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LETTRE LXVII.

Cambrai, 5 juillet 1714.

J'AI
Ai reçu votre lettre datée de Banieres du 21 juin.
Elle m'a fait plaisir; mais une lettre qui m'appren-

droit de Barege que votre jambe est saine, me charmeroit. Ne revenez point sans me donner ce plaisir; il seroit plus grand que je ne puis le dire. M. Destouches est ici depuis douze jours: il en partira dimanche. Son amitié et sa belle humeur sont rares. Je l'ai mené à Lille. Soyez gai, Gaudete in Domino. La paix et la joie du Saint-Esprit sont sur les hommes de bonne volonté. Le détachement rend libre et épargne bien des peines. Bon soir, mon très cher fanfan. Dieu sait combien je vous aime en lui. J'embrasse notre grand chevalier. Faites-en un homme que je puisse bien aimer.

LETTRE LXVII I.

Cambrai, lundi 30 juillet 1714.

RIEN que deux mots, mon très cher fanfan,

pour

vous apprendre que nous sommes ici en assez bonne

TOME VI.

3

Ι

santé. Nous serions encore mieux si vous étiez dans notre société ; mais il ne faut consulter ni mon goût ni le vôtre. C'est la médecine qui doit décider. Le doute suffit seul pour vous faire attendre en patience la seconde saison. Il n'est pas permis de s'exposer au péril de ne guérir qu'à demi, ou de recommencer le voyage. M. Chirac, je le sais, vous condamne à prendre Barege comme votre désert, jusqu'à l'automne. Lisez, priez Dieu, ennuyez-vous pour l'amour de lui: accoutumez-vous à sacrifier vos goûts et vos répugnances pour obéir. Tâchez de dresser le chevalier et de lui donner du courage contre luimême pour vaincre son habitude d'inapplication. Je suis assez souvent avec vous devant Dieu; c'est notre rendez-vous, il rapproche tout. Deux cents lieues ne font rien entre deux hommes qui demeurent dans leur centre commun. Tendrement tout à mon très cher fanfan.

Vos

LETTRE LXIX.

Cambrai, 2 août 1714.

os deux lettres du 15 et du 19 de ce mois, mon très cher fanfan, m'ont appris que vous alliez à Fénélon. J'en suis très content. J'aime bien que

vous goûtiez notre pauvre Ithaque, et que vous vous accoutumiez aux pénates gothiques de nos peres ; mais ne vous séduisez pas vous-même. Défiez-vous de deux traîtres, l'ennui, et l'impatience de vous rapprocher de ces pays-ci. Il faut vous exécuter en toute rigueur pour retourner à Barege dans la seconde saison, si peu qu'il reste de doute raisonnable sur votre parfaite guérison. La patience est le remede qui fait opérer tous les autres. Vous me priez de vous écrire deux fois chaque semaine; c'est ce qui est impossible pour Fénélon, à moins que les postes ne soient changées. Je n'ai jamais vu qu'un seul courier chaque semaine de Paris à Toloze: il passe par Peyrac. S'il n'y a pas de changement, vous ne pouvez ni envoyer ni recevoir des lettres qu'une fois en huit jours. Je ne me porte pas mal, excepté un peu de fluxion sur les dents. Sachez, je vous prie, si ma nourrice est vivante ou morte et si elle a touché quelque argent de moi par la voie de notre petit abbé. Mille choses à mon frere et à mes sœurs. Tendrement tout à vous et au chevalier.

LETTRE LXX.

Jeudi, 9 août 1714.

Je
E suppose que cette lettre vous trouvera à Fénélon.
Dieu veuille, mon cher fanfan, que vous y soyez en
bonne santé! Ne prenez rien sur elle. Ménagez-vous
pour faciliter la guérison de votre jambe. Ne man-
quez pas de reprendre d'abord le chemin de Barege,
si vous ne sentez pas une entiere guérison. Suppor-
tez-vous en paix, corrigez-vous sans vous flatter; ni
trouble de découragement, ni négligence d'illusion.
Qui est-ce qui trouvera le juste milieu entre ces deux
extrémités ? Ce sera la simplicité, la présence de
Dieu, la dépendance de son esprit, et la défiance du
vôtre. Bon soir. Dieu sait combien je vous aime,
pourvu que vous l'aimiez. Mille et mille choses à
tous nos chers parents, depuis le patriarche respec-
table et mes deux sœurs, jusqu'à tous les autres. Je
suis en peine du malade de Chaubouchet. J'embrasse
le chevalier et je voudrois bien le revoir avec un no-
table progrès.

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JE

LETTRE LXXI.

22 août 1714.

E suppose, mon très cher fanfan, que cette lettre vous trouvera de retour à Barege et recommençant à prendre les bains. Dieu veuille que la seconde saison vous guérisse mieux que la premiere, et que le voyage que vous avez fait sans nécessité pendant les chaleurs entre les deux saisons n'ait point nui à votre rétablissement! La grande nouvelle qui occupe maintenant le public est la mort subite de la reine Anne d'Angleterre. Une personne qui m'écrit de ce pays là le représente dans une grande agitation. Je souhaite que le jeune roi, qui est sage, modéré, valeureux, et bon catholique, puisse monter sur le trône. La condition d'un particulier tranquille et chrétien est bien plus douce. Pour votre affaire, dont je vous ai parlé avant votre départ, vous vous souvenez sans doute que vous m'avez promis un secret absolu. Je vous le demande encore et sans aucune exception. Vous comprenez bien mes raisons pour l'exiger. Priez, lisez, instruisezvous de suite et par principes. Marchez en simplicité, ayant Dieu devant les yeux et plus encore au

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