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et l'extrême difficulté de l'exécution l'a cependant fait supprimer. Depuis, on s'est borné, comme Hardi, lorsque l'action exige une assemblée, à faire parler un ou deux personnages au nom de tous; c'est la seule espèce de chœur qu'admette la scène française; et dans les sujets mêmes, soit anciens, soit modernes, dont le spectacle demande le plus de pompe et d'appareil, comme les deux Iphigénies, Mahomet, et Sémiramis, un théâtre où l'action se passe immédiatement sous nos yeux, rend presque impossible le concert et l'accord d'une multitude assemblée qui parlerait en même temps. Il est vrai qu'en la faisant chanter comme les Grecs, la difficulté serait moindre; mais le chant du choeur, entremêlé avec une déclamation simple, fera toujours pour nos oreilles une disparate et une invraisemblance, qui dans le genre sérieux et grave nuirait trop à l'illu

sion.

Dans ce qu'on appelle chez les Grecs la comédie ancienne, comme ce n'était communément qu'une satire politique, le chœur était très-bien placé; il représentait le peuple, ou une classe de citoyens, tantôt allégoriquement, comme dans les Oiseaux et dans les Guépes; tantôt au naturel, comme dans les Acharniens, les Harangueuses, les Chevaliers; et le poëte l'employait ou à faire la satire de la république, ou à sa propre défense et à son apologie. C'est ainsi que dans les Acharniens, le chœur, traitant le peuple d'enfant

et de dupe, lui reproche son imbécillité à se laisser séduire par des louanges, tandis qu'Aristophane a seul osé lui dire la vérité en plein théâtre, au péril de sa vie. « Laissez-le faire, ajoute le chœur: il n'a eu en vue que le bien, et il le procurera de toutes ses forces, non par de basses adulations et des souplesses artificieuses, mais par de salutaires avis. » La comédie du second et du troisième âge changea de caractère, et le chœur lui fut interdit.

CHOEUR d'Opéra. Que vingt personnes parlent ensemble, leurs articulations se mêlent, les sons de leurs voix se confondent, et l'on n'entend qu'un bruit confus. Mais dans un chant dont toutes les articulations et les intonations sont prescrites et mesurées, vingt voix d'accord n'en feront qu'une; et de leur concert peuvent résulter de grands effets, soit du côté de l'harmonie, soit du côté de l'expression.

Je vais plus loin. Dans un spectacle où il est reçu que la parole sera chantée, le chœur a sa vraisemblance comme le récitatif, et cette vraisemblance est la même que celle du duo, du trio, du quatuor, etc. Mais ce que j'ai dit du duo français, je le dis de même du chœur: en s'éloignant de la nature, il a perdu de ses avantages. Voyez Duo.

Il arrive souvent dans la réalité qu'un peuple

entier pousse le même cri, qu'une foule de monde dit à-la-fois la même chose; et comme on accorde toujours quelque liberté à l'imitation, le chœur, en imitant ce cri, ce langage unanime d'une multitude assemblée, peut se donner quelque licence; l'art et le goût consistent à pressentir jusqu'où l'extension peut aller. Or c'en est trop que de faire tenir ensemble à tout un peuple un long discours suivi, et dans les mêmes termes, à moins que ce ne soit un discours appris, comme un hymne; et tel peut être supposé, par exemple, le chœur, Brillant soleil! dans l'acte des Incas; le chœur de Thétis et de Pélée, O destin, quelle puissance! le chœur de Jephté, Le ciel, l'enfer, la terre, et l'onde, et tout ce qui se chante dans des solennités.

Il faut donc distinguer, dans l'hypothèse théâtrale, le chœur appris, et le chœur impromptu. Le premier peut paraître composé avec art, sans détruire la vraisemblance; mais dans l'autre l'on ne doit voir que l'unanimité fortuité et momentanée des sentiments dont une multitude est émue à-la-fois. Plus ces sentiments seront vifs et rapides, et plus l'expression en sera simple, naturelle, et concise; plus il sera vraisemblable que tout un peuple ait dit la même chose en même temps.

Atys, Atys lui-même

Fait périr ce qu'il aime.

Cependant une des plus grandes beautés du

chant du choeur c'est le dessein; ce dessein demande quelque étendue pour se développer, et quelque suite pour se donner de la rondeur et de l'ensemble; le moyen de décrire un cercle harmonieux en imitant des cris, des mots entrecoupés! Voilà sans doute la difficulté, mais aussi le secret de l'art; et ce secret se réduit, du côté du poëte, à dialoguer le chœur, comme j'ai déja dit de former le duo. Que les différentes parties se séparent et se rejoignent; que tantôt elles se contrarient, et que tantôt elles s'accordent; que deux, trois voix, une voix seule, de temps en temps, se fasse entendre, qu'une partie lui réponde, qu'une autre partie la soutienne, et qu'enfin toutes se ramènent à un sentiment unanime, ou se choquent dans un combat de deux sentiments opposés; voilà le chœur qui devient une scène étendue et développée, et qui, dans son imitation, a toute la vérité de la nature, avec cette seule différence, que d'un tumulte populaire on aura fait un chant et un concert harmonieux.

Un vrai modèle dans ce genre, c'est le choeur de l'opéra d'Atys, à la descente de Cybèle: Venez, reine des dieux, venez. C'est de M. Piccini que nos jeunes compositeurs doivent apprendre à faire des chœurs mélodieux.

En critiquant les chœurs de l'Opéra français, on a cité ce morceau de poésie rhythmique que nous a conservé Lampride, où est exprimé le cri de fureur et de joie du peuple romain à la

mort de l'empereur Commode; et on a dit : Que les gens de goût décident entre ce chœur et les chœurs d'Opéra. Mais on n'a mis en comparaison que deux mauvais chœurs de Quinault; et ces deux exemples ne prouvent pas que nos chœurs soient toujours mauvais. Celui de Lampride, au style près, dont la bassesse est dégoûtante, serait pathétique sans doute; mais rien n'empêche que dans nos opéra on n'en compose sur ce modèle. Et pourquoi ne pas rappeler ceux de Castor, celui d'Alceste, Alceste est morte! celui de Jephté, celui de Coronis, celui des Incas, et nombre d'autres qui ont leur beauté et qui produisent leur effet? On aurait encore eu de l'avantage à leur opposer celui de Lampride; mais on n'aurait pas eu le plaisir de dire que l'un était sublime, et que les autres étaient plats. La vérité simple est que l'action, le dialogue, le pathétique, seront toujours très-favorables à la forme du chœur, et que le genre de notre opéra y donne lieu, toutes les fois que la situation est passionnée et qu'elle intéresse une multitude; c'est au poëte à saisir le moment; c'est au musicien à le seconder. On peut voir dans les opéra de M. Gluck et dans ceux de M. Piccini, de combien de beaux chœurs ils ont enrichi notre scène. Dans les chœurs dont l'effet résulte de l'harmonie, le compositeur allemand s'est signalé; le compositeur italien excelle dans les chœurs où l'expression demande le charme de la mélodie. Voyez AIR, CHANT, DUO, LYRIQUE, RÉCITATIF.

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