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« les provinces, les soldats et la république. »

Le questeur Léonas fut chargé de porter la réponse publique à son maître, avec une lettre particulière remplie de la colère et du mépris de Julien.

Décidé à marcher sur l'Orient, Julien part avec trois mille soldats; il étoit à peine suivi de trente mille autres. Tout s'épouvante : Taurus, préfet d'Italie, s'enfuit; Florent, préfet de l'Illyrie, s'enfuit; Nébridius, préfet du prétoire en Occident, demeure seul fidèle à Constance; il perd une main d'un coup d'épée, et Julien refuse de serrer la noble main qui reste à Nébridius 2.

Le nouvel auguste descend le Danube, tantôt côtoyant ses bords, tantôt s'abandonnant à son cours. Sirmium, capitale de l'Illyrie occidentale, le reçoit; il se saisit du pas de Suques, entrée de la Thrace, et s'arrête pour attendre son armée 3.

Il tourne alors le visage au passé et le dos à l'avenir, et, se préparant la triste gloire d'avoir été le premier prince apostat, il abjure publiquement le Christianisme; il déclare qu'il confie sa vie et sa cause aux dieux immortels, fait rouvrir à grand bruit les portes des temples, efface l'eau du baptême par la cérémonie du taurobole: une seule des divinités évoquées apparut un moment à la fumée des sacrifices de Julien, la Victoire.

1 Auguste Juliane ut provincialis, et miles, et reip. decrevit auctoritas. (AMM., lib. xx, cap. xI.)

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Les soldats qui l'accompagnoient brandissant leurs épées au dessus de leurs têtes, ou tournant la pointe de ces épées contre leurs poitrines, avoient juré de mourir pour lui: cependant plusieurs d'entre eux étoient chrétiens; mais Julien les avoit trompés. Avant de quitter les Gaules, il étoit entré le jour de l'Épiphanie dans l'église de Vienne, et y avoit fait sa prière. Ammien Marcellin affirme qu'en ce moment même il professoit secrètement le paganisme : qu'est-ce donc que le parjure avoit dit à Vienne au Dieu des chrétiens ?

Constance se préparoit à repousser l'invasion : il meurt à Mopsucrène en Cilicie, après avoir été baptisé par Euzoïus, de la communion arienne. Le sénat de la nouvelle capitale se range du côté de la fortune; Julien entre dans sa ville natale, que Constance, dit-il, aimoit comme sa sœur, et que An de J.-C. 362 à 363. lui Julien aimoit comme sa mère 2. Constantinople chrétienne reçoit l'idolâtrie ainsi que Rome païenne avoit reçu l'Evangile.

Une commission établie à Calcédoine jugea les ministres de Constance : Paul, Apodème et l'eunuque Eusèbe furent justement punis; d'autres subirent injustement la mort et l'exil.

La cour éprouva une réforme totale on congédia des milliers de cuisiniers et de barbiers. Un de ces derniers se présente superbement vêtu pour

1 Adhærere cultui christiano fingebat a quo jampridem occulte desciverat. (Lib. xx.)

2

t

1 ὁ μὲν γὰρ αὐτὴν ὡς ἀδελφὴν ἐγὼ δὲ ὡς μητέρα φιλῶ. (JULIAN., epist. 58.)

JULIEN, emp.

DUMAS, pape.

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ÉTUDES HISTORIQUES.

couper les cheveux du successeur de Constance. « Je n'ai pas demandé un trésorier, dit Julien, mais << un barbier 1. » Les agents, au nombre de plus de dix mille, furent réduits à dix-sept; les curieux, autres espions, abolis.

Maintenant il convient de connoître plus intimement l'homme qui a pris dans l'histoire une place tout à part, en opposant son génie et sa puissance à la transformation sociale dont les peuples modernes sont sortis.

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SECOND DISCOURS.

SECONDE PARTIE.

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DE JULIEN A THÉODOSE Ier.

Lorsque Julien fut relégué à Athènes par Constance, saint Basile et saint Grégoire de Naziance s'y trouvoient. Le dernier nous a laissé un portrait de l'apostat où se reconnoît l'inimitié du peintre. « Il étoit de médiocre taille, le cou épais, les épaules larges, qu'il haussoit et remuoit souvent, aussi « bien la tête, Ses pieds n'étoient point fermes, << ni sa démarche assurée. Ses yeux étoient vifs, mais égarés et tournoyants : le regard furieux; le nez dédaigneux et insolent, la bouche grande, la lèvre d'en bas pendante, la barbe hérissée et pointue : <«< il faisoit des grimaces ridicules, et des signes de « tête sans sujet; rioit sans mesure, et avec de grands éclats; s'arrêtoit en parlant, et reprenoit <«< haleine; faisoit des questions impertinentes, et « des réponses embarrassées l'une dans l'autre qui « n'avoient rien de ferme ni de méthodique'.

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Cette traduction n'est pas tout-à-fait exacte, et n'a pas sur tout l'âpreté de l'original; mais il y a quelque chose de si simple, de si naturel, de si grave dans le style de Fleury, que je n'ai pas eu la témérité d'entreprendre de refaire ce qu'il a fait. Fleury et Tillemont sont deux hommes qui ne permettent pas qu'on

Ammien Marcellin, qui voyoit Julien en beau, conserve pourtant, dans le portrait de ce prince, quelques traits de celui de Grégoire de Naziance'; et Julien lui-même, dans le Misopogon, semble attester la fidélité malveillante du pinceau chrétien.

« La nature, comme je le présume, n'a pas donné « beaucoup d'agréments à mon visage, et moi, mo« rose et bizarre, je lui ai ajouté cette longue barbe « pour lui infliger une peine, à cause de son air disgracieux. Dans cette barbe je laisse errer des << insectes 2 comme d'autres bêtes dans une forêt. « Je ne puis boire, ni manger à mon aise; car je <«< craindrois de brouter imprudemment mes poils

retouche ce qu'ils ont touché. Le dernier a du génie à force de savoir, de conscience et d'exactitude. Il est en présence des faits et des hommes, comme un chrétien des premiers siècles en présence de la vérité : il aimeroit mieux mourir que de faire un mensonge. Son style incorrect, sauvage et nu, est mêlé de choses qui étonnent. C'est ainsi que, peignant les derniers moments de Julien, il dit, dans le langage des Pères de l'Église : « Il mourut dans la disgrace de Dieu et des hommes. »

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1 Mediocris erat staturæ, capillis tanquam pexisset mollibus, hirsuta barba in acutum desinente vestitus, venustate oculorum micantium flagrans, qui mentis ejus angustias indicabant, superciliis decoris et naso rectissimo, ore paulo majore, labro inferiore demisso, opima et incurva cervice, humeris vastis et latis, ab ipso capite usque unguium summitates lineamentorum recta compagine, unde viribus valebat et cursu. (Amm., lib. xxv, cap. iv.) D'après ce portrait, Julien avoit les cheveux doux, les sourcils charmants, le nez tout-à-fait grec ; la beauté de ses yeux étincelants annonçoit que son ame étoit mal à l'aise dans l'étroite prison de son corps. Si on lit argutias au lieu d'angustias dans le texte, on retrouveroit les yeux vifs, mais égarés et tournoyants, qu'attribue à Julien saint Grégoire de Naziance.

2 Discurrentes in ea pediculos.

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