]
« PoprzedniaDalej »