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à qui que ce soit. En insistant avec force, suivant son droit et suivant son devoir, sur certains points de la morale chrétienne, il a eu en vue non pas des désordres existants, mais des désordres possibles, et il est même resté en deçà de la vigueur avec laquelle Bossuet, Bourdaloue, Massillon et tant d'autres ont repris les fautes des grands.

Nous n'avons rien à dire du mérite littéraire de ect ouvrage. L'illustre orateur a pris de ce côté peu de souci, se proposant d'éclairer plutôt que de plaire. Néanmoins nous croyons qu'outre la solidité à laquelle il a visé, et l'animation et l'imprévu, charme particulier de sa parole, que les froideurs de la lecture ne font pas disparaître parce qu'il réside aussi dans le mouvement de sa pensée, on trouvera encore dans son livre un talent d'écrivain très-élevé et singulièrement heureux. Il a d'une façon éminente la lucidité et la justesse de l'expression, qualité jadis éminemment française, maintenant de plus en plus rare. Il presse, il démontre, il est vif et pénétrant, et l'on s'étonnera qu'un étranger possède si bien les finesses et jusqu'aux élégances d'une langue qu'il a tardivement parlée.

LOUIS VEUILLOT.

LE

POUVOIR POLITIQUE CHRÉTIEN.

DISCOURS

PRONONCÉS A LA CHAPELLE IMPÉRIALE DES TUILERIES.

PREMIER DISCOURS.

SUR LES RAPPORTS ENTRE DIEU ET LES POUVOIRS HUMAINS, ET ENTRE CES POUVOIRS ET DIeu.

Dominum Deum tuum adorabis et illi soli servies.

Tu adoreras le Seigneur ton Dieu et tu ne serviras que lui seul. (Évangile du 1er dimanche de Carême).

SIRE,

1. Le Seigneur est notre maître et notre Dieu parce

qu'il est la cause première de notre existence et l'artisan suprême de notre être. Adorer Dieu n'est que reconnaître sa suprématie infinie, son pouvoir absolu sur toutes les créatures. Le servir n'est que réaliser ses desseins et accomplir ses volontés.

Tout cela, ayant été dit pour tout homme privé, convient d'une manière toute spéciale à l'hommePouvoir. Car, indépendamment des rapports, existant entre Dieu et l'homme en général, il existe des rapports tout particuliers entre Dieu et l'homme-Pouvoir; aussi, indépendamment de l'obligation générale qu'a l'homme-Pouvoir d'adorer et de servir Dieu, il a,

en outre, comme homme-Pouvoir, une obligation toute particulière d'accomplir ce double commandement.

Appelé à l'honneur d'annoncer la parole du Grand Monarque du Ciel, dans ce sanctuaire, que rehausse par sa présence la plus grande majesté de la terre; appelé à parler ici à des chrétiens qui sont Pouvoir euxmêmes, ou qui de près ou de loin tiennent au pouvoir; je dois m'occuper moins de l'homme chrétien que du Chrétien-Pouvoir. C'est-à-dire, qu'à l'exemple des grands orateurs qui m'ont précédé dans cette mission, aussi délicate qu'importante, je dois rappeler à ce Chrétien-Pouvoir la noblesse de son origine, la gravité de ses fonctions, la grandeur de ses devoirs. C'est ce que, Dieu aidant, je me propose d'accomplir dans le cours de cette station.

Je vais donc appliquer au Chrétien-Pouvoir ces imposantes paroles du Sauveur du monde : « Tu adoreras le Seigneur ton Dieu et ne serviras que lui seul; >> et j'expliquerai 1° la manière toute particulière dont Dieu est le Dieu et le maître de tout Pouvoir humain; Dominum Deum tuum, 2o la manière toute particulière dont tout pouvoir humain doit l'adorer; Adorabis; 3o enfin la manière toute particulière dont il doit le servir; Et illi soli servies. C'est le sujet et l'économie de ce discours.

Je n'ignore pas ce qu'il me manque à moi, étranger, et obligé de parler une langue qui n'est pas la mienne, pour plaire à des oreilles françaises. Mais je n'en suis nullement préoccupé. J'ai l'avantage de me trouver ici en présence d'hommes sérieux, prêts à faire grâce à l'absence des formes du langage, en faveur de l'importance des doctrines; d'hommes assez raisonnables

pour ne pas attendre de moi de la flatterie, mais de l'édification; d'hommes enfin qui, aimant, j'en suis sûr, la vérité, sont dignes de l'entendre dans sa majestueuse simplicité.

Je ne suis pas homme de parti. Je ne serai donc ici que prêtre; mais prêtre ami, prêtre dévoué à tout ce qui tient à la France, à cette grande nation, fille aînée de l'Église à ces conditions, je le répète encore ici, j'espère qu'on me trouvera assez Français.

Dieu de Clovis, de Charlemagne et de Saint-Louis, daignez bénir mes intentions et mes efforts; disposez l'esprit et le cœur de ces nobles chrétiens, afin que je parvienne à les pousser encore plus loin dans les voies larges et sûres du christianisme, dans lesquelles seules leurs illustres ancêtres ont rencontré la puissance, la gloire et la stabilité; et afin qu'ils comprennent que la cause de la Religion est la cause du Pouvoir; que la cause du Pouvoir est la cause de la France; et que la cause de la France est la cause du monde; In nomine Patris et Filii et Spiritus Sancti. AMEN.

PREMIÈRE PARTIE.

2. COMME dans toutes les grandes questions de l'ordre philosophique, il y a, dans la grande question de l'ordre politique sur l'origine du Pouvoir, deux systèmes opposés le système que tout Pouvoir ne vient que de Dieu, et qu'on nomme le droit divin; et le système que tout Pouvoir ne vient que de l'homme, et qu'on appelle la souveraineté du peuple (1).

(1) Voyez à l'Avant-propos la raison par laquelle l'orateur a cru devoir débuter par l'exposition de cette doctrine.

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