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de ces avantages est de donner à une longue suite de préceptes l'attrait de la variété; l'autre est de présenter, dans chacun des articles, tout son objet sous divers rapports.

Le premier m'a paru d'un prix inestimable dans un ouvrage d'instruction.

L'ennui naquit un jour de l'uniformité.

C'est ce qu'on doit savoir, sur-tout lorsqu'on écrit pour une jeunesse naturellement dissipée, ou pour un monde qui, n'ayant pas le temps ou le courage de suivre de longues lectures, veut pouvoir quitter et reprendre un livre, selon sa fantaisie, et y trouver, en l'ouvrant au hasard, de quoi s'occuper un moment.

La pesanteur et la monotonie sont les écueils de l'instruction: elle doit avoir la mobilité d'une conversation libre et variée; et mon ambition, dans cet ouvrage, serait de paraître m'entretenir et causer avec mes lecteurs.

D'un autre côté, plusieurs de ces articles élémentaires, ayant chacun divers rapports, j'aurais été forcé, par la méthode analytique, de les décomposer; et le plaisir de voir ensemble et d'un coup-d'œil, si je puis m'exprimer ainsi, la rami

fication des idées radicales et génériques aurait été détruit par cette décomposition.

Si cependant quelqu'un voulait faire de ces éléments une étude raisonnée et suivie, j'ai présumé qu'il me serait facile de lui en tracer le cours, par une table méthodique, où j'aurais soin de classer les articles dans l'ordre le plus naturel. C'est ce que je ferai à la fin de la collection; et si l'on craint de s'égarer dans cette espèce de labyrinthe, cette table en sera le fil.

Bien des détails où je suis entré paraîtront inutiles à des lecteurs instruits: je leur en demande pardon; mais ce n'est pas pour eux que ces détails sont faits.

Mon excuse sera la même pour un petit nombre d'articles, que j'appellerais mécaniques, et qui n'intéressent que l'art, tels que vers, rime, prosodie, accent, nombre, période, harmonie, muet, articulation, nasale, distique, césure, hémistiche, alexandrin, asclépiade, hexamètre, etc. Je les indique exprès, afin qu'on les laisse aux jeunes artistes.

Quant aux passages pris d'une langue que tout le monde ne sait pas, j'ai eu soin de traduire en notes ceux dont le sens n'est pas énoncé

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dans le texte on peut passer les autres, sans

que

le sens du texte en șoit interrompu.

On trouvera dans ce recueil plusieurs morceaux que je n'ai pas donnés dans l'Encyclopédie, comme enthousiasme, éloquence, histoire, oraison funèbre, usage, etc. Ces articles ayant été faits par d'autres mains, et par des mains habiles, je ne m'en étais pas mêlé; mais ici que tout doit être à moi, n'ayant pas le droit de m'enrichir du bien d'autrui, il a fallu, selon mes moyens, y suppléer et remplir les vides. Puissent les peines que je me suis données en épargner aux jeunes gens qu'un naturel heureux rend impatients de produire et presse d'abréger les études de l'art, pour se livrer à ce génie, qui sans doute vaut mieux que l'art, mais qui ne saurait s'en passer: car, dans tous les sens, il est vrai, comme l'a dit un sage, que l'imperfection de la nature a été l'origine de l'art. (VAUVENARGUES.)

ÉLÉMENTS

DE LITTÉRATURE.

090

ESSAI SUR LE GOUT ◊).

LE
E goût, dans l'acception la plus étroite de ce
mot pris figurément, est le sentiment vif et prompt
des finesses de l'art, de ses délicatesses, de ses
beautés les plus exquises, et de même de ses dé-
fauts les plus imperceptibles et les plus séduisants.
Le goût, dans une acception plus étendue, est
la prédilection ou la répugnance de l'ame pour
tels ou tels objets du sentiment ou de la pensée.

Dans le premier sens, on dit d'un homme qu'il a du goût; dans l'autre, on dit que chacun a son goût.

On a remarqué avant moi l'analogie du goût physique avec le goût intellectuel, c'est-à-dire du sens qui juge les saveurs, avec le sens intime qui juge en nous les productions des arts d'après l'impression de plaisir ou de peine qu'en reçoivent l'esprit et l'ame. Je me bornerai donc à dire,

(1) Ce morceau est fait pour servir d'introduction aux Éléments de Littérature.

Élém. de Littér. I.

I

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que l'un comme l'autre de ces deux sens est une faculté naturelle, perfectible, mais altérable; que l'un comme l'autre varie et diffère selon les temps, les lieux, les mœurs, les habitudes; qu'enfin l'un comme l'autre ne laisse pas d'avoir ses principes d'analogie, ses moyens d'assimilation.

Commençons par examiner si dans cette diversité de goûts, qui semble être dans la nature, il peut y avoir un goût par excellence; et si ce qu'on appelle éminemment le goût a jamais d'autre prérogative que d'être le goût dominant.

Le goût physique semble avoir son caractère de bonté dans la préférence qu'il donne aux nourritures les plus saines; et combien les raffinements du luxe n'ont-ils pas encore altéré ce discernement de l'instinct? Le goût intellectuel a-t-il été plus inaltérable? et, soit dans la multitude, soit dans le petit nombre, a-t-il le droit de se croire plus infaillible dans son choix?

L'opinion a pour objet la vérité, qui n'est qu'un point; et il est possible qu'à la longue les opinions particulières se réunissent au même centre, puisque de tous côtés la raison tend au même but; mais y a-t-il de même pour les goûts un point de ralliement et une tendance commune? L'agréable comme l'utile a-t-il un caractère évident et invariable?

Nous vivons en société, et par la communication des sentiments et des idées, par l'exercice habituel de notre sensibilité sur des objets com

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