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nous abandonnant? Ah! nous ne nous plaignons pas de la différence que notre Père commun a mise entre ses enfans; nous adorons les ordres de sa Providence si favorables pour vous et si rigoureux pour nous; mais nous n'avons que trop de raisons de nous plaindre de votre injustice et de votre iniquité Clamant nudi.... conqueruntur et dicunt: Nostrum est quod effunditis.

Mais afin de ne vous laisser rien ignorer de tout ce qui regarde une matière si importante, examinons, avec saint Thomas, ce que c'est que ce superflu du riche, C'est, répond le saint Docteur, tout ce qui probablement et communément parlant n'est point nécessaire au riche selon l'état présent où il se trouve : superflua quæ secundùm statum præsentem non sunt sibi necessaria, prout probabiliter æstimari potest. Tout ceci a besoin d'être éclairci. Saint Thomas parle d'abord de ce qui vous est nécessaire selon votre état présent, c'est-à-dire, selon votre état actuel et réel, et non selon un état chimérique, tel qu'une ambitieuse imagination est capable de se former : Secundùm statum præsentem. Eh! que dis-je ? Saint Thomas ne veut pas même que votre avarice ou votre amour-propre trop éclairé et trop prévoyant

perce jusques dans l'avenir pour prévenir dès à présent des accidens et des malheurs qui n'arriveront peut-être jamais. Il ne faut point, dit-il, juger du superflu, par rapport à ce qui peut arriver: Nec oportet quòd consideret ad omnes casus qui possunt con- . tingere in futurum. Le saint Docteur ne prétend pas cependant condamner par-là ces prévoyances sages, prudentes et raisonnables qui vous empêchent de tomber sous des coups qui vous menacent véritablement, et qui vous accableroient en effet si vous ne les aviez pas prévus. Non, il ne vous défend pas de penser à votre agrandissement, et de vous servir pour cela même de vos biens; mais il veut faire entendre par-là, qu'un chrétien ne doit point chercher à se dispenser, sous ce spécieux prétexte d'agrandissement, des obligations de sa religion, entre lesquelles il doit compter l'aumône ; et que s'il travaille en chrétien à s'agrandir, il doit être toujours dans la disposition d'abandonner tous ses projets et de sacrifier dans les nécessités pressantes son élévation même, au soulagement des pauvres. Le saint Docteur prétend encore que le superflu du riche est communément tout ce qui ne lui est pas nécessaire: Quæ non sunt sibi necessaria.

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ou

Prenez garde, mes frères; il parle ici des choses nécessaires, et non pas des choses qui vous soient agréables, ou utiles, avantageuses: Necessaria tibi; il parle deschoses nécessaires à votre personne, à votre état, à votre famille, et non pas à votre vanité, à votre faste à votre luxe à vos plaisirs et à vos passions. Or on trouve toujours du superflu, dit saint Augustin, quand on sait se contenter du nécessaire; au lieu que si l'on donne dans des dépenses inutiles, bientôt on manque de tout : Si inania quærimus, nihil sufficit. Enfin le saint Docteur ajoute, que comme une distinction exacte du nécessaire et du superflu est quelquefois bien difficile à faire, et qu'il n'est presque pas possible de marquer au riche le point fixe où il doit s'en tenir, il en faut juger probablement : Prout probabiliter æstimari potest; c'est-à-dire, comme l'explique un grand et savant Cardinal, selon le sentiment d'un vertueux chrétien et d'un sage et éclairé directeur Secundùm judicium pii prudentisque christiani.

Mais s'il faut s'en rapporter au sentiment d'un sage et vertueux chrétien, c'est-à-dire, d'un homme habile et désintéressé, d'un confesseur éclairé et zélé, ce n'est done

plus votre ambition, votre cupidité, votre amour-propre, le désir d'élever votre famille, votre passion enfin, qui doit décider sur ce qui vous est nécessaire; ce n'est done plus la coutume du monde, l'usage du monde, les maximes du monde, sur lesquelles vous devez vous régler; ce n'est plus la décision des mondains, de vos amis, de vos parens et de tous ceux qui ont intérêt à ménager votre bien, que vous devez écouter: Secundùm judicium pii prudentisque christiani. Consultez-le donc, hommes du siècle, consultez-le, femmes du monde, le sage et vertueux ministre de Jésus-CHRIST, et il trouvera bientôt votre superflu.

6. DEMANDE.

Détrompez-vous, mon Pere; ce confesseur auroit beau chercher mon superflu, il ne le trouveroit pas. Je n'en ai point, et tout m'est absolument nécessaire, à moins que vous ne vouliez que je ne déchoie de mon état; or vous êtes trop raisonnable pour ne pas permettre que je me soutienne dans une condition et dans un état où la divine Providence m'a

placé.

RÉPONSE.

Ah! votre état, votre état ! Mais quel est donc cet état dont vous êtes si jaloux, et que vous voulez soutenir aux dépens des pauvres, et de toutes les œuvres de miséri~corde qu'on vous propose? Je vous le demande, est-ce un état chrétien, ou est-ce un état payen ? Est-ce un état dont Dieu soit l'auteur, ou un état où la passion vous a élevé ? Est-ce un état conforme aux principes de la religion et aux maximes de F'Évangile, ou un état que l'ambition et la cupidité vous aient fait usurper ? Car, vous le savez mes frères, il n'est rien de si commun aujourd'hui dans le monde, que de voir les noms anciens devenus la proie des hommes nouveaux, et des hommes qui n'étoient rien il y a peu de jours, devenir toutà-coup des hommes grands, riches, puissans, et le disputer de magnificence avec les plus anciennes familles d'une ville ou d'une province. Mais pour en revenir à votre état, si votre état est un état chrétien, conforme aux lois de la religion, n'en devez-vous pas remplir les devoirs, parmi lesquels l'aumône est certainement un des plus indispensables? Si vous devez quelque chose à l'état où Dieu

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