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trouve que quinze mille cent soixante-huit; enfin, quand il faut en venir à les désigner par leurs noms, le dirons-nous? il n'en peut nommer que sept cent quatre-vingt-six. Voici le tableau tout entier.

Nombre des Calvinistes qui ont péri à la Saint-Barthélemy, extrait du Martyrologe des Huguenots, imprimé en 1582.

A Paris, en bloc, 10,000.- En détail, 468.-Nommément, 152

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Nous avons vu que, dans le premier moment, Charles IX rejeta le tout sur l'inimitié entre les Guise et les Châtillon. Mais enfin, quelle fut la part des Guise en cette affaire? Ils étaient absents de la cour pendant qu'elle combinait ce coup d'état. Le roi les y fit revenir, donna ordre au duc de tuer Coligny, le meurtrier de son père, et le duc exécuta par ses gens les ordres du roi touchant Coligny, mais sauva la vie à plusieurs autres. C'est le témoignage que lui rend La Popelinière, l'un des chefs des huguenots, dans sa Vraie et entière histoire des derniers troubles et dans son Histoire de France. « Entre les seigneurs français, dit-il, qui furent remarqués avoir garanti la vie à plus de confédérés, les ducs de Guise, d'Aumale, Biron, Bellièvre et Walsingham, ambassadeur anglais, les obligèrent plus..... ; après même qu'on eut fait entendre au peuple que les huguenots, pour tuer le roi, avaient voulu forcer les corps-de-garde, et que déjà ils avaient tué plus de vingt soldats catholiques. Alors ce peuple, guidé d'un désir de religion, joint à l'affection qu'il porte à son prince, en eût montré beaucoup davantage, si quelques seigneurs, contents de la mort des chefs, ne

'Saint-Victor, t. 3, p. 201 et 202.

l'eussent souvent détourné; plusieurs Italiens même, courant montés et armés par les rues, tant de la ville que des faubourgs, avaient ouvert leurs maisons à la seule retraite des plus heureux 1.»

On suppose encore dans bien des livres que Charles IX, placé à une des fenêtres du Louvre, tirait avec une carabine sur les Calvinistes qui essayaient, en traversant la rivière, de se sauver au faubourg Saint-Germain ; mais ce fait ne repose que sur l'autorité en soi très-légère de Brantôme, qui n'était point à Paris, et qui encore ne le rapporte que comme un ouï-dire. L'historien de Thou n'en dit rien, et sans doute il n'y a pas dans son silence quelque intention de ménager Charles IX, qu'il appelle un enragé. On suppose encore souvent que le massacre de Paris dura trois jours : le huguenot La Popelinière nous apprend qu'il cessa dans la journée même. « Le roi, vers le soir du dimanche, dit-il, fit faire défense à son de trompe, que ceux de la garde et des officiers de la ville ne prissent les armes ni prisonnier, sur sa vie ; ains que tous fussent mis èsmains de la justice, et qu'ils se retirassent en leurs maisons clauses: ce qui devait apaiser la fureur du peuple et donner loisir à plusieurs de se retirer hors de là 2. »

Mais la religion et le clergé ont-ils eu quelque part à cette funeste tragédie? Un poète moderne, Chénier, qui vota la mort de Louis XVI, dans une tragédie de sa façon, nous représente le cardinal de Lorraine bénissant les poignards destinés au massacre de la SaintBarthélemy. Or, dans ce temps-là même, le cardinal de Lorraine se trouvait à Rome, où il était allé au conclave. L'histoire ne parle que d'un seul ecclésiastique mêlé au massacre il se nommait Jean Rouillard, chanoine de Notre-Dame, et fut tué dans son lit, comme huguenot. Voilà toute la part qu'y eurent le clergé et la religion. Un poète, Voltaire, dira néanmoins:

Mais ce que l'avenir aura peine à comprendre,

Ce que vous-même encore à peine vous croirez,
Ces monstres furieux, de carnage altérés,
Excités par la voix des prêtres sanguinaires,
Invoquaient le Seigneur en égorgeant leurs frères ;
Et le bras tout souillé du sang des innocents,
Osaient offrir à Dieu cet exécrable encens.

Et voilà comme ce poète impie travestit l'histoire d'un bout à

l'autre dans sa Henriade.

[Hist. de France, p. 67, 1381.

t. 3, p. 190, note.

2 La Popelinière, 1. 29, p. 67. — St.-Victor,

Mais, après tout, quel jugement porter sur ce coup d'état en lui-même ? Cela dépend des principes qu'on prend pour règle de ses jugements. D'après la politique moderne, qui n'a d'autre principe que l'intérêt, c'est un coup d'état comme un autre.— D'après la croyance des huguenots et de leurs patriarches Luther et Calvin, que Dieu opère en nous le mal comme le bien, c'est une opération divine qui mérite nos respects et notre admiration. — D'après le principe fondamental du protestantisme, que chacun n'a d'autre règle ni d'autre juge que soi-même, Charles IX avait droit de faire ce qu'il a fait, non-seulement comme roi, mais encore comme particulier; et à chacun il est permis d'en faire autant, dès qu'il en a l'envie et la puissance. Si donc, plus tard, Charles IX en a eu du regret, ce n'a pu être l'effet que de son papisme.

Et de vrai, la seule Eglise de Dieu, condamnant tous les mauvais principes, a droit de condamner toutes les mauvaises actions qui en découlent. Elle seule condamne cette politique athée qui dispense les gouvernements d'avoir ni foi, ni loi, ni conscience, ni remords, et, partant, d'aller à confesse. Elle seule condamne cette impiété de Luther et de Calvin, qui fait Dieu auteur du péché, et divinise ainsi tous les crimes. Elle seule condamne le faux principe du protestantisme, que chacun n'a de règle que soi, principe de l'anarchie et de la démoralisation universelle. Et elle condamne les mauvais principes encore plus que les mauvaises actions, la racine du mal plus que les branches. Car ce sont les mauvais principes, autrement les hérésies, qui faussent les idées, pervertissent l'esprit humain et produisent les mauvaises actions: et lorsque les faux sages, qui sèment et cultivent ces principes du mal, blament les rois ou les peuples d'en cueillir les fruits naturels, les actions mauvaises, l'anarchie intellectuelle arrive à son comble; les rois et les peuples ne savent plus où ils en sont, et marchent au hasard : les plus nobles caractères se dégradent, les meilleurs esprits avortent. On le voyait alors: on n'a cessé de le voir depuis, ou plutôt on ne le voyait pas, et ce par la raison que les oiseaux nocturnes ne peuvent voir ce qu'il y a de plus clair.

Il y avait alors ensemble trois jeunes rois de la même famille, de la famille de saint Louis : Charles IX, roi de France; son frère Henri, duc d'Anjou, élu roi de Pologne en 1573; leur beau-frère Henri, roi de Navarre, chef de la branche des Bourbons. A une bravoure naturelle, ils joignaient tous les trois de l'esprit et une certaine aménité de caractère. Supposé maintenant qu'ils eussent été élevés, comme leur glorieux ancêtre, par une Blanche de Castille, dans la crainte et l'amour de Dieu; que, comme saint Louis,

ils consacrassent leur bravoure, leur esprit, leur activité, à procurer la gloire de Dieu et de l'humanité chrétienne ; que l'un en France, l'autre en Pologne, l'autre en Navarre, employassent l'exubérance belliqueuse de leur nation respective, de concert avec l'Autriche et l'Espagne, sous la direction du chef de l'Eglise universelle, à repousser les Turcs d'où ils étaient venus, à purger la mer des pirates musulmans et autres, à faire la conquête de l'Afrique pour y implanter la civilisation chrétienne, aussi bien que dans le Nouveau-Monde, dans l'Inde et dans la Chine : quels n'eussent pas été la gloire de leur nom et le bonheur de leurs royaumes! car Dieu ne manque jamais de récompenser au centuple ce que les rois et les nations font sincèrement pour lui et pour son Eglise.

L'atmosphère politique que respirent ces trois monarques ne leur laissera pas même concevoir l'idée de ces grandes choses. Charles IX n'ambitionnera que la gloire de chasser les bêtes fauves et de sonner du cor, jusqu'à se ruiner la santé. Henri de Pologne, ensuite Henri III de France, étouffera sa gloire naissante dans un horrible mélange d'infâmes débauches et de dévotions fantasques. Henri de Navarre, puis en France Henri IV, se rendra particulièrement fameux par le triple talent de boire comme un ivrogne, de battre comme un chef d'aventuriers, et d'être un vert galant pour corrompre les filles et les femmes de ses sujets, et profaner le trône de saint Louis par l'adultère. Quant à la politique, le plus haut qu'il s'élevera, même dans sa maturité, sera de faire la guerre à l'Autriche catholique en faveur de l'Allemagne protestante, en un mot, d'entretenir la guerre civile dans la chrétienté. Un trait suffira pour peindre les trois princes dans leur jeunesse.

Ce fut le neuf septembre 1575 que Henri d'Anjou prêta serment devant les ambassadeurs, comme roi de Pologne; le décret d'élection de la diète de Varsovie fut lu dans la grande salle du palais : Henri fit, comme roi de Pologne, une entrée solennelle à Paris, et dès-lors la cour fut toujours en fêtes, jusqu'au moment où le nouveau roi se mit en route pour son royaume lointain. On voyait alors à Paris, dit le protestant Sismondi, trois jeunes rois, égalcment avides de plaisirs et de débauches : Charles IX, âgé de vingttrois ans ; Henri, roi de Pologne, âgé de vingt-deux ans ; et Henri, roi de Navarre, âgé de vingt arfs. Ils se nommaient frères, ils partageaient volontiers leurs divertissements et leurs excès; chacun nourrissait cependant une secrète haine contre les deux autres. A cette époque même, une de leurs parties de débauches pensa leur coûter cher. Le seigneur de Nantouillet, Antoine Duprat, petit-fils du chancelier de ce nom, avait été sollicité d'épouser une maîtresse

TOME XXIV.

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du duc d'Anjou, dont ce prince voulait se débarrasser. Il avait répondu qu'il n'était pas homme à donner son honneur pour payer les plaisirs d'un autre. Ce propos avait été rapporté à Henri, et communiqué par lui à son frère et à son beau-frère. Il les irrita tous trois également aux yeux des trois rois, le courtisan qui osait opposer son honneur à leurs plaisirs ou à leurs caprices n'était pas pardonnable. Au milieu de la nuit, ils entrèrent dans la maison de Nantouillet, avec quelques seigneurs ; ils l'accablèrent d'outrages, ils enlevèrent tout ce qu'ils trouvèrent dans sa chambre, et mirent son lit et sa tapisserie en pièces. En même temps, les gens de leur suite enfonçaient les coffres et emportaient tout l'argent et toute la vaisselle. Ils ne savaient pas que pendant ce temps même, Guillaume de Vittaux, frère de Nantouillet, était enfermé dans la chambre voisine, avec quatre bandits déterminés qu'il avait armés pour assassiner un de ses ennemis. Au tumulte que ceux-ci entendirent de toutes parts autour d'eux, ils crurent qu'on venait les arrêter, et se plaçant derrière leur porte, le pistolet à la main, ils attendirent qu'on l'enfonçât pour faire feu. Si les trois rois l'avaient tenté, ils auraient probablement été tués leur bonheur voulut qu'ils se dirigeassent d'un autre côté 1.

A la suite de la Saint-Barthélemy, les huguenots avaient repris les armes dans le Languedoc, dans les Cévennes, mais surtout à La Rochelle. Le duc d'Anjou, accompagné du roi de Navarre, assiégeait cette ville depuis assez long-temps, lorsqu'il reçut la nouvelle de son élection au trône de Pologne. Cet événement donna lieu à une paix qui fut signée à La Rochelle le six juillet 1575, et qui termina la quatrième guerre civile. La cinquième commence, et les protestants reprennent les armes, le mardi gras, vingt-trois février 1574. Charles IX meurt le vingt-neuf mai. Henri III revient de Pologne en France. Les huguenots, alliés aux politiques, voient à leur tête un Montmorency, le duc de Damville; le duc d'Alençon, frère du roi ; le prince de Condé, et enfin le roi de Navarre. Cinquième paix, signée le six mai 1576. Henri III accordait aux huguenots le libre exercice de leur religion par tout le royaume, excepté à Paris, à la cour et à deux lieues à la ronde. Il rendait une entière liberté à leurs écoles, leurs synodes, leurs consistoires; il reconnaissait la légalité du mariage des prêtres apostats; il établissait dans tous les parlements des chambres mi-parties, pour leur assurer des juges impartiaux ; tous les arrêts rendus contre eux étaient annulés ; les plus illustres victimes de leur parti étaient nominativement réha

'Sismondi, t. 19, p. 643.

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