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pour les bontés dont il yous a comblé : dites-lui que je n'ai osé lui écrire pour lui en faire mes très humbles remerciements, et que je m'en abstiens par pure discrétion. Finissez en lui faisant entendre que vous comptez sur les bontés qu'il a pour moi, et dont il ne m'est pas permis de douter; que vous tâcherez de les mériter par un attachement plein de respect: mais n'ayant actuellement rien dont il s'agisse, vous vous bornerez à espérer que, dans les occasions, il voudra bien vous honorer des marques de sa bienveillance, qui peuvent être fort utiles à votre réputation et à

votre avancement.

Je vous envoie une lettre pour M. le maréchal de Villars: elle est faite comme vous la desirez, elle ne le sollicite qu'à demi : je le consulte et je me remets à ce que vous lui expliquerez vous-même de vos services.

M. de Harcourt est parti d'ici assez content et bien disposé pour nous. Il me semble qu'il conviendroit que vous l'allassiez voir et que vous l'accoutumassiez à entrer insensiblement en conversation avec vous: c'est un homme de beaucoup d'esprit, qui raisonnera volontiers, et qui a beaucoup de connoissances acquises. Vous y trouverez des sentiments très nobles, avec un grand usage du monde. Il est rare, à tout prendre, de trouver tant de qualités rassem

blées. Tâchez de le cultiver avec discrétion. Priezle, de ma part, de remercier très vivement pour moi l'homme qui vous a donné à dîner et qui vous a fait des offres si obligeantes ; c'est son proche parent, et son ami fort particulier.

Je suis ravi de ce que le cousin est toujours bien avec les gens dont nous craignions qu'il ne perdît un peu les bonnes graces. La dame de cette maison m'accuse injustement de démangeaison pour la critique : ce que je représente est clair comme le jour; je ne représente qu'étant pressé par un intérêt capital, et j'ai tâché de le faire avec des ménagements infinis. Je ne verrois nul inconvénient que vous prissiez la liberté de parler vous-même à cette dame, et que vous lui témoignassiez avec respect combien votre avancement vous toucheroit si vous pouviez le devoir aux bontés de lui et d'elle. J'espere que quand vous aurez une décision sur mon dernier projet, vous ne perdrez point de temps pour m'en faire part.

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LETTRE XXX.

Cambrai, 16 janvier 1713.

Je suis très content de vos soins pour mon affaire, et nullement de l'acte qu'on m'a envoyé: il brouille

tout, et n'est fait sur aucun principe suivi. Je ne sais point encore le parti que je prendrai. Il faut être patient, prier Dieu, et consulter les hommes sages.

Je vous conjure, mon cher neveu, de dire pour moi à ma niece que je suis très affligé de son état. Je voudrois être à portée de me joindre à vous pour prendre soin de sa santé. Je conçois l'embarras des plus habiles médecins et leur incertitude; mais enfin leurs expériences, quoique très imparfaites, valent un peu mieux que notre ignorance absolue. Après tout, si quelque chose dans la médecine est au-dessus du reste, c'est M. Chirac: il la connoît depuis longtemps, il a étudié son tempérament et la suite de ses maux, il l'a bien conduite dans le plus extrême péril, il s'est affectionné pour elle. Où pourroit-on espérer de trouver un semblable secours? Il ne reste donc qu'à le croire, qu'à lui être docile, et qu'à s'abandonner à ses conseils, ou plutôt à la providence, qui bénira cette docilité. C'est porter une rude croix que de se livrer aux remedes fréquents et à un long régime: on se dégoûte, on se lasse; toute patience s'use: mais il faut tourner son courage contre soimême et se faire un mérite devant Dieu de ce qu'on fait pour se guérir. En guérissant le corps, on mortifie l'esprit et les sens, qui en ont grand besoin. Trop heureux que Dieu nous tienne, compte de cette

TOME VI.

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patience! Lisez-lui ma lettre, et dites-lui à quel point je lui suis dévoué.

Si M. de Laval est encore à Paris, je vous prie de lui dire que j'ai écrit à madame sa merè, selon ses intentions, pour différer notre rendez-vous jusqu'au printemps. Ce retardement sera bon pour elle et pour moi l'hiver et le voyage enrhument les vieilles bonnes gens comme nous. Tout sans réserve à mon très cher fanfan.

LETTRE XXXI.

Cambrai, 22 janvier 1713.

NE soyez point en peine, mon très cher fanfan, sur l'affaire dont vous ne croyez pas avoir parlé assez fortement. Vous avez dit de bon cœur ce que vous avez pu: je n'en demande pas davantage, et je laisse le reste à Dieu: nous verrons ce que la providence donnera d'ouverture. Je ne veux aucun des succès qu'elle ne donne pas.

Je suis consolé d'apprendre que notre malade a un peu respiré; mais je ne me fie point à ces petits soułagements. Pressez-la pour le régime et pour l'usage des remedes. Veillez sur elle : je vous donne procuration pour gronder.

M. de Marquessac nous a envoyé un excellent pâté de Périgueux. Je voudrois l'en remercier par une lettre; mais je n'ose, de peur qu'il ne réitérât son présent. Le baron s'est presque rajeuni à manger un mets périgordin. Ce qui vient de son pays lui est plus délicieux que le nectar et l'ambrosie.

Je vous conjure de ne négliger aucune attention pour M. l'abbé de Laval, Vous lui devez une estime et une amitié très sinceres.

Mandez-moi tout au plutôt ce qu'on aura fait pour votre jambe et ce qu'on aura découvert. Si vous saviez combien vous me soulagerez le cœur par ce soin, vous le prendriez très ponctuellement: mais ne vous gênez point; dictez au petit abbé, ou, si vous n'en avez pas le loisir, dites lui la substance des choses. Pendant tout le temps de l'opération, demeurez au

lit, voyez fort peu de gens, ne parlez guere, point de repas en compagnie, dormez de très bonne heure, grand régime, parfait repos, sévere sobriété. Si vous êtes fidele à Dieu, il vous rendra docile aux chirurgiens. Mille amitiés à la malade et à son cher fils. J'embrasse tendrement le petit abbé. Tout au très cher fanfan.

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