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Cet ouvrage intéressant, sous plusieurs points de vue, est écrit par un officier-général qui a fait la campagne de Saint-Domingue, en 1802, sous les ordres du capitaine-général Leclerc : s'il contient quelques jugemens hasardés, c'est que l'auteur a manqué de renseignemens; un bon nombre de pièces officielles importantes sont encore secrètes.

PREMIÈRE NOTE.

(Volume I, chap. X.)

C'est dans ce chapitre que commence le récit des événemens qui ont eu lieu à SaintDomingue, depuis le 18 brumaire. ToussaintLouverture, général de division, commandant en chef la partie du nord de Saint-Domingue,

avait méconnu l'autorité du général Hédouville, commissaire du directoire exécutif: il traitait en sa présence, directement et secrètement, avec les Anglais, et couvrait ce représentant de la métropole de tant d'outrages, qu'il l'avait obligé à retourner en France. Mais le général Hédouville, inquiet sur les vues de Toussaint-Louverture, donna, avant d'abandonner la colonie, des pouvoirs indépendans de ce chef de noirs au général Rigaud, chef des hommes de couleur, et lui confia l'autorité sur toute la partie du sud de Saint-Domingue, qui se trouva ainsi divisée en deux. Le nord, sous Toussaint, où dominaient les noirs ; le sud, sous Rigaud, où dominaient les hommes de couleur. Une guerre civile effroyable ne tarda pas à éclater entre les deux partis. Le directoire parut y sourire et mettre dans sa durée la garantie des droits de la métropole. Cette guerre était dans toute sa force au commencement de 1800.

La première question, dont eut à s'occuper le premier consul en arrivant au gouvernement, fut de savoir s'il convenait aux intérêts de la métropole de nourrir et alimenter cette guerre civile, ou s'il fallait la faire cesser? Après de mûres réflexions, mais sans hésitation, il se décida pour ce dernier parti :

1° Parce qu'une politique fallacieuse, ayant pour but d'entretenir la guerre civile, était indigne de la grandeur et de la générosité de la nation, et finirait par indisposer également les deux partis contre la métropole; 2° parce que les guerres civiles au lieu d'affaiblir, retrempent et aguerrissent les peuples; et, lorsque le moment serait arrivé de rétablir l'autorité de la métropole, on aurait eu affaire à des hommes plus redoutables; 3° parce que, si cette guerre civile continuait, les habitans perdraient toute espèce d'habitude du travail, et la colonie, le peu qui lui restait de son ancienne prospérité. Ainsi la morale et la politique étaient ici d'accord pour arrêter au préalable l'effusion du sang français; mais quel moyen fallait-il employer? Le directoire avait tenté d'établir le status quó entre les deux partis; les passions qui animaient les noirs et les hommes de couleur, étaient trop violentes pour être contenues, lorsque la métropole n'avait aucun moyen de répression; les hommes de couleur étaient sans doute plus braves, plus aguerris que les noirs: mais ils étaient si inférieurs en nombre, qu'il était facile de prévoir l'époque où ils succomberaient. Le triomphe des noirs aurait été marqué par l'égorgement et la destruction totale des hommes de couleur,

perte irréparable pour la métropole, qui ne pouvait espérer de rétablir son autorité qu'en se servant de l'influence de ceux-ci contre les noirs.

Le premier consul résolut donc d'appuyer le plus fort, de retirer les pouvoirs qu'avait le général Rigaud, de le rappeler en France, de désarmer les hommes de couleur, d'étendre les pouvoirs de Toussaint sur toute la colonie, de le nommer général en chef de Saint-Domingue, et de donner toute sa confiance aux noirs.

Le colonel Vincent, directeur des fortifications de Saint-Domingue, était fort avant dans la confiance de Toussaint, dont il était le chargé d'affaires: il se trouvait alors à Paris. Le premier consul le fit appeler, lui fit connaître sa partialité pour les noirs, sa confiance entière dans le caractère de Toussaint, et le renvoya dans la colonie, porteur: 1o du décret qui nommait Toussaint-Louverture, général en chef de Saint-Domingue; 2° de la constitution de l'an VIII; 3° d'une proclamation aux noirs, où il leur disait: Braves noirs, souvenez-vous que la France seule reconnait votre liberté! Il joignit au colonel Vincent deux autres commissaires. Cette commission fut chargée de prendre toutes les mesures nécessaires pour

rétablir le calme et faire cesser les hostilités. Cette sage politique eut les plus heureux effets. Rigaud repassa en France, les hommes de couleur posèrent les armes, l'autorité des noirs fut reconnue sans contradiction dans toute la colonie, ils se livrèrent à l'agriculture, la colonie parut un moment renaître de ses cendres; les blancs furent protégés; les hommes de couleur même, garantis par l'influence morale de la métropole, respirèrent et se remirent des pertes qu'ils avaient faites. Les années 1800 et 1801 furent deux années de prospérité pour la colonie: l'agriculture, les lois, le commerce refleurirent sous le gouvernement de Toussaint-Louverture; l'autorité de la métropole reconnue et respectée (au moins en apparence), Toussaint-Louverture rendait compte exactement tous les mois au ministre de la marine.

Cependant les vraies dispositions des chefs des noirs ne pouvaient pas échapper au gouvernement français. Toussaint continuait à avoir des intelligences secrètes à la Jamaïque et à Londres, il se permettait dans son administration, des irrégularités qui ne pouvaient pas être attribuées à l'ignorance. Il avait constamment éludé l'ordre réitéré de faire écrire en lettres d'or sur les drapeaux, ces termes

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