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nue les accidents et les prévient pour soulager la personne qu'il ne peut entièrement guérir. D'ailleurs Dieu bénit cette patience, cette docilité, ce renoncement à notre propre volonté. Heureux qui tourne ainsi les maux en biens, en s'abandonnant à Dieu! Que met-on en la place? un courage humain qui s'use; notre volonté roide qui se tourne contre elle-même; une indocilité qu'on doit se reprocher devant Dieu et devant tous ses bons amis. Je n'ignore pas l'amertume de cet état. Je comprends qu'il doit causer une lassitude infinie avec un grand préjugé contre les remedes et les régimes gênants: mais ce qui est impossible à la foiblesse humaine, devient très possible par le secours de Dieu, quand on se livre à lui humblement. Mais j'ai honte de mon sermon; n'en montrez que ce qui pourra être vu sans péril d'importuner la chere malade. Mille choses à la bonne duchesse et à Put. Soyez bien sage jusqu'au bout, pour assurer et accélérer votre guérison. Bon soir, mon très cher fanfan.

LETTRE LII.

Cambrai, 28 juin 1713.

MONSIEUR de Tingri va à Paris pour le mariage du fils de M. le duc de Châtillon; il se charge de mon paquet. Sois sobre, paisible et gai; Dieu, qui le veut, te donnera de quoi le faire. La sobriété est le point le plus important pour ta guérison : ensuite vient le second point, de la patience et de la gaieté; c'est ce qui adoucit le sang, et qui y met un baume pour purifier la plaie. Demande à Dieu, et il te donnera. La demande n'est point une formule de discours; c'est un simple desir du cœur qui sent son besoin, son impuissance, la toute-puissance et l'infinie bonté de notre pere céleste. Mille et mille amitiés à la malade et aux vrais amis. Chante, amuse-toi, fais toi amuser, aime Dieu gaiement.

dit

Avertis notre ami Put et Duchêne, qu'il y a, on, à l'hôtel de Créquy, une tapisserie de Scipion, haute et belle, pour mille écus.

LETTRE LIII.

Cambrai, 3 juillet 1713.

QUOIQUE je t'écrive tous les jours, mon très cher fanfan, les lettres que je t'envoie par la poste ne me contentent pas. Je te veux dire par cette voie sûre combien je suis attentif sans inquiétude sur l'avancement de ta guérison. Panta est trop occupé de ma santé et de mon repos d'esprit ; je le suis peut-être un peu trop de toi: mais, en vérité, je suis assez tranquille, et je me porte mieux que je n'aurois cru. Je me porterai encore mieux quand tu seras guéri et que je te reverrai dans la petite chambre grise auprès de moi. Sois sobre, patient, abandonné à Dieu, et petit dans tes peines. Oh! qu'on est sot, quand on veut faire le grand! Oh! qu'on est vrai et bon quand on veut bien être, 'se voir et être vu foible et pauvre! Si tu veux de l'argent, tu n'as qu'à dire; ne te laisse manquer de rien : si tu manquois, tu le mériterois bien; ce seroit ta faute. Bon jour, très cher fanfan. Alexis continue à bien faire : je l'aime de bonne foi. Je ne sais point s'il aura ce qu'on appelle de l'esprit ; mais il paroît avoir le sens droit, du sentiment, et bonne volonté. Tout à toi, petit fanfan.

LETTRE LIV.

Chaulnes, 29 juillet 1713.

TE voilà donc enfin, mon très cher fanfan, en train d'une prochaine guérison: dès que tu seras en état d'aller avec une sûreté parfaite, il faudra que tu reviennes achever ta convalescence à Cambrai; mais il ne faut rien entreprendre que sur la décision de MM. Chirac, Maréchal, etc. Je voudrois bien que tu pusses nous amener la chere grondeuse, mais on ne doit rien hasarder par rapport à ses maux : je crains l'agitation d'un voyage pour ses reins, et l'éloignement de M. Chirac, s'il lui arrivoit quelque attaque de gravelle chez nous. C'est M. Chirac qui doit décider là dessus; de ma part tout seroit prêt. Je serois charmé de la garder tout l'hiver, et de lui envoyer un carrosse à Paris pour la chercher. Je te prie d'en raisonner avec M. Chirac. Nous la ferions vivre avec plus de régime; mais elle feroit un voyage en carrosse, et elle seroit ensuite éloignée du secours qui lui a sauvé plusieurs fois la vie. Examine, raisonne, consulte l'oracle, et mande-moi ce qui aura été conclu. Pour mon filleul et pour notre petit abbé, nous prendrons nos mesures, quand nous serons à Cambrai, sur ce que tų

nous fera savoir. Il faudra examiner aussi en quelle voiture tu pourras venir quand il en sera temps.

Nous avons passé ici quatre jours en repos, liberté, douceur, amitié et joie ; cela est trop doux: il n'y a que le paradis où la paix, la joie et l'union ne gâtent plus les hommes.

Tout à toi pour jamais, mon très cher petit fanfan. Je te conjure de me mander au plutôt ce qu'il convient de donner à MM. Chirac, Maréchal, etc.; la valeur et en quelle nature de présent pour M. Maréchal. Sera-ce une tabatiere, ou une bague, ou quelque piece de vaisselle d'argent?

LETTRE LV.

Dimanche, 6 août 1713.

Tu ne dois pas hésiter, mon cher fanfan, quand ces messieurs te donneront congé ; il faudra louer une litiere qui te menera ici pour notre argent. Ne crains aucune dépense de vraie nécessité. Ton pere selon la chair n'est pas autant ton pere que moi. C'est ton principal pere qui doit payer tout ce que l'autre ne peut payer. Dieu nous le rendra au centuple. Pour les sommes nécessaires à ces messieurs, je veux les payer noblement et sans faste: il vaut G3

TOME VI.

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