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et la frivolité, grâce à l'opulente oisiveté qu'enfantent nos lois, affichent un luxe insultant et provocateur vis-à-vis de l'industrie honnête et utile. Encore si cela ne faisait qu'accuser le vice de nos institutions sociales... mais il y a là un danger permanent pour le repos du monde ; c'est de ces âmes énergiques, aigries, révoltées que se déchaînent, comme l'ouragan des antres d'Eole, les tempêtes qui bouleversent les empires. C'est un sujet d'étonnement universel que la tranquillité de l'Angleterre au milieu de la tourmente qui ébranle toute l'Europe. A mon avis, voici le secret de cette tranquillité: l'immense empire colonial de l'Angleterre ouvre un champ illimité à l'ambition de ses esprits ardents, aspiring minds comme elle les appelle. De plus l'Angleterre est gouvernée par la plus habile de toutes les aristocraties, qui s'est fait un devoir ou un calcul d'ouvrir ses rangs à l'élite de la démocratie, dont elle soutire ainsi la sève généreuse, pour en rajeunir son vieux corps.

Encore une fois, je ne suis pas communiste, mais je sens et je vois que l'état de choses que je viens de signaler comme étant en opposition flagrante aux lois divines comme à celles de la nature humaine, ne saurait subsister longtemps sous le régime démocratique de l'avenir. On résistera, je le crains on fera entrer la rage au cœur des peuples, et le monde civilisé se trouvera une seconde fois menacé d'une irruption de Goths et de Vandales, dont une grande puissance morale et spirituelle pourra seule le sauver. Ici je ne ferai que rappeler les déclarations récentes de M. Thiers au sujet de la religion et du clergé: "Aujourd'hui, a-t-il "écrit selon le Courrier du Havre, je regarde la religion et << ses ministres comme les auxiliaires, les sauveurs peut-être "de l'ordre social menacé." Chacun sait ce que M. de Tocqueville dit sur le même sujet dans son bel ouvrage sur l'Amérique.

Il est vrai qu'une telle catastrophe peut être très éloignée de nous, habitants de l'Amérique, où la mauvaise distribution des richesses et l'inégalité dans les moyens de les

acquérir, n'en sont pas encore rendues à l'état de grief vivement et profondément senti. Mais ne devons-nous pas penser un peu à nos suivants, et tâcher de leur épargner, s'il est possible, les maux qui, sous nos yeux, tourmentent l'Europe, notre mère ? C'est son sang vicié qui coule dans nos veines, et si nous ne profitons de la vigueur de la jeunesse pour le purifier, préparons-nous à souffrir comme elle. Mettons-nous à l'œuvre, il n'est pas trop tôt. Et si notre propre intérêt bien entendu et celui de nos descendants ne sont pas pour nous des motifs suffisants: Prêtres, vous qui parlez au nom de Dieu et dans les vues de Dieu, le moment est venu pour vous de parler, de faire entendre aux hommes qu'il y a pour eux autre chose que des intérêts matériels. Nouveaux Moïse, descendez de la montagne où l'on vous a crus morts, et montrez à la foule idolâtre qu'il y a un autre Dieu que le veau d'or.

L'on comprend que je n'entends pas faire violence à la conscience du prêtre tout ce que je lui demande, c'est l'évangile, mais l'évangile tout entier, et avec toutes ses conséquences. Avec cela, le prêtre catholique aura bientôt fait disparaître les préjugés et les préventions qui ne lui ont permis depuis longtemps de remplir, à mon avis, qu'une partie de sa mission. Au fond de toutes les hérésies, n'y a-t-il pas eu un levain de liberté? Certes ce ne serait pas un grand prophète que celui qui prédirait qu'au bout de la voie où je l'invite à entrer, il trouvera cette unité religieuse qu'il espère lui-même, et sans laquelle l'unité humaine, vers laquelle on croit marcher, ne sera peut-être jamais qu'un grand rêve.

Lorsque je commençai ce travail, il entrait dans mon plan de traiter, avec quelques détails, la partie de mon sujet où je devais parler de ce que devait être le prêtre; mais pour le faire en ce moment avec tous les développements nécessaires, il me faudrait outrepasser de beaucoup les bornes d'une simple lecture, et peut-être aussi abuser de votre indulgence. Au reste, après ce que j'en ai dit incidemment,

et les considérations que j'ai présentées sur le spiritualisme social ou en rapport avec la société, il ne saurait guère y avoir lieu à méprise quant à ma pensée générale sur ce point. Restent, il est vrai, les applications; et j'avoue qu'en pareille matière, c'est un point bien important. Il ne s'agit plus alors de spiritualisme en idée, sur lequel, à moins d'avoir affaire à des athées, il peut être facile de s'entendre ; mais bien du spiritualisme en action au milieu des passions et des intérêts, des préventions et des préjugés humains; et de plus au sein de réunions d'hommes placés à tous les degrés de civilisation, à chacun desquels il faudra user d'un mode et de moyens d'action divers. Cette action sera paternelle, absolue pendant l'enfance des sociétés; titulaire, directrice pendant leur adolescence; amicale, modératrice pendant leur jeunesse; fraternelle, persuasive pendant leur virilité; encourageante, régénératrice pendant leur vieillesse; toujours indulgente, tolérante, éclairée, car là git sa force, sa vie. C'est pour elle que le Christ a dit au premier des apôtres: "Quiconque se sert de l'épée, périra par l'épée." Eh! l'on voit partout l'épée se briser entre les mains du pouvoir temporel lui-même, et la parole marcher hardiment à la conquête du monde matériel. Mais il faut que je m'arrête.

Je regrette, pour ma part, que le temps me fasse défaut, car j'aurais eu occasion de payer un juste tribut de reconnaissance pour les efforts généreux de plusieurs membres distingués de notre bon clergé canadien, qui, par des actes frappés au double coin de la religion et du patriotisme, ont dévancé, inspiré jusqu'à un certain point les espérances que je forme aujourd'hui de le voir constamment, comme autrefois l'arche d'alliance devant le peuple d'Israël, marcher à la tête de notre peuple vers la terre promise du progrès et de la liberté.

J'aurais voulu vous parler de ces nombreux et précieux colléges où l'on forme non plus seulement des prêtres, mais aussi des citoyens et des prêtres citoyens.

J'aurais voulu vous parler de ces beaux établissements de bienfaisance, qu'un digne et saint prélat a fait, comme par enchantement, surgir au sein de votre cité, où l'enfance orpheline retrouve une mère, la vieillesse indigente un fils, et la faiblesse repentante un toit paternel où l'on tue encore le veau gras, misères humaines que la religion saura toujours, mieux que l'état, soulager et réparer.

J'aurais voulu vous entretenir de cette croisade aussi patriotique que religieuse, entreprise avec tant de zèle, poursuivie avec tant de courage et de succès par un membre de notre jeune clergé, contre le vice le plus abrutissant, œuvre dans laquelle il a été si bien secondé par le clergé

en masse.

Eh! que vois-je en ouvrant, ce matin, les Mélanges Religieux! Les dames et les demoiselles de Longueuil, presqu'en masse, viennent d'entreprendre, sous les auspices de la religion, une croisade contre le luxe, cette autre plaie de notre société. Honneur donc au beau sexe de Longueuil! honneur à leur digne pasteur qui leur a inspiré cette patriotique pensée, qui, sous la puissante escorte de la religion et de la beauté, ne manquera pas d'être bien accueillie partout, et ne s'arrêtera, je l'espère, qu'après avoir, comme la tempérance, jeté de profondes racines sur tous les points de notre sol.

Mais surtout j'aurais désiré signaler à votre reconnaissance et à celle de nos neveux le dévouement de cet autre jeune prêtre, dont la voix et les efforts, secondés aussi par le reste du clergé, ont su abattre la barrière, jusqu'alors infranchissable, qui défendait à notre race l'entrée à son propre patrimoine, vouant notre nationalité à périr sous la constriction formidable d'une nationalité rivale qui nous enveloppe de toutes parts. Il y a dix-huit ans à peu près, lorsque j'entrai homme dans la vie publique, (l'on me permettra, j'espère, cette réminiscence personnelle,) je le fis avec cette divise: Nos Institutions, notre Langue et nos Lois. Je ne pus qu'écrire ces mots sur une humble feuille

de papier. Plus heureux que moi, le jeune missionnaire de la colonisation les aura tracés sur la frontière, non plus en caractères éphémères, mais avec une population industrieuse, forte et impérissable.

Oh! qu'il se forme donc entre notre clergé et la partie active de notre peuple une sainte et patriotique alliance, ayant pour objet notre avancement politique et national. Avec la coopération cordiale et constante de ces deux grands éléments de puissance sociale, nous pouvons nous rassurer sur l'avenir de notre chère patrie; notre devise nationale n'aura pas été le fruit d'une vaine illusion, et nos mânes réjouis pourront entendre nos arrières-neveux répéter en triomphe sur les bords de notre Saint-Laurent :

NOS INSTITUTIONS, NOTRE LANGUE ET NOS LOIS.

E. PARENT.

1846.

LE BEAU SEXE.

COUPLETS COMPOSÉS POUR LE DINER ANNIVERSAIRE DE
FONDATION DE LA SOCIÉTÉ TYPOGRAPHIQUE DE
MONTRÉAL.

Aux sots laissons un jour la politique :
Sans adopter ou le noir ou le blanc,
Oublions donc et rois et république
Pour un sujet plus vert et plus galant.
Le type vole, et mot à mot j'amasse
Les divers traits d'un visage enchanté :
Corolle éclose aux rayons de ma casse,
C'est une femme, hommage à sa beauté !
Qu'elle babille, amis, ou qu'elle gronde,
Elle sait plaire et charmer malgré tout;
J'aime à la voir promener à la ronde
Une gaité que je trouve à mon goût.
Le type vole, et mot à mot j'amasse
Les traits divers d'un visage enchanté :
Corolle éclose aux rayons de ma casse,
Gloire à la femme, un verre à sa santé !

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