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Le repos qu'on désire,

Ne tient son empire

Que dans le séjour des morts.
Chacun vient ici-bas prendre place;
Sans cesse on y passe,

Jamais on n'en sort.

C'est pour tous une loi nécessaire ;

L'effort qu'on peut faire

N'est qu'un vain effort.

Est-on sage

De fuir ce passage?

C'est un orage

Qui mène au port.

Chacun vient ici-bas prendre place;

Sans cesse on y passe,

Jamais on n'en sort.

Tous les charmes,

Plaintes, cris, larmes,

Tout est sans armes

Contre la mort.

Chacun vient ici-bas prendre place;

Sans cesse on y passe,

Jamais on n'en sort.

Je ne crois pas que le mérite de la difficulté vaincue ait jamais été porté plus loin, ni que, dans une telle contrainte de la mesure et de la rime, il soit possible de conserver au langage plus d'aisance, de force et de précision.

CANTIQUE. C'est le nom que la poésie lyrique a pris dans les livres saints, à l'exception de celui des Psaumes. Le cantique était employé in

différemment à célébrer des événements heureux et mémorables, ou à déplorer des malheurs : il prenait tous les tons de l'ode; et il en est quelquefois le modèle le plus sublime ou le plus touchant.

En parlant de l'ode, on ne cesse de vanter Pindare, qu'on entend mal, et dont il ne reste presque rien de vraiment digne d'admiration. Horace est mieux connu et plus justement admiré. Mais quoique le style de ses odes soit le prodige de l'art d'écrire; quoique, pour la variété du coloris, des tours, des mouvements, pour l'abondance des idées, comme pour la richesse et le choix de l'expression, ce soit peut-être, des modèles antiques, celui dont les modernes ont le moins approché; je crois voir le génie de l'ode, l'enthousiasme et l'inspiration, mieux marqués dans les cantiques de Moïse.

Le Cantemus Domino, après le passage de la mer Rouge, est l'expression la plus sublime des mouvements de reconnaissance et d'admiration d'un peuple qui, par un prodige, vient d'échapper au glaive de ses ennemis.

Un Dieu déployant sa puissance et faisant éclater sa gloire; les eaux de la mer assemblées par le souffle de sa colère, et tout-à-coup leur mouvement rompu, et l'onde rendue immobile; une route profonde ouverte au milieu des flots suspendus; les cris de fureur des Égyptiens poursuivant les Israélites, et leur insolence en con

traste avec le sort qui les attendait (1); les chars de Pharaon, ses guerriers, son armée, ensevelis sous la chûte des eaux, couverts des vagues mugissantes, et tombant au fond de l'abyme (2); Israël délivré, pour aller habiter la terre qui lui est promise; et déja l'effroi répandu parmi les Philistins, parmi les rois d'Édom et de Moab, chez les peuples de Chanaan; tels sont les tableaux que présente ce beau cantique; et parmi ces tableaux les mouvements d'enthousiasme de tout un peuple qui s'écrie: C'est là mon Dieu, et je lui rendrai gloire; c'est le Dieu de mes pères, et je l'exalterai. Ta main, Seigneur, a signalé sa force; ta main s'est étendue et a frappé mes ennemis. Les tiens sont dévorés comme un faisceau de chaume aride, d'un trait du feu de ta colère. Oh! qui est semblable à toi, Seigneur? Soit que tu fasses éclater ou ta grandeur ou ta puissance, que tu veuilles te rendre admirable ou terrible, qui osera s'égaler à toi?

Le second cantique n'est pas du même genre; Moïse y parle seul; et l'époque en est remarquable. Ce fut lorsque Moïse eut appris de Dieu même que l'heure de sa mort approchait; ce fut alors que, prêt à descendre au tombeau, il assembla

(1) Dixit inimicus: Persequar et comprehendam.... evaginabo gladium meum, interficiet eos manus mea. Flavit spiritus tuus, et operuit eos mare.

(2) Quasi lapis, quasi plumbum.

Élém. de Littér. I.

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le peuple, et du ton le plus élevé de l'inspiration: Que les cieux m'écoutent parler, dit-il, et que la terre soit attentive à mes paroles. Dieu est la fidélité même. Exempt de toute iniquité, il est juste et droit par essence. » Alors rappelant tout ce que Dieu avait fait en faveur de son peuple, il reprit : «< Est-ce là le retour que tu dois à ton Dieu, peuple stupide et insensé? méconnais-tu en lui ton père? n'est-ce pas lui qui te possède, lui qui t'a fait, lui qui t'a créé? Rappelle-toi les jours antiques; compte les générations passées : interroge tes pères, ils t'apprendront ce qu'il a fait pour toi; interroge tes aïeux, ils te l'attesteront, Le seigneur a fait de son peuple une partie de lui-même il l'a environné, il l'a instruit, il l'a conservé comme la prunelle de ses yeux. Semblable à l'aigle qui excite ses aiglons à prendre leur vol, et qui, volant sur eux lui-même, étend ses ailes, les reçoit sur son dos, les porte dans les airs; le Seigneur a élevé et soutenu son peuple. Ce Dieu qui t'a fait, tu l'as abandonné, et tu as oublié ton créateur. Il a vu ton ingratitude, et il s'est livré à sa colère, et il a dit : J'assemblerai sur eux un déluge de maux. Au dehors le glaive, au dedans la terreur en fera sa proie, sans épargner, ni le jeune homme, ni la jeune vierge, ni le vieillard, ni l'enfant à la mamelle. Il a dit: Où sont-ils? Je veux les effacer de la mémoire des hommes. Mais je diffère, pour ne pas donner ce triomphe à leurs ennemis, de

peur qu'ils ne s'enorgueillissent et qu'ils ne disent: C'est la force de notre bras, et non pas le Seigneur, qui a fait toutes ces choses. C'est à mọi seul qu'appartient le vengeance, et je l'exercerai quand il en sera temps. Hæccine reddis Domino, popule stulte et insipiens? Numquid non ipse est pater tuus, qui possedit te, et fecit, et creavit te? Memento dierum antiquorum; cogita generationes singulas; interroga patrem tuum, et annuntiabit tibi; majores tuos, et dicent tibi... Pars Domini populus ejus... Circumduxit eum, et docuit, et custodivit quasi pupillam oculi sui. Sicut aquila provocans ad volandum pullos suos, et super eos volitans, expandit alas suas, et assumpsit eum, atque portavit in humeris suis... Deum qui te genuit dereliquisti, et oblitus es Domini creatoris tui! Vidit Dominus, et ad iracundiam concitatus est. Et ait... Congregabo super eos mala... foris vastabit eos gladius, et intus pavor, juvenem simul ac virginem, lactantem cum homine sene. Dixit: Ubinam sunt? Cessare faciam ex hominibus memoriam eorum. Sed propter iram inimicorum distuli; ne forte superbirent hostes eorum, et dicerent: Manus nostra excelsa, et non Dominus, fecit hæc omnia... Mea est ultio, et ego retribuam in tempore.

On voit par cet extrait, qu'une éloquence véhémente est le caractère de ce cantique. Celui de David sur la mort de Saül et de Jonathas, est d'un style bien différent. J'en vais rappeler quel

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