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perdre entièrement sa confiance: il vaut mieux tolérer ce qu'on ne sauroit empêcher, et tirer d'elle ce qu'on en pourra obtenir. Il ne faut pas même la contrister s'il est possible: elle n'a que trop de tristesse par ses maux. Les vôtres seront de vrais biens, si vous en faites un bon usage. Il faut espérer que l'esquille, qui produit les mauvaises chairs, sortira, quand le gros os achevera de s'ébranler. Vous verrez un jour combien les temps de douleur sont précieux. Dieu voit mon cœur et ma tendresse pour mon très cher fanfan.

LETTRE XLIII.

Cambrai, 8 mai 1713.

MALGRÉ tout ce que la malade nous mande avec tant de soin et de bonté de cœur sur votre jambe, je ne laisse pas, mon très cher fanfan, d'être toujours en peine. Je ne saurois être content jusqu'à ce que le fond soit entièrement découvert sans aucun danger d'accidents pour les gros vaisseaux sanguins. C'est à quoi on ne sauroit jamais apporter trop de précautions; mais vous êtes en bonnes mains. Je me fie pourtant très peu aux plus habiles hommes; Dieu seul est le vrai médecin. Il l'est encore plus de l'ame

que du corps: mais

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mais il ne guérit que par le fer et par le feu; il coupe, non comme les chirurgiens dans le mort, mais dans le vif pour le faire mourir. Laissez-le couper: sa main est sûre. Donnez-moi par une main empruntée des nouvelles de votre promenade sur le bord de l'eau, et de celle de la chere malade au Luxembourg. Oh! si vous étiez tous deux ici à vous promener avec nous! mais ce que Dieu fait vaut mieux que tous nos desirs. Bon soir.

LETTRE XLIV.

Cambrai, 9 mai 1713.

L'ÉLECTEUR de Cologne a passé ici à neuf heures du matin pour aller dîner à Valenciennes: il ne s'est arrêté qu'un moment pour prendre un bouillon. Voilà notre unique nouvelle. On dit que les Hollandois retardent l'échange des ratifications; mais c'est un bruit peut-être faux. Dieu veuille que nous voyions bientôt une paix générale et longue!

Depuis le temps qu'on mande que vous êtes toujours de mieux en mieux, vous devriez courir comme un Basque. Je vois bien que ces mieux sont bien lents et insensibles. J'attends le gros os, et la découverte du fond: jusques-là je prie Dieu et je prends pa

tience, comme vous la prenez, Dieu merci. J'ai donné le canonicat de M. d'Ipres à l'abbé de Devise, non sans fâcher des gens qui le demandoient. J'en ai un vrai déplaisir: mais que faire? Il me semble que je ne pouvois en conscience faire autrement. Je souhaite que les deux médecines aient soulagé l'hôpital.

Mille amitiés à la chere malade. Tout sans réserve à mon très cher fanfan. J'attends de vos nouvelles et de celles du bon Put par le retour de Villiers.

LETTRE XLV.

Cambrai, 14 mai 1713.

NOTRE malade me parle de tout, excepté de sa

santé. Cet article mériteroit néanmoins un détail. Elle se contente de dire en gros qu'elle passe mal les nuits. Mais comment passe-t-elle les jours? N'a-t-elle rien sur la conscience? Pour moi, je suis sage et docile; je donne bon exemple à mes enfants. Je commençai hier à prendre du lait; je me promene, et je modere mon travail. Lobes va tâter des eaux de Balaruc. Le petit Alexis est actuellement dans ma chambre, où il s'accoutume à être. Il fait connoissance avec les Grecs et les Romains: j'espère qu'il pourra se former, et devenir un bon sujet. N'allez point en car

rosse. Ne hasardez rien. Mettez la guérison dans son tort, si elle ne vient point à la hâte. Si on est sûr d'avoir vu le dernier fond de la carie, et s'il ne s'agit plus que de patience, nous sommes trop heureux. Quand vous verrez M. le maréchal de..., recommandez-lui le Breton c'est une attention convenable; elle vous fera honneur. Mille et mille amitiés au cher Put: c'est un excellent cœur d'ami, mais d'ami d'usage. La bonne duchesse vous aime fort: croyez-la bien. Tout à fanfan et à la malade.

E

LETTRE XLVI.

Cambrai, 17 mai 1713.

Je ne demande à M. Chirac rien de meilleur que votre guérison. C'est bien assez. Plût à Dieu qu'il m'en promette autant pour la chere malade! Il faut au moins tâcher de diminuer beaucoup son mal et de le faire durer si long-temps, qu'on en fasse une demi-santé avec une assez longue vie. Un grand malheur que je vous annonce est que vous n'aurez point de vin d'Alicante: il y a déja quelque temps que la fontaine en est tarie dans cette maison. M. le curé de Dunkerque, qui étoit venu ici voir M. d'Ipres, m'a assuré qu'on n'en trouve à Dunkerque ni pour

or ni pour argent. Il faut espérer que la paix en amenera: mais ce sera trop tard pour vos besoins d'infirmerie. Envoyez-moi au plutôt, je vous prie, des copies des assignations qu'on m'a accordées pour mes bleds. Gardez les originaux entre M. Dupuy et vous: embrassez-le tendrement pour moi. Mille amitiés à la chere malade : dites des choses à l'infini à la bonne duchesse quand vous la verrez. Bon soir, mon très cher fanfan.

JE

LETTRE XLVII.

Cambrai, 18 mai 1713.

vous prie de dire à M. l'abbé de S....... que la sincérité de sa lettre me charme. La malade a beau le contredire: on voit bien qu'il soutient généreusement la vérité. Tout ce qui me console est qu'elle est plus heureuse que sage, et que ses maux diminuent un peu, quoique son indocilité augmente. Mais, d'un autre côté, je crains fort qu'elle n'abuse de plus en plus du succès de sa révolte, et qu'il ne lui arrive enfin quelque triste accident. Si vous ne pouvez pas empêcher qu'elle ne s'échappe un peu, du moins tâchez de faire en sorte qu'elle évite les choses d'une dangereuse conséquence. Madame de Choisy a mandé à madame de Monbron qu'elle vous avoit vu. Elle paroît très contente de sa visite.

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