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Pris dans leur sens absolu et exclusif, ces deux systèmes sont tous deux faux, et même funestes.

Cependant ils se font depuis de longues années mutuellement la guerre. Donc ils sont forts s'ils sont forts, ils renferment en eux-mêmes quelque chose de vrai. Car les faux systèmes mêmes n'ont de force qu'autant qu'ils ont de vérité. Voyons donc ce qui s'y trouve de vrai et de faux. Cet examen nous est nécessaire pour établir les rapports particuliers qui existent entre Dieu et les Pouvoirs humains.

Que tout Pouvoir, comme s'exprime saint Paul, vienne de Dieu; Omnis potestas a Deo est (Rom., 13); c'est une vérité que la raison démontre, que la Religion enseigne, que la tradition atteste et qu'on surprend dans les instincts et dans les croyances universelles et constantes de l'humanité (4)

D'abord la société n'étant pas un fait humain, mais un arrangement divin, l'existence d'un Pouvoir, comme tout ce qui est essentiellement nécessaire à l'existence de la société, est une pensée divine, une institution divine, comme la société elle-même (2).

(1) Les témoignages de cette tradition se trouvent dans l'Essai sur le Pouvoir public qui accompagne ces discours. Cet écrit renferme aussi le développement complet et la justification de la grande et importante théorie qu'on n'a pu qu'indiquer ici. Enfin on pourra y voir résolues les difficultés qu'on lui oppose, au nom de la théologie, de la sûreté des Princes, et de la tranquillité et de l'ordre social.

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(2) « Nulle communauté humaine, dit le grand docteur Sua« rez, ne peut se conserver sans la paix et la justice. Mais la paix et la justice ne peuvent non plus se conserver elles-mêmes « sans un gouvernement possédant l'autorité du commandement « et de la coercition. Un Prince politique est donc nécessaire dans

Ensuite, l'autorité n'est que le droit de commander aux intelligences. Or, aucune intelligence créée ne pouvant donner ce droit à une autre intelligence créée, il ne peut être conféré que par l'Intelligence Incréée, en sa qualité de Maîtresse de toutes les intelligences. Aussi, ou l'autorité vient de Dieu, ou elle n'est pas. Et la philosophie incrédule, en voulant faire de l'autorité sans Dieu, a été très-logique d'avoir fini par la nier et par proclamer que l'anarchie, ou l'absence de toute autorité, est dans les conditions naturelles de toute Société (PROUDHON) (1).

De plus, la Sagesse Éternelle intervient d'une manière toute spéciale dans les événements qui transportent le Pouvoir d'une personne à une autre personne, d'une dynastie à une autre dynastie. Donc, en

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« toute société humaine pour la contenir dans le devoir; Non potest communitas hominum sine justitia et pace conservari; neque justitia et pax sine gubernatore, qui potestatem præcipiendi et coercendi habeat, servari possunt. Ergo in humana « societate necessarius est Princeps politicus qui illam in officio « contineat (Defens. fid., etc.). »

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(1) Toutes les prescriptions du droit naturel, dit encore Suarez, ont leur raison en Dieu, parce qu'il est l'auteur de la « nature. Mais le Pouvoir politique est de droit naturel. Done « il vient de Dieu en tant qu'il est l'auteur de la nature; Omnia « quæ sunt de Jure naturæ, sunt a Deo ut Auctore naturæ, sed « Principatus politicus est de Jure naturæ. Ergo est a Deo ut Auctore naturæ. La preuve que le Pouvoir politique est de droit naturel, c'est qu'un tel Pouvoir est non-seulement né« cessaire à la conservation de la société, mais qu'il est encore « désiré, cherché, et accepté par la nature humaine elle-même ; « Cum Principatus sit necessarius ad conservationem societatis « quem ipsa humana natura appetit, hoc titulo est de jure natu« rali talem potestatem exigente (Ibid.). »

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recevant son Pouvoir, en vertu des lois fondamentales du pays, ou d'une manifestation nouvelle du vœu national, ou par une complication de circonstances qui rendent nécessaire la création d'un Pouvoir exceptionnel, cette personne ou cette dynastie ne reçoivent au fond l'autorité que par cette même Sagesse Éternelle qui a dit : « C'est par moi que règnent les rois; Per me Reges regnant (Prov., 8); » et dont il est dit encore dans les Livres saints, que c'est Elle qui donne un chef à chaque nation; In unaquaque gente præposuit rectorem (Eccli., 17).

Enfin, en créant l'homme, Dieu se fit son père, parce qu'il lui donna la vie; son roi, parce qu'il lui fournit les moyens de perpétuer et de conserver son espèce; et son pontife, parce qu'il se révéla à lui sa lumière et le sanctifia par sa grâce.

par

Or, dans l'économie de sa Providence, Dieu a établi que ces trois fonctions qu'il a accomplies directement, lui-même, à l'égard du premier homme, le fussent par le ministère d'autres hommes à l'égard du reste des hommes.

C'est en effet par les parents qu'il nous engendre; c'est par le pouvoir public qu'il nous conserve; et c'est par le ministère ecclésiastique qu'il nous enseigne et nous sanctifie, afin qu'il y ait unité dans la grande famille humaine.

Mais, pour être exercées par des hommes, les fonetions paternelles n'en sont pas moins la continuation de l'action du Dieu créateur; les fonctions publiques, ayant pour but de maintenir les familles dans l'ordre, n'en sont pas moins, de leur côté, la continuation de l'action du Dieu conservateur; et les fonctions ecclésias

tiques par lesquelles nous éclairons les âmes et nous leur administrons les mystères divins, n'en sont pas moins non plus la continuation de l'action du Dieu. révélateur et sanctificateur.

Comme, dans l'ordre politique, tout citoyen qui exerce une fonction du Pouvoir public a droit à être obéi et respecté comme ce Pouvoir lui-même; ainsi le Pouvoir domestique, le Pouvoir politique, et le Pouvoir ecclésiastique, en exerçant des fonctions divines, ont droit à l'obéissance et au respect qu'on doit à Dieu lui-même.

On voit par là que les préceptes des Princes des Apôtres, prescrivant la soumission aux divers Pouvoirs de la terre comme au Pouvoir suprême du Dieu du Ciel, reposent sur une grande raison, et qu'ils renferment une doctrine de la plus haute philosophie.

Il est donc évident que tout Pouvoir est divin, nonseulement par rapport à son origine, mais encore par rapport à ses fonctions (1). Voilà ce qu'il y a de vrai dans le système du droit divin.

3. Mais suit-il de là que tout Pouvoir légitime vienne exclusivement et directement de Dieu, qu'il ne doive rendre compte de ses actes qu'à Dieu, enfin, qu'il ne puisse jamais, quelle que soit sa conduite, être dé

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(1) « Dans l'Écriture sainte, les rois de la terre sont appelés « Ministres de Dieu. Donc ils n'ont qu'une autorité purement ministérielle par rapport à Dieu; et par conséquent encore, « l'Auteur premier de tout régime politique est Dieu; Terreni reges ministri Dei vocantur in Scriptura; ergo eorum potestas « ministerialis est respectu Dei; ergo ipse est principalis Auctor a hujus regiminis (SUAREZ, loc. cit.). »

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pouillé de son droit et de son autorité? Les partisans du droit divin quand même ne se font pas faute d'admettre ces conclusions. Le Pouvoir public et la société sont mutuellement liés par de nombreux rapports; mais pour ces publicistes la société n'aurait d'autres rapports avec le Pouvoir public, que celui de le subir quel qu'il soit et malgré ses écarts. Les préceptes négatifs seuls obligent toujours et dans tous les cas; Semper et ad semper; les préceptes affirmatifs ne sont pas obligatoires d'une manière aussi absolue; mais, pour ces publicistes, seule la loi de l'obéissance au Pouvoir politique, quoique affirmative, elle aussi, n'admettrait aucune exception. Enfin, le Pouvoir domestique, s'il se change en Pouvoir destructeur de la famille, peut en être éloigné; le Pasteur de l'Église lui-même, s'il devient un loup dans la bergerie, peut être interdit; mais pour ces publicistes, seul le Pouvoir politique pourrait se livrer impunément à toute espèce d'excès; et parmi toutes les sociétés, la société politique seule serait désarmée contre des chefs portant atteinte à son existence et à son bien-être.

Or, la conscience publique se révolte contre une pareille doctrine, la raison la condamne et la religion. elle-même s'en effraye. Car c'est là l'idolâtrie, le fétichisme de l'homme; c'est la consécration de l'oppression et l'apothéose de la tyrannie.

C'est ce qu'il y a de faux et d'inadmissible dans le système du droit divin. Maintenant jetons un coup d'œil sur le système contraire, de la souveraineté du peuple.

4. Selon ce système, le Pouvoir public n'est conféré directement que par la société à la personne qui en est

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